mardi 21 novembre 2006

La Fareas respecte le droit, pas les dealers

Lire cette opinion de Pierre Imhof, directeur de la FAREAS, dans 24 heures


L'opération de police qui s’est déroulée ré­cemment à Bex fait ressortir quelques questions récurrentes sur la relation en­tre le trafic de drogue, les re­quérants d’asile et la Fareas.
Seule une minorité de requé­rants est liée au trafic de dro­gue, nuisant à l’ensemble des personnes venues chercher protection en Suisse et qui mé­ritent pleinement notre solida­rité. L’attitude de cette mino­rité est par contre inaccepta­ble, indépendamment de l’ori­gine ou du statut des individus qui la composent.
Une partie de la population vaudoise perçoit comme tout aussi inacceptable le fait que la Fareas héberge et assiste des
personnes se livrant à ces activités illéga­les.
Il faut tordre une fois pour toutes le cou au postulat qui voudrait que la Fareas protège les trafiquants. La Fareas a pour pratique de signaler systématiquement à la police tout soupçon d’activité illégale de la part de la popula­tion qu’elle assiste, tout comme elle collabore sur demande de la police aux opérations que celle-ci prépare.
Mais alors, pourquoi ne pas exclure les trafiquants des cen­tres d’hébergement ou des ap­partements? Tout simplement parce que la Fareas ne peut avoir que des soupçons. Etablir les preuves et condamner est le travail de la police et de la justice, pas celui de la Fareas. Cette distinction est d’ailleurs
clairement établie dans la loi sur l’aide aux requérants d’asile, adoptée par le Grand Conseil au printemps passé: son article 33 stipule que «l’établissement (la Fareas) as­sure la surveillance des centres d’accueil qu’il gère. (…) En cas de trouble ou de suspicion d’in­fraction pénale à l’intérieur d’un centre d’accueil ou de lo­caux qu’il met à disposition, l’établissement peut faire appel à la force publique pour cons­tater les faits et rétablir l’or­dre. » Si un requérant est con­damné, il va purger sa peine comme n’importe quel autre habitant de ce canton. Il appar­tient ensuite aux autorités compétentes de décider s’il peut rester en Suisse ou s’il doit être renvoyé dans son pays; mais si ce renvoi n’est pas exigé ou s’il n’est pas possible, la Fareas est tenue par la loi d’assister à nouveau cette per­sonne. Le Tribunal administra­tif a d’ailleurs récemment cassé une décision de la Fareas qui avait exclu d’un centre un indi­vidu qui y semait continuelle­ment le trouble. On entend aussi dire que la Fareas devrait mieux surveiller les requérants qu’elle héberge, leur imposer des heures de ren­trée et limiter leur liberté de mouvement. Dans ce domaine également, la Fareas n’a que des compétences limitées. Elle pourrait bien décider de fer­mer les portes de ses structures collectives le soir à 23 heures. Mais elle n’est pas en droit d’empêcher un requérant de sortir au-delà de cette heure, ni de punir celui qui rentrerait plus tard. Des possibilités de limiter la liberté de mouve­ment des requérants d’asile existent dans le cadre strict des mesures de contrainte. Mais celles-ci ne sont pas à disposi­tion de la Fareas: elles doivent être demandées par la police ou par la police des étrangers et sont décidées par un juge, dans des cas bien précis et limités.
La Fareas réprouve ferme­ment les trafiquants de drogue. Mais en tant qu’autorité d’as­sistance, elle doit s’en remettre à d’autres pour ce qui est de l’arrestation et de l’éloigne­ment de ces délinquants, ce qui est une bonne chose. Car si personne n’imagine la police organiser l’assistance des re­quérants d’asile, la Fareas n’a pas pour vocation d’effectuer les tâches des forces de l’ordre.

Déserteur pour ne pas devenir assassin, il sera renvoyé au Cameroun

Ex-garde du corps du président camerounais, Léo* sera expulsé. Se réfugier en Suisse pour se soustraire à un ordre d’assassinat ne répond pas aux critères de la loi sur l’asile. Explications.

SANDRINE FATTEBERT
Publié le 21 novembre 2006

DÉBOUTÉ: Léo ne veut pas entrer en clandestinité pour se soustraire à son renvoi. Pourtant, à son retour au Cameroun, il risque de devoir purger de six mois à trois ans de prison pour désertion. / OLIVIER ALLENSPACH
DÉBOUTÉ: Léo ne veut pas entrer en clandestinité pour se soustraire à son renvoi. Pourtant, à son retour au Cameroun, il risque de devoir purger de six mois à trois ans de prison pour désertion. / OLIVIER ALLENSPACH

«Si j'avais accepté de tuer ce journaliste, comme on me l'avait demandé, je ne serais pas ici», regrette Léo, 30 ans, à quelques heures de son renvoi au Cameroun. Les traits tirés et la voix douce, l'ancien militaire raconte son histoire.

Soldat de formation, il devient garde du corps du président camerounais Paul Biya qu'il accompagne lors de ses déplacements à l'étranger.

De l'armée au fromage

«J'avais la belle vie!», admet l'Yverdonnois dans un soupir. Mais tout se gâte en février 2005. Les préparatifs du séjour du chef d'Etat à La Baule terminés, une partie de l'équipe et lui sont envoyés à Lausanne. Au Palace, son capitaine lui fait miroiter la perspective d'appartenir à la grande famille des proches du président. Une adhésion qui a un coût: assassiner un journaliste radio à son retour au pays. «J'ai demandé à réfléchir. Et c'est là où j'ai eu un déclic. Un de mes collègues avait refusé de liquider le cardinal Christian Toumi et il a été retrouvé mort quelques jours plus tard.» La même nuit, il déserte pour se présenter au Centre d'enregistrement de Vallorbe.

