mardi 13 janvier 2009

Suisse : Les sans-papiers sont toujours là

L'HEBDO

Edition du 08.01.2009 > Actuels > Suisse > Les sans-papiers sont toujours là

Les sans-papiers sont toujours là

Par Michel Guillaume

Clandestins. Président de la Commission fédérale pour les questions de migration, Francis Matthey estime qu’il est temps de reconnaître leur existence et d’assouplir la législation.
 

Cinq ans après la Suisse romande, les Suisses allemands découvrent le problème des sans-papiers. Quelque 150 d’entre eux ont occupé la Predigerkirche, à Zurich, où ils ont passé les Fêtes. Après avoir été massivement approuvées par le peuple en septembre 2006, les lois sur l’asile et sur les étrangers laissent apparaître leurs criantes lacunes.

A Zurich, la plupart des sans-papiers sont des requérants d’asile dont la demande a été rejetée, des NEM (non-entrée en matière) dans le jargon de l’Office fédéral des migrations. Selon l’ex-conseiller fédéral Christoph Blocher qui a durci ces deux lois, ils devraient quitter la Suisse. Mais voilà: ils sont toujours là. Et ils se manifestent désormais à visage découvert en racontant comment ils survivent en Suisse. Avec un bon Migros de 8 fr. 60 par jour.

Briser le tabou. Lundi 5 janvier, le responsable politique de la police, le conseiller d’Etat Hans Hollenstein, a rencontré une délégation de représentants des sans-papiers. Sans grand résultat: le politicien PDC a certes promis de créer une commission d’étude des cas de rigueur pour les soumettre à Berne, où l’Office des migrations tranche en dernier ressort.

Mais le principal problème n’est pas là. La loi révisée sur les étrangers ne mentionne même pas les sans-papiers, comme s’ils n’existaient pas, alors qu’on estime leur nombre entre 90 000 et 300 000 selon les sources. «Il est grand temps de briser ce tabou», estime Maria Roth Bernasconi (PS/GE). La libérale Martine Brunschwig Graf qui, à l’époque, s’était battue pour la régularisation des sans-papiers à Genève, abonde dans ce sens. «Les sans-papiers sont là, car l’économie a besoin d’eux», constate-t-elle.

Face à cette «double hypocrisie des autorités et des employeurs qui exploitent des travailleurs au noir», le président de la Commission fédérale pour les questions de migration, l’ancien conseiller d’Etat neuchâtelois Francis Matthey estime qu’il est temps d’agir. «Il faut modifier la loi sur les étrangers ou, du moins amender ses modalités d’application.»

Jeunes scolarisés. En septembre 2007, Francis Matthey a rencontré la ministre de Justice et Police Eveline Widmer-Schlumpf. «Nous avons demandé une application moins rigoureuse de la législation, en particulier pour les familles et les jeunes qui ont accompli leur scolarité obligatoire en Suisse», déclare-t-il.

Maria Roth Bernasconi propose la régularisation de tous les sans-papiers en Suisse depuis cinq ans, qui travaillent et n’ont pas recours à l’aide sociale. Sans grand espoir: «Le Parlement est très à droite dans ce domaine.»

Des Juifs reçoivent des journaux antisémites

Des plaintes ont été déposées contre les auteurs inconnus de ces pamphlets envoyés depuis Sion et Eclépens. Un article de Chloé Dethurens dans 24 Heures.
Me Ph. Grumbach, président de la CicadInsultes, moqueries, clichés di­gnes de la plus virulente propa­gande nazie. Les pamphlets qu’ont reçus une dizaine de Juifs genevois et lausannois font froid dans le dos. Trois exemplaires différents, tous anonymes, en­voyés à diverses associations is­raélites, qui ont riposté en dépo­sant une plainte dans les can­tons de Genève et de Vaud.
  Le 20 octobre, plusieurs orga­nisations juives ont reçu un mys­térieux pli, expédié de Sion, orné d’un dessin évoquant le mythe du complot juif mondial. L’enve­loppe contient un petit journal antisémite, adressé aux person­nes responsables de ces associa­tions israélites. Son titre: Grin­goire, du nom d’un pamphlet d’extrême droite édité en France durant l’entre-deux-guerres.
  Le contenu de ces quelques pages est clairement antisé­mite. Les Juifs y sont qualifiés de «vermine» et de «parasites religieux». Le journal est ac­compagné d’extraits de Mein Kampf, d’Adolf Hitler, d’articles de la revue genevoise Le pilori, fondée par Georges Oltramare, ou encore de passages décorti­qués de l’Ancien Testament.
«Ce texte est à vomir»

  Ce nouveau Gringoire s’en prend aussi directement à ses destinataires, tels le président de la Cicad (Coordination inter­communautaire contre l’antisé­mitisme et la diffamation), Me Philippe Grumbach, et son secrétaire général, Johanne Gur­finkiel. La Cicad, comme les autres associations concernées, s’indigne de ces pamphlets re­çus à trois reprises en octobre et en décembre. «Même si ce n’est pas fréquent, il est très grave que l’on puisse écrire de telles choses encore aujourd’hui», es­time Ron Aufseesser, président de la Communauté israélite de Genève. «Je n’ai jamais vu de pamphlets d’une aussi grande violence, ajoute Me Philippe Grumbach. Ce texte est à vomir. Il n’a certainement pas été ré­digé par un élément isolé. Mais nous ne savons pas qui est der­rière. Nous exigeons aujourd’hui que les auteurs soient retrouvés et sanctionnés, surtout dans le contexte d’un antisémitisme croissant.» Envoyés avant l’offensive is­raélienne sur Gaza, ces écrits n’ont pas de lien avec le conflit actuel. Ce n’est pas le cas, en revanche, du saccage de la de­vanture d’un centre d’études juives, qui a été brisée à Genève dans la nuit de dimanche à lundi. Selon la Cicad, il s’agit d’un «acte ciblé contre un bâti­ment juif». Une nouvelle étape est ainsi franchie, après les in­sultes sur internet, les tags et les tracas, selon l’association.