vendredi 4 février 2011

Les saisies louches d'un gendarme genevois

gendarme guignolUn requérant d’asile guinéen dénonce la quasi-impunité dont bénéficie ce policier.

Dans le milieu des requérants d’asile guinéens de Genève, on le surnommait «Money Natel». Ce sous-brigadier de gendarmerie, maître d’un chien spécialisé dans la recherche de stupéfiants, serait, à en croire les résidents du foyer du Lagnon, un habitué de la saisie sauvage d’argent et de portables, un spécialiste de l’antidatage des reçus et un adepte de la petite commission personnelle. La justice enquête-t-elle trop mollement sur ces accusations? C’est la question posée à la Chambre pénale de recours.

Le policier a bien été inculpé de faux dans les titres le 4 juin 2010 pour avoir trafiqué le procès-verbal d’audition d’un requérant d’asile. C’est loin d’être suffisant, a plaidé jeudi Me Jean-Pierre Garbade, au nom d’un autre Guinéen qui soutient lui aussi avoir été dépouillé par ce gendarme. En substance, le plaignant reproche au policier de lui avoir pris de l’argent en vue de régler des contraventions passées mais aussi futures – et cela en l’absence de toute base légale –, d’avoir modifié les dates de ces saisies pour s’éviter des ennuis, et de s’être approprié une partie des sommes en question sans donner de quittance.

L’enquête diligentée en 2007 par l’Inspection générale des services (la police des polices), suite aux déclarations de plusieurs résidents de ce foyer, a souligné le peu d’orthodoxie de certaines méthodes employées par le gendarme tout en s’interrogeant sur des disparitions de drogue, d’argent et de Natel. «Il a peut-être voulu jouer au justicier et cela n’a rien d’extraordinaire. Ce qui serait vraiment scandaleux, c’est de fermer les yeux et de soustraire de tels abus au débat juridique», a conclu Me Garbade.

Grotesque et invraisemblable, a rétorqué Me Olivier Jornot. Pour le défenseur du gendarme, les arguments du plaignant relèvent d’un «gigantesque amalgame» et traduisent surtout l’inimitié qu’inspire aux trafiquants un policier qui fait son travail. Certes, ce travail a pu avoir quelques ratés et ce dernier s’en expliquera. «Il ne faut toutefois pas lui faire porter le chapeau d’une pratique répandue dans l’institution», a ajouté Me Jornot, en faisant référence aux sommes confisquées en vue du paiement de contraventions. Quant à des vols d’argent, aucun indice sérieux ne permettrait d’enclencher des poursuites.

La Chambre de recours dira si l’ancien juge d’instruction, et désormais procureur, Michel Graber doit se montrer un peu plus pugnace dans ce dossier. Un magistrat dont le plaignant n’attend plus grand-chose. Me Garbade a demandé sa récusation en soulignant «son silence assourdissant et son manque d’ardeur».

Fati Mansour dans le Temps

«Faire pression sur moi ne fonctionne pas»

La conseillère fédérale Simonetta Sommaruga a déjà marqué son département de Justice et police de sa griffe. De l’asile à l’autorité parentale en passant par la pédocriminalité, elle évoque les dossiers sur lesquels elle compte avancer.

Elle ne nous a pas reçus dans son bureau où elle doit encore composer avec les meubles et décorations d’Eveline Widmer-Schlumpf. Mais Simonetta Sommaruga a déjà marqué le Département de justice et police, qu’elle dirige depuis le 1er novembre, de sa griffe.

Le Temps: L’UDC dicte le ton en matière de politique des étrangers. Comment allez-vous inverser la tendance? En mettant sur le tapis des thèmes tabous avant ce parti?

Simonetta Sommaruga: Je ne suis pas au Conseil fédéral pour être contre ou pour l’UDC: je fais de la politique pour la population. Des thèmes tabous? Il ne doit pas y en avoir. Pour moi, le plus important est de prendre les craintes de la population au sérieux. Je me base sur des faits pour envisager des solutions concrètes et réalisables, sans me demander si elles plaisent à la gauche ou à la droite.

– Un exemple?

