mardi 26 octobre 2010

Des armes pour contenir les migrants

Le nombre de migrants qui franchissent la frontière poreuse entre la Grèce et la Turquie augmente constamment. Le gouvernement grec étant incapable de surmonter seul ce problème, Frontex, l'agence européenne pour les frontières extérieures, s'apprête à déployer des gardes armés dans la région, explique le Guardian.

migrants athène

Une nouvelle unité de gardes européens armés va être dépêchée en Grèce, avec pour mission de patrouiller le long de la frontière turque pour juguler le flux d’immigrés clandestins en Europe. Avec le déploiement de ces Rapid Intervention Border Teams (équipes d’intervention rapide aux frontières ou RABITs), composées de garde-frontières d’autres pays d’Europe, c’est la première fois que Bruxelles envoie des unités multinationales armées sur les frontières extérieures de l’Union.

Les équipes doivent arriver en Grèce dans les prochains jours, a annoncé la Commission européenne le 25 octobre, bien que leurs effectifs précis et leur composition restent à déterminer. “C’est un nouveau front. Les équipes sont armées, mais elles ne peuvent avoir recours à leurs armes que pour se défendre”, a précisé un responsable de la Commission.

Peinant à faire face aux centaines d’immigrés qui entrent chaque jour en Grèce par une portion de la frontière inhospitalière et sans surveillance près de la ville turque d’Edirne, Athènes a lancé un appel à l’aide à Bruxelles mi-octobre. “Le flot de gens qui franchissent clandestinement la frontière a pris des proportions alarmantes, commente Cecilia Malmström, Commissaire aux Affaires intérieures. La Grèce n’est manifestement pas capable de maîtriser la situation par elle-même.

Une pression énorme pour un petit pays

Environ 80 % des immigrés qui sont entrés en Europe cette année sont arrivés par la Turquie, puis la Grèce, d’après Bruxelles. Certains sont des immigrés économiques clandestins, à la merci de bandes de trafiquants de chair humaine ; beaucoup sont des demandeurs d’asile irakiens et afghans, qui se voient infliger par les autorités grecques un traitement que les Nations unies et l’UE jugent indéfendable. “C’est une situation scandaleuse, poursuit le responsable de la Commission. Actuellement, les Grecs n’ont pas les moyens d’y faire face. C’est un petit pays soumis à une pression énorme.”

Le nombre de personnes entrées clandestinement en Grèce a presque quadruplé cette année, passant de 9 000 l’an dernier à environ 34 000. Pour les Afghans comme Ahmad Fahim, âgé de 15 ans, il est courant de passer par la Grèce pour atteindre l’Europe. Venu de Jalalabad, ville de l’Est de l’Afghanistan, il a pris un bus jusqu’à la frontière iranienne, puis a traversé l’Iran à pied grâce à des passeurs qui l'ont emmené ainsi que d’autres clandestins jusqu’en Turquie.

De là, ils se sont frayé un chemin jusqu’à la côte, en face de l’île grecque de Mytilène. “Ça m’a pris quatre mois et ça m’a coûté 1 500 dollars [1 076 euros] pour les passeurs, raconte Ahmad. On avait vraiment mal aux pieds, mais tout le temps, j’ai pensé à l’Angleterre, où vit ma famille. En Grèce, les conditions sont terribles. Au commissariat, ils nous enfermés, vingt d’entre nous, dans une cellule insalubre. Et avant de nous laisser partir, ils ont battu Fahimullah parce qu’il disait qu’il ne se sentait pas bien.”

"Les garde-côtes grecs ont détruit notre bateau"

Matthew a 22 ans. Il vient du Congo. “Mon père m’a appris à prier, dit-il. Pendant le voyage jusqu’ici, j’ai beaucoup prié, et bien des fois, j’ai remercié mon père. Les garde-côtes grecs ont détruit notre bateau quand nous avons essayé de traverser, et ils nous ont délibérément repoussés vers la Turquie. Il y a eu une tempête et aucun d’entre nous ne savait nager. Nous avons failli mourir.

