mercredi 14 janvier 2009

Grâce à la pression de l'UDC, de nouveaux tour de vis annoncés

Le Conseil fédéral est prêt à sévir contre les criminels étrangers. Dans son contre-projet à l'initiative de l'UDC, il propose de révoquer systématiquement les autorisations de séjour des personnes qui écopent d'au moins deux ans de prison.

Ce nouveau tour de vis dans la loi sur les étrangers, mis en consultation jusqu'au 15 avril, pourrait concerner quelques centaines de condamnés sans passeport suisse. En 2007, un peu plus de 5100 peines privatives de liberté inconditionnelles ou avec sursis partiel ont été prononcées, dont 1003 pour une durée d'au moins deux ans.

Selon les estimations, 200 étrangers titulaires d'une autorisation de séjour auraient été touchés cette année-là par la nouvelle disposition. Ils avaient notamment commis des délits en matière de drogue, des actes de violence et des délits contre le patrimoine (brigandage compris).

Le contre-projet indirect doit permettre de préciser les motifs de révocation et de mieux tenir compte du degré d'intégration, fait valoir le gouvernement. Il convient également d'unifier la pratique des cantons. Emboîtant le pas à une bonne partie de la droite, Eveline Widmer-Schlumpf a convaincu l'exécutif de restreindre la marge d'appréciation des autorités sur l'opportunité de retirer les permis de séjour quand des infractions pénales graves sont en jeu.

Dans la foulée, le gouvernement demande qu'une autorisation d'établissement (permis C) ne soit à l'avenir octroyée à un étranger qu'en cas d'intégration "réussie". Cela vaudrait également pour les conjoints admis au titre du regroupement familial.

Le Conseil fédéral est d'avis que son contre-projet reprend les idées de l'initiative de l'UDC, mais sans entrer en contradiction avec le droit international ni avec les droits fondamentaux garantis par la constitution.




14 janvier 2009 - 16:45
Toujours plus dure en matière d'asile et des étrangers

La Suisse pourrait procéder à un nouveau tour de vis dans ses lois sur l'asile et les étrangers. Une année après l'entrée en vigueur de la dernière révision, le gouvernement met en consultation une série de durcissements jusqu'à la mi-avril.

Eveline Widmer-Schlumpf, qui avait déjà dévoilé plusieurs des mesures en question, fait valoir la nécessité d'accélérer les procédures et de renforcer la lutte contre les abus.

En 2008, 16'606 demandes d'asile ont été déposées en Suisse, soit une progression de 53,1%, a souligné mercredi la ministre de justice et police devant la presse.

En une année, les mesures préconisées en son temps par son prédécesseur Christoph Blocher et adoptées par le peuple ont eu un effet positif. Mais la pratique a mis aussi en lumière certaines lacunes, juge la conseillère fédérale.

A l'avenir, la Suisse ne devrait plus reconnaître l'objection de conscience ou la désertion comme un motif d'asile. Même les personnes exposées à de sérieux préjudices ou craignant à juste titre de l'être ne devraient plus recevoir le statut de réfugié si elles ne peuvent pas faire valoir d'autres persécutions pertinentes au vu du droit d'asile.

La mesure risque de se retourner surtout contre les déserteurs érythréens et somaliens, dont le nombre de demandes a explosé ces derniers temps. Néanmoins, la personne qui ne pourrait être renvoyée parce qu'elle risque de subir des traitements inhumains dans son pays devrait obtenir être admise provisoirement en Suisse, assure Eveline Widmer-Schlumpf.

Le gouvernement propose aussi de réprimer les activités politiques menées en Suisse dans le seul but de motiver la qualité de réfugié. La sanction pénale vise notamment les personnes qui prêtent assistance aux requérants lors de la planification ou de l'organisation d'une activité politique abusive ou qui encouragent cette activité.

Ici et pas ailleurs

Autre mesure, la possibilité de déposer une demande d'asile auprès d'une représentation à l'étranger devrait être supprimée. La Suisse est le seul pays européen à reconnaître cette démarche, pourtant la plupart des requêtes se basent sur des motifs non valables.

Enfin, il est prévu de court-circuiter les retards abusifs. Une nouvelle procédure permettant de traiter rapidement, par écrit, les demandes de réexamen et les demandes multiples sera introduite. Aujourd'hui, certains prolongent leur séjour en Suisse même après un refus définitif en déposant une nouvelle demande, fustige la ministre de la justice.

