samedi 30 septembre 2006
Gare à la xénophobie!
Un triste fait divers s’est produit récemment: deux enfants ont violé une petite fille. La presse s’est soigneusement abstenue de faire mention de la nationalité des deux enfants coupables. A juste titre: un certain consensus existe parmi les journalistes en ce sens que les «faits divers», si atroces soient-ils, ne justifient pas l’indication de nationalités, sauf exceptions (personnalités connues, criminels franchissant la frontière, etc.).
Or M. Blocher, ministre de la Justice, a cru, lui, devoir immédiatement souligner la nationalité étrangère de l’un des enfants. Pour l’autre, qui était Suisse, il s’est aussitôt rabattu sur…. son origine étrangère. Cela est scandaleux.
Même et surtout avant une votation sensible, on ne saurait chercher à attiser la xénophobie de cette façon-là. D’autant moins que les spécialistes de ces problèmes (criminologues, assistants sociaux etc.) sont unanimes: de tels actes n’ont rien à voir avec une question de nationalité ou d’origine.
Une fois de plus, il faut rappeler que le fait de stigmatiser telle nationalité ou telle origine est un acte de xénophobie. Et que le fait de constamment mettre en évidence la nationalité étrangère, tout comme d’ailleurs l’aspect ethnique, finit par graver dans les esprits l’équation simpliste «étranger = criminel».
Hélas, la xénophobie n’est pas encore prohibée par le Code pénal. Il n’est jamais trop tard.
Face à de telles dérives, ce serait le moment de la pénaliser, comme cela a été fait, en bonne partie grâce à l’action de la LICRA, contre le racisme et l’antisémitisme
Philippe Nordmann,
président de la commission juridique de la LICRA, Lausanne
vendredi 29 septembre 2006
Après la votation: Pallier les lacunes de la protection juridique
La protection juridique dans le domaine de l’asile doit être renforcée sur le modèle de ce qui se pratique dans d’autres Etats si l’on veut pouvoir protéger les personnes persécutées et garantir une mise en œuvre de la nouvelle loi respectueuse du droit international et de notre Constitution. C’est ce que réclame l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) à l’issue de la votation sur les lois révisées sur l’asile et les étrangers.
La dignité humaine avant les chiffres
La chasse aux abus a décidément le vent en poupe. Trois jours après un week-end de votations dont l'issue a débouché sur un nouveau tour de vis en matière de politique d'asile, le Parti radical romand (PRR) s'attaque à l'explosion des coûts sociaux en ville de Bienne. La formation bourgeoise brandit des statistiques alarmistes: depuis 2002, le nombre de bénéficiaires de l'aide sociale a presque doublé, tandis que la population biennoise reste stable. Comment endiguer la progression d'une courbe exponentielle qui risque d'engloutir plus du tiers du budget de la ville à l'horizon 2007? Les têtes pensantes du PRR souhaitent jouer la carte de la consultation interpartis afin de créer le consensus politique autour d'un projet, mais en lançant tout d'abord la réflexion à l'interne. En revanche, la base du parti bourgeois semble n'avoir qu'une idée en tête: traquer les abus. Mercredi soir, ce sont surtout les mesures extrêmes qui ont été évoquées. En commençant par le contrôle des bénéficiaires de l'aide sociale, qui devrait - selon certains radicaux romands - permettre de dénicher les gens qui profitent du système. Transformer les assistants sociaux en détectives? Cela se fait déjà à Granges, à l'initiative du maire - socialiste - Boris Banga. Autre mesure envisagée: dénoncer les cas suspects auprès des autorités compétentes.
En élevant la délation au rang de «devoir civique» et en voulant institutionnaliser le flicage des personnes en situation difficile, le PRR fait fausse route. Remettre en cause le système est une chose. Edicter des mesures sans aucune empathie pour les bénéficiaires de l'aide sociale en est une autre. Des gens qui perçoivent la plupart du temps la tutelle de l'Etat comme un échec personnel n'ont pas à vivre dans la crainte d'une dénonciation ou d'une perquisition. S'engager sur ce chemin revient à véhiculer l'idée que derrière chaque «assisté» se trouve un abuseur.
Privilégier la maîtrise des coûts au détriment de la dignité humaine ne saurait être une politique à long terme. «Derrière ces chiffres se cachent des gens», a rappelé un membre du parti. En gardant ce constat à l'esprit, le PRR pourra aisément résister aux sirènes du populisme.
jeudi 28 septembre 2006
L'avis de Hocine Eldrup dans un quotidien Algérien
A une très large majorité, les Suisses ont donc décidé de durcir leur législation sur l’immigration et les conditions de l’asile politique. Un vote qui confirme une évolution constante des mentalités depuis plusieurs années dans la Confédération helvétique et met définitivement un terme à une longue tradition d’hospitalité - au sens large du terme - et d’ouverture. Mais le résultat de ce scrutin est révélateur d’un mouvement de grande ampleur dans l’ensemble des opinions des pays européens...
Philippe de VILLIERS cite aussi la Suisse en exemple
En durcissant sa législation, la Suisse envoie un double signal : d’abord aux candidats à l’immigration clandestine, mais aussi légale, pour qui la petite confédération helvétique ne figurera plus parmi les eldorados de droits sociaux ; à ses voisins européens ensuite, à qui elle montre l’urgence du redressement, avant qu’il ne soit trop tard.
Lire dans le courrier des lecteurs de l'Hebdo
mercredi 27 septembre 2006
Ca sent très mauvais
«La Suisse pue le renfermé», annoncions nous en affiche du Courrier au lendemain des votations de dimanche. Quelques personnes s''en sont offusquées, dénonçant notre propension à l''exagération. Nous aimerions pouvoir leur donner raison.
Force est pourtant de constater que l''atmosphère devient de plus en plus irrespirable. La manière dont l''UDC fanfaronne au lendemain de sa victoire en s''adonnant à la surenchère xénophobe dans une quasi-indifférence générale a de quoi faire froid dans le dos.
Dès dimanche soir, le parti blochérien diffusait ainsi un communiqué de presse prévenant que l''acceptation des lois sur l''asile et les étrangers ne suffirait pas: «Les nombreux problèmes que pose la proportion élevée d''étrangers en Suisse ne sont pas résolus pour autant, beaucoup s''en faut.» Parmi les «problèmes» encore à régler, l''UDC citait «l''explosion» du nombre de naturalisations et la nécessité de «mettre fin aux tentatives d''éluder ou de violer nos principes sociaux, culturels et chrétiens».
Mais comme si cela ne suffisait pas, le parti a jugé nécessaire, dès le lendemain, de préciser la cible par un éditorial diffusé par son service de presse, et signé de son porte-parole Roman S. Jäggi. Le nouvel ennemi, ce sont les musulmans, les «divergences insurmontables entre notre mode de vie démocratique et chrétien (...) et l''islam». Et les nouveaux abus à traquer, ce sont, en vrac, les filles interdites de cours de natation pour motifs religieux ou ces minarets pour lesquels les demandes de permis de construire «se multiplient comme les champignons après la pluie».
Une prolifération que l''éditorialiste de l''UDC ne se donne pas la peine d''étayer statistiquement. Il faut dire qu''en menant récemment campagne, en Suisse alémanique, contre quelques minarets qui ont su s''offrir la une des médias, le parti avait soigneusement préparé le terrain.
L''UDC travaille visiblement depuis de longs mois à l''après-24 septembre. Alors que radicaux et démocrates-chrétiens, s''ils se sont volontiers prêtés à son discours fascisant, semblent aujourd''hui pris de court. Les gesticulations de leurs dirigeants, qui prétendent désormais vouloir jouer la carte de l''intégration, feraient sourire si le sujet n''était si grave. D''autant que les récentes déclarations d''un très catholique conseiller fédéral valaisan soutenant les propos du pape sur l''islam viennent brouiller le message. Tout comme celles de son coreligionnaire Christophe Darbellay, président du PDC, qui expliquait hier aux lecteurs du Matin sa volonté de «lancer un débat national» sur les valeurs défendues par les Suisses, la politique ne pouvant «pas faire l''impasse sur la problématique de l''islam».
Mais rassurons-nous. Les musulmans ne sont pas les seuls cibles de l''UDC. Roman S. Jäggi, dans sa détermination à aider le peuple à «prendre les choses en main», cite aussi notamment «le financement de l''AI ou le minage sournois de l''armée». Au rythme où brunit ce pays, nous pourrons bientôt tous plier bagages.
