mercredi 11 juin 2008

Abus, une question ancienne

Extrait d'un article paru sur swissinfo :

http://www.swissinfo.ch/fre/swissinfo.html?siteSect=105&sid=9150603


Mauvais pauvres

Dans le cadre du programme national de recherche PNR 51 «Intégration et exclusion», Verena Keller, professeure à la Haute école de travail social de Lausanne, prône une approche nuancée du phénomène de la précarisation des jeunes et des raisons qui peuvent les conduire à solliciter l'aide sociale :

«Le souci d'aider, mais de ne pas aider n'importe qui et n'importe comment, est présent dès les origines. De même, la question de l'abus est très ancienne, même si les mots changent, souligne-t-elle. Il y a un siècle, le soupçon portait sur les vagabonds ou les buveurs. Aujourd'hui, ce sont les jeunes ou les requérants d'asile qui en sont victimes

swissinfo, Carole Wälti

Grèves de la faim aux camps de Bordeaux, Toulouse, Paris

EXTRAIT DU "QUOTIDIEN DES SANS-PAPIERS" N° 25
Mardi 10 juin 2008

Téléchargeable sur http://quotidiensanspapiers.free.fr/


Grèves de la faim aux camps de Bordeaux, Toulouse, Paris

CRA DE BORDEAUX
Grève de la faim depuis le 3 juin

Une quinzaine de pensionnaires du camp de rétention de Bordeaux a décidé
le 3 juin d'une grève de la faim illimitée, comptant sur ce moyen pour
être libérés et régularisés. Selon le comité de régularisation des
sans-papiers, tous ont refusé de s'alimenter ce soir là mardi, certains
ont pris un petit-déjeuner, voire un déjeuner le lendemain, tout en
maintenant leur mouvement de « révolte organisée » ; la grande majorité
à décide de nouveau refusé de s'alimenter le 5 juin. « Ce n'est pas un
soulèvement », aurait minimisé un policier qui convient tout de même
qu'il a effectivement constaté des refus de s'alimenter. Les grévistes
de la faim dénoncent « des insultes, brimades, intimidations,
harcèlements et humiliations, et surtout une non-information sur les
horaires d'expulsion. » Le CRSP et RESF se mobilisent pour soutenir ces
sans-papiers en lutte, l'église de Gironde relaye l'information et les
appele à manifestation de soutien !

[Sources : CRSP, RSF, église catholique en Gironde.]


TOULOUSE, CRA CORNEBARRIEU
Les détenus en grève de la faim depuis le 6 juin

Le vendredi 6 juin, 28 détenus du CRA ont engagé un mouvement collectif
de grève de la faim.

Ils ont réagi spontanément à des propos méprisant tenus à l'encontre
d'une personne âgée. Ce mouvement s'inscrit dans un contexte de
dégradation continue des conditions de détention depuis l'ouverture du
CRA de Cornebarrieu. L'entretien de conditions déplorables de séjours
conduit logiquement à déduire que cette situation vise sciemment à
humilier et rabaisser les femmes, les hommes et les enfants détenus.
Comment ne pas voir du mépris dans la décision de suppression de
l'alimentation halal et l'imposition de repas à base de porc sans autres
alternatives. Les détenus ne pouvant obtenir de colis alimentaires
provenant de l'extérieur, la politique de l'administration provoque un
phénomène de sous-nutrition chez certains prisonniers.

Les cartes téléphoniques sont vendues à un prix excessif dans ce camp.
Chose plus étonnante, les durées de communications sont totalement
irrégulières par rapport à des cartes présentées comme standard. Cette
réalité s'apparente à une forme de racket.

Il semble que ce camp ne soit pas chauffé, même en hiver. En outre, les
couvertures, d'une piteuse qualité, ne permettraient pas de se protéger
du froid.

Ces conditions générales de détention conduisent à penser qu'elles sont
utilisées afin d'amener les détenus à craquer et à accepter de quitter «
volontairement » le territoire.

