lundi 28 février 2011

Dans le ventre d'une migrante à Genève

L'association «Enceinte à Genève» guide des femmes migrantes au cours de leur grossesse et leur fournit un soutien dans une ville où tout renvoie à la différence.

Toutes originaires d'ailleurs, c'est pourtant ici qu'elles deviendront mères. Dans quelques mois, elles donneront naissance à leur premier enfant à Genève, leur nouvelle terre d'asile, sans réellement savoir comment cette étape majeure de leur existence va se dérouler. Une situation vécue avec beaucoup d'angoisse, celle d'être livrée à soi-même ou celle de ne pas pouvoir communiquer avec le personnel médical. Pour vaincre ce stress, des femmes exilées allophones ont décidé de s'informer auprès du programme «Enceinte à Genève». Il propose de suivre cinq cours de préparation à l'accouchement pour femmes migrantes non-francophones, remboursés par l'assurance maladie. Réalisé dans les locaux de l'Arcade sages-femmes à Plainpalais, le programme est mené en collaboration avec l'association Appartenances-Genève, qui s'engage pour l'accès aux soins des familles et des personnes exilées.
C'est ainsi que chaque vendredi après-midi, durant cinq semaines, une quinzaine de ressortissantes rejoignent la salle de cours au boulevard Carl-Vogt, chacune accompagnée de son interprète. Elles sont originaires d'Europe de l'Est, d'Afrique ou d'Amérique latine et vivent à Genève depuis quelques mois, voire quelques années. Elenice est brésilienne, elle atteint son huitième mois de grossesse et ne parle pas un mot de français, à part un «bonjour» qu'elle murmure avec timidité en entrant dans l'arcade. La plupart des femmes allogènes présentes à ces cours ne parlent pas ou très peu le français et ne savent souvent ni le lire, ni l'écrire. Ce qui limite en conséquence les interactions avec leur entourage francophone. Si la barrière de la langue constitue un frein à l'intégration, ici tout le monde a son interprète et a le droit d'être comprise.

Pas d'homme à l'horizon
Les deux sages-femmes qui animent le cours, Fabienne Borel et Odile Evéquoz, s'affairent à installer des sièges contre les murs tout en accueillant avec un large sourire et des gestes affectueux les nouvelles arrivantes. Tandis que certaines viennent s'installer sur de gros coussins, ou que d'autres s'agitent devant la fontaine à eau, Elenice patiente devant les toilettes de l'Arcade. «C'est universel chez les femmes enceintes, elles sont toujours au petit coin», confie Fabienne Borel sur un ton amusé.
Les interprètes, mandatées par la Croix Rouge suisse, sont aussi des femmes, des mères ou des grands-mères venues des quatre coins du monde. Ici, les hommes ne sont pas autorisés. «Leur présence peut entraîner des gênes, notamment chez les femmes musulmanes», remarque l'instigatrice de ce programme. L'agitation s'estompe peu à peu, toutes les femmes prennent place et le silence s'impose rapidement. Les regards se tournent vers les deux sages-femmes qui s'enquièrent de l'état de santé des participantes au cas par cas. Ebou, Burkinabée de 24 ans, entre dans l'arcade avec un peu de retard. Tout en s'excusant, elle explique qu'elle devait emmener sa fille de cinq ans à l'école. D'un même élan, les interprètes traduisent les paroles de la jeune Africaine. Les autres femmes, l'oreille tendue, esquissent des sourires complices.

Unies dans la précarité
Au-delà de leurs origines diverses, un détail les réunit: le ventre rebondi. Autre point commun: les situations légales précaires. «La majorité d'entre elles sont requérantes d'asile, les autres, dans une moindre mesure, sont clandestines, explique Fabienne Borel. Pour la plupart, elles sont plongées dans l'incertitude, dans la peur du renvoi, dans la difficulté du logement. Certaines vivent dans des foyers pour requérants d'asile, dans une pièce unique.» C'est le cas d'Abyssa, originaire d'Ethiopie. Elle loge depuis quatre mois dans une chambre du centre d'accueil au Grand-Saconnex. «Je partage la salle de bain, les toilettes ainsi que la cuisine avec d'autres locataires. Avec le bébé, ce sera plus difficile», craint-elle.
Une femme érythréenne saisit alors une poupée, à disposition pour les démonstrations, et lui montre comment, dans son pays, les femmes baignent le nouveau-né dans une bassine. Ses gestes méticuleux sont ceux d'une mère. Elle a déjà donné la vie, mais elle pense tout de même avoir besoin de suivre ce cours, «car ici tout est différent». De l'achat des couches-culottes à l'accouchement dans un hôpital, il faut tout réapprendre et s'adapter aux autres façons de faire.