Les Suisses ferment leur porte aux étrangers
Les Suisses ont voté à une très large majorité en faveur d'une nouvelle loi plus restrictive sur l'immigration et le droit d'asile.(Photo : AFP)
L’ensemble de la presse suisse s’est déclarée impressionnée lundi par l’ampleur de la mobilisation lors du double référendum portant sur le statut juridique des étrangers hors Union européenne (UE) et pays de l’Association européenne de libre-échange (AELE). Le nouveau texte de loi qui donne un tour de vis sur l’asile et l’immigration -proposé par la droite populiste et déjà approuvé par le parlement- a été massivement approuvé par 68% des Suisses. En 2002, le peuple rejetait de justesse une initiative de l’Union démocratique du centre (UDC) nettement moins restrictive que la nouvelle loi sur l’asile en faveur de laquelle il s’est prononcé. Aujourd’hui même Genève, un canton pourtant réputé ouvert, a accepté les deux lois plus coercitives.
La suite à lire sur le site de
Augmentation des demandes d'asile en août
Les personnes en phase de renvoi étaient moins nombreuses en août (8849) qu'en juillet (9109). Parmi elles, 6122 faisaient l'objet d'une démarche visant à leur procurer des papiers d'identité, soit une baisse de 1,9% par rapport au mois précédent, a indiqué l'Office fédéral des migrations (ODM). Au total, 45'307 migrants étaient impliqués dans le processus d'asile à la fin du mois d'août 2006. Cela représente une baisse de 278 personnes en un mois.
Comme au cours des derniers mois, la Serbie et Monténégro arrive en tête des pays de provenance des demandeurs d'asile (114 nouvelles demandes, + 40). La Turquie arrive en seconde position (74 demandes, + 23) puis l'Irak (58 demandes, -2).
L'Erythrée figure en quatrième position des pays les plus représentés (57 demandes, + 13). La dégradation de la situation dans ce pays explique la hausse de l'octroi de l'asile, a ajouté l'ODM.
Durant le mois d'août, 829 décisions ont été rendues en première instance, 162 de moins qu'en juillet. 192 personnes se sont vues octroyer l'asile, soit un taux d'acceptation de 26,9% sur les 713 décisions effectives (positives, négatives et de non-entrée en matière).
Ce taux élevé d'acceptation s'explique par l'octroi de l'asile à certaines nationalités, a précisé l'ODM. C'est ainsi que 69 décisions positives ont été rendues pour des ressortissants érythréens et 51 pour des ressortissants turcs.
L'image de la Suisse
Réactions des lecteurs
Pas vraiment, c’est plutôt une confirmation. Le point positif de ces votations est que le souverain a osé exprimer son ressenti sans se préoccuper de l’image de la Suisse à l’extérieur. Le résultat peut nous inciter à rechercher d’autres solutions, adaptées aux situations des requérants dans leurs propres pays. MYRIAM BELAKOVSKY PRILLY
Non, car la position de la Suisse fera vraisemblablement école dans l’Union européenne et spécialement à Bruxelles. MARCEL LAPPERT LAUSANNE
La Suisse qui rejette ceux qui souffrent, ceux qui sont traqués, qui n’ont plus de maison, plus de travail, tous ceux qu’on ne veut pas accueillir parce qu’ils ne sont pas riches, célèbres ou post-gradués, cette Suisse-là ternit encore un peu plus son image et me fait honte. Quel bel exemple d’humanité nous donnons là à nos enfants… J’espère qu’ils feront mieux que nous, lorsqu’ils seront des décideurs, ou qu’ils auront la sagesse d’aller vivre ailleurs s’ils trouvent un pays qui veut bien les accepter. NATHALIE CHATELAIN MORGES
Peu importe l’image qu’ils ont de nous. Que ceux qui nous critiquent balaient devant leur porte. SYLVAIN MICHOUD CHOËX (VS)
Je suis actuellement en Afrique et l’image de la Suisse devient pire que celle de la France. Je ne comprends pas pourquoi mon pays en arrive à voter ainsi. MARTIAL POUSAZ VILLARS
Je suis une Française en vacances. Si un tel référendum pouvait avoir lieu en France, le résultat serait au moins égal sinon plus élevé. Alors l’image de la Suisse modifiée? Bien sûr que non, au contraire. EDWIGE JOLIOT MONTREUX
Bien évidemment! Burki l’illustre excellemment. La Suisse, ce n’est plus le Cervin, Chillon ou le Grütli, même plus les coucous chers à Orson Welles, c’est hélas Blocher et sa vache. Les médias étrangers l’ont répété: la Suisse a le régime le plus sévère d’Europe. Nous sommes condamnés à passer nos vacances ici, car il ne ferait pas bon être «étranger» hors frontières. DANIEL PACHE MORGES
mardi 26 septembre 2006
Les Suisses votent pour une législation sur l'immigration plus stricte
C’est à une écrasante majorité que les Suisses ont plébiscité dimanche un durcissement des conditions d'immigration en approuvant par référendum une révision du droit d'asile et une nouvelle loi sur les étrangers.
Les Suisses n'aiment pas les étrangers
Les « lois Blocher » contre les étrangers ont été acceptées par une écrasante majorité d’Helvètes. Le message est clair : les étrangers venant du sud et des pays musulmans ne sont pas les bienvenus au pays des Alpes.
Le vieil héritage xénophobe de la Suisse
Pour l’historien de gauche Hans-Ulrich Jost, les votations sur l’asile et les étrangers ont fait ressortir une des constantes de la politique suisse : la xénophobie.
Dans une interview à swissinfo, le professeur honoraire de l’Université de Lausanne explique comment, selon lui, la tradition humanitaire du pays ne vaut que lorsqu’elle sert ses intérêts.
.Immigration : la Suisse ferme sa porte aux étrangers
L’ensemble de la presse suisse s’est déclarée impressionnée lundi par l’ampleur de la mobilisation lors du double référendum portant sur le statut juridique des étrangers hors Union européenne (UE) et pays de l’Association européenne de libre-échange (AELE). Le nouveau texte de loi qui donne un tour de vis sur l’asile et l’immigration -proposé par la droite populiste et déjà approuvé par le parlement- a été massivement approuvé par 68% des Suisses. En 2002, le peuple rejetait de justesse une initiative de l’Union démocratique du centre (UDC) nettement moins restrictive que la nouvelle loi sur l’asile en faveur de laquelle il s’est prononcé. Aujourd’hui même Genève, un canton pourtant réputé ouvert, a accepté les deux lois plus coercitives.
Ces lois qui font jaser l’Europe
Alors que le commentaire du journal allemand Die Welt parle de «sobriété suisse» et d’«une révision raisonnable» de la loi sur l’asile, le quotidien français Libération condamne quant à lui le résultat en le qualifiant de «douche froide» et en évoquant «un état des lieux désolant pour ce qui concerne la réforme du droit d’asile».
Plusieurs journaux relèvent que ces lois ont été confectionnées par Christoph Blocher et voient dans le large plébiscite populaire une victoire personnelle du ministre. Ainsi, le Financial Times considère qu’il s’agit d’un succès de l’UDC et de son ministre zurichois.
Même commentaire dans Le Monde qui estime que «le débat s’est inscrit dans un contexte très émotionnel, d’où sort victorieuse la vision sécuritaire du ministre nationaliste populiste de la justice et de la police Christoph Blocher, père de la réforme».
Dans le même sens, le quotidien autrichien Oberösterreichische Nachrichten dresse le portrait du conseiller fédéral qui se trouverait à présent «au sommet de son pouvoir».
Avant d’ajouter que c’est finalement l’Union européenne qui paiera les conséquences de ce vote «en devant accueillir les requérants d’asile déboutés par la Suisse».
L’intégration des étrangers s’annonce comme la prochaine grande bataille
Au lendemain des votations, l’UDC précipite les partis dans une nouvelle bataille: l’intégration des étrangers. Toutes yles formations devront définir les règles du jeu pour ceux qui résident en Suisse.
Après son triomphe sur l’immigration, l’UDC poursuit sa croisade contre les étrangers. Le parti précipite déjà tout le paysage politique dans une nouvelle bataille: l’intégration des migrants résidant en Suisse. Dans sa ligne de mire: les musulmans. «Car l’islam en tant que tel, estime le conseiller national agrarien Guy Parmelin, se place trop souvent au-dessus des lois.» Et les agrariens auront une occasion en or pour porter ce débat. Les Suisses voteront probablement l’an prochain, à la veille des élections, sur leur initiative sur les naturalisations par le peuple.
Reste que les discussions sur la maîtrise des langues nationales, le voile islamique ou les dispenses de cours de natations pour les jeunes filles musulmanes sont désormais agendées par tous les partis. Car au lendemain des votations, l’intégration des musulmans, ainsi que celle de tous les étrangers, est plus que jamais d’actualité.