Selon les Nations unies, 90 % des immigrés clandestins arrêtés en Europe l’ont été en Grèce. Manfred Novak, le rapporteur des Nations unies sur les droits de l’homme, s’est rendu il y a peu à Athènes, et a constaté que les demandeurs d’asile étaient emprisonnés dans des conditions “inhumaines et dégradantes”. “Certaines des installations sont tellement surpeuplées, mal éclairées et sales qu’il nous a été difficile de rester avec les détenus. Nous avons dû sortir car nous manquions d’air”, souligne-t-il.

Au cours de l'année passée, Bruxelles et les gouvernements de l’UE ont pris la décision de déployer des patrouilles maritimes pour bloquer les axes de migration et de trafic qui, en Méditerranée, aboutissent à l’Espagne, l’Italie et Malte. Ils ont également conclu des accords controversés avec le colonel Mouammar Kadhafi en Libye afin qu’il récupère les immigrés. La Libye a toujours été une étape importante pour les gens qui viennent d’Afrique et du Moyen-Orient.

La Grèce s’est retrouvée exposée par la fermeture de ces axes, des milliers de personnes y arrivant via la Turquie, depuis le Pakistan, l’Afghanistan, l’Irak, l’Iran et l’Afrique. Christos Papoutsis, ministre grec de la Protection civile, a déclaré ce week-end : “Chaque jour, on signale une irruption massive, à la frontière terrestre entre la Grèce et la Turquie, de ressortissants de pays du tiers monde qui tentent d’entrer clandestinement dans le pays afin de se rendre dans d’autres Etats de l’UE.

Des demandeurs d'asile se sont cousu la bouche

Quelque vingt-cinq demandeurs d’asile iraniens seraient en grève de la faim en Grèce, certains s’étant cousu la bouche, pour protester contre le traitement dont ils font l’objet et contre le refus grec de prendre leurs demandes d’asile en considération.

Près de la ville grecque d’Orestiada, une portion de plus d’une dizaine de kilomètres de frontière serait complètement ouverte, sans aucune surveillance. Les immigrés passent par là au rythme de plusieurs centaines par jour, en dépit de la difficulté du terrain. La crise est encore aggravée par d’autres pays de l’UE, qui refoulent en Grèce les immigrés clandestins qu’ils interpellent conformément à des règles qui stipulent qu’ils doivent être renvoyés dans le pays par lequel ils sont entrés dans l’Union.

Un article signé Ian Traynor et Helen Smith dans le Guardian relayé par Presseurop et le Courrier International


le parapluie frontex

"La peur de l'autre ne doit pas nous rendre naïfs"

Dans les pages de 24 Heures, le courrier d'une lectrice à propos de l’article intitulé «Vaud est plus ferme, mais régularise aussi davantage» (24 heures du 19 octobre 2010).

le raciste c'est l'autreSi seulement on pouvait connaître le profil des étrangers expulsés de Suisse suite à une condamnation pénale. Pour une partie d’entre eux, certainement des sans-papiers avec pour seul reproche le fait de travailler illégalement dans notre pays alors que nous manquons de main-d’œuvre dans différents secteurs d’activités (agriculture, viticulture, économie domestique en particulier). Nous n’avons pas à être fiers de la politique vaudoise de notre chef du Département de l’intérieur. Tant qu’on condamnera les migrants les plus fragilisés et qu’on pillera les personnes bien formées de leur pays d’origine — pour les faire venir travailler dans notre pays —, les inégalités crasses demeureront, au détriment de la solidarité et d’une vie digne pour tout le monde. Tant que nous montrons du doigt les étrangers afin de faire croire qu’ils sont responsables des difficultés auxquelles nous devons faire face, rien ne changera. Tant que les étrangers fragilisés seront accusés de tous les maux, c’est l’ensemble des plus démunis de notre pays qui seront mis à l’écart. La peur de l’autre ne doit pas nous rendre naïfs à l’égard d’une politique visant à satisfaire les habitants les mieux lotis de notre canton.

