Le Conseil national enterre une proposition du canton d’Argovie. La majorité estime que le port du voile n’est pas un problème.
La burqa ou le niqab ne seront pas interdits en Suisse. Par 93 voix contre 87, le Conseil national a refusé vendredi de donner suite à l’initiative du canton d’Argovie prônant l’interdiction de se couvrir le visage dans les lieux publics. Le Conseil des Etats en avait déjà fait de même en 2011.
Le voile intégral n’étant pratiquement pas porté en Suisse et ne créant pas de problèmes sérieux, une intervention du législateur ne se justifie pas, ont fait valoir les deux rapporteurs de la commission, la socialiste soleuroise Bea Heim et le libéral-radical genevois Hugues Hiltpold.
Interdiction contre-productive
Une interdiction n’aurait de toute façon qu’une efficacité relative, car elle est difficile à faire respecter. Elle risquerait d’être contre-productive en poussant les femmes adeptes du voile intégral à rester chez elles, rendant leur intégration encore plus difficile.
Pour la majorité, les dispositions actuellement en vigueur suffisent à régler des situations particulières où le fait de se couvrir le visage peut être problématique, à l’école ou dans les relations avec les autorités. C’est au surplus aux cantons qu’il appartient de trouver des solutions; une réglementation uniforme serait contraire au fédéralisme.
L’UDC pour l’égalité des sexes
Certains cantons prohibent déjà la participation à une manifestation le visage masqué, mais cette réglementation a pour unique objectif le maintien de l’ordre public dans des situations particulières. L’initiative argovienne a pourtant été soutenue par une forte minorité composée des UDC, d’une bonne partie des démocrates-chrétiens et de quelques libéraux-radicaux. Pour eux, la mesure proposée répondait à l’impératif de l’égalité entre les sexes et aurait encouragé l’intégration des femmes musulmanes dans la société suisse.
Interdite en France
L’an dernier, une loi a interdit le port de la burqa en France. Le Conseil constitutionnel a validé la compatibilité de cette interdiction avec les droits fondamentaux.
Au Sénat, l’ancien ministre socialiste de la Justice et ancien président du Conseil constitutionnel Robert Badinter avait appuyé avec détermination, au nom de la dignité de la femme, cette loi proposée par un gouvernement de droite.
Denis Masmejan dans le Temps