mardi 28 septembre 2010

Bad Ragaz: une élève pourra garder le voile

Un règlement interne interdisait le port de tout couvre-chef à l’école de Bad Ragaz. Une élève a fait recours et obtenu gain de cause auprès de la première instance. La commission scolaire de la commune saint-galloise, pour le bien des élèves, a renoncé à porter le conflit devant une instance supérieure et renonce à l’interdiction.

L’élève musulmane qui a mis en émoi l’école de Bad Ragaz pourra continuer à venir aux cours avec son foulard. Désavouée, la commission scolaire de la commune saint-galloise, qui avait dans un premier temps interdit le port de tout couvre-chef à l’école, a annoncé lundi qu’elle renonçait à faire recours contre la décision du Conseil régional de surveillance des écoles. Celui-ci a donné raison à la jeune fille la semaine dernière.

L’adolescente, âgée de 15 ans, avait décidé en mai dernier de venir à l’école désormais la tête recouverte d’un hidjab. Alors même que son père lui avait demandé d’attendre ses 18 ans pour porter le foulard, que portent également sa mère et sa sœur aînée.

Car, à Bad Ragaz, un règlement scolaire interne interdit le port de tout couvre-chef à l’école. La commission scolaire, l’instance élue par la population et seule compétente pour les questions scolaires au niveau communal, a écrit par deux fois à la famille pour le lui rappeler.

Soutenus par un membre du Conseil central islamique de Suisse habitant dans les Grisons, les parents ont alors fait recours contre l’interdiction faite à leur fille de porter le voile islamique à l’école.

A contre-pied du canton

La semaine dernière, le Conseil régional de surveillance a tranché en faveur de l’élève et déclaré que l’interdiction était disproportionnée et contraire à la liberté de religion garantie par la Constitution. Une décision qui prend le contre-pied de l’autorité cantonale suprême en matière scolaire, qui, au début août, a recommandé aux communes d’édicter des règlements soumis à référendum interdisant le foulard à l’école.

Dans un communiqué diffusé lundi, la commission scolaire de Bad Ragaz explique qu’elle renonce à poursuivre l’affaire «car il n’est pas du devoir de l’école de servir de plate-forme pour éclaircir des questions de fond touchant toute la société, ni de permettre à des groupes d’intérêts polarisants de se mettre en avant. Pour le bien de tous les élèves, l’école va se concentrer sur sa tâche première: l’enseignement.»

Hansjörg Hürlimann, président de la commission scolaire et membre de la municipalité, n’a pas voulu faire d’autres commentaires sur cette décision.

Les principaux points du projet de loi sur l’immigration

Le projet de loi sur l'immigration, dans les cartons du gouvernement depuis son adoption en conseil des ministres en mars, est examiné par l'Assemblée nationale à partir de ce mardi 28 septembre. Le texte, qui comporte 84 articles et 472 amendements, entend faciliter le renvoi des étrangers en situation irrégulière.

A la version initiale du projet de loi, ont été ajoutées les dispositions annoncées par le président de la République lors du "discours de Grenoble" du 30 juillet, parmi lesquelles figurent notamment les conditions dans lesquelles une personne récemment naturalisée pourrait être déchue de sa nationalité. Outre ces mesures de dernière minute, le texte vise à "mettre en œuvre certaines conclusions du séminaire gouvernemental sur l'identité nationale" qui s'est tenu en février, comme le précise le compte-rendu du conseil des ministres du 31 mars.

Extension de la déchéance de nationalité

C'est la plus emblématique et la plus controversée des mesures préconisées par Nicolas Sarkozy à Grenoble, le 30 juillet. "La nationalité française doit pouvoir être retirée à toute personne d'origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d'un fonctionnaire de police ou d'un militaire de la gendarmerie ou de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique", avait demandé le président de la République, soutenu dans une large mesure par sa majorité.

Un amendement déposé par des députés de la majorité va exactement dans ce sens. S'il est adopté, il modifiera l'article 222-14-1 du code pénal relatif aux violences envers les personnes dépositaires de l'autorité publique. Dans le cas de violences ayant entraîné la mort, une mutilation ou une infirmité permanente, le coupable pourra être déchu de la nationalité française si celle-ci a été acquise moins de dix ans avant les faits, et à condition que cette déchéance n'ait pas "pour résultat de rendre apatride l'auteur des violences".

