dimanche 8 avril 2012

La Turquie s’inquiète de l’afflux de réfugiés syriens

Certaines sources parlent de 3000 personnes qui ont franchi la frontière en une journée pour fuir les violences en Syrie. Face à cette situation, le Premier ministre turc a demandé à l’ONU de se montrer beaucoup plus ferme à l‘égard de Damas.

Les civils constituent l’essentiel des réfugiés, mais il y a aussi des déserteurs de l’armée loyaliste qui ont choisi de rallier l’insurrection. Tous souhaitent garder l’anonymat.
L’un d’eux assure que des Iraniens se trouvent en Syrie depuis le début du soulèvement. Il s’agit, selon lui, de “Gardiens de la Révolution qui participent à la répression”. Un autre insurgé ajoute : “on demande à la communauté internationale de nous fournir des armes. Ainsi, on pourra facilement et rapidement renverser le régime et libérer le pays”.

Depuis le début de la répression, plus de 24 000 Syriens ont trouvé refuge en Turquie. Sur place, dans les camps de déplacés, on affirme que le régime de Bachar Al-Assad a fait installer des mines le long de la frontière pour empêcher le passage des civils.

Ceux qui ont fui en Turquie espèrent pouvoir retourner un jour chez eux, mais ils ne sont pas vraiment optimistes. C’est ce qu’a constaté Mustafa Bag,, l’envoyé spécial d’euronews au camp de réfugiés de Reyhanli. “Quand le plan de Kofi Annan a été voté, dit-il, le sang devait arrêter de couler et les armes devaient se taire. Mais les refugiés pensent que cela ne servira à rien d’autre qu‘à faire gagner du temps à Bachar Al-Assad.

Euronews

L’horizon est encore bouché

Malgré les efforts des ONG et les fonds de l’UE, la principale minorité européenne ne vit pas mieux qu’il y a 10 ans. Un manque de suivi à Bruxelles, la corruption des responsables locaux et le désintérêt des Etats en sont les raisons principales.

famille rom

Le 8 avril est la journée internationale des Roms, mais une part importante des 12 millions d’entre eux qui vivent en Europe vit encore dans une pauvreté accablante. Les tensions ethniques s’accentuent, comme on a pu le constater avec les attaques des campements roms en Italie en 2008 ou les intimidations auxquelles se livrent des paramilitaires racistes en Hongrie.

En septembre dernier, des milliers de Bulgares sont descendus dans la rue, en criant des slogans comme "Les tziganes, il faut en faire du savon". "Le traitement réservé aux Roms est le test décisif de la démocratie", affirmait prophétiquement feu le président tchèque Václav Havel en 1993. La transition vers le capitalisme a eu des conséquences désastreuses pour les Roms.

Sous le régime communiste, ils avaient un emploi et étaient logés et scolarisés gratuitement. A présent, beaucoup perdent leur emploi, leur logement, et le racisme à leur encontre ressurgit impunément.

Le rôle limité de l'UE

A la fin des années 1990, la perspective de l’adhésion à l’UE de certains pays d’Europe centrale et orientale a laissé entrevoir une amélioration. "Les responsables roms étaient très enthousiastes", se souvient l’ancien député européen Jan Marinus Wiersma. Les pays candidats à l’adhésion adaptaient leur législation à celle de l’UE et proposaient des projets.

Ce n’était que de la poudre aux yeux, disent désormais les ONG et les militants des droits des Roms. En Bulgarie, par exemple, les Roms ont retrouvé massivement un emploi, d’après les chiffres officiels.

"En réalité, ils se sont retrouvés quelques mois plus tard à la rue", dit à Sofia la chercheuse bulgare Ilona Tomova. "Nous, les pays postcommunistes, nous nous y connaissons en manipulation des chiffres. Mais l’Union ne s’en est pas rendue compte."

Maintenant que ces pays sont devenus des Etats membres de l’UE, Bruxelles ne peut plus utiliser la perspective de l’adhésion comme moyen de pression, estime Rob Kushen, directeur du Centre européen des droits des Roms (ERRC) à Budapest.

La Commission européenne est en outre liée par le principe de subsidiarité : "En ce qui concerne les Roms, ce sont les pays membres qui jouent un rôle déterminant en matière d’enseignement, d’emploi, de logement et de santé. Notre rôle se limite à coordonner", dit Matthew Newman, porte-parole de Viviane Reding, la commissaire chargée des Droits fondamentaux et de la Justice.

Bruxelles peut toutefois influer sur la politique par le biais des fonds européens. Pour la période 2007-2014, par exemple, la République tchèque, la Roumanie et la Slovaquie ont reçu chacune 172 millions d’euros spécialement affectés à la question rom.

