lundi 23 mai 2005

Les "à fonds anti-racistes" à Bex


Une trentaine de manifestants ont défilé samedi dans les rues de Bex pour dénoncer les comportements racistes. Malgré les rumeurs qui circulaient, aucune provocation n'a été enregistrée.

Assises de l'immigration, atmosphère tendue


Samedi à Morges, les quatrièmes Assises de l’immigration ont subi le contrecoup de la décision du Gouvernement vaudois d’appliquer les mesures de contrainte envers les requérants déboutés. Le groupe «Non aux expulsions» a tenté d’empêcher le conseiller d’Etat Jean-Claude Mermoud de s’exprimer. Et plusieurs participants ont quitté la salle au moment de son discours. Organisatrice des Assises, la Chambre cantonale consultative des immigrés a adopté une résolution pour s’opposer à l’utilisation des mesures de contrainte et pour dénoncer le renvoi du groupe des «523».
24 heures rends compte de cette journée en page 28 par la plume de Nicolas Verdan.
En ce qui concerne les résultats des discussions sur le projet de loi sur l'intégration, le bilan n'est pas fameux. La CCCI (commission consultative cantonale pour l'intégration) n'a même pas été consultée par le Conseil d'Etat avant de mettre ce projet en branle.
Le point le plus critiqué est que la loi ne s'adresse qu'aux étrangers les plus intégrés; un comble pour une loi sur l'intégration:
Reste cette question, qui était samedi sur toutes les lèvres. Pourquoi limiter cet avant-projet de loi sur l’intégration aux seuls permis B et C? «Et tous les autres, alors?» Serge Paccaud, responsable du service communautaire de la Planchette à Aigle, fulmine. Membre de la Coordination Asile Chablais, homme de terrain, il voit dans cette restriction «une hypocrisie totale».
Dans son commentaire, Nicolas Verdan mets lui aussi le doigt sur cet absurdité:
Une telle vision restrictive est inspirée par la Berne fédérale. Elle repose sur un postulat temporel: l’intégration ne peut être envisagée que dans une perspective durable. Sont ainsi exclus toutes celles et tous ceux qui sont le plus démunis dans le nouveau paysage qui est le leur. Soit les requérants d’asile, susceptibles d’être refoulés, et les clandestins. Or, la réalité du terrain le prouve, ce sont avant tout eux qui ont, par exemple, besoin de suivre des cours de langue ou qui cherchent un accès au monde du travail.
En se focalisant ainsi sur ces deux lettres B et C, le Canton se propose de dresser un nouvel obstacle juridique à l’intégration. Une vision étroite en rupture avec la réalité du terrain. Dommage.

Lire également, l'article de La Liberté et l'interview d'une jeune députée Européenne d'origine kurde.

Rixe de Bex, le courrier des lecteurs de 24 heures

Voici les réactions publiées ce lundi en page deux du quotidien.

Vous confondez le responsable et la victime
» A propos de la nuit d’émeute à Bex (24 heures des 12 et 13 mai 2005):
Je suis abasourdi de la manière dont vous avez traité l’événement. L’auteur des graffitis, loin d’en être la victime, est bien le premier responsable. Son acte est condamnable et doit être jugé. Personne n’est au-dessus des lois qui protègent les citoyens, personne ne peut faire justice lui-même. S’il a subi un tort ou constaté une illégalité telle qu’un trafic de stupéfiants, il peut saisir la justice.
Ce monsieur se dit satisfait de ses graffitis racistes et vous faites la part belle à sa justification! Ce faisant, vous activez la haine raciale et par là même les réponses violentes. Quel bel exemple, pour nos jeunes!
Son acte est aussi intolérable que la réaction des requérants. La violence n’est jamais une réponse. Le seul chemin est le dialogue, celui qu’on doit apprendre aux jeunes. Mais quand, au sein même de notre Conseil fédéral, ce dialogue devient impossible, que chacun est plus disposé à tirer la couverture à soi qu’à trouver des réponses, l’avenir s’annonce sombre.
L’événement de Bex démontre clairement que la politique actuelle de l’asile, dite de «durcissement», est une aberration. Loin d’augmenter la sécurité, elle la diminue en incitant des personnes peu informées à des jugements péremptoires et xénophobes.
Combien de signataires de cette fameuse pétition, devenue incontournable pour les citoyens qui souhaitent fréquenter sans heurts les commerces de Bex, connaissent-ils notre politique d’asile? Combien savent qu’on vient d’interdire de travailler à des centaines de requérants déboutés? Renseignez-vous, ne mettez pas la tête dans le sac, et nous éviterons de tels événements. Sinon, nous serons responsables d’une montée de violence sans précédent, qu’il sera trop facile de mettre sur le dos des étrangers!
Serge Paccaud,
Aigle


