samedi 21 juin 2008

Quand les Palestiniens s'arment de caméras

Etonnant. Une organisation israélienne de défense des droits de l’homme fournit à des familles de Cisjordanie les moyens de filmer les agressions dont elles sont victimes. Histoire d’en finir avec l’impunité des colons. Un article de Andrés Allemand pour 24 Heures.

La violence des images filmées est plus éloquente que 1000 discours.


La scène est insoutenable. Quatre hommes encagoulés s’avancent, tenant chacun une batte de base­ball. Arrivés à la hauteur d’une famille de bergers palestiniens, ils se mettent à les frapper sur la tête, le dos, tout le corps. Soudain, la caméra chancelante qui filme l’agression tombe à terre. Puis l’image se fige.
Dans son malheur, la famille a une chance: elle avait reçu une des caméras vidéo distribuées en Cisjordanie par B’Tselem, célèbre organisation israélienne de dé­fense des droits de l’homme. Ce sont ces terribles images, remises à la police israélienne, qui ont permis l’arrestation, mardi, de deux colons installés près de la ville d’Hébron. Leur diffusion la semaine dernière sur les ondes de la BBC y est peut-être aussi pour quelque chose.
Autrefois, ces agressions res­taient impunies. Difficile de dé­montrer les faits. Mais les camé­ras de B’Tselem ont changé la donne. C’est le cas pour la famille Nawaj’ah, qui disposait d’une autorisation spéciale pour faire paître son troupeau sur ce pré appartenant à un Palestinien, si­tué dans une zone militaire inter­dite aux civils israéliens.
Une centaine de caméras

Quand deux colons sont venus en tracteur leur dire de déguerpir, les bergers se sont méfiés. Ils ont appelé en renfort d’autres mem­bres de la famille, dont deux sexa­génaires et une jeune femme de 25 ans. C’est elle, Muna, qui tenait la caméra. C’est elle qui a couru chercher du secours. Trente mi­nutes plus tard, des proches par­viennent à faire stopper une jeep israélienne qui passait sur la grand-route. Après une heure, des ambulances sont arrivées, ainsi qu’une voiture de police. Plusieurs des victimes ont été hospitalisées. Depuis le début 2007, B’Tselem a distribué une centaine de camé­ras à des Palestiniens vivant près des colons. Plus d’une cinquan­taine de cas de violences (tirs, coups, jets de pierres) ont déjà été enregistrés. «Mais les caméras ont avant tout un effet dissuasif», explique Oren Yacokovobich, res­ponsable du programme Shoo­ting back. «Elles révèlent au grand public des incidents qui d’habitude restent invisibles, et dont la véracité peut être remise en question.» A voir la violence des images, on comprend pour­quoi…

Vers le site de B'Tselem

Vers les vidéos du projet Shooting back

Humaine et responsable, vraiment ?

Sandrine Bavaud, députée Verte, à Lausanne, réagit à l'article intitulé "Les requérants de Vallorbe iront visiter les grottes". Un courrier de lecteur dans la rubrique Vous avez la parole de 24 Heures.

La décrue du nombre de requérants d’asile dans le canton de Vaud s’expliquerait principalement, selon le conseiller d’Etat Philippe Leuba, par une application à la lettre de la loi sur l’asile et la mise en oeuvre d’une politique humaine et responsable. Une telle synthèse est certainement un peu rapide.
Premièrement, le nombre de requérants d’asile diminue car les conflits armés ne sont plus d’actualité dans les Balkans.
Deuxièmement, grâce au sou­tien de la société civile, du milieu associatif et d’élus, des centaines ont obtenu un per­mis de séjour. Contrairement aux propos du Conseil d’Etat, le canton a bel et bien une marge de manoeuvre dans le domaine de l’asile.
Troisièmement, avec le durcissement de la politique à l’égard de la migration, des centaines de personnes sont passées dans la clandestinité, voire la criminalité, afin de survivre. Les risques à l’encon­tre de la sécurité publique s’accroissant, il ne paraît donc pas adéquat de parler d’une politique responsable.
La politique menée par nos autorités, soutenue consciem­ment ou inconsciemment par une majorité de la population, n’est pas davantage appliquée avec humanité pour l’ensemble des catégories de requérants d’asile. En effet, avec trois repas en nature ou 8 francs par jour pour se nourrir, les dégâts sur le long terme sont prévisibles: le degré de préca­risation allant de pair avec l’état de santé, il faut s’atten­dre à un accroissement des troubles psychologiques et psychiatriques chroniques.
Malades ou non reconnus par leur pays d’origine, de nom­breux requérants déboutés resteront durablement chez nous en toute légalité: pour ces femmes, ces hommes et ces enfants coupés de leur dignité humaine, nous devons conti­nuer à nous mobiliser et mon­trer l’exemple!