jeudi 25 juin 2009

Les sans-papiers expulsés campent sur le trottoir

«Maintenant, ce sera les CRS ou les papiers»

Evacués de force mercredi de la Bourse du travail à Paris par la CGT qui voulait récupérer ses locaux, 200 travailleurs en situation irrégulière campent sur le trottoir.

CORDÉLIA BONAL

Jeudi devant la Bourse du travail, dans le IIIe arrondissement à Paris.

Jeudi devant la Bourse du travail, dans le IIIe arrondissement à Paris. (CB)

Un semblant de calme est revenu autour de la Bourse du travail ce jeudi à Paris, après la violente évacuation la veille des occupants par le service d'ordre de la CGT. Les sans-papiers délogés, au nombre de 200 environ, ont passé la nuit sur le bout de trottoir où ils ont échoué avec matelas et couvertures, et ne comptent pas en bouger pour le moment.

Ce matin, personne n'est parti travailler, tous s'en tiennent au mot d'ordre: ne pas bouger tant que les demandes de régularisations déposées par le collectif (750 dossiers déposés à ce jour à la préfecture, 1200 au ministère) n'avanceront pas. En attendant, on s'organise, sous l'œil de quelques policiers. Des chaises, réchauds, radios ont rejoints le fatras de sacs et matelas. Voisins et associations passent discuter, dire leur colère, distribuer pain et bouteilles d'eau. Sur le trottoir d'en face, quelques cafetiers ouvrent l'accès à leurs toilettes.

Travailleurs isolés en situation irrégulière, originaires d'Afrique pour la grande majorité, les occupants avaient investi il y a 14 mois la Bourse du travail, bâtiment appartenant à la ville de Paris mais géré par plusieurs syndicats, dont la CGT. L'occupation avait été décidée après le refus par la préfecture de police de Paris de recevoir 1.000 dossiers que le collectif, la CSP 75 (coordination de sans-papiers) voulait voir traiter, la préfecture renvoyant vers la CGT.

«Bandits»

«On est en France depuis des années, on travaille, on cotise, nos grands-parents se sont battus pour la France», énumère Keita, intérimaire dans le bâtiment grâce à de faux papiers, comme beaucoup ici. «Alors on ne bougera pas de ce trottoir. Maintenant, ce sera les CRS ou les papiers.»

Depuis hier, les deux accès au bâtiment sont bloqués: grilles baissées côté boulevard, porte close côté rue, qui s'ouvre de temps à autre pour laisser passer une poignée de responsables syndicaux venus reprendre possession des locaux. Entre le collectif de sans-papiers et les membres de la CGT, on évite soigneusement tout contact.

«La CGT ? C'est des bandits!», s'insurge Keita. Même colère chez Anzoumane Sissoko, délégué du collectif, la CSP 75: «Nous ne voulons plus avoir affaire à eux. Après ce qu'ils nous ont fait hier, venir comme ça nous taper et nous asperger de gaz lacrymogène, ça suffit comme ça.» Au lendemain de l'évacuation, Sissoko compte les absents: «six blessés» et «quatre interpellés». Chiffres qui n'ont pas été confirmés ce jeudi par la préfecture.

«Violence injustifiable»

Après l'épisode violent de la veille, associations et partis ont condamné, plus ou moins fermement, la décision de la CGT, syndicat qui se pose par ailleurs régulièrement en intermédiaire pour le dépôt de dossiers de régularisations de travailleurs. Pour France Terre d'asile, «la CGT, avec cette intervention, qu’elle l’ait souhaité ou non, indique clairement qu’elle change de logiciel en se recentrant sur sa "clientèle" habituelle. Nous devons veiller collectivement (...) à ne pas laisser la division et le rejet de l’autre se propager».

Le Conseil représentatif des associations noires de France (Cran) «dénonce la brutalité de la CGT et demande au gouvernement des actions concrètes pour faciliter une sortie de crise de manière plus humaine», tandis que les Verts s'élèvent contre une «violence injustifiable».