Les autorités doivent réagir
A propos de la nuit d’émeute à Bex (24 heures des 12 et 13 mai 2005):
Je comprends le geste désespéré du citoyen de Bex. Tout le monde (ou presque) parle de discrimination raciale. Mais alors que penser de ces chers requérants qui viennent en Suisse se faire de l’argent sur le dos des jeunes, avec leur satanée drogue? Le pays commence à en avoir assez de ces agissements.
Qu’attendent les autorités suprêmes pour bouger? Il faut renvoyer ce genre d’individus peu désirables. Je suis maman et grand-maman, et franchement l’avenir me fait peur,pour tous ces jeunes impuissants devant tant d’indifférence. Il ne faut pas mettre la faute sur la police, qui agit selon les moyens et les ordres qu’on veut bien lui donner.
Il est scandaleux de voir que la population est manipulée par des autorités trop laxistes. Il serait temps qu’elles réagissent!
Anne-Marie Burdet,
Villeneuve


Retrouver le sens du dialogue
» A propos de la nuit d’émeute à Bex (24 heures du 12 mai 2005):
Les commentaires sur les inscriptions racistes et les échauffourées qui ont suivi ont souvent insisté sur la violence des requérants d’asile d’origine africaine, en faisant l’amalgame entre ceux-ci et le trafic de drogue.
On dirait que tous les habitants approuvent ou comprennent M. Corboz, auteur des inscriptions haineuses. Ce n’est pas vrai. Depuis douze ans que j’habite la région, j’ai été conviée régulièrement à des journées portes ouvertes organisées par le centre d’accueil et le Groupe bellerin d’appui aux requérants d’asile, qui existe depuis plus de vingt ans. Beaucoup d’habitants ont tissé des liens personnels avec des requérants. La diversité culturelle a toute une histoire à Bex. C’est une des qualités de la localité.
La répartition inégale des centres d’accueil sur le territoire cantonal n’est pas étrangère à la dégradation de la situation. Mais en demandant la fermeture du centre, la Municipalité, présidée par un socialiste, a favorisé l’expression de ressentiments envers les requérants.
Au lieu de gérer les problèmes avec sobriété, elle a misé sur la sensation, donnant ainsi une légitimation à une dérive. Elle pourrait redresser la barre en favorisant les initiatives qui vont dans le sens du dialogue et du respect mutuel plutôt que de prôner l’exclusion.
Ursula Gaillard,
La Peuffeyre-sur-Bex


Le syndic n’a pas su apaiser
» A propos de la nuit d’émeute à Bex (24 heures des 12 et 13 mai 2005):
J’ai assisté, il y a quelques mois, à une conférence publique en présence de Michel Flueckiger, syndic de Bex. Le thème était la lutte contre la drogue, mais comme une bonne partie des citoyens présents, M. Flueckiger a axé toutes ses interventions sur le problème posé par la Fareas et ses requérants d’asile. Il a réclamé à plusieurs reprises le départ de «ces gens-là», requérants étant apparemment coupable de (presque) tous les problèmes dont souffre Bex.
Un syndic et politicien expérimenté devrait tout tenter pour apaiser les tensions entre citoyens et requérants. Il est garant de l’ordre public et ne devrait pas jeter de l’huile sur le feu. Ainsi, j’ai été très déçu qu’il ne condamne pas l’auteur des inscriptions racistes.
Je peux comprendre l’indignation des Bellerins devant les comportements délictueux d’une minorité de requérants. Mais ce n’est pas en passant sous silence un acte raciste, qui a sa source dans une peur des étrangers de plus en plus ressentie en Suisse, que M. Flueckiger va amener un apaisement.
(...) Au lieu d’exiger la suppression du centre et de critiquer la politique d’asile cantonale, le syndic devrait plutôt aider à trouver des solutions réalistes et constructives pour améliorer les relations entre une population et des requérants qui en auraient bien besoin.
Xavier Rubli,
Ollon


La banalisation m’effraie
» A propos de la nuit d’émeute de Bex (24 heures des 12 et 13 mai 2005):
Les récents événements qui se sont produits à Bex m’ont profondément choqué. J’aimerais tout d’abord dire qu’y vivant depuis vingt ans, je n’ai jamais ressenti le moindre sentiment d’insécurité, il en est de même pour toutes les personnes que je connais.
Le centre Fareas et ses habitants n’ont jamais amené de troubles, ils ont plutôt amené un peu de vie dans cette ville parfois morne. Je ne comprends pas la façon dont la presse et les autorités ont réagi à ces événements, condamnant bien plus les requérants d’asile que l’auteur des graffitis.
24 heures, notamment, a qualifié les agissements de ce dernier de cri du cœur, alors qu’écrire «Nègres go home» sur les murs n’est rien d’autre qu’un acte raciste impardonnable et intolérable. Et c’est bien ce racisme exacerbé qui me semble le plus grave dans cette histoire. Je m’effraie de la banalisation de tels actes que pratique une certaine presse.
Pierre Raboud,
Bex

Aide au retour, interview sur place

Au journal du matin de La Première, Michel Bory fait entendre les voix de trois ex-requérants originaires du Kosovo et qui sont rentrés dans leur pays d'origine.