vendredi 13 novembre 2009
Affaire du faux appel à la prière: une plainte a été déposée
ATS | 13.11.2009 | 11:12
Les responsables de l'établissement du Petit- Saconnex (GE) ont aussi distribué un tous-ménages pour dénoncer ce procédé. Les faits ont été révélés jeudi. Vers 07h00 samedi, l'appel à la prière des musulmans résonnent aux alentours de la mosquée du Petit-Saconnex (GE). Mais le lieu de culte doté d'un minaret n'a jamais diffusé cet appel. Cette méthode est d'ailleurs interdite par la loi.
L'imam du Centre culturel islamique Youssef Ibram a recueilli de nombreuses réactions choquées du voisinage. Beaucoup pensaient que la mosquée avait désormais un muezzin. C'est finalement l'un des voisins qui a indiqué à l'imam qu'une voiture avait circulé dans le quartier avec un haut-parleur diffusant l'appel à la prière.
«Ce procédé est inadmissible», a expliqué vendredi l'imam. Une dénonciation pénale a été déposée, précise-t-il en revenant sur une information de «20 Minutes». Il veut que la police enquête sur cet incident, qui nuit selon lui à l'image des musulmans. La mosquée a aussi distribué 500 lettres à ses voisins directs pour expliquer et dénoncer l'incident.
Incitation à la haine
La Jeunesse identitaire de Genève (JIG), un groupe d'extrême- droite, se targue dans la presse d'être l'auteur de cette mascarade. Ce mouvement voulait ainsi montrer à la population ce qu'il adviendrait dans quelques années si l'initiative antiminarets était rejetée par le peuple suisse le 29 novembre prochain.
Ce texte soutenu notamment par l'UDC et l'UDF vise à introduire un moratoire interdisant la construction de tout nouveau minaret en Suisse. Quatre, dont celui de la mosquée de Genève, existent actuellement. Aucun n'a toutefois de muezzin, l'appel à la prière étant strictement interdit.
Le Parti radical genevois a aussi transmis vendredi matin une dénonciation pénale. Les auteurs du faux appel à la prière incitent à la haine des musulmans, souligne Murat Julian Alder, le constituant radical qui a signé la dénonciation. Il évoque l'atteinte à la liberté de culte et la violation de la loi sur le culte extérieur. Il appartient au procureur général de poursuivre ou classer l'affaire.
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L'initiative anti-minarets "inefficace et dangereuse", juge le PLR
L'initiative populaire contre la construction de minarets, en votation le 29 novembre, est "inutile, inefficace et dangereuse", a répété le PLR. Pour son président Fulvio Pelli, elle n'a qu'un but "publicitaire" puisqu'elle n'apporte aucune réponse aux vrais problèmes.
L'initiative populaire contre la construction de minarets, en votation le 29 novembre, est "inutile, inefficace et dangereuse", a répété le PLR. Pour son président Fulvio Pelli, elle n'a qu'un but "publicitaire" puisqu'elle n'apporte aucune réponse aux vrais problèmes.
Le conseiller national tessinois estime que le message politique qui sous-tend le texte lancé par des représentants de l'UDC et de l'Union démocratique fédérale (UDF) rate sa cible. Il n'est pas la solution pour lutter contre l'intégrisme et renforcer la sécurité, a-t-il relevé.
Son collègue genevois Hugues Hiltpold a souligné l'importance d'intégrer au lieu d'exclure. Et de rappeler que les conditions légales encadrant la construction des minarets resteront les mêmes qu'aujourd'hui si le peuple rejette l'initiative. "Il n'y aura pas une foison de minarets."
Le PLR a entamé la deuxième phase de sa campagne pour le "non" en publiant une nouvelle série d'annonces placées sous le slogan "Certains s'agitent, d'autres agissent". Le parti y énumère trois exigences: renvoyer les "prédicateurs de haine", mieux surveiller les fondamentalistes et établir des "règles claires et identiques pour tous basées sur notre culture occidentale".
Minarets Suisse vus de Belgique
Suisse: climat malsain autour de la votation sur les minarets
L'initiative populaire contre les minarets avait été déposée auprès du gouvernement, forte de près de 115 000 signatures, soit largement plus que le minimum des 100 000 nécessaires pour organiser une consultation. Débat récurrent en Suisse, l'idée d'interdire les minarets est soutenue par la droite populiste et les milieux évangélistes, qui joue habilement des sentiments xénophobes d'une partie de la population. Le Conseil national a bien dû se résoudre à organiser la votation, malgré les très nombreuses critiques que l'initiative avait suscitées, certains parlant d'un débat "ridicule, odieux et dangereux".
Dès le dépôt du texte, le gouvernement suisse avait fait savoir qu'il appellerait le peuple à le rejeter lors du vote. Le comité à l'origine de cette initiative a fait valoir que les minarets ne sont pas des constructions à caractère religieux mais "le symbole apparent d'une revendication politico-religieuse du pouvoir, qui remet en cause les droits fondamentaux".
Guerre d'affiches
Quoi qu'il en soit, la campagne en faveur du "oui" à l'initiative prend des tours malsains. L'UDC a ainsi imprimé une affiche représentant le drapeau de la Confédération avec une femme voilée et hérissé de minarets. Certaines villes ont interdit l'affiche, arguant de son caractère discriminatoire voire franchement haineux; mais d'autres, telle Genève, l'ont autorisée au regard du principe de liberté d'expression.
Une autre affiche, produite par un groupuscule valaisan, figurait les membres féminins du conseil des ministres revêtus d'une burqa à côté de leurs collègues masculins en costume classique, avec le slogan "Arrêtons de nous voiler la face". L'affiche a été interdite, l'image des "sept sages" (surnom du conseil des ministres de la confédération helvétique) ne pouvant être source d'une exploitation politique, selon la chancellerie fédérale.
Récemment, le comité des droits de l'homme de l'ONU s'était inquiété de l'initiative anti-minarets, jugée incompatible avec le Pacte international sur les droits civils et politiques. Pour l'un des membres de ce comité, Michael O'Flaherty, la publication des affiches présentant les musulmans sous un jour sinistre posait également problème. Dans sa réponse, le Conseil fédéral s'était dit "confiant que l'initiative sera rejetée par le peuple et que le problème de la compatibilité entre notre constitution et le droit international ne se pose que sur le plan théorique."
Malgré l'hostilité très nette de la plupart des partis politiques et des milieux économiques, religieux, sociaux, etc., le "oui" à l'interdiction continue à gagner du terrain, avec 35% de personnes favorables à l'interdiction.
Dans un pays qui compte, à l'heure actuelle, 4 minarets pour 200 mosquées.
T. Nagant avec Le Monde