mercredi 28 avril 2010

Un pasteur fait des avances obscènes à des requérants

Venus chercher de l’aide auprès de l’Eglise protestante vaudoise, des requérants africains ont subi des propositions déplacées d’un pasteur bénévole. Enquête exclusive signée Alain Walther dans 24 Heures.

Point d'Appui LausanneSe rendre au Point d’Appui, c’est frapper à la bonne porte, lorsqu’on est un sans-papiers débouté – soit fragile et démuni.

Il y a trois ans, dans le vestiaire de ce sanctuaire de l’Espace multiculturel des Eglises à Lausanne, des Africains adultes ont subi les avances d’un bénévole, pasteur à la retraite. Proposition de massage dans la pièce d’à côté, paroles obscènes et déplacées… Deux hommes se sont sentis humiliés par le comportement du pasteur, au point qu’ils osèrent parler et faire part de leur désarroi à Cécile Ehrensprenger. A l’époque, la directrice du foyer d’accueil pour migrants à Vennes a jugé qu’«il était de son devoir professionnel de faire part à ces personnes de leurs droits, de leur expliquer comment porter plainte».

Trois ans plus tard, alors que les deux hommes sont maintenant tous deux titulaires d’un permis, l’un d’eux a parcouru le long chemin pour faire reconnaître son humiliation. C’est gagné: une plainte pénale est sur le bureau d’un juge d’instruction lausannois. La police a d’ores et déjà entendu les plaignants. C’est là le premier pas vers la reconnaissance du statut de victime. Quant au pasteur prévenu, il a été entendu par la police mais n’est pas inculpé pour l’instant.

Avant d’en arriver à une éventuelle confrontation devant un juge, tous les protagonistes auront connu déconvenues, déceptions et désespoir. Avertis de son comportement, les supérieurs du bénévole l’obligèrent à ne plus travailler seul au vestiaire puis, de façon plus radicale, à quitter le Point d’Appui. Du côté des personnes maltraitées, il a fallu comprendre que l’avocat proposé par l’Eglise protestante avait enterré le dossier. Un autre défenseur plus déterminé vint à la rescousse et les aida à déposer une plainte pénale.

A son domicile, le pasteur attend son heure – l’heure du pardon. «Sans me contrôler, j’ai glissé sur une voie que je n’aurais pas dû prendre.» Au téléphone, il explique que les mots crus furent «prononcés sur le ton de la rigolade, qu’il n’y eut aucune contrainte de sa part». Pourtant, le prévenu se dit coupable. «L’endroit où j’ai prononcé ces mots, le vestiaire du Point d’Appui, permet à la justice d’invoquer l’abus de la détresse.»

L’abus de la détresse frappe «celui qui, profitant de la détresse où se trouve la victime ou d’un lien de dépendance fondé sur les rapports de travail ou d’un lien de dépendance de toute autre nature, aura déterminé celle-ci à commettre ou à subir un acte d’ordre sexuel». Ce délit peut être puni d’une amende jusqu’à 3 ans de prison.

Aujourd’hui, attendant la décision du juge, le pasteur espère encore en la réunion que n’a jamais organisée le Conseil synodal. «J’aimerais rencontrer les victimes pour leur demander pardon. Pardon de les avoir atteintes dans leur dignité .»

L’UDC ne veut pas de réfugiés près de l’école

Le centre de requérants prévu à l’Esp’Asse est sur le chemin des écoliers. L’UDC demande à la Municipalité de chercher une autre solution d’accueil.

André Francis Cattin, président de l’UDC nyonnaise, s’est élevé avec vigueur, lundi au Conseil communal, contre le projet de créer un centre de requérants d’asile à l’Esp’Asse. Dans son interpellation, le conseiller s’est indigné du choix de ce site, trop proche de l’Ecole du Rocher. «Il n’est pas logique que le cercle d’activité des requérants (ndlr: sous-entendu une infime minorité qui se livre au trafic de drogue) se confonde avec celui des écoliers», a-t-il estimé. Il a demandé à la Municipalité de dénoncer l’accord conclu avec l’EVAM et la Fondation de l’Esp’Asse pour rechercher un autre lieu d’hébergement, hors agglomération.

