mercredi 12 septembre 2012

La désertion ne sera plus un motif pour obtenir l'asile

La désertion ne sera plus reconnue comme motif d'asile en Suisse. Cette disposition du Conseil des Etats, qui frappe surtout les Erythréens, devrait entrer en vigueur fin septembre.

Par 25 voix contre 20, le Conseil des Etats s'est rallié mercredi au Conseil national dans la révision de la loi sur l'asile. Une disposition qui vise surtout les Erythréens devrait entrer en vigueur à la fin de la session. Une minorité composée de la gauche et de quelques sénateurs bourgeois a jugé que la non-reconnaissance de la désertion pour l'octroi de l'asile ne répond pas aux critères prévus par la constitution pour déclarer une mesure urgente.

Une mise en vigueur immédiate bafoue les droits populaires: le lancement d'un référendum ne peut avoir lieu qu'a posteriori, alors que la disposition est déjà appliquée. Il ne faut y avoir recours qu'en cas de nécessité absolue, ont fait valoir plusieurs sénateurs. A coup de durcissements de la politique d'asile, la Suisse se trouve de plus en plus aux limites du droit, a dénoncé Anne Seydoux (PDC/JU). Mais la majorité de droite n'a pas eu cure des réticences exprimées.

Abus dénoncés

Au vu des 30'000 demandes d'asile qui risquent d'être déposées en Suisse cette année, il faut agir sans délai, ont exigé plusieurs orateurs de droite. Trop de personnes abusent du système d'asile, selon This Jenny (UDC/GL). Le but de la Suisse est d'offrir l'asile aux personnes qui le méritent vraiment, a renchéri Simonetta Sommaruga. Pour y parvenir, il faut accélérer les procédures et lutter systématiquement contre les abus, d'après la conseillère fédérale. L'entrée en matière sur ce volet de la révision de l'asile, contestée par les Verts, a été acceptée par 34 voix contre 9. Même à gauche, certains ont considéré que certaines mesures méritaient d'être discutées.

Centres spéciaux

La Chambre des cantons va maintenant examiner d'autres mesures urgentes, moins contestées. Il s'agit de la suppression de la possibilité de déposer des demandes d'asile dans les ambassades. Autre mesure immédiate, la possibilité, pour la Confédération, de créer des centres spécifiques pour les requérants récalcitrants. L'Office fédéral des migrations ne veut pas encore dire où ils seront situés. D'après plusieurs voix, le Tessin pourrait en accueillir un à titre d'essai.

Les autorités fédérales pourront aussi changer l'affectation de constructions - généralement des bâtiments militaires - en vue d'héberger des demandeurs d'asile, sans devoir demander une autorisation. Enfin, le Conseil fédéral devrait pouvoir s'écarter sans délai du droit en vigueur lorsqu'il veut tester de nouvelles procédures. La validité d'une loi urgente est limitée. La commission préparatoire propose au plénum de porter à trois ans la durée des mesures urgentes. Le National a quant à lui opté pour deux ans.

ATS, Newsnet et le Matin

«La Suisse ne doit pas couper l'aide sociale à tous les requérants»

Contrairement au National, le Conseil des Etats a refusé de supprimer l'aide sociale aux requérants d'asile. Pour la majorité, les demandeurs d'asile qui se comportent correctement doivent continuer d'être aidés.

La Suisse ne doit pas couper l'aide sociale à tous les requérants d'asile. Par 33 voix contre 9, le Conseil des Etats a refusé mercredi d'emboîter le pas au National dans la révision de la loi sur l'asile. Mais d'autres durcissements ont été entérinés sans trop d'états d'âme. Le Conseil national a créé des remous cet été en décidant de n'attribuer à l'avenir que l'aide d'urgence - soit quelque 8 francs par jour - aux requérants. Au Conseil des Etats, seule une minorité emmenée par This Jenny (UDC/GL) a plaidé pour cette mesure censée réduire l'attrait de la Suisse. Aux yeux de la majorité, ce pas, excessif, risque d'entraîner plus de problèmes qu'il n'en résout. La Chambre des cantons a préféré la voie du compromis. Ainsi, les demandeurs d'asile qui se comportent correctement doivent continuer de toucher l'aide sociale.

En revanche, ceux qui ont commis des actes délictueux ou triché dans les procédures doivent être pénalisés par une réduction ou une suppression des moyens qui leurs sont attribués. Cette possibilité existe déjà, mais dans une formulation non contraignante. A l'avenir, la sanction pécuniaire deviendra obligatoire pour tous ceux qui se comportent mal.

Moins d'argent

Pour couper court aux critiques de la population, le conseil a précisé dans la loi que l'aide sociale accordée aux requérants «est inférieure» à celle attribuée aux résidents suisses. Même si dans les faits, cette contribution est déjà en moyenne 30% plus basse. Pour le reste, la révision vise surtout à accélérer les procédures et à limiter le nombre de demandes. Le Conseil des Etats s'est largement aligné sur le National. Les recours deviendront plus difficiles avec des délais de traitement raccourcis.

Mesures urgentes

La désertion ne sera plus reconnue comme motif d'asile, probablement dès fin septembre. Par 25 voix contre 20, le Conseil des Etats a déclaré cette mesure, qui frappera surtout les Erythréens, urgente. Les personnes subissant des mauvais traitements pour avoir déserté continueront d'être accueillies en Suisse, a averti la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga. Comme au National, d'autres dispositions ont été décrétées urgentes, malgré l'opposition d'une minorité qui a dénoncé cette atteinte à la démocratie. La mise en vigueur immédiate implique que le lancement d'un référendum ne peut avoir lieu qu'a posteriori, alors que les dispositions sont déjà appliquées. Mais la majorité de droite a considéré qu'il était nécessaire d'agir sans délai, au vu de l'avalanche de demandes d'asile qui s'abat sur la Suisse. Elle a aussi porté à trois ans la validité du volet urgent, alors que le National a opté pour deux ans.

Centres pour récalcitrants

La possibilité de déposer des demandes d'asile dans les ambassades a été supprimée. Autre mesure immédiate, la Confédération pourra créer des centres spécifiques pour les requérants récalcitrants. «Malgré l'urgence, on ne pourra pas ouvrir un centre tout de suite; nous devons encore trouver le canton et la commune qui auront le courage de l'accueillir», a averti la ministre de la justice. Le Tessin pourrait se mettre sur les rangs pour un essai. Les autorités fédérales pourront aussi changer l'affectation de constructions - généralement militaires - en vue d'héberger des requérants, sans devoir demander une autorisation. Enfin, le Conseil fédéral pourra s'écarter temporairement du droit en vigueur lorsqu'il veut tester de nouvelles procédures.

Familles

L'asile familial a été limité. Un réfugié reconnu ne pourra continuer à obtenir ce statut que pour son conjoint et ses enfants mineurs. Les autres parents proches n'en bénéficieront plus, à moins d'être considérés comme des cas de rigueur. La question du droit au permis de séjour ou au regroupement familial pour les personnes admises provisoirement doit encore être abordée. Les délibérations reprendront ultérieurement.

ATS et Le Matin