Droit au logement, qui s'était «désolidarisé de l'occupation de la Bourse par les sans papiers motivée par des considérations peu crédibles», dénonce néanmoins la méthode, «expéditive».

Pour un an de prison ce sera l'exil

Malte en appelle à l'ONU

L’illusion sécuritaire

Pour les nationalistes, les lois sur l’asile et sur les étrangers ne seront jamais assez sévères ni assez punitives

Pour les nationalistes, les lois sur l’asile et sur les étrangers ne seront jamais assez sévères ni assez punitives. Depuis vingt ans, l’UDC prend rituellement pour cible les requérants d’asile et, plus largement, les étrangers. Ce pilonnage a lourdement conditionné la politique suisse. Certes, aucune des initiatives lancées par l’UDC n’a trouvé de majorité populaire. En revanche, la pression ainsi exercée a contaminé le gouvernement et le parlement, qui ont donné plusieurs tours de vis aux lois existantes. Ce durcissement constant des conditions d’accueil et des procédures finit par paraître raisonnable par contraste avec les projets extrêmes de l’UDC. Il rassure une opinion publique méfiante et sensible aux abus réels ou supposés commis par une minorité des étrangers.

Pourtant, sur le terrain de l’immigration non désirée, peu de choses ont changé. Les tours de vis successifs sont vécus par les administrations comme l’expression d’une impuissance à maîtriser un problème complexe qui ne se résume pas à l’enjeu des abus.

Il n’en ira pas différemment avec les nouveaux projets visant le renvoi des «étrangers criminels». Quelques faits divers choquants ont amené l’UDC à sortir l’artillerie lourde, bien que l’expulsion des étrangers délinquants soit déjà possible et pratiquée. Il est juste que la règle du renvoi s’applique très diversement sur le territoire helvétique, fédéralisme oblige. Le gouvernement s’engouffre dans la brèche. Il propose un tour de vis et demi là où l’UDC en réclame deux. Son contre-projet reprend largement les mesures préconisées par l’UDC, tout en veillant à dresser deux ou trois garde-fous. Scénario classique.

Les étrangers sont avertis: le respect de l’Etat de droit est une condition pour vivre en Suisse; aucun écart grave ne sera pardonné. Bien, mais quid du service après-vente? La majorité des renvois souhaités seront impraticables, comme c’est déjà le cas aujourd’hui. On s’agite beaucoup pour faire croire que le pays deviendra plus sûr, mais la réalité se chargera de calmer les esprits.

Le tour de vis du Conseil fédéral


(DR)

(DR)

La presse helvétique commente la réponse du gouvernement à l’initiative de l’UDC sur le renvoi des délinquants étrangers

Pour le gouvernement, les étrangers qui commettent un délit grave passible d’une peine d’un an de prison au moins doivent être renvoyés. «Le Conseil fédéral a en effet décidé de durcir le ton», explique 24 Heures. «On se rappelle qu’une initiative des démocrates du centre demandant leur expulsion automatique avait recueilli 210’000 signatures. Le gouvernement avait alors proposé un contre-projet prévoyant le renvoi des étrangers condamnés à plus de deux ans de prison. La procédure de consultation a [donc] révélé une véritable volonté de serrer la vis.»

Ce que le quotidien vaudois interprète ainsi: «La pression de l’UDC a marché. Du moins pour l’instant.» Et de constater que «le message est très clair: le gouvernement agit» et «essaie de couper l’herbe sous les pieds de l’UDC». Mais sur le terrain? «Les exécutions de renvois s’avèrent […] très compliquées et les cantons, chargés de cette mission, en savent quelque chose.» 24 Heures énumère les obstacles dans son éditorial: la nécessité de connaître la nationalité, le comportement du pays d’origine, les accords de réadmission, le prix des vols spéciaux de rapatriement, pour en conclure qu’«au final, le gouvernement peut bien hausser le ton. Dans de nombreux cas, sa voix ne portera pas bien loin.»