– Une commission du Conseil des Etats nous a demandé de nous pencher sur l’idée de raccourcir les procédures d’asile. Pour moi, c’est vraiment nécessaire, aussi dans l’intérêt de la personne concernée. Des procédures trop longues nuisent à l’intégration et coûtent cher à la Confédération et aux cantons. Il faut par contre veiller à raccourcir les procédures dans le plein respect du droit. Cela contribuera à rendre notre politique d’asile plus crédible.

– L’UDC veut faire baisser le nombre de demandes d’asile sous le seuil de 10 000. Est-ce aussi votre objectif, vous qui prôniez une «limitation de l’immigration» dans le Manifeste du Gurten?

– Ce n’est clairement pas à la Suisse de dire combien de demandes elle accepte. Nous sommes signataires de la Convention de Genève de 1951 sur les réfugiés et de la Convention européenne des droits de l’homme, qui stipulent qu’un pays doit offrir sa protection à des personnes persécutées. Dans ce cadre, nous pouvons viser plus d’efficacité, avec des procédures plus courtes. Nous devons aussi nous engager, avec nos partenaires européens, en faveur d’un bon fonctionnement du système de Dublin, qui permet déjà de renvoyer les requérants vers le premier pays européen où ils ont déposé une demande. Ce système a déjà montré ses limites [la Suisse, comme d’autres pays, ne renvoie plus de requérants vers la Grèce, ndlr]. Mais sans Dublin, la situation deviendrait très difficile pour la Suisse.

– Que pensez-vous de l’idée de pousser les maîtres d’école à dénoncer les enfants sans papiers? Ne violerait-on pas la Convention internationale des droits de l’enfant?

– Le Conseil fédéral a donné mandat à notre département, en collaboration avec d’autres, d’approfondir cette question. Le respect de la Convention va de soi.

– Près de 200 000 sans-papiers vivent en Suisse en situation illégale. Quelles solutions prônez-vous pour mettre fin à l’hypocrisie actuelle?

– Personne n’est «illégal» en Suisse: je préfère parler de personnes sans statut de séjour légal. Ces personnes vivent souvent dans des situations incroyablement difficiles; il m’importe de clarifier leur statut. Mais je ne parle pas de régularisation: une régularisation collective n’aurait pas de sens. N’oublions pas que ces gens sont souvent là parce qu’ils trouvent du travail au noir. Des employeurs en profitent; certains ne paient même pas les assurances sociales. C’est de l’esclavage! Cela me fâche. Nous devons rapidement trouver des solutions pour combattre ce fléau, avec les cantons et les associations patronales.

– A quel point est-ce difficile pour une socialiste de gérer un DFJP bien ancré à droite? Ne craignez-vous pas, en donnant des gages à la droite, de vous éloigner de vos convictions? N’êtes-vous pas «prise en otage»?

– Ceux qui m’ont connue comme parlementaire savent que je suis très indépendante. Faire pression sur moi ne fonctionne pas. Je suis entourée d’excellents spécialistes et je suis ravie d’avoir l’Office fédéral de la justice, chargé de faire respecter l’Etat de droit, dans mon département. Mais, pour faire de la politique, il faut aussi avoir un bon contact avec la population. J’ai l’intention de rester proche des gens. Cela fera aussi du bien au DFJP.

– Des voix s’élèvent pour dénoncer des actes violents émanant de l’extrême gauche. Est-ce un phénomène qui vous inquiète?

– Je suis contre toute forme de violence. Cela veut dire que je me distancie aussi clairement de celle de l’extrême gauche, qui n’a absolument rien à voir avec les valeurs de gauche que je défends. Ce phénomène ne doit pas être négligé.

– L’UDC est associée au groupe de travail pour la mise en œuvre de l’initiative sur le renvoi des criminels étrangers et a déjà posé ses conditions. N’est-ce pas un exercice alibi?

– Il faut tout de suite préciser qu’il ne s’agit plus de l’initiative de l’UDC mais d’un article constitutionnel accepté par la majorité du peuple et des cantons. Je suis contente que l’UDC arrive avec des propositions concrètes. Je l’ai dit à ce groupe: si on a plusieurs propositions, il ne faut pas en présenter qu’une seule, mais exposer avec précision, pour chacune d’entre elles, quelles conséquences elles peuvent avoir, par exemple sur le respect de la Convention européenne des droits de l’homme ou de l’Accord sur la libre circulation des personnes. J’ai demandé que les conclusions me soient présentées à la mi-juin. C’est un délai très rapproché et c’est voulu: il ne faut pas que le fossé qui s’est creusé parmi les citoyens lors de cette votation très serrée perdure longtemps. Il faut travailler à rapprocher les points de vue.

