franchir clandestinement la frontière égypto-israélienne.
Nombre de réfugiés africains viennent du Darfour. Ils passent illégalement la frontière égyptienne. Israël accueille avec émotion ces victimes de génocide. De plus en plus d’Africains se dirigent, comme autrefois les Hébreux, à travers le désert du Sinaï, jusqu’à la terre promise. Chaque nuit, selon Michael Bavli, représentant à Jérusalem du Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (UNHCR), au moins quarante Africains traversent clandestinement la frontière égypto-israélienne. Leur nombre va crescendo au fil des semaines. Ils sont déjà plusieurs centaines en terre sainte, à réclamer le statut de réfugié.
Un village dans le Néguev
Ce flux migratoire, souligne Michael Bavli, ne peut que s’amplifier, dans la mesure où la situation au Darfour et dans les pays limitrophes ne cesse de se détériorer. Il tire la sonnette d’alarme: «Le bureau du HCR à Jérusalem se trouvera bientôt dans l’incapacité de répondre aux besoins de tant de personnes déplacées.» Ces réfugiés, sous la conduite de passeurs égyptiens qui tirent profit de leur malheur (chacun d’entre eux a dû payer plusieurs centaines de dollars), n’ont aucun mal à franchir cette frontière.
Car, contrairement aux territoires palestiniens clôturés de toutes parts, aucune barrière ne vient obstruer le passage entre le Sinaï égyptien et le Néguev israélien. A la faveur de la nuit, le groupe de réfugiés s’approche de la frontière. Vite repérés par les soldats de Tsahal, ils sont embarqués vers les villes israéliennes les plus proches. Les réfugiés atterrissent dans les services sociaux de différentes municipalités déjà débordées. Pour faire face à ce flot d’arrivants, le gouvernement israélien a pris une double décision: monter un village de toile dans le désert du Néguev et refouler vers l’Egypte ceux qui ont quitté leur pays essentiellement à cause de «motifs économiques».
Par contre, les originaires du Darfour bénéficieront du statut de réfugiés. Ils trouveront en Israël un pays d’accueil. Le premier ministre Ehud Olmert l’a promis solennellement. Pour beaucoup d’Israéliens, le sort des populations du Darfour rappelle en effet celui des Juifs durant la Seconde Guerre mondiale. Dans une lettre adressée à Ehud Olmert, publiée dans plusieurs quotidiens israéliens, Abaker Ali écrit avoir quitté le Darfour pour échapper au génocide. Un terme qui évoque de terribles souvenirs parmi les Israéliens. Ils ne resteront pas indifférents. Si le gouvernement semble encore pris au dépourvu, une chaîne de solidarité de particuliers vient, en revanche, pallier les carences des autorités. On leur distribue nourriture et vêtements. Des réfugiés du Darfour ont aussi trouvé gîte et travail dans les kibboutzim. Les originaires du Darfour vont se fondre d’autant mieux dans la population que la mosaïque israélienne comprend déjà plus de 100 000 immigrants de peau noire, les Falachas, les juifs d’Ethiopie.
SERGE RONEN JÉRUSALEM pour le quotidien 24Heures