La polygamie, en revanche, ne figure pas parmi les motifs de déchéance de nationalité, conformément à l'arbitrage rendu le 6 septembre par Nicolas Sarkozy, qui avait ainsi désavoué son ministre de l'intérieur, Brice Hortefeux.

Expulsion des étrangers communautaires

Espace Schengen ou non, un étranger venant d'un pays de l'Union européenne peut circuler librement pendant trois mois dans n'importe quel autre Etat membre. Le projet de loi propose qu'un ressortissant européen fasse l'objet d'une mesure d'éloignement en cas d'"abus d'un court séjour" – moins de trois mois – lorsqu'il multiplie des allers-retours "dans le but de se maintenir sur le territoire" ou s'il constitue "une charge déraisonnable pour le système d'assistance sociale". Cette disposition, dont la conformité avec le droit européen reste à démontrer, a été ajoutée notamment afin d'expulser plus facilement les Roms en situation irrégulière.

Réduction du périmètre d'action du juge des libertés et de la détention (JLD)

Souvent critiqués par l'exécutif pour leur "laxisme", les JLD verraient leur rôle limité par ce nouveau texte s'il est adopté en l'état. "En France, deux juges interviennent dans la procédure d'éloignement : le juge administratif (tribunal administratif), qui se prononce sur la légalité de la mesure d'éloignement ; le juge judiciaire (juge des libertés et de la détention), qui se prononce sur la régularité de la procédure et le maintien en rétention", précise-t-on en préambule du projet de loi.

Actuellement, les délais imposent au JLD de se prononcer avant le juge administratif. Sur les préconisations du rapport Mazeaud (PDF), le texte propose de porter à cinq jours le délai de saisine du JLD. Ce magistrat n'interviendrait ainsi qu'après que l'administration se soit prononcée sur l'éloignement ou non d'un étranger interpellé. Selon l'Union syndicale des magistrats administratifs, cette inversion va "mécaniquement entraîner une hausse sans précédent de la contestation des arrêtés de rétention devant les juridictions administratives". "Asphyxier le juge administratif [et] affaiblir le JLD [revient à] aliéner la justice à l'objectif de reconduire toujours plus", estime le syndicat.

Transposition de la directive "retour"

Les députés européens avaient adopté le 18 juin 2008 la directive "retour" établissant notamment des "standards minimaux en matière de durée de rétention et d'interdiction de retour" des immigrés en situation irrégulière. Douze articles du projet de loi sont consacrés aux détails techniques de la transposition de ces "standards" dans le droit français. En particulier, le texte prévoit qu'un étranger en situation irrégulière renvoyé vers son pays peut être interdit de séjourner sur tout le territoire européen pendant une durée maximale de cinq ans.

Limitation du droit des étrangers malades

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit qu'un étranger peut bénéficier d'un titre de séjour si son "état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité" et "sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire".

Les débats porteront sur le terme "effectivement" de cet article. Un amendement (PDF), déposé par le député UMP Thierry Mariani et adopté en commission des lois, entend gommer ce terme. Mais des députés de l'opposition et de la majorité ont déposé d'autres amendements visant à laisser le texte en l'état.

Comme le note le député UMP Etienne Pinte, très critique envers la politique du gouvernement envers les étrangers, "s'interroger sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé est dénué d'intérêt si l'on ne prend pas soin de vérifier qu'il y aura accès. En effet, dans l'immense majorité des pays, les traitements existent, mais ils sont réservés à une élite. Si le traitement existe mais que l'intéressé ne peut y accéder en pratique, les conséquences d'une exceptionnelle gravité sont inéluctables : aggravation de la pathologie, progression des complications, voire décès".

  • Mariages "gris"

On connaissait les mariages "blancs" ; le ministre de l'immigration et de l'identité nationale, Eric Besson, a propulsé les mariages "gris" dans le débat médiatique, les qualifiant, en novembre 2009, d'"escroquerie sentimentale à but migratoire". Les "mariages gris", extrêmement difficiles à qualifier, désignent des mariages conclus entre un étranger et un ressortissant français au détriment de ce dernier, considéré comme abusé par son partenaire. Le texte propose que ces mariages soient désormais passibles d'une peine de sept ans d'emprisonnement, au lieu de cinq, et d'une amende de 30 000 euros, contre 15 000 actuellement.