Pourtant, «cela ne suffit pas au parti agrarien», écrit Le Nouvelliste. Même si, «conscient de l’écho que suscite cette discussion au sein de l’opinion publique, [le Conseil fédéral] a […] durci son projet initial». Si Eveline Widmer-Schlumpf dit que la solution «est un catalogue de fait, puisque toutes les infractions entraînant plus d’un an de prison figurent dans le Code pénal, les autorités conserveront cependant une marge d’appréciation», relève le quotidien valaisan. Et c’est précisément là que le bât blesse: pour l’UDC, ce contre-projet est «un exercice alibi qui ne changera guère la pratique actuelle».

Le Conseil fédéral veut «dribbler l’UDC», titre pour sa part Le Courrier. Le quotidien de gauche genevois résume: «Pour un an de prison, ce sera l’exil». Samedi dernier, il écrivait déjà, en élargissant le propos au droit d’asile et à la vision que la Confédération a de la problématique des étrangers en Suisse, qu’en janvier 2009, «un an jour pour jour après l’entrée en vigueur du énième durcissement de la loi sur l’asile, la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf communiquait son intention de donner un tour de vis supplémentaire. L’objectif était clairement énoncé: il s’agit de «diminuer l’attractivité» du pays, point final. Cette révision en préparation n’aura bien entendu aucune incidence sur les flux migratoires en direction de notre pays. Ses effets devraient en revanche pénaliser des catégories de réfugiés qui auraient le plus besoin d’une protection, selon les spécialistes. Comme les réformes précédentes, elle ne fera donc que grossir les rangs des recalés de l’asile, ces laissés-pour-compte contraints de survivre avec, au mieux, quelques francs par jour dans l’un des Etats les plus opulents de la planète.»

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La CGT expulse les sans-papiers!

24/06/2009 à 17h27 (mise à jour à 18h31)

«Ils sont rentrés et ont balancé les lacrymo»

http://www.liberation.fr/societe/06011055-descente-cgt-sans-papiers

REPORTAGE + VIDÉO

La CGT évacue des sans-papiers par la force
http://www.dailymotion.com/video/x9ob88_la-cgt-evacue-des-sanspapiers-par-l_news

Un commando de gros-bras a délogé ce mercredi les travailleurs sans-papiers de la Bourse du travail, à Paris, à coups de gaz lacrymo. Des CRS ? Non, la CGT.

Matelas sous le bras, sacs et couvertures à la main, ils sont sortis un à un, sous le regard des CRS. Sur le trottoir, bordé par des dizaines de fourgons de police et de cars de CRS, des femmes pleurent, en état de choc.

Après 14 mois passés à vivre jour et nuit dans les locaux de la Bourse du travail à Paris, les occupants de ce grand bâtiment situé à deux pas de la place de la République se sont retrouvés à la rue ce midi, évacués de force.

Africains en situation irrégulière, ils étaient autour de 400 à 500 à y vivre en permanence et près de 1200 à y venir par intermittence. Qui a mené l'évacuation ? La situation était d'abord confuse, cet après-midi. Tandis que nombre de témoins accusaient la police, les sans-papiers évacués désignaient la CGT, qui aurait envoyé son service d'ordre faire le sale boulot.

Scénario que le syndicat a fini par reconnaître quelques heures plus tard: «Après avoir essayé en vain de négocier pendant des mois, nous avons décidé de mettre un terme à une occupation qui était devenue un squatt (...) et ce sans faire appel aux forces de l'ordre», justifie Patrick Picard, secrétaire général de l’Union départementale de Paris.