«On m'a dit que pour s'intégrer, il fallait travailler.» Il trouve un emploi à la fromagerie Conod, à Baulmes, où il laisse le souvenir d'un travailleur consciencieux. Son transfert à Yverdon l'oblige à changer d'emploi. Il s'inscrit alors auprès d'une société de travail temporaire.

Réfugié par amour?

Digne d'un roman de politique-fiction, la version de Léo ne convainc pas l'Office des migrations (ODM). Pour celui-ci, il est invraisemblable que Léo ait reçu un tel ordre hors de son pays, soit avec la possibilité de fuir en cas de refus. De plus, Léo ne parvient pas à indiquer correctement le nom de sa prétendue victime. Quant aux causes et circonstances de la mort de son collègue, l'office fédéral estime qu'elles relèvent de la pure hypothèse.

A ses yeux, Léo a demandé asile pour retrouver une compatriote, rencontrée lors de précédents voyages en Suisse. Or, si la mise en danger de son intégrité corporelle ou une pression psychique insupportable sont des critères pris en compte par l'ODM, l'amour n'en est pas un. Sa violente altercation avec une collaboratrice de la Fareas à Yverdon n'arrange rien à son dossier.

Retour à la case départ


Aujourd'hui, Léo devrait déjà avoir quitté le territoire suisse. Au Cameroun, il risque d'écoper de six mois à trois ans de prison pour désertion. «Le fait d'avoir appartenu à la garde présidentielle démontre que Léo est issu d'une famille aisée et influente. Il dispose ainsi (…) des moyens et relations nécessaires pour se soustraire à une longue détention préventive, voire à une peine ferme», relève l'ODM sur la base des renseignements de la représentation suisse au Cameroun.

Léo, lui, dément appartenir à la classe aisée de son pays. Va-t-il choisir la clandestinité pour échapper à son renvoi? «Non. Pour moi, c'est fini. Je veux juste que les gens d'ici sachent ce qu'il m'arrive…»

* Prénom fictif.

La version de Léo est plausible

S. F.

Lazila*, à la tête d'une fondation pour enfants défavorisés au Cameroun, est proche d'un membre de la rédaction. Pour elle, la version de son compatriote Léo est plausible. «En effet, il est assez courant ici qu'un journaliste parvienne à travers ses multiples relations à intégrer la sphère politique, à la côtoyer d'assez près pour être au fait de quelque affaire douteuse. Et s'il se montre soucieux d'en informer le public, soit ce souci est «endormi» par les offres juteuses de la corruption, soit sa tête est mise à prix. Qu'il soit retrouvé mort ou qu'il disparaisse, l'affaire est très facilement démentie, étouffée et classée par les forces de l'ordre, souvent parce qu'elles sont originaires du même groupe ethnique que la haute personnalité mise en cause. Le véritable nom de Léo est typique de cette ethnie-là (Fang-Béti, Bulu plus particulièrement). D'autre part, il y a tout un réseau mafieux qui empêche et dissuade toute investigation, en particulier lorsqu'il s'agit d'affaires concernant la présidence. C'est un sujet presque tabou et la loi du silence est de mise. Mais les gens ne sont pas dupes. Ils sont seulement impuissants ou eux-mêmes corrompus par le désir de préserver leurs intérêts personnels.»

* Prénom fictif.

"Monsieur Guri Ura, l'étranger d'ici"

Dans le cadre de

INSTANTS SUSPENDUS

Images sur la condition des requérants d’asile « NEM »

Du 14 au 25 novembre 2006

Forum de l’Hôtel de Ville

Place de la Palud, Lausanne


Organisateurs :

Point d’Appui Centre socioculturel Pôle Sud

Rue César Roux 8 Av. J.-J. Mercier 3

1004 Lausanne 1003 Lausanne

021 312 49 00 021 311 50 46


Rectificatif


En lieu et place de

« Il y a de la terre partout »

pièce de théâtre de et par la Compagnie La Jorga


nous présenterons


"Monsieur Guri Ura, l'étranger d'ici"

pièce de Driton Kajtazi, interprétée par le théâtre albanais «Kurora»


« Le héros de cette comédie est Guri, un albanais du Kosovo. Dans son pays d’origine, il se sent autochtone d’ailleurs et en Suisse, étranger d’ici. Il aime son pays d’origine, mais il aime aussi son pays d’accueil où il est né et où il vit: la Suisse. « Par amour pour mon pays d’origine, Kosova, j’aime la Suisse », aime bien dire Guri.Guri Ura veut acquérir la nationalité suisse. Il doit répondre à une série de questions posées par Pierre Pont, le responsable des candidats à la naturalisation. Pierre lui pose des questions, Guri se pose des questions.


Une musique, mélange de sons de la Suisse, de Kosova et de partout, comble le silence de réflexion de cette pièce. Le public pourra aussi participer notamment à travers un questionnaire qu’un acteur distribue, mais aussi en s’impliquant à chaque fois qu’un acteur demandera son avis. Choix cornélien pour le public et Pierre…(Guri Ura se traduit en français par… Pierre Pont). Cette pièce prendra la forme d'un théâtre-forum. Il s'agit d'une discussion théâtrale publique dans laquelle sont jouées des saynètes touchant à la vie quotidienne, à des problématiques sociales, et dans le cadre desquelles les spectateurs sont invités à intervenir pour en modifier le cours, pour proposer des "chutes" alternatives, en fonction de la manière dont ils perçoivent le problème abordé et ses solutions possibles. »


Jeudi 23 novembre, 20h30

Salle du Cazard,

rue Pré-du-Marché 15, Lausanne


Entrée libre et gratuite