Sandrine Bavaud, députée, Lausanne

Demandeurs d'asile: le Jura en ultime refuge

Il aura fallu 5 ans à la famille Sabirov arrivée de Tchétchénie en 2005 pour obtenir un statut de réfugié. Pendant toutes ces années, elle a été soutenue, hébergée et accompagnée par le centre d'accueil pour demandeurs d'asile.

famille sabirov

La famille Sabirov a obtenu ses papiers il y a quelques jours, après plusieurs années de démarches et de nombreuses péripéties / Photo Karine Jourdant

Lorsqu'ils quittent la Tchétchénie au cours de l'hiver 2005, Kissa et Movladi Sabirov fuient un pays à feu et à sang. Leur histoire s'avère douloureuse et ils n'ont pas envie d'y revenir. Poussés par la guerre et ses horreurs, ils veulent croire en un Eldorado.

C'est la France qu'ils choisissent pour y chercher refuge. Ils le savent et la Déclaration universelle des droits de l'homme le prévoit : « devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l'asile en d'autres pays ». Et puis, « ici c'est le pays qui aide le plus. En France, on savait ce qu'il se passait en Tchétchénie » explique Kissa.

Pour autant, il aura fallu cinq longues années à cette famille pour obtenir enfin un statut de réfugié qui lui permette désormais d'envisager un nouveau départ. Ce fut un parcours du combattant pour les parents. Une vraie épreuve aussi pour leurs enfants dont les plus grands ont connu avec eux le centre de rétention et le spectre de l'expulsion.

L'aîné, Anzor, avait 10 ans lorsqu'il a été contraint de quitter précipitamment ses copains, son école, ses repères. Cela a été douloureux. Il reconnaît qu'il a vécu cet épisode comme un déchirement. Mais aujourd'hui l'adolescent échafaude de beaux et ambitieux projets. Il vaut devenir plombier. Sa nouvelle vie est ici. Avec ses nouveaux amis, ses parents et ses frères et sœurs, Mansour 14 ans, Madina 12 ans, Hamzat 4 ans et Makka 3 ans.

À l'instar de tous les demandeurs d'asile qui s'installent dans le Jura, la famille Sabirov a été accueillie par le foyer Saint-Jean qui dispose de 100 places à Dole et de 20 à Morez. Dans ces structures appelées CADA (centres d'accueil pour demandeurs d'asile) dépendantes du dispositif national d'accueil, tout est prévu pour permettre la meilleure intégration possible. « Notre rôle consiste à épauler les demandeurs dans leurs démarches administratives, à les accompagner dans la vie quotidienne, à veiller à leur bonne santé et à la scolarisation des enfants » explique Philippe Bwanga-Bamba, directeur du foyer Saint-Jean. Et lorsque l'intégration des familles est une réussite, c'est un succès partagé et un grand bonheur pour tous. Kissa qui a appris le français auprès de l'association Femmes debout aimerait trouver un emploi dans le commerce. Son époux envisage de se lancer dans une formation.

Pour le couple et ses cinq enfants, une nouvelle vie commence.

Un article signé Karine Jourdant dans le Progrès

La N-VA veut rendre la procédure d'asile plus stricte

La N-VA (Nieuw-Vlaamse Alliantie) présentera jeudi à la Chambre une série de propositions de loi visant à rendre plus stricte la procédure d'asile.

Le parti veut notamment une procédure accélérée pour les demandeurs d'asile qui ont peu de chances d'obtenir le statut. Il s'agit notamment des ressortissants de pays jugés sûrs et de personnes ayant introduit des documents frauduleux ou n'ayant pas collaboré à l'établissement de leur identité.
Cette procédure accélérée prévoirait toujours une enquête, mais la décision tomberait dans un délai de deux semaines. Un éventuel appel ne serait pas suspensif. Pour la députée, Sarah Smeyers, "le problème dans la procédure actuelle est que chaque demandeur s'engage dans une procédure longue, qui peut durer jusqu'à 16 mois".

Une situation d'autant plus problématique selon elle que huit demandes sur dix finissent par être rejetées. Par comparaison, la procédure d'asile serait bien plus courte dans d'autres pays européens. Elle serait de 4,5 mois aux Pays-Bas, selon Mme Smeyers. Theo Franken, un autre élu de la N-VA, estime que la procédure devrait être réservée aux demandeurs de bonne foi. "De cette manière, on pourrait libérer juqu'à la moitié des places dans les centres d'accueil", selon le député, qui estime que la crise actuelle des places d'accueil est causée par une législation belge beaucoup trop laxiste.

BELGA