Pourquoi un syndicat qui monte régulièrement au créneau sur la question des travailleurs sans-papiers a-t-il délogé... des travailleurs sans-papiers ? La CGT, qui dispose du bâtiment, en co-gestion avec la CFDT, FO, la CFE-CGC, l'Unsa et Solidaires, voulait d'abord récupérer son lieu de travail. Ensuite, le syndicat entretient depuis le début des relations tendues avec ces sans-papiers, pour la plupart travailleurs isolés, employés dans le nettoyage ou la sécurité, qui se sont rassemblés dans un collectif autonome, la CSP 75 (coordination des sans-papiers), sans jamais vouloir se rapprocher de la CGT pour les demandes de régularisation.

«Bonbonnes de lacrymo»

Après plusieurs semaines de menaces, la CGT a donc envoyé ce matin «quelques dizaines de militants», qui n'ont pas fait les choses à moitié. Les témoins — occupants, passants ou commerçants — décrivent tous la même scène, très brutale: vers 12h30, alors que le gros des occupants était, comme chaque mercredi, parti manifester place du Châtelet pour réclamer des régularisations, une trentaine de gros bras «au crâne rasé», brassard orange au bras, ont débarqué armés de «bâtons» et de «bonbonnes de lacrymo», le visage protégé par des masques et des «lunettes de piscine».

«Ils ont remonté la rue en rang, arrivés à la porte de la Bourse du travail ils ont crié "On y va! on y va!", ils sont rentrés dans le bâtiment et ont balancé les lacrymo», raconte Nicolas qui remontait la rue à ce moment là et a appelé la police, comme d'autres. Une jeune fille, Nadia, dit aussi avoir vu «une vraie milice. Leurs bâtons, c'étaient des planches». D'autres parlent de «commando», de «chaises qui volaient», montrent les vitres cassées.

Sous le choc, Konté, un occupant qui ce matin n'était pas parti à la manifestation, justement pour garder le bâtiment, raconte: «Ils savaient qu'on est peu nombreux le mercredi. On était dans la cour quand ils sont arrivés, ils nous ont lancé tellement de gaz qu'on a dû sortir, on n'a pas eu le choix.» La police est arrivée «dix minutes plus tard» mais sans rentrer dans le bâtiment, faute, explique-t-on, de réquisition du propriétaire, en l'occurrence la mairie de Paris. Les policiers seront rejoints par les CRS, tandis que les pompiers évacuent plusieurs blessés légers.

«Milice»

Sur le boulevard, les passant s'échauffent: «ratonnade», «nettoyage», «Sarkozy assassin»... Certains jurent reconnaître parmi les policiers en civil présents les mêmes qui ont forcé le bâtiment une demi-heure plus tôt. Deux jeunes filles affirment que des policiers en civil étaient déjà là quand la «milice» a débarqué et se parlaient entre eux avec leur talkie. Bientôt la rumeur court: ce serait la police qui aurait mené une opération coup de poing pour pouvoir ensuite faire évacuer le lieux.

Dans les rangs de la police, on ne nie pas avoir eu des hommes présents «comme chaque mercredi, pour encadrer la manifestation» mais on se défend d'avoir participé à l'évacuation, menée «par le service d'ordre de la CGT et uniquement par lui».

En fin d'après-midi, les sans-papiers achevaient d'amasser leurs affaires sur le trottoir, sans savoir où ils allaient passer la nuit. Impossible pour l'heure de réoccuper le bâtiment, toujours bloqué par la police.

CORDÉLIA BONAL (texte) et EMILIEN CANCET (images)

Le Conseil fédéral durcit son projet de loi sur les criminels étrangers

Le gouvernement entend renvoyer les criminels étrangers ayant commis des infractions passibles de 1 an de prison. Le contre-projet a été durci pour répondre à l’initiative populaire de l’UDC. Un article de Xavier Alonso dans 24 Heures.