– Pourriez-vous défendre un projet qui serait en contradiction avec le droit international?

– La Suisse a un intérêt à demeurer un partenaire fiable dans les relations internationales.

Valérie de Graffenried et Denis Masmejan dans le Temps

L'initiative anti mendicité est lancée

Le PLR lausannois a récolté hier les premières signatures pour son initiative populaire communale intitulée «Stop à la mendicité par métier!». D'ici au 3 mai, au moins 8333 signatures valables devront avoir été récoltées. Le PLR pourra compter sur l'appui des Vert'libéraux et – surtout – de l'UDC pour y arriver.

Comme il l'a annoncé mardi déjà, le parti blochérien diffusera sa propre affiche pour faire signer l'initiative rédigée par le PLR. Alors, hier devant la presse, c'est peut-être pour éviter qu'on les confonde encore un peu plus avec des élus UDC que les représentants du PLR ont évité d'employer spontanément le mot «Roms» dans leurs exposés. Et pour soutenir la récolte, ils ont présenté l'affiche financée par le PLR Suisse et disant «Stop à la mendicité. Par amour de la Suisse». Le texte de l'initiative interdit «à toute personne de s'adonner, d'organiser ou d'inciter à la mendicité par métier sur l'ensemble du territoire communal». Un mendiant «par métier», c'est «celui qui, notamment par la fréquence, le temps consacré ou le caractère organisé de son activité, vise à retirer un gain régulier de son activité», définit l'initiative. Un récidiviste «pourra être appréhendé et conduit au poste de police à des fins d'interrogatoire». Jusqu'au 3 mai, ils devront récolter au moins 8333 signatures valables. Le comité d'initiative est composé uniquement de membres du PLR, avec ses deux nouveaux candidats à la municipalité en vedettes: Mathieu Blanc en est le président et Marlène Bérard la vice-présidente. Les cantons de Fribourg, Neuchâtel, Genève et «la plupart» des alémaniques appliquent déjà une telle interdiction, ont dit les initiants devant les médias. Le droit pénal vaudois – effacé par le nouveau Code pénal suisse – interdisait la mendicité jusqu'en 2007. Puis le Grand Conseil refusa une interdiction, préférant laisser cette possibilité aux communes. Les communes de la Riviera viennent de le faire. Son application a un effet dissuasif, jugent les initiants. Les communes de l'Ouest lausannois en discutent aussi, même si le parlement communal de Renens, à majorité de gauche, s'y oppose. Les initiants disent craindre qu'à terme, Lausanne ne devienne une «oasis» de la mendicité.
«Nous ne nous en prenons pas aux personnes qui, de temps à autre, ont quelques fins de mois difficiles et demandent quelques francs pour aller à la Marmotte (gîte d'urgence dont l'entrée coûte 5 fr., ndlr), explique Mathieu Blanc. Ce qui irrite les Lausannois, ce sont vraiment ces bandes de gens qui arrivent le matin ensemble, qui sont placés à des endroits et vers lesquels passent ensuite les récolteurs pour chercher l'argent. Ils agacent les Lausannois, les commerçants et les touristes. Il s'agira d'éviter le débat de conscience et de séparer mendicité et pauvreté.» Selon les initiants, les mendiants sont «50 à 60 à Lausanne» et peuvent augmenter le sentiment d'insécurité: «Quand vous voyez des gens qui se traînent, ils peuvent effectivement faire peur, ils hèlent le passant», précise Martine Fiora-Gutmann. Autre élue PLR, Françoise Longchamp ajoute: «Ils sont souvent derrière nous quand nous sommes au bancomat. Et certains vous agressent verbalement si vous ne leur donnez rien.»

Jérôme Cachin dans le Courrier

Policier accusé de racket: un avocat réclame l'inculpation

En 2007, des requérants africains mettaient en cause un gendarme pour des vols. La partie civile dénonce la mise en veilleuse de la procédure.

