La Suisse respectera ses engagements à l'égard de l'Union européenne même si une votation (un référendum) organisée dimanche 28 novembre a vu se dégager une majorité en faveur de l'expulsion de tous les étrangers délinquants. C'est ce qu'a affirmé jeudi 2 décembre, à Bruxelles, Simonetta Sommaruga, conseillère fédérale (ministre) pour la justice et la police.
Des capitales dénoncent le caractère automatique, et sans recours possible, d'une mesure qui devrait, en principe, s'appliquer aussi aux citoyens de l'UE, alors que la Suisse a le statut d'Etat associé aux accords de Schengen sur la libre-circulation au sein de l'espace européen sans frontière.
Les directives européennes interdisent par ailleurs les expulsions collectives et les mesures discriminatoires. Or, le texte approuvé dimanche – et déposé par le parti populiste de droite UDC – ne tient notamment pas compte de la gravité des délits commis.
Respecter des obligations internationales
Mme Sommaruja a tenté, mercredi 2 décembre, de rassurer les ministres de l'intérieur des Vingt-sept, réunis à Bruxelles pour un conseil. Elle affirme qu'elle trouvera une solution qui permettra à la Suisse de respecter ses obligations internationales. Dans l'immédiat, le principe de la libre-circulation n'est pas remis en cause, assuré Mme Sommaruja. Elle ne cache toutefois que son pays va avoir des difficultés à "interpréter" le texte sans remettre en cause soit la décision populaire, soit les engagements européens de la Confédération.
Des experts du Conseil européen ont signifié dès le mois d'octobre à la Suisse que l'initiative de l'UDC contredisait la Convention européenne des droits de l'homme mais aussi l'accord de libre circulation des personnes signé en 1999 entre Bruxelles et Berne.
A ce stade, les Européens calment le jeu et affirment "examiner" le problème posé par la votation. Certains Etats semblent d'autant moins enclins à pénaliser Berne qu'ils sont eux-mêmes confrontés à certains mouvements populistes ou xénophobes et estiment ne pas avoir de leçons à donner à la Suisse.
A Bruxelles, des diplomates soulignent cependant, à mots couverts, que le vote intervenu dimanche pose clairement un problème juridique et politique qu'il faut régler, soit dans le cadre du comité mixte Suisse-UE, soit par une décision politique de Bruxelles qui pourrait, en théorie, aller jusqu'à rompre l'accord sur la libre-circulation des personnes, voire d'autres accords. Une perspective lointaine et, à ce stade, encore peu probable.
Jean-Pierre Stroobants dans le Monde