Pour Eveline Widmer-Schlumpf, ministre de la Justice, le contre-projet du Conseil fédéral à l’initiative de l’UDC «pour le renvoi des criminels étrangers», respecte la Constitution et le droit international. © FLORIAN CELLA

«Notre projet respecte la proportionnalité, et donc la Constitution. Tout comme il respecte aussi le droit international.» Eveline Widmer-Schlumpf a dû répondre hier plusieurs fois à la même question: quelle différence existe-t-il entre son contre-projet et l’initiative populaire de l’UDC?

Les démocrates du centre exigent en effet que tous les délinquants étrangers soient automatiquement expulsés. Leur initiative a été rendue célèbre par la campagne qui mettait en scène des moutons noirs boutés hors du drapeau suisse par des moutons immaculés. L’UDC avait alors récolté 210 000 signatures, au lieu des 100 000 nécessaires.

Mais le gouvernement rejette le texte, arguant qu’il ne respecte pas la Constitution et le droit international en introduisant l’automatisme de la sanction.

Pression du Parti libéral-radical
Il propose donc un contre- projet. Dans une première mouture, présentée en janvier dernier, il prévoyait de renvoyer les étrangers ayant commis une infraction passible de 2 ans de prison. Hier, après la mise en consultation, il a, notamment sous la pression du Parti libéral-radical, durci le ton. La nouvelle version propose de révoquer les autorisations de séjour – en clair expulser – des délinquants étrangers en cas d’infraction pénale grave (viol, meurtre). Et cela, dès une peine de prison d’au moins 1 an. «Ce n’est pas plus sévère, note la ministre de Justice et police, mais plus clair.»

Différences entre cantons
Pas pour l’UDC. Le parti a d’emblée dénoncé un «pur exercice alibi, qui ne change guère la pratique actuelle». De leur côté, l’Office des migrations (ODM) et le Parti socialiste estiment que la loi actuelle est suffisante… lorsqu’elle est appliquée. Car, dans les faits, la marge d’appréciation des justices cantonales dessine des sanctions à géométrie variable d'une région à l’autre. Ainsi, par exemple, en 2008, le canton de Vaud a expulsé nonante délinquants étrangers alors que Genève seulement quinze. Le tour de vis du Conseil fédéral se situe donc d’abord dans cette «unification de la pratique des cantons», a expliqué la conseillère fédérale grisonne.

Expulsions impossibles sans accords de réadmission
«Ce contre-projet consacre la pratique vaudoise», a réaffirmé Philippe Leuba, le ministre de la Justice d’un canton de Vaud qui passe pour le bon élève en la matière. Le libéral rappelle également que les «expulsions ne sont exécutées qu'une fois la peine purgée».

Reste un problème qui ne trouve de réponse ni dans le texte de l’initiative UDC ni dans celui du Conseil fédéral: lorsqu’il n’y a pas d’accords de réadmission, la politique peut décréter des expulsions, mais elle ne peut les exécuter. En clair, on ne se débarrasse pas d’un criminel étranger si son pays d’origine ne veut pas le reprendre. C’est le cas pour de nombreux pays d’Afrique centrale. «L’impossibilité pratique d’expulser n’est pas une raison pour baisser les bras, et motiver le laxisme, conclut Philippe Leuba. Mais le Conseil fédéral doit redoubler ses efforts en ce sens.»

Les Roms victimes de racisme à Belfast

La violence continue contre les émigrés roumains en Irlande du Nord. L‘église dans laquelle certains d’entre eux avaient trouvé refuge suite à des attaques racistes à leur domicile a été la cible de jets de pierre qui ont endommagé les ouvertures de l‘édifice. Ces actions qui se sont amplifiées la semaine dernière sont jugées inquiétantes par le Vice-Premier Ministre nord-irlandais… Martin Mac Guiness se demande si les jeunes ne sont pas entrain d’imiter ce qui se passe en Angleterre ou le scrutin européen a vu une nette progression du parti nationaliste britannique considéré comme raciste.