Motion radicale
Hier à Flims (GR), les radicaux – les premiers à en avoir fait un cheval de bataille – sont sortis du bois. Le sénateur Fritz Schiesser vient de déposer une motion réclamant une loi générale réglant l’établissement des étrangers en Suisse.
«L’Etat doit cadrer les droits fondamentaux des migrants», explique le conseiller aux Etats glaronais. Un exemple? «Le voile constitue certes un droit fondamental. Cependant, une enseignante ne doit pas le porter à l’école», remarque l’auteur du texte, qui assure que ce dernier ne vise pas particulièrement les musulmans. Du côté des Verts, on se dit ouvert au dialogue. «Mais il faut discuter de ce qu’on entend par intégration », avertit la Vaudoise Anne Catherine Menétrey. «S’il s’agit simplement d’apprendre une langue, ce n’est pas suffisant. L’Etat doit garantir aux étrangers des chances d’accès à la formation et au travail.» La question des religions, quant à elle, doit être abordée dans un climat de tolérance, précise l’écologiste. «On pourrait entre autres envisager une formation pour les imams. Cet élément pourrait par exemple être inscrit dans une initiative parlementaire. » Mais pour Anne-Catherine Menétrey, la véritable clé de l’intégration se trouve dans les moyens financiers que le parlement sera prêt à débloquer
Regrets socialistes
Les socialistes, quant à eux, se mordent les doigts d’avoir attendu trop longtemps avant d’empoigner cette question, à en croire la députée genevoise Maria Roth-Bernasconi. Pour rattraper son retard, le parti à la rose rédige actuellement une feuille de route sur l’intégration des étrangers. Elle sera soumise aux délégués lors de l’assemblée du parti en décembre.
«Un bon moyen d’intégrer les migrants, c’est de leur octroyer le droit de vote», estime Maria Roth-Bernasconi, qui participe à la rédaction de ce document. La problématique de l’islam y est abordée au travers des femmes migrantes, «notamment musulmanes, provenant de sociétés dans lesquelles elles n’ont pas grand-chose à dire». Le texte aborde également la thématique du voile islamique, ainsi que des dispenses de cours. «Tous les enfants ont droit au sport, estime la Genevoise sur ce dernier point. Mais ce qui importe, au final, c’est d’inclure les parents dans la discussion. Pour mener une politique d’intégration cohérente, il faut ouvrer les bras à l’autre.»
Opinion de Denis Barrelet dans 24heures
Les 68% doivent s’engager pour toute l’Europe
Maintenant que la modification de la loi sur l’asile et la nouvelle loi sur les étrangers ont été acceptées par le peuple, laissons la confiance s’installer. Cela signifie, en premier lieu, que les lois doivent être appliquées. Les procédures doivent être rapides autrement que sur le papier et un séjour en Suisse ne doit plus être attractif lorsque sa prolongation a été refusée. Les règles nouvelles destinées à intégrer les étrangers admis, et à éviter leur exploitation, doivent devenir réalité elles aussi.
Le vote de dimanche, si clair, assure les meilleures conditions quant à l’avenir, à condition qu’on ne se mette pas systématiquement à tirer à nouveau de gauche et de droite. De gauche viendra la tentation de réintroduire par la petite porte ce qui a été prôné en vain ces dernières semaines, dont par exemple une règle faisant du travail trouvé en Suisse un droit d’y séjourner durablement d’où qu’on vienne. De droite pourraient venir d’autres freins à l’immigration, dans un but étroitement électoral.
Cette confiance retrouvée quant à la capacité de l’Etat d’agir, il la faut en réalité pour d’autres raisons encore. Ce qui est en jeu, avec la pression migratoire croissante en provenance des pays pauvres, c’est l’équilibre démographique et social des pays du Nord. Pour l’heure, chacun croit pouvoir s’en tirer seul. Les Pays-Bas, libéraux s’il en était dans ce domaine, sont parmi les plus sévères désormais, par la crainte légitime de perdre leur identité. La Suisse les a dépassés dimanche. Pendant ce temps, les barques qui accostent à Lampedusa ou aux Canaries déchargent des drames. Romano Prodi régularise par centaines de milliers les sans papiers de fraîche date, ce qui ne fait que créer le vide qui attirera en Italie les clandestins suivants. La question, de plus en plus incisive, est celle d’une politique commune sans laquelle la situation deviendra inextricable.
Les Suisses ont voté dimanche, sagement apparemment. Sagement veut dire, en réalité, qu’on ne défendra pas la Suisse durablement si on le fait seul dans son coin, avec le dernier Recueil des lois fédérales. En novembre, le peuple retournera aux urnes, cette fois pour dire s’il estime correctement placé le milliard que les autorités suisses ont promis à l’Union européenne pour aider ses pays pauvres à lui. L’Union démocratique du centre, cette fois, fera cavalier seul, estimant cet argent mieux dans notre porte-monnaie. En fait, ce sera l’épreuve du feu. Si, dans leurs majorités, les citoyens approuvent ce milliard, ils montreront qu’ils ont compris combien, dans un ensemble économique fonctionnant correctement, riches et pauvres dépendent les uns des autres.
La Suisse a toutes les raisons de se soucier des équilibrages économiques dans le reste du monde, dès maintenant. Cela n’a rien à voir avec une forteresse haïssable construite par les privilégiés. Si les Européens veulent conserver leur nature profonde, c’est sans plus attendre qu’ils doivent se mettre autour de la table commune. Etablir des règles restreignant durablement l’immigration, accompagnée par des créations d’emplois dans les pays d’origine et y assurant des prix justes: c’est là que l’on aimera voir la Suisse en tête, et Micheline Calmy-Rey et ses successeurs. Faut-il rappeler qu’en sa qualité de puissance financière et de défenseur des pays pauvres, notre légitimité pour agir est double? Depuis dimanche, Berne doit s’adapter! Question de cohérence.
Priorité à l'intégration
Le Neuchâtelois Didier Burkhalter a convaincu ses amis radicaux de croiser le fer avec le parti de Christoph Blocher en jouant la carte de l'intégration. Une motion va être déposée au Parlement
Asile: le PS veut mettre le centre droit sous pression pour qu'il tienne ses promesses
PRD et PDC ont laissé entendre durant la campagne qu'il fallait aussi penser à une solution plus globale, et notamment signer plus d'accords de réadmission. Paroles en l'air ou réelle volonté de mieux contrôler une immigration irrégulière?
Nouveau droit d'asile/étrangers: contre-attaque des opposants
Les opposants au durcissement du droit d'asile et des étrangers ne baissent pas les bras après leur défaite de dimanche. Ils travaillent déjà sur un projet d'observatoire de l'application des nouvelles lois
Les libéraux règlent leurs comptes
Lendemains de vote
A propos des lois sur l’asile et sur les étrangers, il y a eu dissension au sein du Parti libéral entre la base et les dirigeants. Ces bisbilles fragilisent le parti. Vont-elles coûter à Martine Brunschwig Graf et à Claude Ruey leur place à Berne l’an prochain?
Les étrangers sont sous le choc
Au lendemain du plébiscite populaire en faveur des lois sur l'asile et sur les étrangers, les communautés extra-européennes en Suisse sont sous le choc. Les sentiments vont de la déception à l'indignation, en passant par la peur.
«Ce vote est une nouvelle claque pour les étrangers», déplore Nefail Maliqi, journaliste à Bota Sot, le quotidien de la communauté kosovare, l'une des plus importante en Suisse. «Nous respectons la décision du peuple helvétique, mais nous regrettons que le pays se blinde chaque jour un peu plus. La Suisse a pourtant toujours été ouverte. Ces lois sont un stress supplémentaire pour les personnes en situation précaire.»...
lundi 25 septembre 2006
Plainte contre Infrarouge: Blocher persiste
Christoph Blocher s'interroge toujours sur l'opportunité de déposer une plainte après le refus de la TSR de faire l'impasse sur les dessins de Mix&Remix lors de l'émission "Infrarouge". Il l'a dit lors de l'heure des questions au Conseil national.
la presse étrangère réagit
La presse internationale s'est fait l'écho des votations de ce dimanche en Suisse, commentant essentiellement le durcissement de la loi sur l'asile et les étrangers.
L'édito de 24heures
Lire l'édito de Thierry Meyer
L’espoir d’un apaisement
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Près de sept votants sur dix qui approuvent la politique d’asile et d’immigration préconisée par la majorité du parlement et par le Conseil fédéral, le verdict est sans appel.