[Source : UD CGT 31]


MARSEILLE, CAMP DU CANET
Grève de la faim depuis le 24 mai

Un prisonnier du CRA qui a contacté RESF indique que plusieurs dizaines
de retenus ont entamé une grève de la faim depuis samedi 24 mai pour
protester contre leur enfermement, particulièrement celui des malades.

Ils subissent de violentes pressions de la police pour casser leur
mouvement de protestation. Ils souhaitent que leur situation soient connue.

La cinquantaine de gréviste de la faim protestent contre les raisons et
les conditions de détention. Ils dénoncent entre autre : l'inhumanité
des décisions d'expulser un monsieur qui vit en France depuis 30 ans ;
d'une personne malade qui devait subir une très grave opération quelques
jours après son arrestation, d'une autre dont le mariage est ainsi rendu
impossible.


À PARIS
Grève de la faim depuis le 2 juin

La grève de la faim a été décidée le soir du 2 juin au CRA de Vincennes.
Communication avec le CRA le 3 juin :

« Aujourd'hui on fait la grève de la faim, on ne va pas manger, on a
décidé ça hier soir, on s'est réuni dans la cour. On nous donne le petit
déjeuner le soir même pour le lendemain, donc la grève commencera
vraiment ce midi.

Tous les prisonniers ont décidé de ne pas manger aujourd'hui. Mais là
tout le monde dort [il est 10h du matin]. Je ne sais pas s'il y aura une
autre réunion, il faut attendre que tout le monde se réveille. Les gens
se réveillent vers 11h/11h30 mais ça dépend de ce que chacun a à faire,
s'il y a des convocations, des rendez vous avec le juge, c'est eux qui
nous réveillent. Sinon on peut dormir toute la journée.

On fait la grève parce que la bouffe est pas terrible, parce qu'il y a
des gens qui sont malades, on s'occupe pas d'eux. Le médecin se fout de
nous alors qu'il y a des gens malades. On demande des recours et ils
nous écoutent pas.

On a fait une liste et chacun a noté son nom et on a signé. On n'a pas
écrit de texte on a juste écrit au dessus des signatures : « on ne mange
pas ».

Je n'ai aucune idée si le CRA un est au courant, on passe pas de l'autre
côté.

À Cité, au 8ème bureau quand j'étais en garde à vue ils m'ont tapé, j'ai
demandé un médecin, un avocat, je n'ai vu personne. Le chef de police
était bourré. Ils vous traitent comme un chien, pas en être humain. À
mon avis Vincennes c'est mieux pour la politesse. Il m'ont fait croupir
plus de 24h en garde à vue. Il y avait d'autres gens. Il m'ont tapé
parce que j'avais mal, que je demandais le médecin, ils mont insulté : «
branleur », le chef de police m'a dit qu'il avait payé 60 euros de sa
poche pour faire venir le médecin alors que d'après lui j'étais pas
malade. Mais je l'étais vraiment : après j'ai été à l'hôpital Hôtel
Dieu. Là bas c'était bien, les médecins ont fait leur travail. J'étais
pas dans une salle spéciale, mais il y avait toujours des policiers avec
moi, j'étais menotté, mais on m'enlevait les menottes quand le médecin
venait me voir. »

[Source : fermeturetention@yahoo.fr]

Europe et migrations - Contre la directive de la honte


Europe et migrations

Contre la directive de la honte

Depuis des années maintenant, l’Union européenne (UE) met en avant la lutte contre l’immigration dite « clandestine ». Dès 2002, un livre vert était établi. Puis ce sont des mesures opérationnelles communes qui furent élaborées : charters communautaires (avril 2004), négociations d’accords de réadmission (depuis 2000), directive sur la répartition des charges financières de l’éloignement....

par Claude Quémar

8 juin 2008

La directive en discussion depuis fin 2007 est un pas important en avant vers l’harmonisation de la législation en matière de rétention et d’expulsion des personnes en situation irrégulière et cela pour deux raisons essentielles : le projet de la Commission est soumis à la fois au Conseil et au Parlement européen (procédure de codécision) ce qui rendra cette directive contraignante ; mais surtout, il s’agit d’une harmonisation « vers le bas », c’est à dire vers moins de protection.