Des représentations particulières
Pour Eden, originaire elle aussi d'Erythrée, la situation est tout aussi pesante: «J'habite dans un petit appartement au foyer des Tattes, au troisième étage sans ascenseur. Monter les escaliers est maintenant une épreuve pénible. Mais avec le bébé dans une poussette, ce sera pire!». «Pourquoi ne pas porter l'enfant dans le dos, comme le font les femmes de votre pays?», lui suggère Fabienne Borel. Eden hoche la tête mais ne semble pas convaincue. Porter son enfant dans le dos, c'est à nouveau se distinguer des autres mères d'ici, alors qu'adopter la poussette peut représenter un facteur d'intégration.
La séance débute par un cours d'anatomie «pour sensibiliser aux différentes parties du corps, comme l'utérus, ou à l'évolution du bébé dans le ventre de la femme, signale la sage-femme. Nous avons constaté que les plus éduquées n'ont pas d'idée précise des étapes de la grossesse.» A chaque parole énoncée par l'une des deux maïeuticiennes succède une cacophonie provoquée par les dialectes différents. La patience est de rigueur, chaque explication nécessite une traduction. Une fois le silence rétabli, les animatrices du cours proposent un nouvel exercice. «Nous leur demandons souvent de représenter le bébé à l'intérieur du corps, explique Odile. Certaines dessinent un serpent, une sorte de spermatozoïde géant dans le ventre de la femme. Elles ont une idée très vague, magique voire animiste de ce phénomène.»
La présentation terminée, les questions fusent les unes à la suite des autres. Fadouma est la plus loquace. Elle a vécu en Somalie ainsi qu'au Yémen et attend à présent son premier enfant. Ses questionnements sont multiples et très précis. Ils concernent l'alimentation, l'allaitement, le sommeil, le sexe, l'exercice physique, etc. Trop longtemps contenues, ces interrogations doivent être exprimées. Elles dévoilent toute l'anxiété sous-jacente. Fadouma pense pouvoir compter sur le soutien de son mari, mais convient qu'elle ne peut pas tout déléguer.
La dernière rencontre s'achève. Certaines femmes sont déçues: «Nous avons appris énormément mais c'était bien trop court.» Elles se sont néanmoins senties en sécurité dans ce lieu suffisamment réconfortant pour envisager sereinement la venue de leur enfant, sans pour autant échapper aux écueils de leur vie. Une ultime séance sera organisée la semaine suivante, cette fois-ci en présence des futurs pères, pour ceux qui le veulent.

Une crise humanitaire aux frontières de la Libye

Egyptiens, Chinois, Ghanéens… Ils sont déjà plus de 50 000 à avoir fui la Libye via la ville tunisienne de Ras Jedi. Et l’afflux ne cesse de croître. La crise vire au chaos humanitaire à la frontière. Il faut d’urgence un pont aérien et maritime pour évacuer les migrants et éviter une crise sanitaire. De leur côté, les cantons suisses craignent une vague de réfugiés. Ils demandent à la Confédération d’appliquer une politique restrictive en la matière. Sans compter que les accords de Dublin connaissent quelques ratés.

Au milieu des ballots, ils sont des centaines sous le soleil et dans la poussière. Coincés entre des bus déglingués et les pots d'échappement des voitures qui font la navette entre Ben Guerdane et le poste frontière tunisien de Ras Jedir, ils attendent. Certains sont là depuis plusieurs jours. Ils ont dormi dans le froid sur des trottoirs, des parkings ou les dalles d'un entrepôt. Les plus chanceux rejoindront un abri, voire un avion pour Le Caire. Car la majorité des migrants fuyant la Libye en guerre civile sont des Egyptiens. Ce qui était une crise humanitaire a viré au chaos ce week-end.

«C'est de pire en pire»