THIERRY MEYER
Publié le 25 septembre 2006
Il s'inscrit du reste dans une longue lignée de votes sur cette question délicate, où chaque fois que les projets, teintés d'esprit restrictif, étaient adoubés par les élus du peuple, celui-ci suivait, alors qu'il a repoussé chaque initiative allant dans le même sens.
Ce pragmatisme est un motif de croire, sur une question qui a connu de douloureux déchirements, à un espoir d'apaisement. Ce serait la vraie bonne nouvelle d'une campagne qui a reflété non seulement la polarisation affirmée de notre sérail politique, mais aussi le désarroi perceptible d'une population qui, à l'instar de l'Europe entière, peine à comprendre l'évolution déroutante des flux migratoires mondiaux.
Pourquoi croire en un apaisement? D'abord, la netteté du résultat rend impossible toute argutie sur la ligne à suivre, mais elle procure aussi une base claire à partir de laquelle construire une politique globale d'immigration et d'intégration. On sent très bien l'inclination tripale de la droite nationaliste à demander toujours plus. Mais elle a peut-être rempli sa besace – et son office: l'envie duale de punir davantage «les abus» et de mieux intégrer les migrants légaux, bref, de clarifier une politique des étrangers qui donne une priorité à «l'immigration choisie», est une tendance largement majoritaire dans toute l'Europe. L'habileté de l'UDC aura été de sentir cette tendance avant les autres formations politiques, de mieux l'exploiter. Au jourd'hui, après ce vote limpide, comment exiger un durcissement ultérieur sans verser dans la politique xéno phobe?
D u coup, la balle est à la fois dans le camp des «suiveurs» et dans celui des perdants. Au centre-droit, désormais, d'apporter la preuve qu'il n'a pas soutenu ces lois par simple électoralisme, mais parce qu'il est convaincu qu'elles sont un des instruments d'une politique qui comporte plus d'efforts sur le terrain, plus de solutions concrètes et coordonnées avec nos voisins européens et, lorsque c'est possible, avec les pays d'émigration.
Dans deux mois, le vote sur le milliard de cohésion à l'Union européenne est une occasion rêvée de confirmer l'ouverture des Suisses en la matière.
Et la gauche, et les milieux associatifs? La lourdeur de la défaite interdit, contrairement à ce que certains avançaient encore hier, de s'engager dans la voie du juridisme revanchard. Une surveillance de l'action de l'administration dans l'application des textes est nécessaire, mais elle ne doit pas être comprise comme un instrument à défaire la volonté populaire. Au contraire, pour le Parti socialiste en premier lieu, qui avait baissé pavillon avant même l'échec consommé, l'heure est aux propositions nouvelles. Comme le suggèrent déjà les voix modernistes de la gauche, il s'agit d'intégrer le résultat de ce 24 septembre et de s'attaquer aux nombreux problèmes que les textes adoptés ne résolvent pas. De la capacité du centre-droit comme de la gauche à tenir ces caps définis durant la campagne dépendra la place que prendra l'asile, en particulier, dans l'agenda politique de ces prochaines années.
C'est ici aussi un espoir: que ce débat usant à force d'être caricatural retrouve le rang qui lui sied. Par exemple pour faire place, au sommet des priorités, à une réflexion assainie sur les retraites et l'avenir de l'assurance invalidité. Là aussi, le non très ferme à la chimère COSA ouvre les espoirs d'un débat plus serein.
Edito de la Tribune de Genève
La Suisse a vécu un tournant, hier. L'asile occupe le devant de la scène politique depuis un quart de siècle. Le pays s'était toujours refusé aux solutions du parti le plus dur contre les réfugiés. Depuis hier, c'est fait, l'UDC a gagné. Elle a fait accepter sa ligne au Conseil fédéral, puis au peuple. Hormis les camps d'internement et les restrictions massives de soins médicaux aux requérants, toutes les mesures que les agrariens défendaient se retrouvent dans la loi...
Asile et étrangers: un double «oui» massif qui assomme la gauche
La victoire du Conseil fédéral est massive. La gauche espérait pour ses référendums contre les lois sur l’asile et sur les étrangers un score qui lui permette de peser dans le débat.
On en est loin.
L'éditorial du Temps -
La Suisse est comme les enfants, elle a besoin de cadre. C'est une banalité que de le découvrir: toutes les sociétés occidentales en désarroi réclament des solutions lisibles à des problèmes qui ne le sont souvent plus...
...La défaite est donc lourde, surtout pour les autorités intellectuelles, culturelles ou religieuses, dont la perte d'influence politique ne cesse de se creuser
Lire aussi l'article de Valérie de Graffenried
La gifle
Certes, l'issue du scrutin ne faisait guère de doute. Toutes celles et ceux qui ont mené campagne contre les lois sur l'asile et les étrangers –que la majorité populaire ne nous empêchera pas de qualifier de xénophobes– avaient conscience de se battre pour l'honneur. Mais assister hier après-midi à l'impitoyable annonce des résultats canton après canton avait de quoi déprimer le plus optimiste des militants des droits humains.
Même si on savait depuis le 24 novembre 2002 que le dépeçage final du droit d'asile et des étrangers n'était qu'une question de temps. Ce jour-là, les Suisses refusaient à une très faible majorité une initiative populaire de l'UDC durcissant considérablement la loi sur l'asile. Depuis, Christoph Blocher, le fer de lance de la formation d'extrême droite, a accédé au Conseil fédéral et a pu concrétiser ses funestes intentions avec la complicité non seulement de son parti, mais également de la grande majorité des élus bourgeois du parlement.
Ce verdict s'inscrit en outre dans une continuité certaine. Depuis 1987, chaque fois que les autorités fédérales ont présenté des projets de restriction sur l'accueil et les droits des migrants, la population les a acceptés à une confortable majorité. Cela s'est déjà produit sept fois en vingt ans avec toujours des pourcentages favorables d'au moins deux tiers des votants.
Devenue avec le temps une véritable litanie, la traque aux abus dispose d'un nouvel arsenal législatif qui donne froid dans le dos. Tant dans la loi sur l'asile que dans celle sur les étrangers, le migrant est d'abord vu comme une menace, un fauteur de troubles, un profiteur dont il convient de se méfier. Alors on érige des barrières, soit en interdisant toute forme d'immigration qui ne proviendrait pas de l'Union européenne –ce qui exclut près de 95% des habitants de la planète–, soit en faisant de l'accès à l'asile un mirage. Et si malgré tout un étranger, avec quelque statut que cela soit, parvient à passer nos frontières, tout est bon pour lui rendre économiquement et socialement la vie impossible.
Alors, que le Conseil fédéral et le parlement ne viennent pas nous dire que ces deux lois favorisent l'intégration! Presque tout dans les textes témoigne du contraire, à commencer par les obstacles mis au regroupement familial.
Enfin, ce scrutin constitue une gifle pour les dizaines de milliers de personnes vivant en Suisse sans statut légal et contribuant à sa prospérité. Pris d'un élan d'inconscience et d'ingratitude, deux votants sur trois ont signifié à ces migrants de l'ombre une forme de rejet qui laissera des traces.
Retournons le verdict des urnes dans tous les sens: difficile d'y voir une lueur d'espoir. Et pourtant. Là où un vrai débat a pu se dérouler avec la population, là où la propagande officielle a pu être contrebalancée et les mensonges dénoncés, la défaite n'a pas des allures de Berezina. On a ainsi pu voir que de l'autre côté de la Sarine, la campagne précédant la votation n'a de loin pas atteint l'ampleur qu'elle a eue en Suisse romande. Sans doute le sursaut moral de certaines personnalités de droite qui, à Genève, Neuchâtel ou Lausanne, se sont fortement mobilisées contre les lois a-t-il également eu un impact. Insuffisant certes, mais il a permis une timide prise de conscience.
Maigre consolation, convenons-en!
Ruth Dreifuss veut se remettre tout de suite au travail
Malgré sa défaite d'hier, l'ancienne conseillère fédérale, qui a conduit le référendum contre les lois sur l'asile et les étrangers, affiche sa détermination à poursuivre la lutte pour limiter les dégâts.
L'édito de Beat Grossenbacher
Le double oui n'est en soi pas une surprise. C'est son ampleur chiffrée (68%) et son unanimité territoriale qui interpellent. Les Suisses ont-ils peur, comme un demandeur d'asile l'a laissé entendre hier soir à la télévision romande? Le sentiment grandissant d'insécurité a certainement joué un rôle dans ce vote. Il ne faut pas s'en cacher. Mais la vraie raison du plébiscite est à chercher dans le ras-le-bol que la population manifeste de plus en plus clairement à l'égard des «profiteurs».