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«Nous, Africains, devons prendre notre intégration en mains»

L’Association africaine du Chablais incite les migrants à jouer un rôle actif dans la société qui les accueille. Une approche qui se veut novatrice en Suisse, selon son président.

© Mathieu Rod  Tazuila Emery, président de l’Association africaine du Chablais. © Mathieu Rod | Tazuila Emery, président de l’Association africaine du Chablais.

«Ce nom bien valaisan, je ne sais pas comment mon père l’a eu !» Il était peut-être écrit que Tazuila Emery s’établirait en Suisse. Venu du Congo, il fut requérant d’asile. Vingt-huit ans plus tard, ce fidèle employé du site chimique de Monthey préside l’Association africaine du Chablais, forte de plus de 200 membres, baptisée Baobab. « Un arbre de légende dans toute l’Afrique, sous lequel se règlent beaucoup de problèmes de société. Un lieu d’échange et de paix. »

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«Nous, Africains, devons prendre notre intégration en mains»

«Nous, Africains, devons prendre notre intégration en mains»

Publié par 24 heures (http://www.24heures.ch)

ASILE | L’Association africaine du Chablais incite les migrants à jouer un rôle actif dans la société qui les accueille. Une approche qui se veut novatrice en Suisse, selon son président.

Patrick Monay | 24.06.2009 | 14:13

«Ce nom bien valaisan, je ne sais pas comment mon père l’a eu !» Il était peut-être écrit que Tazuila Emery s’établirait en Suisse. Venu du Congo, il fut requérant d’asile. Vingt-huit ans plus tard, ce fidèle employé du site chimique de Monthey préside l’Association africaine du Chablais, forte de plus de 200 membres, baptisée Baobab. « Un arbre de légende dans toute l’Afrique, sous lequel se règlent beaucoup de problèmes de société. Un lieu d’échange et de paix. »

- Pourquoi avoir fondé cette association, il y a deux ans ?

- Pour enfin devenir acteurs dans la société. Pendant un quart de siècle, beaucoup d’entre nous sont venus en Suisse avec l’intention de rentrer au pays. C’était mon cas. Or, cette attitude conduit à être attentiste, à rester simple observateur. Cela a beaucoup pesé sur notre communauté, notamment en ce qui concerne l’intégration des enfants. C’est comme si l’Africain était resté devant la porte d’une maison, sans jamais frapper. Désormais, ici dans la Chablais, nous avons décidé de frapper à la porte. De prendre nos responsabilités. C’est une rupture totale.

- Comment ?

- Prenez l’éducation. Un comité, au sein de Baobab, est chargé de mener une réflexion et de faire des propositions aux autorités, afin d’éliminer les blocages culturels. Nous souhaitons disposer d’un local où les devoirs des enfants seraient pris en charge, avec la contribution des grands frères. Ce centre doit devenir, en quelque sorte, notre nouvelle « place du Marché ». Un endroit où créer le débat avec les autochtones, de façon plus ouverte que dans nos églises et nos boutiques africaines.

- Vous ambitionnez aussi de fonctionner comme une passerelle pour les migrants africains. De quelle façon ?

- Comme nous avons l’avantage de parler les mêmes langues ou dialectes que les nouveaux arrivants, nous pouvons, d’entente avec les autorités locales, faciliter leur accueil. Actuellement, les requérants d’asile sont marginalisés dès le départ. Au plan psychologique, c’est néfaste. Nous pouvons contribuer à changer cela en leur expliquant des choses très concrètes, comme le fonctionnement des institutions ou la gestion des déchets, mais aussi en les mettant en contact avec des familles suisses. Ce sont des mesures que nous pouvons mettre en place dès demain, si l’on nous ouvre la porte.

- A quels obstacles vous heurtez-vous ?

- Aux préjugés, principalement. De par notre couleur de peau, nous sommes une minorité très visible. Bien plus que les Italiens ou les Portugais avant nous… Nous pouvons comprendre la méfiance que cela peut faire naître au départ. Mais nous voulons combattre les idées reçues et les généralisations.