Ses propos, attribuant dans la foulée aux requérants hébergés en abri PCi des cambriolages d’un kiosque de quartier, ont provoqué un tir croisé de la gauche contre cette stigmatisation aux relents racistes. «Il ne faut pas se tromper de cible, qui est le trafic de drogue. Il faut agir pour ne pas faire le lit des partis populistes», a estimé le conseiller indépendant Jacky Colomb.

L’Arizona à l’assaut des clandestins

Des associations de défense des droits de l’homme dénoncent une récente loi qui favorise le contrôle de papiers au faciès. L’Etat compte quelque 460 000 immigrés clandestins. Un article de Luis Lema dans le Temps.

Fin mars dernier, le corps de Robert Krentz était trouvé dans le sable du désert, près de sa voiture. Propriétaire d’un énorme ranch de 14 000 hectares au sud de l’Arizona, l’homme portait un revolver à la ceinture qu’il n’avait pas utilisé. Quelques jours plus tôt, comme il le faisait souvent, il avait alerté une «Border patrol» sur la présence d’illégaux mexicains et d’un possible trafic de drogue. Mais le «rancher» était aussi connu pour venir parfois en aide aux immigrants assoiffés et désespérés qui traversaient ses terres en direction du nord. Les derniers mots qu’avait entendus son frère juste avant la mort de Krentz, énoncés de la radio de son véhicule, étaient ceux-ci: Illegal alien.

La mort de Robert Krentz, dont les aïeuls avaient fondé le ranch au début du siècle dernier, a été l’épisode de trop pour les habitants de l’Arizona, un Etat qui sert de principal couloir de passage aux clandestins mexicains. Ils ont saisi leurs élus qui, à leur tour, ont élaboré une loi divisant aujourd’hui profondément les Etats-Unis. Désormais, la police locale aura le droit de contrôler les papiers de n’importe quel individu soupçonné d’être un clandestin, même s’il n’a pas commis d’autre délit. Les contrevenants risquent 6 mois de prison et des milliers de dollars d’amende. La loi, que vient d’approuver la gouverneure républicaine de l’Etat, Jan Brewer, a fait bondir les associations de défense des droits civiques, et les communautés hispaniques du pays. L’Arizona compterait quelque 460 000 immigrés clandestins, qui sont pratiquement tous Mexicains. Elle est, selon ses détracteurs, une invitation au ­racial profiling, le contrôle au faciès.

Etat «raciste»

En quelques jours, le débat s’est envenimé. Devant le Congrès de Phoenix, des manifestants ont dessiné sur le sol des croix gammées avec des haricots, symbole des paysans mexicains. D’autres crient à «l’apartheid». Le maire de Phoenix lui-même, le démocrate Phil Gordon, s’en est pris vivement à cette mesure qui, selon lui, risque d’envoyer en prison «les enfants et les retraités» qui ne disposent pas d’un permis de conduire (la plupart des Américains n’ont pas d’autre document d’identification). En Californie voisine, certains responsables appellent au boycott de cet Etat «raciste».

Face à cette avalanche de critiques, la gouverneure ne s’en laisse pas conter. Loin de croire aux menaces de boycott, elle se réjouit d’offrir aux futurs entrepreneurs un Etat «plus sûr». En une année, dit-elle, elle a envoyé cinq lettres à l’administration Obama pour qu’elle se penche sur ce problème. L’immigration est certes une matière qui tombe sous la compétence des autorités fédérales. Mais, depuis le meurtre de Robert Krentz, la presse locale détaille sur de pleines pages les «nuisances» très locales que provoquerait l’afflux de clandestins: meurtres, vols de voitures, drogue, kidnappings. A quoi s’ajoutent, note encore Loyd Eskildson, un professeur retraité qui se définit lui-même comme «un fier porteur du drapeau américain»: «Les pertes d’emplois pour les natifs américains, les écoles bondées, la perte de valeur des maisons «surhabitées», le bruit, les déchets et les coûts exorbitants des soins de santé.» «Ces illégaux ne sont plus intéressés par l’assimilation. Il n’est plus possible de fermer un œil et d’ignorer ces problèmes en Arizona.»