L'autre volet de la révision, qui vise aussi à faciliter les expulsions, touche la loi sur les étrangers. Les personnes faisant valoir que leur renvoi ne saurait être exigé pour des raisons personnelles - par exemple en cas d'absence d'un réseau social dans le pays d'origine - devraient désormais prouver cette allégation, indique Eveline Widmer-Schlumpf.

Il va de soi qu'une guerre civile sera jugée comme un motif de non-retour, selon la ministre. Mais le Conseil fédéral souhaite désigner les Etats vers lesquels le renvoi est considéré, de manière générale, comme raisonnablement exigible.

Un domicile obligé

Quant aux autorités cantonales, elles devraient pouvoir assigner un lieu de résidence à l'étranger admis provisoirement qui touche des prestations d'aide sociale. Cette mesure a été demandée par les cantons en vue de soulager les grandes communes, qui subissent un afflux de personnes de ce type.

La Suisse veut aussi faciliter le renvoi des demandeurs dans le pays européen où ils sont arrivés avant de venir en Suisse. Un nouvel élément constitutif de la détention en phase préparatoire et de la détention en vue de l'exécution du renvoi devrait être introduit dans la procédure Dublin, prévoit la conseillère fédérale.

Pour celle-ci, les modifications proposées sont conformes à la constitution et au droit international public. Ce n'est pas en durcissant une nouvelle fois la loi sur l'asile que l'on changera quoi que ce soit à la réalité des réfugiés, rétorquent Amnesty International, l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés et l'Observatoire du droit d'asile et des étrangers dans un communiqué commun.

Si des requérants d'asile frappent à notre porte, ce n'est pas parce que notre accueil serait excessivement généreux, mais avant tout parce qu'ils se trouvent exposés à de graves dangers dans leurs pays d'origine, rappellent les ONG.

«Relent de déjà-vu»

Selon ces ONG, si les mesures mises en consultation mercredi par le gouvernement pour «réduire l'attractivité de la Suisse» sont adoptées, la protection des personnes qui fuient guerres et persécutions serait amoindrie. «Requérants d'asile et réfugiés paieraient ainsi le prix de ce jeu peu glorieux aux forts relents de déjà-vu».

Elles soulignent aussi que le dernier durcissement de la loi sur l'asile d'il y a un an n'a pas empêché, comme partout en Europe, une hausse du nombre de demandes d'asile depuis l'été dernier.

En face, l'Union démocratique du centre (UDC / droite nationaliste) estime que les révisions annoncées dans les lois sur l'asile et les étrangers arrivent trop tard. Les augmentations massives de demandes d'asile en sont la preuve, déclare Alain Hauert, porte-parole.

Selon l'UDC, Evelyne Widmer-Schlumpf a tergiversé et ne fait maintenant qu'avancer les propositions élaborées par son prédécesseur Christoph Blocher.

swissinfo et les agences


L'ASILE EN 2008

Demandes. L'an dernier, 16'606 personnes ont demandé l'asile en Suisse, soit 53,1% de plus qu'en 2007.

Fin d'année. Le nombre de requérants a augmenté de 42% au quatrième trimestre par rapport au trimestre précédent.

Numéro un. Comme en 2007, l'Erythrée arrive en tête de liste avec 2849 demandes (+71,5%).

Irak et Cie. Suivent la Somalie (4,5 fois plus) et l'Irak (+50%). Au cinquième rang, on trouve le Sri Lanka (+98,4%) et au sixième le Nigéria (+202,1%).

Octroi. En 2008, le taux d'octroi de l'asile a atteint 23%, soit une hausse de près de 20%.


QUELQUES REPÈRES

Votation. En septembre 2006, plus de deux tiers des Suisses ont approuvé en votation la nouvelle loi sur l'asile et la loi révisée sur le séjour des étrangers.

Renvoi. La nouvelle législation autorise le renvoi dans les 48 heures de tout demandeur dénué de papiers d'identité en règle et qui ne peut donner de motifs valables pour son séjour.

Aide. Les demandeurs d'asile déboutés et qui ont épuisé toutes les voies de recours sont exclus de prestations de l'aide sociale et ne reçoivent qu'une aide d'urgence.

Accueil. Actuellement, la capacité d'accueil des cantons est de 10'000 places environ. Il en faudrait 12 à 13'000 pour répondre aux besoins croissants.