- Comme celle concernant les dealers…

- C’est une réalité que nous ne pouvons ignorer. Mais il s’agit d’une infime minorité d’entre nous. La preuve que rester dans la marge est dangereux… En travaillant sur l’intégration active, nous voulons immédiatement faire entrer les gens dans la légalité.

- Quels sont les premiers échos de vos efforts ?

- Très positifs. Certains Africains étaient réticents au départ. Aujourd’hui, tout le monde est enthousiaste. Et nous avons d’excellents contacts avec les autorités, en particulier la commune de Monthey. Nous avons beaucoup à apporter à la société. L’objectif, c’est de créer un déclic. Espérons que notre démarche sera reprise ailleurs en Suisse.

>> L’Association africaine du Chablais organise samedi 27 juin une «soirée de l’amitié » à Monthey (salle de la Gare). Dès 18h, cuisine africaine, danse et musique avec, entre autres artistes, Vincent Zanetti. Entrée libre.

Les No Border à l'assaut de Calais

Un camp de militants altermondialistes s'est installé quelques jours dans la ville pour dénoncer les politiques migratoires.

«On est là pour dire notre refus des politiques migratoires actuelles, notre volonté que les frontières soient abolies et notre engagement pour la libre circulation des personnes», résume Meriem, «membre» du réseau No Border (lire leur manifeste ici).

Un argumentaire bien rodé et une organisation efficace caractérisent les participants de ce camp altermondialiste installé à Calais jusqu'au 27 juin (pour les suivre sur Twitter c'est ici). Un lieu de débats, de rencontres autour de la question des migrations, dans un lieu hautement symbolique.

Ils seraient une petite centaine selon des témoins sur place, 250 selon Meriem.

Des centaines de migrants en transit

A l'origine de cette initiative, des activistes du réseau européen No Border, spécialisé dans ce type d'installations. Le choix de Calais n'est pas anodin. En effet, c'est un lieu de passage obligé pour les migrants dans leur route vers l'Angleterre.

Depuis la fermeture du centre de Sangatte en 2002, des centaines de personnes passent par la ville et s'y installent dans des conditions extrêmement précaires en attendant de passer la Manche (lire un article sur le sujet de France Terre d'Asile ici).

Les migrants sont d'ailleurs invités à partager pendant ces quelques jours la vie du camp. Au risque, comme le note un militant associatif calaisien, de faire naître des désillusions. «La notion de camp est associée à Sangatte dans l'esprit des migrants. Certains nous ont dit qu'ils espéraient obtenir des papiers en rejoignant ce campement», a-t-il confié à Youphil.

Calais en état d'alerte

L'événement donne lieu à un déploiement colossal des forces de l'ordre. Quelques 2000 policiers ont été mobilisés pour faire face à l'arrivée de ces militants, connotés extrême-gauche. La ville est placée en situation d'alerte. Ainsi, pendant une semaine, pas question d'acheter de l'alcool dans les supermarchés ou de l'essence en bidon.

Les associations d'aide aux migrants qui travaillent à Calais n'ont pas souhaité s'associer au camp No Border. «Ces militants prônent la suppression des frontières et la libre circulation des personnes. Ce sont des thématiques qui ne sont pas les nôtres», explique Vincent Lenoir, de l'association Salam (notre article sur le procès d'un des membres de l'asso ici). Mais individuellement, les adhérents et les salariés de l'association iront peut-être faire un tour du côté de la rue Normandie-Niemen où sont installés les No Border.

Le point d'orgue du rassemblement est prévu samedi 27 juin, avec une grande manifestation à laquelle un certain nombre d'organisations politiques et syndicales se sont associées (par exemple Terre d'errance). Et à partir de la semaine prochaine, le camp devrait être démonté. Seuls resteront les migrants.