Le double oui n'est en soi pas une surprise. C'est son ampleur chiffrée (68%) et son unanimité territoriale qui interpellent. Les Suisses ont-ils peur, comme un demandeur d'asile l'a laissé entendre hier soir à la télévision romande? Le sentiment grandissant d'insécurité a certainement joué un rôle dans ce vote. Il ne faut pas s'en cacher. Mais la vraie raison du plébiscite est à chercher dans le ras-le-bol que la population manifeste de plus en plus clairement à l'égard des «profiteurs».
Les Suisses en ont marre des abus en matière d'immigration. Ils ont voté la conscience d'autant plus tranquille que le Conseil fédéral et une large majorité du Parlement cautionnaient cette approche. Face à certains amalgames hâtifs, les arguments humanitaires n'ont pas pesé lourd. C'est regrettable, car les nouvelles lois, si elles sont appliquées sans discernement, peuvent conduire aux pires bavures et à de terribles injustices. Les opposants aux deux lois, Ruth Dreifuss en tête, ont promis qu'ils allaient rester vigilants. C'est indispensable.
Reste que le signal donné par le souverain est tout sauf anodin. Il s'agit d'en tenir compte, sans quoi de nouveaux durcissements de la législation sont à craindre. Alors, tant mieux si les textes adoptés hier permettent de lutter efficacement contre les abus. Cela contribuera à calmer les sentiments xénophobes. Mais il ne faut pas se leurrer. Sans une multiplication des accords de réadmission pour les requérants déboutés, sans une aide substantielle au retour, sans une politique du développement digne de ce nom, les problèmes de fond posés par les flux migratoires ne pourront jamais être réglés. L'ignorer, c'est se fourvoyer!
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