On peut a priori s’étonner de voir d’abord adopter des textes normalisant l’éloignement et la détention, alors même qu’aucune politique commune de séjour des ressortissants hors UE n’est en élaboration. Mais depuis Tampere |1|, l’Europe forteresse se renforce d’année en année. 11 000 morts aux portes de l’Europe ne leur suffisent pas !!

Après ces trois années de négociation, le texte bloque, malheureusement pas au nom de la défense des droits humains, mais à cause du coût estimé de l’assistance juridique prévue dans le texte, ou à cause du manque de temps prévu (4 semaines) pour convaincre d’un retour « volontaire » les personnes concernées. La France (selon el Pais), quant à elle, s’est opposée aux garanties prévues envers les mineurs d’âge scolaire. Elle veut pouvoir expulser les mineurs sans tenir compte de leur situation scolaire et sans attendre la fin de l’année. Il s’agit sans doute de la vision sarkozienne du codéveloppement.

Des mesures inhumaines

Les principales mesures qui scandalisent les associations de défense des étrangers concernent la durée de détention, les mineurs et l’interdiction systématique du territoire.

Aujourd’hui la durée de détention varie de 32 jours (France) à une durée illimitée (Suède, Grande Bretagne). Elle serait portée à 18 mois. Or, même les pays qui prévoient une durée illimitée dépassent rarement les 18 mois, constatant que si après ce laps de temps ils n’ont pu organiser l’éloignement (laissez-passer consulaire, voyage...), ils n’y parviendront plus. Il s’agit ni plus ni moins d’un contrôle de populations indésirables, d’un véritable « internement administratif » (pour reprendre l’expression de la Cimade |2|), y compris lors de l’examen de leurs demandes d’asiles ou de titres de séjour (en particulier dans de véritables camps situés aux portes Sud de l’Europe).

Si le texte prévoit qu’on ne peut placer en rétention un mineur non accompagné, il ne l’exclut pas pour des mineurs accompagnés. Les références nombreuses dans les débats à la Convention internationale des droits de l’enfant de 1990 ne servent qu’à masquer la possibilité d’enfermer jusque 18 mois des mineurs !!

De la même façon, aucune protection particulière contre l’éloignement ou la rétention n’est prévue pour les femmes enceintes, enfants mineurs avec leurs parents, victimes de tortures ou de traite...

Une interdiction du territoire européen pouvant aller jusque 5 ans est prévue lors de l’éloignement. Il ne s’agit ni plus ni moins que d’une double peine, qui condamne à la clandestinité permanente ceux et celles qui reviendraient malgré tout.

Les collectifs de sans papiers, les associations de défense des droits des étrangers, de juristes, etc. se mobilisent depuis des mois pour empêcher l’adoption de cette directive de la honte.

L’avenir est à l’immigré qui sert et qui rapporte

Il est important de comprendre que ces politiques sécuritaires s’appuient sur une vision utilitariste de l’immigration. La philosophie partagée dans l’UE d’une immigration « utile », c’est à dire conforme aux besoins conjoncturels des économies européennes, va à l’encontre du respect des textes fondamentaux de défense des droits humains, du droit d’asile et même de la nouvelle tarte à la crème du codéveloppement.

Le meilleur exemple en est la énième réforme du code d’entrée et de séjour français s’attaquant à l’immigration familiale. Il n’est pas question d’accepter les familles des immigrants, cela aurait un coût de les éduquer, les soigner.... Il vaut mieux négocier la venue de travailleurs dans les secteurs où l’on ne trouve pas de main d’œuvre locale, et plus hypocrite encore, la venue d’étudiants titulaires d’au moins un master (obtenu dans son pays) qui pourront obtenir un titre de séjour s’ils trouvent un emploi ici.