Le Ministère public cherche-t-il à épargner un gendarme accusé de racket? Son attitude passive en «donne l'impression», affirme Me Jean-Pierre Garbade. Son client, A.C., un ex-requérant d'asile guinéen qui a été expulsé de Suisse, a porté plainte en février 2007 contre un sous-brigadier pour le vol de 150 francs et la falsification d'un reçu1. Quatre ans plus tard, l'avocat plaidait hier devant la Chambre pénale de recours pour demander une nouvelle fois l'inculpation de l'agent. Il réclame parallèlement la récusation du procureur en charge du dossier. Les décisions tomberont ultérieurement. Maître-chien aux «excellents états de service», selon son défenseur Me Olivier Jornot, le fonctionnaire a toujours nié la moindre malveillance. Il a tout de même été inculpé dans une procédure jumelle, en juin 2010, de faux dans les titres. Il a avoué avoir signé une déclaration et une autorisation de visite domiciliaire à la place d'un prévenu, selon lui par gain de temps. Ce délit a été découvert quand plusieurs autres ex-requérants l'ont également mis en cause pour des faits survenus entre 2005 et 2007. Les histoires se ressemblent, les victimes alléguées aussi: Africains, recalés de l'asile, connus des services pour du deal de rue.

Baptisé «Money Natel»
Lors de ses missions, le sous-brigadier les a interpellés à plusieurs reprises en ville ou au foyer du Lagnon, à Bernex, où certains résidaient. A tel point que les dénonciateurs l'avaient surnommé «Money Natel». Pour les sommes dont ils prétendent avoir été dépouillés (jusqu'à plusieurs centaines de francs), ainsi que les nombreux téléphones mobiles qui auraient disparu lors des contrôles. Dans certains cas, de petites quantités de cannabis et de boulettes de cocaïne auraient été dérobées.
Des accusations «invraisemblables», d'autant plus à la lumière des antécédents de leurs auteurs, soutient Me Jornot. L'avocat considère qu'un seul et unique reproche peut être adressé au gendarme: des saisies d'argent en prévision d'une contravention à recevoir. Cette pratique était illégale mais a longtemps été utilisée à Genève, notamment avec les mendiants roms, avant qu'un avis de droit conduise les autorités à y mettre fin. Me Jornot en a conclu au rejet de la requête de la partie civile. «Le procureur classera ensuite cette plainte, cela paraît évident.»
La hiérarchie policière, elle, n'avait pas pris à la légère les dires des Africains. En août 2007 déjà, à l'issue d'une longue enquête – avec écoutes téléphoniques –, les commissaires de la police genevoise ont transmis leurs conclusions à la justice. La lecture de ce rapport est édifiante: le document établit une liste conséquente d'irrégularités et de lacunes à charge du sous-brigadier. Des saisies non inventoriées, des quittances fantaisistes, des documents introuvables, des incohérences entre les différents types de formulaires remplis, ou encore des falsifications présumées et avérées.

Relancer l'instruction
Cette gestion approximative du travail administratif accrédite indéniablement une partie des dires de A.C. et des autres requérants. «Les soupçons sont suffisants. Il serait scandaleux de fermer les yeux et d'empêcher un débat judiciaire», s'est élevé Me Garbade. Pour lui, le magistrat instructeur – Michel-Alexandre Graber – aurait dû réentendre «tout le monde» après avoir reçu l'enquête de police: «Les commissaires le suggéraient eux-mêmes.»
Interrogé en marge de l'audience, l'avocat de la partie civile pointe le système genevois, qui ne prévoit pas de procureur spécial pour les affaires impliquant des membres forces de l'ordre. «Quand un magistrat travaille quotidiennement avec la police, il n'est pas facile de traiter ensuite les plaintes qui la visent», ajoute Me Garbade.

Olivier Chavaz dans le Courrier

Note : 1Le Courrier du 9 avril 2008.

Le port du voile à la TSR

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Raymond Bürki dans 24 Heures

Un cybercafé pour les migrants et les Bellerins

Un espace internet a été inauguré à l’EVAM. Population locale et requérants peuvent s’y rendre gratuitement.