Les Suisses en ont marre des abus en matière d'immigration. Ils ont voté la conscience d'autant plus tranquille que le Conseil fédéral et une large majorité du Parlement cautionnaient cette approche. Face à certains amalgames hâtifs, les arguments humanitaires n'ont pas pesé lourd. C'est regrettable, car les nouvelles lois, si elles sont appliquées sans discernement, peuvent conduire aux pires bavures et à de terribles injustices. Les opposants aux deux lois, Ruth Dreifuss en tête, ont promis qu'ils allaient rester vigilants. C'est indispensable.
Reste que le signal donné par le souverain est tout sauf anodin. Il s'agit d'en tenir compte, sans quoi de nouveaux durcissements de la législation sont à craindre. Alors, tant mieux si les textes adoptés hier permettent de lutter efficacement contre les abus. Cela contribuera à calmer les sentiments xénophobes. Mais il ne faut pas se leurrer. Sans une multiplication des accords de réadmission pour les requérants déboutés, sans une aide substantielle au retour, sans une politique du développement digne de ce nom, les problèmes de fond posés par les flux migratoires ne pourront jamais être réglés. L'ignorer, c'est se fourvoyer!
La Suisse verrouille sa porte aux étrangers non-européens
C'est un rejet massif des étrangers non européens. La population suisse a voté à 68 % en faveur de la nouvelle loi sur l'immigration et à 67,8 % pour durcir les conditions d'accès au droit d'asile. Aucun des vingt-six cantons ne s'est opposé à la nouvelle réglementation. «Le résultat est affligeant et pourtant tout avait été dit sur ces deux lois qui constituent une insulte aux droits humains les plus élémentaires», se plaignait hier Didier Estoppey, éditorialiste du quotidien militant le Courrier. Les associations de défense des étrangers n'étaient pas seules, hier soir, à observer, incrédules, les tableaux de résultats. «La Suisse a adopté l'une des législations les plus restrictives en Europe, et d'autres pays pourraient suivre», s'est inquiété, pour sa part, le porte-parole du Haut Commissariat pour les réfugiés, William Spindler.
Revue de presse de la TSR
Au lendemain du double oui aux lois sur l'asile et les étrangers, et du non à l'initiative COSA, la presse suisse est particulièrement divisée dans ses commentaires. La critique se fait nettement plus vive en Suisse romande...
Immigration: la Suisse verrouille ses portes
Consultés par référendum, les Suisses ont approuvé dimanche à 68%, l'entrée en vigueur de lois qui durcissent les procédures d'asile et l'accueil des travailleurs étrangers. Un texte proposé par la droite populiste et qui a déjà été approuvé par le Parlement. En Suisse, 1 personne sur 5 est un étranger mais paradoxe : les demandes d'asile n'ont jamais été aussi basses depuis 20 ans.
"Penser" la migration
Tandis que Messieurs Merz et Blocher ont visiblement du mal à cacher leur satisfaction face à la presse, Ruth Dreifuss elle se dit «déçue mais pas découragée». Il est rare qu’un ancien Sage s’engage avec tant de conviction dans une campagne de votations.
L’acceptation de la révision des deux lois est massive. Face à l’ampleur de la défaite, comment la gauche peut-elle rebondir?
Christophe Darbellay, le président du PDC, avait proclamé être l’inventeur du «petit oui». Le peuple suisse lui a préféré sa version extralarge. A respectivement 67,75%, et 67,96%, le souverain a très largement approuvé la révision des lois sur l’asile (LAsi) et sur les étrangers (LEtr). Au rayon des Jasager, Schwytz est tout devant et Zurich pas très loin derrière. Mais il n’y a a pas de röstigraben.Même les cantons de Vaud et de Genève, où la mobilisation des opposants avait été forte, y compris dans certains milieux bourgeois, ont voté non. Une Suisse entièrement verte sur la carte, à l’exception de quelques villes, et une grande claque rose pour la gauche en général. Et les socialistes en particulier, qui devront pourtant forcément rebondir sur un thème peu porteur électoralement.
Ce vote ne surprend pas Etienne Piguet, spécialiste en migrations à l’Université de Neuchâtel: «D’une part, les sondages allaient dans ce sens. D’autre part, il y a une continuité historique assez remarquable sur ce thème de l’asile et des étrangers. Ce que j’appellerai l’entrouverture suisse. Avec un désarroi sur des flux que l’on ne comprend plus.» A l’heure de l’analyse, les responsables socialistes n’admettent que du bout des lèvres la mollesse de leur campagne. «Nous savions que nous étions un commando sans aucune chance, renchérit la nouvelle présidente du groupe socialiste aux Chambres, Ursula Wyss. Le PS se devait de bien défendre COSA parce qu’il partait seul contre tous. Pour l’asile et les étrangers, nous pouvions compter sur une grande coalition de la société civile.» Pour Thomas Christen, secrétaire général du PS, «ce score correspond à notre électorat et à celui des Verts. Il est difficile de gagner une votation contre le Conseil fédéral et l’ensemble des partis bourgeois. » Et maintenant? Alors que Christoph Blocher a révélé – en français! – le calendrier serré de la mise en oeuvre échelonnée et rapide (entre 2007 et 2008) des deux lois, il s’est refusé à commenter le résultat: «Ce n’est pas ma victoire, mais une décision très importante.» Le conseiller fédéral se contente donc de demander aux autorités compétentes (cantons, communes, tribunaux) d’appliquer «avec détermination » les dispositions approuvées par le souverain.
Pour la gauche, la «résistance » devra donc s’organiser rapidement. Quasi instantanément, les organisations non gouvernementales ont annoncé une vigilance stricte de cette application, notamment la création d’un «observatoire des abus» ( lire ci-dessous). Pour le PS, Thomas Christen emboîte le pas: «Nous allons déposer dès demain des motions et des interpellations au niveau cantonal. Notamment pour qu’il n’y ait pas d’iniquités au niveau national entre les traitements des différents cas de rigueur.» Ursula Wyss ajoute: «De grandes promesses ont été faites par les partisans du oui. Dont certaines sont d’ailleurs en contradiction avec les deux lois. Nous veillerons à ce qu’elles soient tenues.» Même discours chez Ruth Dreifuss, présidente du comité d’opposants, «déçue, mais pas découragée. Le combat contre les idées de l’UDC continue.» Quant aux Verts, par l’entremise de leur section vaudoise, ils songent à lancer une initiative sur la politique migratoire suisse. Prévoyant notamment, selon la conseillère nationale Anne-Catherine Menetrey, «une entrée en matière pour toutes les demandes d’asile; un permis pour chaque emploi et une passerelle plus rapide entre les différentes autorisations de séjour.
La gauche mal à l’aise par définition
En matière de politique d’asile et d’étrangers, Etienne Piguet doute que le PS proposera autre chose qu’un arsenal réactif: «Sur cette thématique, la gauche est par définition mal à l’aise pour soutenir ses principes de solidarité universelle et humaniste. Sa vision s’oppose à la logique de fonctionnement de l’Etat-nation et de la souveraineté nationale. Marquée en Suisse par une solidarité à l’intérieur des frontières plus qu’à l’extérieur. Dans ce sens, et même si ce serait souhaitable, elle peine à proposer une politique de régime migratoire qui lui est propre. Et son rôle pourrait se borner à observer et à dénoncer les dérapages dans l’application de ces nouvelles lois.» A une petite année des élections fédérales, les socialistes abandonneraient ainsi une thématique peu lucrative en matière de bulletins de vote. «J’espère bien que nous ne serons pas paralysés par cette échéance électorale », se défend Arnaud Thiéry, secrétaire central des Jeunesses socialistes suisses. Après les radicaux, le Parti socialiste a d’ailleurs agendé l’intégration au menu de son congrès de décembre. Impossible d’en savoir plus: «Le document est en progrès», avoue Ursula Wyss.
CLAUDE ANSERMOZ
Les réactions
Et ailleurs dans le monde
- dans le Figaro: "La votation d'hier marque une nouvelle fois le paradoxe d'un pays qui compte avec 21% de sa population étrangère, l'un des plus forts taux d'Europe, et ses tendances au repli sur soi."
- dans l'Express: "La plupart des commentateurs y voient un triomphe du conseiller fédéral chargé du département de Justice et Police, Christoph Blocher, et de son parti, l'Union démocratique du centre, hérault de la droite nationaliste."
- sur Euronews: "Je me dis que le peuple suisse a été intoxiqué dans le sens de la haine, j'ai écouté les hommes politiques, tous ont prêché de la haine, j'ai eu les larmes aux yeux quand j'ai écouté l'honorable Blocher; je pense que le peuple suisse a peur".
- sur TF1: La Suisse a adopté l'une des législations les plus restrictives en Europe et d'autres pays pourraient suivre.
