mercredi 5 mai 2010

L’Islam en Suisse à l’aune de la méfiance

musulmans modérésPlus brûlant que jamais, le débat sur l’islam a récemment encore été attisé par les revendications du Conseil central islamique de Suisse. Un contexte dans lequel les musulmans modérés se sentent peu entendus, comme le révèle le Bosniaque Alic Nedzad. Entretien.

Alic Nedzad a fui sa Bosnie natale à l’âge de 12 ans, en 1992, pendant la guerre, pour venir s’installer en Suisse avec sa famille.
Il a été le coordinateur d’une organisation de jeunesse bosniaque et il a également siégé au comité de la mosquée bosniaque de Berne.
Depuis 2003, le trentenaire est rédacteur en chef de la revue Swiss BiH, une plateforme électronique d’échange et d’intégration, destinée aux ressortissants bosniaques installés dans la Confédération.

Lire la suite de cet article de Corinne Buecher sur swissinfo.

Renvoi forcé: un ministre fribourgeois écrit à Philippe Leuba

Le conseiller d'Etat Pascal Corminboeuf plaide en faveur d'un Béninois menacé de renvoi et de sa fille, établie à Domdidier (FR). Un article de Michaël Rodriguez dans le Courrier.
Le conseiller d'Etat fribourgeois Pascal Corminboeuf s'alarme de la situation d'un jeune Béninois et de son enfant. Il a écrit au ministre vaudois de l'Intérieur Philippe Leuba en lui demandant de faire tout son possible pour éviter que Dieudonné, un requérant d'asile menacé de renvoi, ne soit arraché à sa fille de 7 ans. Ministre fribourgeois des Institutions, Pascal Corminboeuf est aussi le parrain de la mère de la fillette.
«Il faudrait donner une chance à la petite de connaître son père, estime Pascal Corminboeuf, joint par téléphone. Je trouve choquant que l'on casse des liens autour d'un enfant. On connaît assez les dégâts dus au fait que des enfants n'ont pas eu de relation équilibrée avec leurs deux parents.» Dieudonné vit séparé de son ex-compagne, mais il entretien des liens étroits avec sa fille, établie à Domdidier (FR) avec sa mère et son grand-père (notre édition du 31 mars). La démarche de Pascal Corminboeuf a coïncidé avec la libération de Dieudonné et de plusieurs autres requérants d'asile incarcérés en vue de leur renvoi. Les juges de paix vaudois venaient de décider de ne plus reconduire les mesures de détention administrative jusqu'à nouvel ordre. Motif: les vols spéciaux affrétés pour les expulsions sont gelés suite à la mort d'un Nigérian à l'aéroport de Zurich-Kloten. Le département de Philippe Leuba a signalé cette libération à Pascal Corminboeuf. Mais le ministre vaudois ne lui a pas répondu sur le fond. Il a écrit en revanche au grand-père de la fillette, Bernhard Hugo, qui s'était adressé à lui et à la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf. La lecture comparée des deux réponses – cantonale et fédérale – vaut le détour. A propos d'une éventuelle régularisation humanitaire, le ministre vaudois note que «c'est l'autorité fédérale qui est compétente en la matière». Qu'en dit-on à Berne? «Dans la mesure où l'autorité cantonale n'est pas disposée à envisager un règlement des conditions de séjour (de Dieudonné, ndlr) dans notre pays, les autorités fédérales ne bénéficient d'aucune marge de manoeuvre dans ce dossier.» Ce hiatus illustre sans doute assez bien comment des situations humaines peuvent «disparaître» dans l'angle mort des administrations. Curieusement, les autorités n'évoquent pas la piste du regroupement familial, pourtant la plus logique. C'est celle, en tout cas, que prévoit d'emprunter le Service d'aide juridique d'aide aux exilés (SAJE). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, un parent étranger peut prétendre à un permis de séjour au titre du regroupement familial, même en l'absence de vie commune. Pour cela, il doit prouver qu'il entretien un lien fort avec son enfant. La décision est normalement du ressort des cantons. Mais là aussi, Lausanne et Berne risquent de se renvoyer la balle. «D'après mes services, il s'agit d'une situation d'exception, qui est de compétence fédérale», indique Philippe Leuba.
En filigrane de l'histoire de Dieudonné se pose la question du respect du droit à la famille. Tout récemment, les autorités vaudoises étaient prêtes à expulser Pitchou, un jeune Congolais, et à l'arracher à son fils nouveau-né. Il a été libéré in extremis le 2 mars dernier sur ordre des autorités fédérales, et a obtenu depuis une admission provisoire. Selon le SAJE, plusieurs mères et leurs enfants sont également menacés de renvoi. L'interdiction, dès janvier 2011, du mariage pour les personnes établies illégalement en Suisse, contribuera encore à affaiblir la protection des liens familiaux des migrants.