Les résidents de l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM) de Bex sont désormais connectés au reste du monde, via internet. Six postes ont été installés dans une annexe indépendante du centre.

Du lundi au vendredi, toute personne âgée de plus de 12 ans peut désormais profiter du relais internet et vaquer à ses occupations informatiques à raison d’une demi-heure par jour. «C’est une politique développée à la fois pour que les migrants gardent un lien avec leur pays d’origine, dans l’optique d’un retour, et à la fois pour s’intégrer ici», explique Pierre Imhof, directeur de l’EVAM.

La gestion du cybercafé, ouvert trois heures par jour, est assurée par des résidents en programme d’occupation. Ils veillent à ce que tout fonctionne et à ce que les règles soient suivies. Dix commandements sont affichés dans la salle internet. On y lit notamment: «Tu n’emploieras pas l’ordinateur pour nuire à autrui.»

Particularité de ce cybercafé: il est ouvert à la population bellerine. «J’espère que les gens vont venir et que ça va faire tomber des barrières entre des populations qui ont tendance à s’ignorer», lâche Alain Michel, municipal en charge de la sécurité publique.

Le centre EVAM de Bex a connu par le passé de gros problèmes liés au deal de drogue. Ceux-ci ont parfois causé des tensions au sein de la cité du sel. Ouvrir l’espace internet aux Bellerins représente donc un moyen «d’estomper les préjugés liés au manque de connaissance de l’autre», selon Alain Michel.

Après les EVAM de Renens en 2007, suivi de Moudon, d’Yverdon, de Sainte-Croix et de Lausanne, Bex participe dorénavant à la réduction de la fracture numérique des migrants. Le coût de l’opération est négligeable, puisque la totalité du matériel est issu de la récupération. A Leysin, l’ouverture d’un espace similaire est prévue pour le 2 mars.

Cindy Mendicino dans 24 Heures

Informations: tél. 024 463 03 43

PLR et UDC au coude à coude sur la mendicité

mendicité vd afficheLes libéraux-radicaux lausannois ont lancé hier leur initiative communale pour interdire l’aumône par métier. L’UDC se frotte les mains.

«Cette initiative, c’est un trait de génie des libéraux-radicaux… en notre faveur!» Claude-Alain Voiblet, candidat UDC à la Municipalité, se frotte les mains. «Que les libéraux-radicaux récoltent les signatures, nous récolterons les voix», dit-il en substance.

Dès la semaine prochaine, la rivalité entre les deux partis gagnera la rue. Le PLR lancera lundi une campagne d’affichage, financée par le PLR Suisse. Deux jours plus tard, l’UDC mettra ses propres placards invitant à signer l’initiative. Les deux affiches sont quasi identiques (voir ci-contre ). Toutes deux disent «Stop (à la) mendicité». Celle de l’UDC parle de «qualité suisse», celle du PLR, «d’amour de la Suisse». Ces affiches proviennent pourtant de deux partis qui ont refusé de s’allier pour les élections communales. «Cette initiative va dans le bon sens, nous la soutenons, mais il sera difficile d’aboutir», estime toutefois Claude-Alain Voiblet. L’UDC aidera donc à la récolte des signatures. Mais elle refuse de siéger dans le comité. Elle revendiquera volontiers la paternité en cas de réussite, mais laissera, le cas échéant, le PLR assumer sa défaite.

8333 signatures à récolter d’ici au 3 mai

«C’est vrai que le thème de la mendicité était jusqu’à peu profilé UDC, reconnaît Mathieu Blanc, président du comité d’initiative et candidat à la Municipalité. Maintenant, nous avons repris le leadership sur le sujet. On peut appeler ça du suivisme, pour moi, cela fait partie du jeu politique.» L’UDC ne sera pas seule à soutenir l’initiative. Les Vert’libéraux devraient faire de même. Le PDC, par contre, ne suivra pas.

Les libéraux-radicaux devront récolter 8333 signatures pour faire aboutir leur initiative communale. La récolte de signatures a officiellement commencé hier. Elle durera jusqu’au 3 mai. Le parti ne veut plus que Lausanne soit «la dernière oasis de la mendicité», en faisant allusion aux interdictions qui existent dans les cantons de Neuchâtel, de Genève et de Fribourg, ou la région de la Riviera.