«C'est de pire en pire», témoigne Fedora Gasparetti de l'Organisation internationale des migrations. «Chaque jour qui passe voit le nombre de migrants augmenter.» Depuis le début de l'exode, il y a une semaine, ils sont près de 50 000 à avoir transité par Ras Jedir. Aux 18 000 Tunisiens des premiers jours, se sont ajoutés les étrangers. Les autorités locales, qui au début avaient bien géré le flot ininterrompu, semblaient hier dépassées, d'autant que les organisations internationales tardent à prendre le relais. Pour la seule journée de samedi, près de 10 000 personnes ont franchi la frontière, à en croire Monji Slim, président local du Croissant-Rouge. Et les premiers décomptes d'hier confirmaient une tendance à la hausse: «Entre minuit et huit heures, on a recensé 3000 personnes. Il faut trouver une solution, car on ne pourra pas continuer longtemps comme ça», s'alarmait Monji Slim.C'était juste avant le débarquement de 1300 Chinois, épuisés par un périple de dix-huit heures en camion entre Khoms (120 km à l'est de Tripoli) et Ras Jedir. Affalés sur des valises ou à même le sol, ces ouvriers du consortium CCECC, qui travaillaient jusqu'à la semaine dernière pour la construction d'une ligne de chemin de fer, se préparaient hier après midi à la venue d'un diplomate et à leur transfert vers Pékin. En zone libyenne, à une cinquantaine de mètres, un millier d'hommes sont assis sur la terre battue, guettant l'ouverture du portail bleu vers la Tunisie et la distribution d'eau et d'aliments fournis par des Tunisiens très mobilisés. Des Ghanéens, des Maliens et des Coréens étaient attendus au poste frontière assailli par les étrangers.

Pas assez de bus

A huit kilomètres de là, le colonel-major Essoussi pare au plus pressé. A Choucha, au milieu de la plaine littorale de la Djeffara parcourue par les chameaux et le vent du large, le militaire tunisien a monté en hâte un hôpital de campagne. Sous les eucalyptus, il recense les arrivants qui ont droit à une visite médicale sommaire et à un abri. Le soldat dit «contrôler la situation», mais, depuis mercredi, il ne cesse d'araser la garrigue pour monter ses tentes kaki. Les bulldozers ont toujours un temps de retard sur les migrants qui s'agglutinent au milieu d'un chaos indescriptible de voitures, de valises et de passants.Le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) a prévu de déployer des abris pour 10 000 personnes. «Il y a un problème de transport», reconnaît Houda Chalchoul, assistante juridique au HCR. «Nous n'avons pas assez de bus pour acheminer toutes ces personnes qui voyagent avec leurs effets personnels.» Le pont aérien a démarré jeudi entre Djerba et Le Caire où 7200 Egyptiens ont déjà atterri samedi. Deux ferries escortés par des navires de guerre égyptiens devaient arriver au port tunisien de Zarzis, à 80 km au nord de Ras Jedir.

L'état de santé s'altère

Les autorités ont demandé l'organisation en urgence d'un pont aérien et maritime pour évacuer les migrants et éviter ainsi une crise sanitaire. Elles envisagent le pire. «Si la frontière s'ouvre, nous aurons à gérer un afflux important de blessés des combats en Libye», s'inquiète le colonel-major Essoussi. Plus les jours passent, plus leur état va s'altérer car le système de santé libyen est dépassé par les événements.»Signe de l'ampleur de la crise, le sud tunisien a été mobilisé. Des migrants ont été plutôt bien accueillis par les «Comités de sauvegarde de la révolution» à Ben Guerdane, Médenine, Djerba, Zarzis. Là, dans les centres de vacances réquisitionnés, les touristes sont rattrapés par la crise libyenne.

Arnaud Vaulerin, Ras Jedir et Zarzis, dans la Liberté

A Benghazi, l'enfer pour les travailleurs africains

Benghazi est la deuxième ville du pays, après Tripoli. Avant la révolte actuelle, des milliers de travailleurs venus des pays de l’Afrique sahélienne sont venus s’y installer. Les évènements de ces derniers jours ont libéré Benghazi du joug de Kadhafi, mais ont fait de la ville un véritable enfer pour ces hommes.

libye africains

Des Africains soupçonnés d'être des mercenaires à la solde de Kadhafi, détenus dans une salle du tribunal de Benghazi ©REUTERS/Suhaib Salem

Ils sont une vingtaine à vivre dans une maison en construction de 3 étages. Le bâtiment n’est pas terminé, les murs sont encore en béton brut. Les chambres ressemblent à des cellules, il n’y a même pas de fenêtre.  Ils viennent du Mali, du Niger ou encore du Tchad et ils sont terrorisés. Omar est l’un d’entre eux. Il travaillait comme maçon avant la révolution. Maintenant, il n’ose plus sortir de cet endroit pourtant peu accueillant.

Des rumeurs de meurtres racistes courent dans Benghazi. Il faut dire que depuis le début de cette révolution, Muammar Kadhafi a fait appel à des mercenaires africains pour le défendre. Des hommes coiffés de casques jaunes en plastique que l’on a vus lors des affrontements un peu partout dans le pays. Que l’on voit encore dans Tripoli actuellement.  Et la population de Benghazi a du combattre ces hommes, lourdement armés par le régime. La rébellion s’est emparée de la ville la semaine dernière. Et maintenant, tous les Noirs qui se trouvent ici sont suspectés d’être des mercenaires. Des gens qui ont tué des révolutionnaires, des frères, des parents, des proches, des amis des habitants de Benghazi.