- sur France2: Sur ses 7,3 millions d'habitants, la Suisse compte plus de 21% d'étrangers
- en allemand dans la Süddeutschezeitung: Die Schweiz bekommt eines der schärfsten Asyl- und Ausländergesetze in Europa.
- en espagnol dans El Mundo: Suiza endurece sus leyes de Asilo y Extranjería. Toujours dans El Mundo: Las propuestas de nuevas leyes de Asilo y Extranjería que el Gobierno suizo someterá hoy a referéndum fueron calificadas de "racistas y xenófobas" por el relator de la ONU sobre el Derecho a la Alimentación, Jean Ziegler.
La Suisse vérouillée
dimanche 24 septembre 2006
Communiqué d'ACCOR-Sos racisme
(au sens large). Le 9 mars 1993, les Chambres fédérales décidaient que la Suisse signerait la Convention internationale contre le racisme mais avec une réserve. Elle ne s’engagerait pas à ne pas commettre de discrimination raciale. Cette réserve ne contredit-elle pas le droit humanitaire? Dans son Rapport explicatif de juin 2000 le Conseil fédéral a clairement exprimé qu'il attendait du changement législatif voté aujourd’hui, le renforcement de la légitimation politique de la réglementation sur les étrangers. Le vote de ce week end renforce la tradition discriminatoire et xénophobe qui porte cette réglementation depuis 89 ans. En pleine évolution, notre société doit refuser la régression du droit En 1938, les Juifs étaient indésirables en Suisse. Pour les repérer à la frontière, nos autorités avaient obtenu des nazis qu’ils apposent un signe distinctif, le fameux tampon «J». Cette politique fut déplorée en 1995. Les autorités n’ont-elles pas reçu aujourd’hui le pouvoir de discriminer les gens selon leur nationalité? Des ressortissants du monde entier concourent au bien-être de notre pays et dynamisent une société confrontée aux problèmes de notre temps: les inégalités de développement, la sauvegarde de la nature, la justice pour tous. ACOR SOS Racisme contribue au renforcement du tissu social et au
dialogue qui fait évoluer les mentalités. Elle s’engage en faveur de cette évolution.
ACOR SOS Racisme, 24 septembre 2006
Pour information: Karl Grünberg, Secrétaire général, 079 771 68 47
L'EPER est inquiète
L'EPER (Entraide Protestante Suisse) est inquiète
du résultat du double vote sur les lois sur l'asile et les étrangers.
Ce résultat est le fruit d'une politique de désinformation. Focalisée
sur la peur et les abus, elle exacerbe les tensions entre les
citoyennes et les citoyens et les communautés étrangères vivant en
Suisse.
L'EPER regrette que la population suisse, en acceptant les
modifications des deux Lois sur l'asile et les étrangers, se dote de
législations parmi les plus dures et les plus xénophobes d'Europe. En
tant qu'actrice sur le terrain auprès des personnes défavorisées et
des personnes migrantes, l'EPER est particulièrement inquiète du sort
réservé aux femmes seules et aux jeunes mineurs qui seront les
premières victimes de ces durcissements. Cette sanction populaire,
résultat d'une campagne de désinformation, renforce les clivages...
entre communautés et met en péril la cohésion sociale de notre pays.
Les Eglises regrettent le oui aux lois Blocher
Dans un communiqué diffusé dimanche, les Eglises chrétiennes et la Fédération suisse des communautés israélites regrettent le double oui du peuple aux lois sur l’asile et sur les étrangers. Elles demandent que ces dispositions soient appliquées dans le respect de la dignité humaine.
Lisez le communiqué des Eglises
Les Églises et la FSCI demandent que la loi sur l’asile et la loi sur les étrangers soient appliquées dans le respect de la dignité humaine
La Fédération des Églises protestantes de Suisse (FEPS), la Conférence des évêques suisses (CES) et la Fédération suisse des communautés israélites (FSCI) regrettent que les deux textes de lois aient été acceptés. Elles les considèrent comme impropres à régler les problèmes qui se posent et comme contraires à la tradition humanitaire de notre pays. Les Églises nationales et la FSCI suivront d’un œil attentif et critique la mise en œuvre de ces lois et continueront à s’engager pour le respect de la dignité humaine dans les affaires relatives aux migrants.
Les Suisses durcissent la loi sur l'asile: réaction internationales
Lire dans Radio-Canada
Lire dans Corus Nouvelles (Québec)International - Les Suisses durcissent la loi sur l'asile
Dans info690 et sur le Matinternet et Canoeinfo au Québec
Sur Euronews (Lyon , France) et Challenges (Paris , France)
A 7sur7 en Belgique
Sur DW-welle (Allemagne)
Un oui massif à un tour de vis sur l'asile et l'immigration
68% des votants ont accepté la loi sur les étrangers et la révision de la loi sur l'asile. Mais à 58%, ils ont refusé l'initiative qui voulait verser une partie des bénéfices de la BNS à l'AVS.
Ce dossier comprend des liens vers de nombreuses séquences audio et vidéo des premières réactions politiques.
Lien vers les résultats complets
Une voix pour la majorité musulmane
L'Association suisse des musulmans pour la laïcité (ASML) vient de voir le jour. Tolérance, intégration, paix et démocratie: l' association fera connaître les valeurs partagées par la plupart des musulmans de Suisse
samedi 23 septembre 2006
L'asile indésirable - L'Express
out comme le chocolat Lindt ou l'horlogerie de précision, les propositions de lois anti-immigration appartiennent depuis longtemps au patrimoine national suisse, à sa tradition, à son savoir-faire...
«Emigration illégale»: une notion à bannir
Alors que dans le dit débat sur la Letr (Loi sur les étrangers) et la Lasi (Loi sur l’asile) la notion «d’émigration illégale» a été largement répandue, ce rappel sur les dangers inhérents à cette formule est plus utile que des déclarations incantatoires ou faussement humanistes (réd.)
L’incroyable histoire d’un groupe de réfugiés devenus des Stars
Humanitaire
Le Genevois d’adoption Alphonse Munyaneza n’imaginait pas qu’il allait engendrer un tel phénomène. Son projet de documentaire sur des réfugiés Sierra-léonais a raflé des prix dans de nombreux festivals. Quand aux musiciens protagonistes du film, The Refugee all stars, ils ont signé pour un célèbre label et tournent aux Etats-Unis. Leur disque sort mardi.
Veillée d'armes
Des personnes seront à la rue ce soir. Non point encore les migrantes et les migrants formant les nouvelles catégories d'exclu-e-s que pourraient bientôt fabriquer les lois sur l'asile et les étrangers sur lesquelles on vote ce week-end. Mais toutes celles et ceux qui ont décidé de se mobiliser une dernière fois en consacrant la nuit précédant le scrutin à une veille[1]. Au Courrier aussi, même si tout semble avoir déjà été dit sur l'inhumanité et l'absurdité de ces deux lois, nous avons décidé de mobiliser une dernière fois nos colonnes. Pour rappeler l'importance de la votation de demain dans l'histoire politique de ce pays. La Suisse est en effet sur le point de manquer une occasion unique. Pour la première fois, elle s'est lancée dans l'examen simultané de sa politique d'asile et de sa politique migratoire. Le résultat est affligeant: une loi sur les étrangers qui ferme les portes a toute personne ayant eu l'outrecuidance de naître ailleurs qu'en Europe. Et qui contraint donc les migrants économiques à tenter leur chance via la filière de l'asile. Mais la seconde loi veille au grain, en multipliant les chausse-trappes. Quitte à éliminer aussi, dans la foulée, les «vrais réfugiés». En bref: la Suisse, refusant d'admettre que son histoire comme son destin sont faits de migrations, continue à se réfugier dans le déni. Les deux textes dont ont accouché les Chambres, avec Christoph Blocher au forceps, sont non seulement une insulte aux droits humains les plus élémentaires. Ils sont également une négation des besoins économiques et sociaux de ce pays. La société civile ne s'y est d'ailleurs pas trompée, examinant avec une grande méfiance la marchandise que les parlementaires ont gobée tout rond. Qui aurait tablé, en début d'année, alors que le double référendum venait d'être lancé, sur la formidable mobilisation qu'il a permise? Sur la richesse des milieux qui, transcendant souvent les clivages politiques habituels, ont tiré la sonnette d'alarme? Sur le courage de femmes et d'hommes qui, bravant leur hiérarchie ou les mots d'ordre de leur parti, n'ont pas hésité à monter au front? Bien sûr, la bataille est loin d'être gagnée... Les derniers sondages laissent d'ailleurs planer peu d'espoir quant au résultat des votations de demain. Mais au-delà du verdict du Souverain, le taux de refus des deux lois a une importance déterminante dans la suite du combat pour les droits des migrants. Leur possible acceptation dans quelques cantons pourrait même établir un rapport de force donnant légitimité à la désobéissance civile que devront peut-être bien soutenir certaines autorités locales, suivant la voie tracée par les pionniers vaudois. Alors, pour celles et ceux qui auraient omis de remplir leur bulletin, ou de convaincre leurs proches de le faire, ce rappel: même s'il n'est plus temps d'aller à La Poste, les bureaux de vote sont ouverts dimanche matin! Note : [1]«Veillée de la loi» animée de diverses activités culturelles, ce samedi dès 18 heures sur la place de l'Ile à Genève. | |
Radio Vatican : immigration et droit d'asile en question en Suisse
Du côté du droit d’asile, un durcissement des conditions d’accès a été mis en place, qui est peu conforme à la convention de Genève selon ses détracteurs et en rupture avec la tradition suisse d’accueil des étrangers. C'est ce que nous explique Rosita Fibbi, chercheur au forum suisse pour l’étude des migrations et de la population à l’université de Neuchatel, et enseignante à l’université de Lausanne
Ecoutez l'émission de Radio Vatican
vendredi 22 septembre 2006
L'immigration est un facteur de compétitivité pour l'économie suisse
La productivité du travail constitue un des facteurs essentiels de la croissance économique nationale, de la prospérité et donc du bien-être social. Le capital humain d'origine étrangère est un puissant levier de la productivité du travail d'un pays, pour autant que la politique en matière d'immigration favorise la venue de «cerveaux». Certains pays, à l'instar des Etats-Unis, l'ont bien compris en favorisant l'immigration des personnes qualifiées. D'autres, comme la Suisse, ne semblent pas avoir saisi l'importance du capital humain - quelle que soit son origine - pour la croissance économique.