LIENS

Communiqué de la Confédération (http://www.news.admin.ch/dokumentation/00002/00015/index.html?lang=fr&msg-id=24823)
ODM, Office fédéral des migrations (http://www.bfm.admin.ch/bfm/fr/home.html)
Statistique de l'asile en 2008 en pdf (http://www.news-service.admin.ch/NSBSubscriber/message/attachments/14656.pdf)

Régularisation des femmes de ménage sans-papier

Voir le reportage de la TSR, consacré à Nelly Valencia

Le Grand Conseil demande au canton d’intervenir pour accélérer la régularisation des femmes de ménage sans papiers. En revanche, l’assemblée a refusé de prendre fait et cause pour les jeunes mères au chômage. Un article de Mehdi-Stéphane Prin dans 24 Heures.
Femme de ménage pas contente  Pour sa première séance 2009, le Grand Conseil vaudois a passé une grande partie de l’après-midi à débattre de sujets relevant des compétences de la Confédéra­tion. Le domaine de l’asile et des clandestins s’est taillé la part du lion, avec notamment la victoire surprise de Sandrine Bavaud. La présidente du groupe des Verts a réussi à faire passer sa proposition d’accélé­rer la régularisation des fem­mes travaillant dans le domaine de l’économie domestique.
  En clair, une courte majorité de députés souhaite que les nounous et femmes de ménage clandestines travaillant depuis plus de cinq ans dans le canton puissent bénéficier de papiers. Seul hic, le canton n’a aucun moyen de légiférer dans ce do­maine entièrement en mains fédérales, comme l’ont rappelé plusieurs fois des députés UDC. Qu’importe! Pour la gauche et le centre, il s’agissait avant tout de donner un signal vau­dois aux autorités fédérales. «Accepter un tel texte aurait un effet moral», a plaidé Mario­-Charles Pertusio, de l’Alliance du centre. Dans le même groupe, Jacques-André Haury a tenu à faire connaître sa sympa­thie envers «ces clandestins qui viennent ici pour travailler plu­tôt que pour tendre la main».
  Entre leçon de morale à la Confédération et respect des compétences du canton, le conseiller d’Etat Philippe Leuba n’a pas réussi à renverser la tendance. «Le peuple s’est pro­noncé à plusieurs reprises con­tre la régularisation collective des sans-papiers», a argumenté le chef du Département de l’in­térieur. «Il ne s’agit pas d’une régularisation collective de sans-papiers», a répliqué San­drine Bavaud.
  Pour la Verte, il s’agit de simplifier les procédures de ré­gularisation des employés de maison clandestins. Le Grand Conseil lui a donné raison, même si la décision n’a aucune valeur contraignante pour le gouvernement.
  En revanche, une majorité du Grand Conseil a refusé de se mêler des affaires de la Confé­dération dans le domaine du chômage.
  Le député d’A Gauche toute! Bernard Borel a demandé que les jeunes mères au chômage ne soient pas obligées de chercher du travail avant la fin de leur congé maternité. Selon lui, le Valais applique les règlements de Berne dans ce domaine avec plus de souplesse. «Je suis sur­pris que vous passiez une grande partie de l’après-midi à débattre de la législation fédé­rale », a ironisé Jean-Claude Mermoud, chef du Départe­ment de l’économie. «J’ose es­pérer que vous n’allez pas con­tester une décision du parle­ment fédéral.» L’argument a cette fois fait mouche, et les députés vaudois n’ont pas donné un second signal aux autorités suisses.

Le signal fort de Philippe Leuba

Éditorial de Corinne Feuz, rédactrice en chef adjointe de 24 Heures.

Depuis août 2008, le nombre de requérants d’asile en Suisse n’a cessé de croître. Rien d’étonnant à cela. Il suffit pour s’en convaincre de reporter sur une mappemonde la provenance de ces «flux migratoires». Erythrée, Somalie, Irak sont en tête de ce triste hit-parade. Autant d’hommes, de femmes et d’enfants en provenance de pays durablement en conflit.
Le canton de Vaud n’y échappe évidemment pas. La loi sur l’asile largement approuvée par le peuple à l’automne 2006 implique que les cantons traitent rapidement les demandes d’asile. Pour cela, ils ont besoin de capacité d’accueil suffisante. Dans sa planification, l’EVAM (Etablissement vaudois d’accueil des migrants) avait prévu 53 arrivées par mois. Entre août et décembre dernier, la réalité a oscillé entre 111 et 190 requérants supplémentaires chaque mois. Aujourd’hui, les huit foyers d’accueil du canton sont pleins à craquer.
  L’ouverture à Nyon, dans un petit mois, d’un abri de la protection civile pour accueillir une centaine de requérants était donc indispensable.
  Cette localisation est hautement symbolique. Politiquement, le signal est fort: le district de Nyon ne possède plus, depuis plusieurs années, de structure d’accueil fixe. Pour pallier l’urgence, Philippe Leuba a donc exclusivement cherché une solution à La Côte. C’est certes une manière de soulager les régions qui aujourd’hui accueillent déjà des requérants.
  Mais c’est aussi un moyen de maintenir la pression sur les collectivités publiques de La Côte afin que cette région accueille à nouveau un véritable centre d’hébergement.
Lire ci-dessous.