Femme en burqa condamnée en Italie

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Le canton d’Argovie veut à son tour bannir le voile intégral

Après la Belgique, la France et l’Allemagne, le débat rebondit en Suisse. Hier en Argovie, les Démocrates suisses ont réussi à convaincre le Grand Conseil de préparer un projet d’interdiction de la burqa. Il devrait être soumis à Berne. Un article de Caroline Zuercher dans 24 Heures.

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Le débat sur l’interdiction du voile intégral était dans l’air. Le canton d’Argovie met le feu aux poudres. Son Grand Conseil a voté hier, par 89 voix contre 33, une motion des Démocrates suisses visant son interdiction dans l’espace public. Le texte a été soutenu par l’UDC, le PLR, le PDC, le PBD et les Evangéliques. Les socialistes et les Verts s’y sont opposés. Une commission va préparer une initiative cantonale. Le plénum décidera s’il souhaite la déposer aux Chambres fédérales.

Les arguments ont été classiques. La burqa est un symbole du pouvoir de l’homme sur la femme et empêche l’intégration, ont souligné les partisans de l’interdiction. Ce n’est pas à nous de faire pression sur Berne, ont rétorqué les socialistes alors que les Verts ont dénoncé une attitude «hystérique» et «visant à faire peur».

Ces vêtements qui cachent le visage de la femme sont au cœur des polémiques. En Suisse comme en Europe. La semaine dernière, les députés belges ont décidé de les interdire. Le Conseil des ministres français examinera le 19 mai un tel projet de loi. Et la cheffe de file des libéraux allemands a réclamé dimanche une mesure similaire.

Dans le monde politique suisse, la burqa et le niqab font aussi l’unanimité contre eux. Mais pas la nécessité de légiférer. Comme le rappelle Martine Brunschwig Graf (PLR/GE), il ne doit pas y avoir plus de dix à onze femmes portant la burqa en Suisse. La Genevoise s’oppose aussi à une mesure visant une religion particulière. A son avis, les dispositions cantonales permettent déjà d’exiger que le visage soit découvert dans l’espace public, au nom de l’ordre public. Reste à savoir, précise-t-elle, «si la solution fédéraliste suffit ou si des dispositions devraient être précisées sur le plan suisse».

La proposition d’Oskar Freysinger

Cette voie a déjà été suivie par l’UDC valaisan Oskar Freysinger. Dans sa motion «Bas les masques!», il demande une règle fédérale interdisant les visages couverts dans les transports publics, devant les autorités et lors de manifestations. Il évoque dans son texte les voiles intégraux, mais aussi les cagoules et les masques. Une manière d’éviter le débat religieux. «Ma motion est pragmatique, souligne-t-il. Je propose de régler le problème là où il est le plus aigu.» Car le Valaisan le sait aussi: une interdiction totale serait difficile à appliquer.

Musulmans divisés

Bannir la burqa, le président du PDC Christophe Darbellay l’a déjà proposé en 2006. «Nous ne voulons pas de guerre de religions, mais une politique d’intégration crédible doit comporter des limites claires», argumente le Valaisan. Or, poursuit-il, ce vêtement est «une expression du fondamentalisme».

La question divise les musulmans eux-mêmes. Ainsi, le Forum pour un islam progressiste s’oppose à la burqa et au tchador. «Ils sont indignes pour la femme et il n’est pas écrit dans le Coran qu’elle doit être couverte de la sorte, argumente sa présidente Saïda Keller-Messahli. La burqa est peut-être un faux problème en Suisse, mais cela nous oblige à entamer un débat public. Le voile, le niqab, le tchador… Je ne pense pas qu’en les portant, les femmes se soumettent aux hommes. Par contre, ils traduisent un problème avec le corps de la femme qui se retrouve d’ailleurs dans toutes les religions. Et il faut parler de ces tabous. »

Berne tient au dialogue, mais pas avec le CCIS de Nicolas Blancho

Berne refuse le dialogue

berne dialogue ccis

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