Un article trouvé sur LeMonde.fr

Sans pitié avec les sans-papiers

Premier examen à l’Assemblée du projet de loi sur l’immigration. Un texte durci cet été, en pleine polémique sur les Roms.

Manifestation de sans-papiers le 17 avril 2010 à Paris.

Manifestation de sans-papiers le 17 avril 2010 à Paris. (© AFP Fred Dufour)

Les associations y voient «une atteinte inégalée aux droits des étrangers». Cet après-midi débute l’examen en première lecture à l’Assemblée nationale du projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité. A l’origine, ce texte visait à transcrire, en droit français, plusieurs directives européennes. L’une d’elles dite «directive retour», a suscité la polémique car elle ouvre «la possibilité» d’assortir une décision d’expulsion d’«une interdiction de retour» sur le territoire européen. Les associations parlent de «bannissement».

Au-delà, le gouvernement a apporté une série d’amendements restreignant encore les droits des migrants. Le débarquement, en janvier, de 123 clandestins kurdes syriens sur une plage corse, a donné à Eric Besson l’occasion de satisfaire une ancienne demande de Nicolas Sarkozy. A plusieurs reprises, le chef de l’Etat avait souhaité une fusion des juridictions administrative et judiciaire, au détriment de la seconde, jugée trop libérale, devant lesquelles comparaissent les étrangers en situation irrégulière. Les Kurdes ayant été remis en liberté après avoir été placés en rétention, ce qui leur a permis d’échapper à l’expulsion, le ministre de l’Immigration a décidé de sévir en réduisant le pouvoir du juge judiciaire (lire ci-contre).

«Surenchères». D’autres articles, comme celui sur la déchéance de la nationalité, ou les entraves à la libre circulation des Roms, sont la traduction du discours prononcé par Nicolas Sarkozy, le 30 juillet, à Grenoble. Résultat, de 86 articles lors de sa présentation en Conseil des ministres, le 31 mars, le projet de loi en compte 107 aujourd’hui.

A l’Assemblée nationale, le gouvernement devrait rassembler une majorité pour voter ce texte. Sur les 314 députés du groupe UMP, il ne s’en trouvera sans doute que quelques dizaines pour contester ouvertement la copie d’Eric Besson. La fin du quinquennat approche, et avec elle l’angoissante question de la réélection de Nicolas Sarkozy en 2012. Les députés de droite vont donc serrer les rangs même s’ils sont «nombreux», comme le confiait hier l’un d’eux à Libération, à être «mal à l’aise avec les surenchères de certains ministres». Les plus téméraires devraient se faire entendre, ce matin, à l’occasion de leur réunion hebdomadaire à huis clos. Mais l’exécutif peut compter sur le président du groupe UMP, Jean-François Copé - supporteur inconditionnel du discours de Grenoble et de ses déclinaisons législatives -, pour canaliser cette opposition marginale.

Outre une poignée de villepinistes, la loi Besson n’est contestée, chez les députés UMP, que par Nicole Ameline, Etienne Pinte et Lionel Tardy. La première, en désaccord avec les dispositions sur la déchéance de la nationalité, menace de ne pas voter ce texte qui «fait une place trop large à la répression». «J’appartiens à une famille humaniste et il faut que nous ayons une démarche équilibrée», a-t-elle déclaré jeudi lors des journées parlementaires de Biarritz. Etienne Pinte pousse à l’extrême l’opposition de la droite sociale et catholique : en découvrant cet été les images d’expulsions, il dit avoir pensé au «Vel d’Hiv». «Ils n’étaient pas déportés vers la mort, seulement vers leurs misères.» Lionel Tardy fonde son opposition sur le «risque d’inconstitutionnalité» qui justifie, selon lui, les amendements de suppression sur une dizaine d’articles. L’Assemblée nationale devrait balayer tout cela.

Contestation. La loi Besson devra ensuite être débattue au Sénat, où la contestation au sein de la droite est beaucoup plus puissante. A l’image de l’ex-Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, on s’inquiète, dans la Haute assemblée, de la «droitisation» de la majorité. Concernant la loi sur l’immigration, le sénateur Jean-René Lecerf, vice-président de la commission des lois, prévient qu’il ne laissera pas passer «ce qui relève de l’affichage». Il aura fort à faire.

 Alain Auffray et Catherine Coroller dans Libération