«Je ne demande qu'à pouvoir être soigné en Suisse»
Venu du Cameroun en 2002, Eric a été frappé de non-entrée en matière en mai dernier. Il risque d'être renvoyé dans son pays, malgré sa maladie.
Accès au soin, angélisme, ados emprisonnables: vos réactions
Bellerins, gare à l’angélisme!
Peut-on habiter Bex et voter deux fois non? Aujourd’hui Bex est devenu synonyme de «gros problèmes avec les réfugiés». A cause de quelques dealers et de violences perpétrées par des citoyens qui se sont octroyé le rôle de justiciers, la réputation de Bex a pris un coup. Voici qu’on vote sur une nouvelle loi censée mieux lutter contre les abus en matière d’asile. Quelle aubaine, pourrait-on croire! Or il n’en est rien!
Cette loi poussera davantage de requérants vers la clandestinité, donc vers des activités illégales telles que le trafic de drogue. Parce qu’elle refuse le droit d’asile à ceux qui ne présentent pas dans les 48 heures un papier d’identité, des milliers de personnes seront condamnées à errer – sans assistance et sans papiers – dans les rues des villes et villages de notre pays.
Une aberration lorsqu’on sait que pour des raisons politiques, administratives et d’analphabétisme, plus d’un milliard d’humains sont privés de pièces d’identité.
(…) Quant à la loi sur les étrangers, elle provoque une ségrégation entre ressortissants européens et extra-européens contraints d’aller grossir les rangs des travailleurs au noir et privés du droit au regroupement familial. Les partisans de ces deux lois font preuve d’angélisme en croyant qu’elles résoudront les problèmes liés aux abus. Avec la nouvelle loi sur l’asile il y aura davantage de requérants qui seront condamnés à traîner dans les rues et la nouvelle loi sur les étrangers sera une fabrique de travailleurs au noir
Alberto Cherubino,
Groupe bellerin d’appui aux requérants d’asile Bex
Cessons de critiquer
Des procédures peu fiables
Un accès réduit aux soins
Des adolescents jetés en prison
Des enseignants mal pris
Blocher met dans sa poche les élèves du Centre de formation professionnelle de Bienne
Le conseiller fédéral s'est adressé mardi soir à 500 élèves du Centre de formation professionnelle de Bienne (CFP). Son style décontracté a fait mouche auprès des jeunes.
«Quand il était conseiller national, Christoph Blocher reprochait au Conseil fédéral ses interventions publiques à l'occasion des votations fédérales», pouvait-on lire sur l'une des pancartes brandies devant le Centre de formation professionnelle (CFP) par une quinzaine d'opposants à la nouvelle loi sur les étrangers et à la modification de la loi sur l'asile. «Nous voulions marquer notre présence et encourager les jeunes du CFP à déposer un double non dans les urnes», déclare Marlies Küpfer. Deux membres du comité «2 x non» se sont ensuite mêlés aux étudiants, après avoir obtenu l'autorisation de la direction du CFP. Celle-ci a jugé opportun qu'il y ait dans la salle des personnes susceptibles de poser au conseiller fédéral des questions critiques.
Christoph Blocher a d'abord présenté dans le détail les enjeux des deux objets soumis au peuple. Décontracté et s'exprimant très librement, le conférencier a immédiatement cherché le contact avec son jeune public. S'appuyant sur des exemples, recourant volontiers à la plaisanterie, il a d'emblée mis dans sa poche les élèves du CFP, âgés de 17 à 20 ans. Le conseiller fédéral a insisté à plusieurs reprises sur «les bons rapports qui existent aujourd'hui entre les Suisses et les étrangers». Christoph Blocher en a également appelé à la tradition humanitaire de notre pays. «La Suisse a toujours été une terre d'accueil pour les vrais réfugiés, il continuera d'en être ainsi avec les nouvelles lois», estime-t-il. Non sans humour, l'orateur s'en est pris à ses détracteurs: «Mes opposants, parmi lesquels il y a pourtant beaucoup d'intellectuels, ne lisent malheureusement que la première phrase de certains des nouveaux articles de loi.» Puis est venu le moment des questions. «Comment allez-vous faire, dans la pratique, pour déterminer si on se trouve devant un mariage fictif ou non?» a demandé l'une des deux opposantes présentes dans la salle. Les élèves du CFP se sont aussi montrés critiques. L'un d'eux a déploré que les mesures de contrainte autorisent la mise en détention d'enfants. Un autre a également reproché au conseiller fédéral d'informer trop unilatéralement.
Des souffrances supplémentaires
Interview de Patrick Bodenmann, chef de clinique et responsable médical du Centre de santé infirmier (CSI) pour les requérants d’asile, à la Policlinique médicale universitaire à Lausanne.
Patrick Bodenmann: «Selon plusieurs études, le syndrome de stress post-traumatique est dix fois plus fréquent parmi la population de migrants. Il y a donc un réel besoin d’assistance psychologique.»
— Selon les données que nous avons recueillies, les NEM sont en très grande majorité des hommes, âgés de 25-26 ans et célibataires. Ils ont effectué un long voyage pour venir en Suisse et on se dit qu’ils devraient être en relative bonne santé. Mais nous avons été étonnés de l’importante présence de troubles psychologiques et psychiatriques dans cette population. Ces personnes souffrent souvent de dépression, d’anxiété, d’angoisse généralisée ou encore de syndrome de stress post-traumatique.
— Comment l’expliquez-vous?
— Pour répondre précisément, il faudrait étudier ce phénomène. Il est difficile de savoir si la situation qu’ils vivent est la cause de ces pathologies, mais on peut imaginer que les conditions dans le pays hôte ont une probable influence. Souvent, les jeunes hommes que je rencontre sont peu au clair face à leur situation, ne connaissent pas très bien leurs droits et leurs obligations. Bref, ils sont dans le flou et manquent de repères.
— Si le peuple accepte la nouvelle loi sur l’asile, les requérants déboutés et tenus de quitter la Suisse seront traités comme les NEM. Cela aura-t-il des conséquences?
— Si les deux modifications soumises au peuple sont acceptées, certaines personnes seront plus vulnérables et cela aura probablement un impact sur leur santé. Des études publiées dans la presse médicale l’ont déjà mon- tré: quand un pays durcit sa pratique face aux migrants, certaines de leurs pathologies, notamment mentales, tendent à s’aggraver et à devenir chroniques. Les nouvelles lois pourraient donc générer des souffrances supplémentaires, et donc également des coûts.
— Comment soignez-vous ces personnes?
— Il faut les suivre, le mieux possible. Mais dans le cas des NEM, nous nous heurtons à une difficulté: ils n’ont droit qu’à une aide d’urgence. Qu’est-ce que cela signifie?
