vendredi 6 août 2010

L’Hospice optimise ses foyers pour requérants

L’institution souhaite fermer les abris PC où sont logés les réfugiés frappés d’une non-entrée en matière. D’où un important besoin de places. Un article de Chloé Dethurens dans la Tribune de Genève.

© V. Villemin | L’abri PC de Châtelaine.

Une centaine de places supplémentaires au moins pour loger les requérants d’asile. Voilà ce dont aurait besoin l’Hospice général, à court terme, pour avoir enfin un peu de marge. Pour y parvenir, plusieurs projets sont en cours afin d’optimiser l’espace dans les différents foyers et créer de nouvelles chambres.

Objectif: fermer l’abri de protection civile où sont actuellement logés environ quatre-vingts requérants frappés d’une non-entrée en matière – baptisés Nems – obligés, à terme, de retourner dans leur pays.

Actuellement, bien que l’afflux de réfugiés soit relativement stable, les centres d’accueil de l’Hospice général sont pleins. Si pleins que l’institution se voit dans l’obligation de loger les Nems dans l’abri PC de Châtelaine depuis mars 2009. Une solution d’urgence loin d’être idéale, que l’Hospice souhaite supprimer dès qu’une alternative sera trouvée. «Nous sommes de plus en train de perdre de nombreux appartements que nous louons à des particuliers qui souhaitent aujourd’hui les récupérer, explique Bruno Righetti, responsable du service hébergement de l’Hospice. Nous avons perdu 10% de ces logements l’an passé. Il nous en reste 650.»

Aujourd’hui, l’heure est donc à la prospection de nouvelles places et, dans l’attente de la création d’un autre centre, à l’optimisation de l’espace dans les foyers existants grâce à de petits aménagements.

Soixante places à la Praille

A l’avenue de la Praille, l’actuel foyer pour requérants est l’un de ceux s’apprêtant à subir un réaménagement. Soixante places vont être créées au rez-de-chaussée. Un grand espace bénéficiant de la lumière naturelle, auparavant dédié au stockage de matériel, sera transformé en dortoirs supplémentaires «qui pourront servir de lieu d’accueil et permettront de faire face à des arrivées soudaines de personnes requérantes», explique Balthasar Staehelin, directeur de l’Aide aux requérants d’asile.

Le foyer des Tattes, à Vernier, va lui aussi subir quelques transformations. Plusieurs bureaux seront transformés en chambres. «Nous allons réduire au maximum l’espace administratif, poursuit Bruno Righetti. Nous allons déménager les employés qui ne sont pas obligés de travailler sur place. Cela nous permettra de libérer deux étages où des chambres seront aménagées.»

Anticiper

Dans les autres foyers, quelques retouches ont été ou vont également être réalisées, toujours afin de libérer de l’espace. De légers aménagements – optimisation de buanderies ou encore déménagement de bureaux – qui permettront de loger quelques personnes de plus. «Notre objectif est d’avoir un peu plus de marge, car les choses vont très vite dans ce domaine, ajoute Bruno Righetti. Il suffit qu’une crise survienne quelque part pour que l’afflux de personnes reprenne. Nous devons donc toujours être proactifs et anticiper.»

Autre projet en cours: la destruction et le remplacement des pavillons provisoires destinés aux requérants d’asile, situés à Mategnin. «Ceux-ci ont une durée de vie d’environ cinq ans et ont été construits il y a presque dix ans. Ils sont en mauvais état et doivent être changés», poursuit Balthasar Staehelin. Les nouveaux pavillons, plus résistants, seront eux aussi provisoires.

En prison pour avoir refusé son expulsion vers l’Angola

Pour s’être opposée par deux fois en dix jours à une expulsion par avion, une Angolaise de 25 ans, sans-papiers, a passé sa première nuit en prison où elle a été placée en détention provisoire ce jeudi 5 août. Un article de Simon Castel sur LyonCapitale.fr

Le tribunal correctionnel de Lyon a fait preuve de fermeté en plaçant Sonia (prénom d’emprunt) en détention provisoire en attente de son procès pour refus d’embarquement. L’avocat et la famille de Sonia qui mettent pourtant en avant tout le danger que représenterait un retour en Angola pour la jeune femme, restent dans l’incompréhension. Selon eux, elle a toutes les raisons de prétendre au statut de réfugié politique qui lui a été refusé.