Ces travailleurs africains rencontrés à Benghazi sont terrés dans cette maison insalubre. Lorsqu’ils sortent, c’est pour parcourir les quelques mètres qui les séparent de l’épicerie, juste en face. Dès qu’ils tentent d’aller plus loin, ils sont insultés, menacés. Certains disent avoir été frappés. C’est le cas de Driss. Il était soudeur dans une entreprise pétrolière. Et hier lorsqu’il est sorti dans la rue, il dit que 2 jeunes Libyens l’ont poursuivi et l’ont battu.

Le racisme est très présent à Benghazi. La population est franchement hostile aux noirs.  Avec cette révolution et ces mercenaires embauchés par Kadhafi, le racisme s’est développé ici. Et même des gens plutôt cultivés sont capables de tenir des propos xénophobes particulièrement violents. Et vous trouverez difficilement des Libyens pour prendre la défense de ces immigrés, totalement isolés. On leur reprochait déjà auparavant de venir piquer des emplois. Désormais les griefs sont bien plus graves...  Ces derniers jours, les pays européens, la Chine, l’Inde… ont affrété des avions, des bateaux, des bus pour évacuer leurs ressortissants. Mais rien pour les Africains : ils viennent de pays pauvres. Qui n’ont rien prévu pour leur permettre de revenir au pays en sécurité. Ils regardent à la télévision les évacuations d’autres étrangers vivant en Libye. Mais ce n’est jamais leur tour. Ils se sentent complètement oubliés. Ils ont aussi vu à la télévision des prisonniers que l’on présente comme des mercenaires alors qu’ils ont reconnu des amis ou des collègues de travail, des Africains installés ici depuis plusieurs mois.

Ils ne travaillent plus, ils n’ont donc plus beaucoup d’argent. Ils se contentent de manger du pain dans leurs chambres minuscules. Ils sont littéralement emprisonnés car dehors c’est dangereux.  Ils aimeraient rejoindre l’Egypte par la route, à 7 heures d’ici à peu près. Mais impossible de trouver un chauffeur qui veuille bien les emmener et puis de toutes façons, ils n’ont pas les moyens de payer le trajet. Kadhafi ou pas, ils s’en moquent complètement. Tout ce qu’ils constatent, c’est que leur vie est en danger. Ils veulent partir. Par n’importe quel moyen. Grâce à leur pays d’origine, une nation étrangère ou une organisation humanitaire, peu importe. C’est une question de vie ou de mort.

Richard Place, envoyé spécial en Libye, pour France Info

Pour écouter le reportage de Richard Place

Les Africains qui cherchent asile en Israël sont réduits à l'esclavage dans le Sinaï

Une étude du groupe "Médecins pour les droits de l'homme" publiée mercredi, révèle les épreuves extrêmes rencontrées par les demandeurs d'asile qui traversent le Sinaï pour gagner Israël.

Sur les 284 demandeurs d'asile que le groupe a pris en charge dans son dispensaire entre octobre 2010 et janvier 2011, près des deux tiers déclarent avoir été emprisonnés 59% avoir été emprisonnés pendant leur périple, et 52% avoir subis des violences sérieuses (privation d'eau et de nourriture, coups, brûlures au fer rouge, électrocutions, agressions sexuelles allant souvent jusqu'au viol, parfois collectif).  Certains ont été enterrés vivants dans le sable.

Aux mains de véritables trafiquants d'esclave, ils sont parfois séquestrés et violentés, dans de véritables "camps de torture", jusqu'a que leurs familles ou leurs proches versent des rançons. 44% d'entre eux disent avoir été témoins de violence sur d'autres prisonniers, et parfois de violence mortelle, et 88% avoir été privés de nourriture pendant leur détention.  L'ONG accuse les officiels israéliens d'ignorer le problème, et de refuser d'accorder des titres de séjours à ces demandeurs d'asile politique, et demande au ministère de la Santé de leur permettre, quel que soit leur statut, de bénéficier de l'assurance maladie israélienne.

Près de 200 éthiopiens et érythréens seraient actuellement détenus et réduits en esclavage dans des camps. Selon l'organisation, d'autres camps de ce type dans le Nord Est du Sinaï.  La péninsule du Sinaï est devenue une sorte de No Man's Land, la zone de tous les trafics où cohabitent de véritables pirates, des trafiquants de drogue, d'esclaves ou d'armes. Les évènements en Égypte ont provoqué un reflux des troupes égyptiennes qui tentaient, tant bien que mal, d'assurer l'ordre dans le Sinaï, face notamment aux tribus bédouines dont certaines sont impliquées dans les trafics. Le Hamas, quant à lui, laisse fleurir ces trafics, les organise parfois, et en tire parti.