Les pays membres où vivent des Roms peuvent aussi déposer des demandes au titre de programmes sociaux plus étendus. Cette cagnotte représente au total 17,5 milliards d’euros.

La Slovaquie avait obtenu 200 millions d’euros pour un nouveau programme. De 2001 à fin 2006, Klara Orgovanova a travaillé dans ce pays avec une équipe de 30 personnes.

Comment l'argent des subventions disparaît

Mais en juillet 2006, le parti social-démocrate [SMER-SD] est arrivé au pouvoir et a formé une coalition [jusqu’en 2010] avec le Parti national slovaque [SNS], dont le leader, Ján Slota, estimait que les Roms se domptent avec un "long fouet dans une arrière-cour".

Ensuite, le plus gros de la somme a "disparu", transformée en de nouveaux feux tricolores, des équipements technologiques pour les hôpitaux ou des clubs de football où aucun Rom ne joue. Quant à Klara Orgovanova et son équipe, elles ont été licenciées.

Parfois, l’argent est empoché par des ONG factices ou vient grossir les salaires des hauts fonctionnaires corrompus. C’est ce qu’affirment certains eurodéputés, comme [l’ancienne élue] Els de Groen, des militants des droits des Roms et des journalistes, comme ceux du collectif BIRN (Balkan Investigative Reporting Network).

Cela dit, l’argent n’est pas toujours détourné volontairement. Les demandes de subventions sont compliquées et exigent une bonne compréhension du jargon de l’UE.

Face aux épisodes racistes et à la tentative de fichage des Roms en Italie en 2008 et surtout après les expulsions de Roms de France en 2010, la Commission s’est limiteé à invoquer une violation de la libre circulation, non pas de l’égalité de traitement et l’égalité raciale.

Une réaction jugée très insuffisante par les organisations des droits de l’homme. Cette réserve de la Commission est due au fait que "la discrimination et le sentiment anti-tzigane sont un sujet politique bien plus brûlant", estime Nele Meyer, d’Amnesty International.

"La Commission ne peut jouer le rôle de super-gendarme des droits fondamentaux", fait remarquer de son côté Matthew Newman. Ce dernier souligne aussi le "faible taux d’absorption" des subventions de l’UE destinées aux Roms : "Les demandes ne portent que sur une partie des fonds. Les Roms ne sont pas une  priorité politique".

D’après Valeriu Nicolae, lui-même rom et directeur du Centre des politiques pour les Roms et les minorités de Bucarest, les fonds affectés aux Roms par Bruxelles sont très insuffisants : "la Roumanie a reçu pendant la période 2007-2013 environ 230 millions d’euros. Nous avons un million de Roms. Cela ne représente pas même 20 centimes par Rom et par jour."

Pourquoi la Commission ne met-elle pas en place un commissaire chargé des minorités ? "Les pays membres ont peur qu’il commence aussi à s’intéresser aux Hongrois en Roumanie ou aux Basques en Espagne", note Jan Marinus Wiersma. Quant au hongrois Kinga Göncz, député européen, il évoque une peur "compréhensible" : "Les pays pourraient alors penser : ‘Parfait, c’est Bruxelles qui va s’en charger.’"

Depuis les drames qui se sont produits en Italie et en France, l’Union semble entrer en mouvement. En avril 2011, le Conseil européen a décidé d’établir un cadre européen commun, sous la forme de "stratégies nationales d’intégration des Roms".

Lívia Járóka – seule député européen d’origine rom – se montre optimiste car on met davantage en avant l’intérêt socioéconomique de l’intégration des Roms. "Car les politiciens ne vont pas purement et simplement aider les Roms".

Mais là encore, la Commission s’en remet finalement aux Etats pour trouver une solution. La Hongrie actuelle montre ce que cela peut donner dans la pratique. "Le gouvernement de Viktor Orbán a récemment abaissé l’âge maximal de la scolarisation obligatoire, si bien que les enfants roms peuvent quitter l’école plus tôt", dit Rob Kushen de l’ERRC.

Cela montre à quel point il est difficile d’obtenir de quelconques mesures en faveur des Roms dans le climat actuel. Viktor Orbán est confronté en Hongrie, comme dans d’autres pays européens, à une opposition d’extrême-droite : Jobbik, un parti ouvertement anti-Roms. "La démocratie consiste aussi à défendre les minorités. Mais Viktor Orbán ne semble pas le comprendre. C’est justement l’avertissement que lançait Havel en 1993", souligne Rob Kushen.

Hellen Kooijman pour Mondiaal Nieuws, traduction : Isabelle Rosselin sur Presseurop