Nyon va ouvrir un abri PCi pour une centaine de requérants

Le district de Nyon ne possède aucune structure d’accueil pour les requérants d’asile. Il n’est donc pas surprenant que l’Etablissement vaudois d’ac­cueil des migrants (EVAM) ait sollicité le chef-lieu dans l’ur­gence. «Nous n’allions pas demander d’ouvrir un abri ailleurs dans le canton, con­firme Emmanuelle Marendaz Colle, chargée de communica­tion. Nous aurions préféré un autre lieu d’accueil, mais face à l’afflux massif des arrivées, l’ouverture d’un abri était incontournable, et c’est celui de Nyon qui convient le mieux.» Situé au chemin d’Eysins, à proximité du brico-loisirs Mi­gros, l’abri «En Oie» ac­cueillera, dès mi-février, une centaine de requérants, unique­ment des hommes seuls, prove­nant essentiellement d’Erythrée, de Somalie, du Sri Lanka, d’Irak, du Nigeria, du Kosovo et de Géorgie.
  L’EVAM précise qu’il ne s’agira que de «cas Dublin», dont le séjour en Suisse ne devrait pas excéder deux à trois mois, puisque la plupart de­vront être renvoyés vers un autre pays européen.
  L’abri «En Oie» sera ouvert 24 heures sur 24 et sera enca­dré par deux surveillants et un intendant. L’EVAM a également demandé à la commune de Nyon de mettre à disposition une structure de jour «pour permettre aux personnes hé­bergées d’avoir un endroit moins oppressant pour passer la journée». La Municipalité nyonnaise n’a pas encore déter­miné où se situeraient ces locaux, mais elle affirme vou­loir faire tout son possible afin d’offrir des conditions d’accueil agréables.
  Avant l’ouverture de l’abri, une séance d’information publique à laquelle participera le conseiller d’Etat Philippe Leuba sera organisée.
  Parallèlement à cette mesure d’urgence, provisoire, un groupe de travail conduit par le préfet Jean-Pierre Deriaz plan­che sur un projet de centre d’hébergement, qui devrait être réalisé dans une des communes de La Côte comprenant plus de 2000 habitants.

Lire le communiqué de presse de l'EVAM

Lire l'article du Matin

Les centres de requérants d'asile bouchonnent

Un article de Laurent Grabet (textes) et Pascal Frautschi (photos) dans 24 Heures.

Ici, son destin hors normes est la norme. Le sourire lumineux d’Hiwet la révèle davantage que son anglais approximatif. Ce qu’il semble démentir en revanche, c’est que ce petit bout d’Erythréenne de 29 ans a passé dix ans dans l’armée, dont cinq au front. Enrôlée de force dans la guerre que son pays livrait à l’Ethiopie voisine. Comme 314 autres requérants de 45 nationalités différentes, la jeune femme a trouvé refuge dans ce grand immeuble blanchâtre de trois étages planté à Anières, au milieu de la campagne genevoise.

© PASCAL FRAUTSCHI | ​En Suisse depuis seulement quelques mois, Daniel Agu (à g.) et Jonathan Anthony disent avoir fui des rafles policières au Nigeria. Les deux requérants dorment dans un dortoir improvisé avec 14 autres personnes. Ils déplorent la surfréquentation du centre d’Anières, la promiscuité et le manque d’hygiène qu’elle implique, mais restent optimistes. ANIÈRES, LE 8 JANVIER 2009 Le centre d’accueil est censé accueillir un maximum de 280 personnes. Depuis l’été, cette «porte d’entrée sur la Suisse», où la plupart des pensionnaires passent six mois, bouchonne. «Nous sommes remplis à 113%, explique son directeur, Gabriel Fratianni.

Depuis 2004 pourtant, nos effectifs baissaient et nous tablions sur une quarantaine d’arrivées par mois. Aujourd’hui, il y en a une centaine ! L’explosion du nombre de demandeurs d’asile en Suisse nous a obligés à aménager quatre dortoirs.»

En quarantaine pour cause de tuberculose !