«Nous ne visons pas les personnes qui demandent de l’argent pour aller dormir à la Marmotte, mais bien ceux qui s’adonnent à la mendicité par métier», précise Mathieu Blanc. C’est-à-dire les personnes qui, «notamment par la fréquence, le temps consacré ou le caractère organisé de leur activité, visent à retirer un gain régulier de la mendicité.» Selon Mathieu Blanc, l’interdiction ne vise pas spécifiquement les Roms.

Pour Martine Fiora-Guttmann, conseillère communale membre du comité d’initiative, il ne se passe pas une semaine sans que les commerçants lausannois ne se plaignent des mendiants. «J’en ai un quasi tous les jours sur l’escalier de mon hôtel. Nous essayons de le chasser, mais il revient tous les jours. Les hôtes de nos villes sont étonnés. Ce n’est pas très bon pour le tourisme.»

Julien Magnollay dans 24 Heures

"Coteau Fleuri est juste une solution de secours"

vd pc lausanneHier, 22 requérants ont été déplacés de Nyon à Lausanne. Leur cas révèle les incohérences du régime de l’aide d’urgence.

Smajic Sanel a perdu le peu de moral qui lui restait. Comme ce Bosniaque qui a raconté son parcours dans nos colonnes (24 heures d’hier), 21 autres requérants déboutés ont été déplacés hier matin par l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM). Logés jusqu’ici à Nyon, ils passeront désormais leurs nuits à l’abri de protection civile de l’école de Coteau Fleuri, dans le quartier lausannois des Boveresses.

«Pas une vie»

Dès qu’il a découvert ce nouveau dortoir, Smajic a rendu la clé du casier où il aurait pu ranger ses quelques affaires. «Je ne reste pas. Ici, ce n’est plus une vie», souffle-t-il, abasourdi. A Nyon aussi, il était hébergé dans un abri PCi. Mais là-bas, l’aménagement des lieux lui permettait de préserver une certaine intimité. Et il n’était pas obligé de quitter les lieux au matin pour n’y revenir que le soir.

Alors, à midi, dans la «structure de jour» des Boveresses, Smajic profite encore du repas frugal (un thé, un sandwich mou, une pomme, une barre chocolatée) servi aux requérants à titre d’aide d’urgence. Puis il s’en va, sans dire où il compte dormir ce soir.

Ses 21 compagnons d’infortune resteront à Coteau Fleuri. Mais eux aussi, après avoir parcouru leur nouvel abri, ont protesté contre la dégradation des conditions de leur hébergement.

La situation des «NEM»

Directeur de l’EVAM, Pierre Imhof ne comprend que trop bien. A son arrivée en 2004, il s’était donné pour priorité de renoncer aux abris PCi, mal adaptés à des hébergements qui durent des mois, voire des années. Le dernier de ces lieux avait été fermé la même année. C’était l’abri de Coteau Fleuri, celui-là même que Pierre Imhof doit utiliser une nouvelle fois aujourd’hui.

«On n’a pas d’autre choix», explique le patron de l’EVAM. Après un pic, en 2008, le nombre des requérants d’asile arrivant dans le canton de Vaud s’est stabilisé. Tous statuts confondus, ils sont aujourd’hui près de 4500. Le problème, pour l’EVAM, c’est que lorsque leur demande d’asile se solde par une «non-entrée en matière» (NEM), beaucoup restent en Suisse. Etant en «situation irrégulière», ils n’ont droit qu’à une aide d’urgence, conformément aux règles imposées par la Confédération en 2008.

Neuf cents requérants déboutés sont actuellement assistés par l’EVAM. Ce sont les «papiers blancs», comme ils se désignent eux-mêmes en extirpant d’une poche le dérisoire formulaire qu’ils doivent obtenir du Service cantonal de la population pour être pris en charge par l’EVAM.

Conséquence inévitable, les structures d’accueil de l’EVAM sont saturées. Rares, très rares sont les communes qui acceptent de contribuer à la résolution du problème. Par rapport au reste du canton, la ville de Lausanne fait déjà plus que sa part. Elle a néanmoins accepté de remettre à disposition les locaux de Coteau Fleuri, où 50 «NEM» au maximum trouveront un lit.