Réforme attendue

De fait, Barack Obama a décidé d’entrer de plain-pied dans la polémique en qualifiant la législation de l’Arizona de «malencontreuse» et en demandant au Département de la justice de vérifier qu’elle est conforme à la Constitution. Le président s’est, semble-t-il, résolu à lancer une réforme globale du système d’immigration dont on ne connaît pas encore les contours, mais qui pourrait passer par la légalisation d’une partie des 12 millions d’illégaux que compte le pays. Il est vrai que, jusqu’ici, les Latinos ont été déçus par le peu d’empressement de l’administration d’empoigner cette réforme. Or, les élections approchent, et le vote hispanique est primordial pour les démocrates…

Mexique: Amnesty dénonce les crimes contres les clandestins

Amnesty International a dénoncé mercredi l'indifférence, voire la responsabilité de représentants des autorités du Mexique face aux "enlèvements, viols et meurtres" dont sont victimes les clandestins dans le pays.

"Les autorités mexicaines doivent agir pour stopper les sévices dont sont continuellement victimes les émigrants, proies de bandes criminelles tandis que les représentants de l'autorité ferment les yeux ou jouent même un rôle actif dans les enlèvements, viols et meurtres", dans un rapport publié à Londres, où siège l'organisation de défense des droits de l'homme, et reçu à Mexico.

Quelque 500.000 "clandestins", presque tous venus d'Amérique centrale, tentent chaque année la traversée du Mexique pour aller chercher du travail aux Etats-Unis. Ce voyage est devenu "l'un des les plus dangereux au monde", affirme le rapport signé par Rupert Knox, spécialiste du Mexique à Amnesty.

Les enlèvements contre une rançon, demandée à la famille restée au pays, ont atteint "des records en 2009", ajoute Amnesty en citant la Commission nationale mexicaine des droits de l'Homme (CNDH): "près de 10.000 victimes en six mois, dont près de la moitié affirment que des fonctionnaires étaient compromis".

"Six femmes ou jeunes filles sur dix dénoncent des viols, et la rumeur raconte que certains passeurs demandent que les émigrantes reçoivent des piqûres anticonceptionnelles avant leur voyage", selon Amnesty.

Le rapport cite le témoignage de "Veronica" (prénom modifié par Amnesty), qui voyageait le 23 janvier dernier avec plus de 100 clandestins à bord d'un train de marchandises stoppé par la police fédérale dans l'Etat du Chiapas (sud, à la frontière du Guatemala).

Les policiers ont obligé les clandestins à descendre et à s'allonger sur le ventre, leur ont dérobé leurs bagages et ont menacé de les tuer s'ils ne continuaient pas leur route à pied, le long de la voie, a-t-elle affirmé.

Après des heures de marche, le groupe a été attaqué par des hommes armés, Veronica a été violée et un de ses compagnons au moins a été tué, a-t-elle ajouté.

Deux suspects ont été arrêtés, mais la police fédérale n'a pas été inquiétée, bien que les victimes aient indentifié deux de ses agents, souligne Amnesty.

Amnesty "recommande" au Mexique de s'attaquer à cette "crise des droits de l'Homme" par "des réformes législatives garantissant l'accès à la justice, l'établissement d'une commission fédérale spéciale" et "la publication des cas de mauvais traitements et des actions entreprises contre les responsables, y compris les représentants des autorités".

Le Mexique a lui aussi ses émigrés, 12 millions aux Etats-Unis dont la moitié de clandestins, et son gouvernement s'est élevé ces derniers jours contre une loi d'immigration particulièrement sévère adoptée en Arizona, à la frontière entre les deux pays.

La loi, signée le 23 avril par la gouverneure républicaine Jan Brewer, autorise les policiers à arrêter des étrangers en cas de "doute raisonnable" sur la légalité de leur entrée aux Etats-Unis, même en l'absence d'un autre délit présumé.

Le Mexique "utilisera tous les moyens à sa portée" pour défendre ses émigrants contre cette loi qui "porte atteinte aux droits de l'Homme", avait déclaré mardi le président mexicain Felipe Calderon.

AFP