A deux reprises, Sonia est parvenue à échapper à son expulsion par avion. Elle risque aujourd’hui trois mois de prison fermes pour refus d’embarquement. La dernière condamnation marquante dans la région est celle de Guilherme Hauka Azanga, également Angolais, dont le refus d’embarquement s’était traduit par deux mois fermes, l’année dernière.

Une deuxième expulsion évitée

Suite à son arrestation le 23 juillet, Sonia est placée au centre de rétention administrative (CRA) de Saint-Exupéry en attente de son expulsion. Le jour de l’embarquement à bord de l’avion qui doit la reconduire à Luanda, la jeune femme se débat corps et âme, tant et si bien que la police est contrainte de faire machine arrière pour éviter le scandale. La scène se passe le 26 juillet dernier. Le séjour de Sonia au Centre de rétention est donc prolongé jusqu’au 4 août où un deuxième vol en direction de Paris, puis de Luanda est prévu.

Le jour J, le mercredi 4 août, la famille et quelques associatifs sont présents à l’aéroport Lyon Saint-Exupéry, deux heures avant le départ, pour expliquer la situation aux passagers et leur demander de refuser d’embarquer avec l’expulsée. "La police a voulu l’expulser en catimini mais elle nous a repéré et a vite compris qu’il n’était pas possible de la menotter et de l’embarquer de force. Les policiers sont venus m’intimider en me demandant mes papiers mais je suis resté catégorique. Ils ont finalement abandonné l’embarquement à bord de l’avion en descendant de la voiture de police ", raconte le père, réfugié politique en France depuis 10 ans. Quant à savoir les raisons précises de cette deuxième annulation, présence des soutiens, résistance de Sonia ou colère des passagers, personne ne le sait.

Sonia est alors placée en garde à vue pour refus d’embarquement, elle comparait le lendemain, jeudi 5 août. Redoutant d’être contrainte de quitter le territoire pour de bon, la jeune femme refuse la comparution immédiate. Suivant la demande de la procureure, le juge la place en détention provisoire pour s’assurer de sa présence lors de l’audience programmée le 9 septembre. Mais la persévérance de Sonia est justifiée par son père qui nous avoue qu’il “craint pour sa vie en Angola ". "Elle n'a rien fait d'autre que tenter de sauver sa vie en refusant d'embarquer vers un pays où ses jours sont en danger , résume Danielle de RESF qui a suivi ce dossier, je suis choquée qu’on la jette en prison ”.

Menacée physiquement dans son pays

Sonia arrive en France en 2007 avec un visa de touriste. Elle a pour projet de vivre avec son père et sa mère, installés dans la région lyonnaise depuis 1999. Tout comme ses parents dix ans auparavant, elle fuit “les persécutions des autorités angolaises”  qui recherchent son père, membre du parti d’opposition Unita (Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola), ignorant que ce dernier s’est réfugié avec sa femme en France où ils ont obtenu l’asile politique.

"Ils ont déployé tous les moyens pour me retrouver. Ils persécutent les membres de ma famille restés là-bas ", nous déclare le père qui a connu la torture en Angola. Il est toujours sans nouvelle d’une autre de ses filles après qu’elle se soit fait arrêter à l’aéroport de Luanda en février 2008. Quant à Sonia, Philippe Praliaud, son avocat fait part à la barre des viols et intimidations qu’elle a déjà subi en Angola. La procureure, de son côté, ne cache pas qu’elle comprend "cette volonté viscérale de ne pas quitter le territoire français" , motivant ainsi sa crainte que Sonia n’échappe à la justice.

Asile refusé

"On arrive en bout de course. Elle est en danger. Et pourtant, elle a vu toutes ses demandes  (de régularisation, NDLR) rejetées ", tel est le constat de la procureure. Son avocat rappelle que les demandes d’asile ont effectivement été refusées par la préfecture. Il se demande par ailleurs pourquoi l’administration considère que le fait que ses parents soient menacés en Angola et bénéficient donc du statut de réfugiés ne suffise pas à octroyer ce même statut à Sonia.