Paradoxes de l’urgence

Pierre Imhof n’a pas changé d’idée depuis 2004: «C’est une solution de secours.» Elle ne servira d’ailleurs que pour l’hébergement de célibataires. Si le directeur de l’EVAM n’y recourt qu’à contrecœur, c’est aussi pour des raisons économiques: «Paradoxalement, le système de l’assistance d’urgence coûte beaucoup plus cher que les autres formules d’hébergement.»

Pierre Imhof s’explique: «Nous ne devons fournir à ces migrants rien de plus qu’une aide matérielle.» Un lit, les repas, des soins si nécessaires. Mais jamais d’argent. Ce dispositif implique un encadrement onéreux. Exemple: un requérant en cours de procédure touche 8 francs par jour pour ses repas, tandis que les trois repas que l’EVAM sert aux NEM coûtent en moyenne 25 francs.

«Nos charges se réduiraient aussi si nous pouvions construire pour disposer de locaux adaptés à nos besoins», poursuit Pierre Imhof. Mais les oppositions sur le plan communal rendent tout projet immobilier des plus incertains.

Autant dire que, hier, dans l’atmosphère confinée de l’abri de Coteau Fleuri, les 22 requérants et la direction de l’EVAM n’étaient pas loin de partager les mêmes états d’âme.

Daniel Audétat dans 24 Heures


vd requérants aide projet vie

La SSR renonce à règlementer le port du voile face à la rareté des cas

Il n’y aura pas de directive nationale sur le port de signes religieux pour les journalistes. Mais en Suisse romande, la RTS a dû trancher.

Un média de service public peut-il compter dans ses rangs une journaliste portant un foulard islamique? Confrontée à ce dilemme, la Radio Télévision Suisse (RTS) – Radio et Télévision suisse romande – doit désormais se débrouiller seule. Car à Berne, malgré ses promesses, la SSR renonce finalement à trancher dans ce délicat dossier qui suscite le débat. Origine du malaise: la postulation à la Radio suisse romande, en fin d’année dernière, d’une étudiante en journalisme qui porte le hijab ( 24 heures des 6-7 janvier ).

Dimanche dernier, Roger de Weck, le nouveau directeur général de la SSR, a ainsi annoncé à la NZZ am Sonntag qu’aucun règlement ne serait élaboré au niveau national: «Une directive est complètement inutile aussi longtemps que, sur 6100 employés, il y a un cas à résoudre toutes les années bissextiles. Tant que l’on a affaire à de rares cas isolés, c’est aux supérieurs qu’il appartient de décider, en s’appuyant sur le sens commun et en considérant les intérêts de l’entreprise et du service public.» Et Roger de Weck de conclure: «Il y a suffisamment de règles à la SSR, pour ne pas dire trop.»

Cette prise de position est aux antipodes des promesses faites par la SSR, en janvier, d’élaborer des «directives claires» sur le port de signes religieux dans les médias de service public du pays. Une prise de position était attendue d’ici au printemps, promettait-on.

La direction de la RTS n’a donc pas eu d’autre choix que de trancher par elle-même. Verdict? Les journalistes amenés à exercer leur métier sur le terrain, lors d’interviews, de conférences de presse ou d’apparition à l’écran, devront s’abstenir d’afficher des signes d’appartenance ostentatoire. Mais la religion n’est pas seule touchée: «Cela concerne aussi bien le port d’un foulard islamique que l’expression d’un symbole politique ostentatoire ou d’appartenance à une association», explique Manon Romerio, directrice de la communication à la RTS. Qui conclut: «Le ou la journaliste est tenu de présenter une apparence d’impartialité à son interlocuteur et au public.» Cette pratique, qui relevait jusqu’ici d’une règle non écrite dans la profession, sera désormais «précisée si besoin par les rédactions en chef concernées».

Quant à l’aspirante journaliste voilée, elle a pour l’heure reçu une réponse négative à l’une de ses deux postulations à la Radio suisse romande. «Elle ne correspondait pas aux critères de base» (en termes de formation), note la RTS. Pour la deuxième, la sélection est encore en cours.

Martine Clerc dans 24 Heures


ssr port voile