David Koskas pour israel-infos

Inquiétudes à Berne

Simonetta Sommaruga et Johann Schneider-Ammann préparent des solutions pour les semaines à venir.

La vague de révolte dans les pays arabes inquiète Simonetta Sommaruga et Johann Schneider-Ammann. La ministre de la Justice table sur la collaboration européenne pour maîtriser un éventuel afflux de réfugiés. Pour l'heure, personne ne peut prévoir l'importance de la vague.

Selon la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga, les conséquences de la révolte en Libye et de son lot de réfugiés vers l'Europe restent totalement inconnues. De même, on ne peut évaluer pour l'heure la taille d'une éventuelle vague de migrants, a-t-elle déclaré samedi à la radio alémanique DRS.

Il n'y a toutefois pas lieu de paniquer, a souligné la plus haute responsable de l'asile en Suisse. La Confédération doit aider à gérer les suites des turbulences dans le monde arabe et pour ce faire, il s'agit de collaborer avec les Etats de l'Union européenne. Mme Sommaruga a ajouté qu'on ne saurait utiliser ces réfugiés comme thème de campagne électorale et a appelé les partis à la retenue.

L'Office des migrations est prêt

En cas d'arrivée très importante de réfugiés, la Suisse serait dans une situation d'urgence absolue, souligne la vice-directrice de l'Office fédéral des migrations (ODM) Eveline Gugger Bruckdorfer: il faudrait alors recourir temporairement à des installations de la protection civile.

La Confédération peut gérer actuellement 1200 demandes de requérants d'asile par mois, pour lesquels elle dispose de places. Ces demandes peuvent être traitées rapidement. Cette infrastructure peut être étendue à 1800 places au maximum, précise Eveline Gugger Bruckdorfer dans une interview au journal dominical «Sonntag». Il sera difficile d'aller au-delà en cas d'afflux plus important. «Nous nécessiterions alors des bâtiments dont nous ne disposons pas actuellement. Mais nous cherchons des solutions. Au final, il appartient aux cantons de développer leurs structures».  Or ceux-ci se montrent réticents depuis des semaines.

La présidente de la Conférence des directeurs cantonaux de justice et police Karin Keller-Sutter rappelle dans la presse alémanique de dimanche que la Confédération doit refouler immédiatement les réfugiés économiques tunisiens, sans les transférer aux cantons.

Pas d'armée aux frontières

Dans «Le Matin Dimanche», le chef du Corps des gardes-frontières Jürg Noth explique qu'en cas d'afflux massif, il peut s'imaginer une aide de l'armée pour la surveillance aérienne ou une aide logistique. Il est toutefois hors de question de placer des soldats de milice aux frontières.

Un soutien est également possible à travers les organisations partenaires des pays voisins, sur la base des accords policiers et douaniers bilatéraux. Ceci pourrait se faire avec l'Allemagne et la France afin de dégager des moyens pour les régions où il y a un manque de personnel, comme au Tessin, explique Jürg Noth.

Quant au ministre de l'Economie, Johann Schneider-Ammann, il a annoncé samedi dans la «Berner Zeitung» qu'au vu des contestations actuelles, les demandes d'exportation d'armes vers le monde arabe sont examinées avec beaucoup de prudence. Pour l'instant, aucune requête n'a été déposée par un pays arabe.

Pas de durcissement

Le conseiller fédéral PLR renonce à un durcissement des règles pour les exportations d'armes et de munitions. Les directives ont été renforcées il y a trois ans déjà: depuis, armes et munitions ne sont plus livrées à des pays qui enfreignent systématiquement et de manière grave les droits humains, a-t-il rappelé. Pour cette raison, les exportations d'armes sont interdites vers l'Arabie saoudite. En 2010, la Suisse a pourtant encore livré du matériel de guerre d'une valeur de 132,6 millions de francs vers Riyad: mais il s'est agi d'un système de défense anti-aérienne dont l'exportation avait été autorisée en 2006. Johann Schneider-Amman espère une rapide stabilisation dans les pays en révolte. Afin d'y parvenir, il n'exclut pas une aide extérieure à l'économie. Il juge intéressante l'idée d'une sorte de plan Marshall - un programme de reconstruction économique - mais, selon lui, elle est irréaliste et ne se fera «certainement pas avec la Suisse dans les premiers rangs».

Le Nouvelliste

Tensions nationales sur les réfugiés du Maghreb

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