Est-ce qu’il faut simplement garantir leur survie ou l’urgence peut-elle être vue de façon plus vaste? Dans le canton de Vaud, nous avons la possibilité d’apporter des soins à ces personnes grâce aux soutiens du monde politique et des institutions de santé. De façon plus générale, nous pouvons former les jeunes médecins et soignants à la problématique de la santé des migrants, mettre en place des structures ou des groupes de réflexions pour permettre aux plus vulnérables d’avoir accès aux soins. Localement, cet enseignement et cette réflexion sont en cours. En Suisse, les établissements publics réfléchissent aux stratégies à mettre en place dans le cadre d’un programme appelé «Migrant Friendly Hospitals». Au niveau européen, un tel processus avait déjà débuté en 2004.
— Le monde médical s’engage en faveur des migrants alors que le politique insiste sur la nécessité de lutter contre les abus.
— Cela peut paraître contradictoire, en effet; mais la Suisse s’est aussi engagée, en signant des conventions internationales ou par le biais de sa constitution, à fournir des soins à tous. La réalité est là et nous devons y répondre. Ceci dit, il arrive aussi que des organisations non gouvernementales, créées d’abord pour intervenir dans des pays en développement, prennent le relais des structures officielles pour parer aux nécessités dans des pays développés, y compris en Suisse.
CAROLINE ZUERCHER
jeudi 21 septembre 2006
Courrier des lecteurs de 24heures
Quand notre monde occidental mené par des capitalistes avides de profits voudra bien payer correctement les produits des pays de migrants, ceux-ci resteront chez eux, où il y a tant à faire. Mais actuellement, ces lois sont tout à fait indispensables. Nous payons des sommes énormes, alors que nos autorités dépensent des millions pour l’étranger. Par exemple 15 millions pour les Palestiniens: pourquoi ces derniers ne vont-ils pas travailler au Liban, en Arabie, dans les Emirats? Ce sont des Philippins, Indiens, Chinois, Sri-lankais qui y travaillent… (…) Pour avoir enseigné dans des classes avec 80% d’étrangers, je n’ai pas constaté un apport culturel comme certains politiciens démagogues le prétendent. Au contraire, cela entraîne une précarisation pour tous dans les apprentissages et la maîtrise des matières.
Pour les «biens pensants» – les Voruz, Ruey, Huguenin, Sambuc, Neirynck, Dreifuss – il est facile de se donner bonne conscience avec l’argent de la collectivité. Combien de «sans-papiers» ont-ils accueilli chez eux?
De plus, la Suisse a trop d’étrangers, dont une partie au chômage. Pourquoi ne rentrent-ils pas dans leurs pays alors que ceux-ci accueillent et naturalisent des requérants par dizaine de milliers (Italie, Espagne, Portugal)?
(…) Par ailleurs, pourquoi y a-t-il pénurie de logements et des bouchons de circulation partout? Depuis longtemps nos autorités auraient dû comprendre qu’il faut maîtriser l’augmentation de la population et arrêter de bétonner et de «foutre en l’air» ce pays
Robert Reymond,
Pully
Petits calculs électoraux
Il y a trois sortes de citoyens favorables à la loi sur l’asile.
D’abord, les xénophobes purs et durs, qui avaient déjà soutenu James Schwarzenbach en 1970.
Ensuite, les petits poissons qui se font happer par les hameçons de la pub UDC. On y lit que la Confédération verse aux cantons 4800 fr. pour une famille de 4 NEM. Bien des Suisses ne gagnent pas autant.
Vrai, mais… l’aide d’urgence se monte à 10 fr. par personne, donc 1200 fr. par mois au maximum. Où sont passés les 3600 fr. restant?
Enfin, ceux qui accordent une confiance aveugle à la majorité du Parlement.
Impossible que nos députés se trompent à ce point.
Seulement voilà, un député est confronté à deux optiques antagonistes: d’une part le problème migratoire et d’autre part l’aspect politique de sa décision. Pour une part importante de la droite, c’est ce dernier aspect qui a prévalu. Souffler dans la même trompe que l’UDC c’est lui couper l’herbe sous les pieds, lui enlever une arme importante si elle n’en a plus le monopole. A une année des élections c’est important. Et tant pis pour les quelques défauts de ces lois.
Dans deux ou trois ans on se rendra compte de l’énormité de l’erreur, on verra que les abus persistent et que le nombre de clandestins et de sans-papiers aura augmenté et surtout que quelques vrais réfugiés auront été renvoyés vers la misère, la prison, voire la torture
Jean-Pierre Mutrux,
Grandson
Un goût d’abus
A propos de la «Réflexion» d’Hélène Küng intitulée «Halte aux abus: deux fois non» (24 heures du 16 septembre 2006):
L’abus… c’est quoi? La pasteure Hélène Küng présente sa «réalité». Elle constate entre autres que «des personnes non-européennes venant chercher un travail (en Suisse)… s’inscrivent pour une demande d’asile… et ne comprennent pas qu’on les accuse d’abuser…». Au lieu de protéger ce genre d’individus, elle ferait mieux de leur expliquer que la signification du mot «abuser» se trouve dans tous les dictionnaires.
Quelles que soient la situation d’une personne et la demande de main-d’oeuvre de l’économie, ce pays n’a vraiment pas besoin d’immigrants qui font leur entrée par le mensonge. La pasteure pourrait en outre leur rappeler l’existence du huitième commandement.
Quant au débat politique, une contribution responsable serait de faire des propositions constructives pour maîtriser le problème complexe des migrations, plutôt que de traiter le travail de nos législateurs de «mensonges» et «d’’irréalisme». En réalisant qu’une partie de mes impôts sert à payer le salaire de la pasteure, je ressens un goût… d’abus
Stefan Bodmer,
Saint-Sulpice
La nouvelle loi ne fera pas mieux
Oui, notre système d’asile permet malheureusement d’entretenir quelques faux requérants d’asile et ce problème doit être résolu. Oui, les moyens légaux actuels ne permettent pas de remédier à cette situation. Accepter les nouvelles lois telles qu’elles nous sont présentées semble donc répondre à un besoin urgent de faire le ménage. Eh bien non, ilyaaumoins deux raisons qui me poussent à les refuser car selon moi elles ne sont que poudre aux yeux.
D’abord, je n’ai pas entendu chez les partisans de commentaires sur une éventuelle adaptation du budget alloué aux fonctionnaires fédéraux en charge de ces épineux dossiers. Du coup, je me demande si ces nouvelles lois feront effectivement la différence par rapport aux textes actuellement en vigueur, alors que les ressources humaines et financières seront probablement semblables… On peut même craindre que d’ici l’année prochaine, nous ayons à subir un nouveau train d’économies, ce qui par effet de dominos nous amènera à constater dans deux ans que ces lois ne peuvent plus être appliquées avec efficacité en raison d’un manque de moyens.
J’extrapole sans doute, mais on est en droit de se demander où pourrait s’arrêter la spirale infernale?
Je reprends également l’argument de Ruth Dreifuss: si nous avons le moindre doute sur ne serait-ce qu’un seul article de ces deux volumineux projets, il est de notre devoir de nous opposer à cet ensemble d’articles, et de renvoyer ainsi nos autorités à leur copie
Eric Cornuz,
Aigle
Où sont les Suisses?
Après avoir pris connaissance des infos, je constate que le peu de Suisses encore en sursis dans un pays qui se voulait être un paradis vont peut-être voter non le 24 septembre. Et ces mêmes Suisses rouspètent sans cesse qu’il y a trop de faux réfugiés, trop de profiteurs qui viennent pour se faire soigner, vider les caisses du social, et voilà encore qu’ils vont accepter des minarets… Alors j’ai une question. Où puis-je me réfugier pour avoir encore des droits sans avoir des interdits (de fumer, de me parquer, de boire un verre sans risque et d’aller aux toilettes quand j’en ai envie)?
Au cas où vous trouveriez ce paradis qui était mon pays auparavant, écrivez-moi. Je n’ai pas besoin d’une Mercedes payée par le contribuable, mais simplement de retrouver ce que j’ai perdu: ma fierté d’être Suisse
Guy Leresche,
Lausanne
Une question de sécurité
A propos de la «Réflexion» de M. Gérald Nicod intitulée «Aujourd’hui le tricheur est gagnant» ( 24 heures du 14 septembre 2006):
Le président de l’UDC-Vaud, a clairement exprimé ce que veut le peuple suisse. Même une personne de gauche, tant soit peu intelligente, devrait comprendre, sinon ce serait de l’inconscience. Une immigration contrôlée est la base de la sécurité d’un pays et c’est l’occasion, Suisses conscients, d’y contribuer par vos votes.
Roland Johner,
Saint-Légier