Conséquence: Jonathan, requérant nigérian de 27 ans, est entassé dans l’un d’eux avec une quinzaine d’autres célibataires. En septembre, cette pièce en hébergeait seulement six. Son nettoyage, confié aux occupants, laisse donc à désirer. Le sol est sale. «Cette casserole graisseuse traîne sur la table depuis ce matin, se plaint Jonathan en tripotant son permis N de requérant. Ces personnes n’appartiennent pas à notre ethnie. Nous nous parlons avec les mains, et c’est difficile de s’entendre sur le ménage ou de trouver le coupable quand notre nourriture disparaît du frigo.»

Il n’est en effet plus possible de regrouper les personnes sur des critères de «compatibilité nationale». Ainsi, parfois, Ethiopiens et Erythréens se retrouvent dans une même chambre, Africains et ressortissants des pays de l’Est sur un même lit superposé. La promiscuité multiplie les tensions et les vols; et, de l’aveu même du directeur, elle détériore les conditions sanitaires. Les personnes atteintes de varicelle, de gale et de tuberculose sont mises en quarantaine dans une chambre qui a dû être spécialement aménagée dans une annexe.

De leur côté, les dix assistants sociaux ne chôment pas. En moyenne, chacun d’entre eux s’occupe de 67 requérants. «Soit 27 de trop!» selon Gabriel Fratianni. Certains doivent même s’atteler aux lourdes et nombreuses tâches administratives. «Nous aimerions travailler plus en profondeur, mais il nous faut plutôt enchaîner les discussions entre deux portes», déplorent de concert Nina Spahr et Fanny Zurcher, fraîchement engagées pour maintenir le navire à flot.

Des cours pris d’assaut

Les cours de français affichent complet. Sur le tableau blanc, les pays d’origine des élèves sont listés en couleur à côté de quelques mots de base: Iran, Syrie, Irak, Erythrée, Somalie, Tanzanie, Sri Lanka. «Nous avons dû doubler le nombre de nos professeurs bénévoles. C’est bien, mais il faudrait faire plus», explique Corinne, la responsable de l’enseignement. Les bonjours de tous les accents saluant son passage dans les couloirs prouvent que ces efforts sont appréciés.

La majorité des requérants sont arrivés en Suisse récemment. Aucune lassitude ou rancœur n’a eu le temps de s’installer. L’espoir est de mise. Le tour de vis sur l’asile promis par la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf (lire ci-contre) risque de changer la donne. La rayonnante Hiwet pourrait alors devoir quitter les statistiques. «Mais probablement pas le pays», pronostique un assistant social.

Les sept Sages sur le point de sévir

«Le Conseil fédéral lancera d’ici à la fin du mois la procédure de consultation sur une modifica­tion de la loi sur l’asile et sur celle des étrangers. Peut-être communiquera-t-il sur le sujet dès cette semaine», indique Brigitte Hauser-Süess. Lundi, la porte-parole du Département fédéral de justice et police (DFJP) ne souhaitait donc pas s’exprimer sur son contenu.
  Samedi pourtant, Eveline Widmer-Schlumpf dévoilait dans Le Temps vouloir «accélérer les décisions de non-entrée en matière». En 2008, 16 606 de­mandes d’asile ont été déposées, soit 53% de plus que l’année précédente. La conseillère fédé­rale souhaite donc adopter des «modèles plus souples» pour absorber ces fluctuations. «La création, annoncée à la fin no­vembre, de 20 postes à durée limitée dans les centres d’enre­gistrement vont dans cette direc­tion », précise Roman Cantieni, porte-parole de l’Office des migrations (ODM). La cheffe de DFJP n’envisage en revanche pas de remettre en cause le système de répartition des requérants dans les cantons proportionnelle­ment à la population de ceux-ci.
  Le projet envisage aussi qu’ob­jecteurs de conscience et déser­teurs bénéficient d’une admis­sion provisoire et non plus d’un statut de réfugié. Et que la possi­bilité de déposer une demande d’asile dans les ambassades, jugée trop coûteuse, soit suppri­mée. D’autres mesures seront étudiées pour éviter les deman­des répétées ou injustifiées.
  Sur le terrain, des abris d’une capacité totale de 500 places ont été installés dès septembre dans les centres d’enregistrement de Bâle, de Kreuzlingen et de Chiasso. Fin 2008, le Conseil fédéral allouait un crédit annuel de 8,9 millions à l’ODM pour l’exécution des auditions et une indemnité de 25 millions aux cantons pour couvrir les coûts engendrés par l’afflux. L. GR.