Une des manières d’avoir des immigrés qui coûtent moins qu’ils ne rapportent, c’est de ne laisser entrer que ceux qui ont été formés ailleurs, gratuitement pour la France et pour l’Europe. Le pillage des pays du Sud a trouvé une nouvelle forme ; le CADTM s’oppose donc à ces politiques, dans la continuité de ses combats propres.

Au lieu de réduire la circulation et l’accueil des étrangers, c’est une extension du droit d’asile qu’il faut élaborer : femmes fuyant l’excision pour leurs filles, des mariages forcés, victimes de viols ou de la traite, réfugiés environnementaux qui se multiplient partout dans le monde, victimes des politiques de pillage de la nature et de destruction de l’environnement, tous et toutes doivent voir en Europe leurs droits reconnus et défendus, y compris la liberté de circulation et d’établissement.

Nous soutenons ainsi les mouvements actuels des sans papiers, contre les centres fermés en Belgique, les grèves des travailleurs sans papiers en France, soutenues par les organisations syndicales. C’est une part de notre combat pour d’autres solidarités Nord Sud, contre les méfaits d’un système qui nourrit la précarité, la haine de l’autre, le patriarcat.

notes articles:

|1| A Tampere (Finlande), le Conseil européen s’est accordé en octobre 1999 sur les critères que devait respecter la politique d’immigration de l’UE.

|2| Cimade : Comité intermouvements auprès des évacués – Service œcuménique d’entraide.



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Berne ne se soucie guère des requérants à l'aéroport

La préfecture, un guet-apens de plus en plus fréquent


Sans-papiers. Un rapport dénonce les arrestations lors des demandes de régularisation.

Par CATHERINE COROLLER dans Libé


La semaine du 21 janvier 2008, monsieur G. se rend à la préfecture de Melun (Seine-et-Marne) pour déposer un dossier de régularisation par le travail. Au guichet, on lui dit que sa demande sera étudiée. On lui remet un formulaire. On lui demande son passeport. On lui dit de s’asseoir. Cinq minutes plus tard, la police vient l’arrêter. Et la préfecture lui notifie un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière (APRF). Des récits de ce type, la Cimade (service œcuménique d’entraide) en relate une dizaine dans son Enquête sur les conditions d’accueil des étrangers dans les préfectures rendue publique ce matin.

Le Tessin redoute un afflux de clandestins

Le gouvernement de Silvio Berlusconi a durci le ton contre les étrangers en situation illégale. Au Tessin, des magistrats et des politiciens s’attendent donc à ce que ces clandestins remontent vers le Nord. Ils appellent Berne à l’aide.
Pendant ce temps, sur le terrain, c’est le calme plat.
Un article d'Antonio Civile pour 24 Heures.

Le tour de vis décrété contre les étrangers en situation illégale en Italie fait craindre à certains magistrats tessinois une infiltration massive de personnes enclines à la délinquance. Le député au Grand Conseil Lorenzo Quadri a interpellé le Conseil d’Etat tessinois. A lui de faire pression sur la Confédération pour qu’elle renforce le corps des gardes-frontière au Tessin.

Silvio Berlusconi va-t-il étendre son influence jusqu’en Suisse? Depuis que le Cavaliere a repris la présidence du gouvernement italien et qu’il a serré la vis contre les étrangers illégaux, le Tessin se met à craindre une invasion de clandestins et de nomades en provenance d’Ita­lie. Les Roms ne sont pas expli­citement nommés. Mais ils sont les premiers visés.
C’est la magistrature canto­nale qui a sonné l’alarme. «Les étrangers chassés d’Italie pren­dront la route du Nord pour arriver sous nos latitudes», pré­dit le procureur Antonio Peru­gini, qui craint pour la sécurité au Tessin. «La clandestinité est en effet l’antichambre de la cri­minalité organisée. De nom­breux clandestins et requérants d’asile finissent en prison. Tant qu’ils sont en prison, ils sont neutralisés. Mais à l’extérieur, il y a de très nombreuses autres personnes dans la même situa­tion. Raison pour laquelle il faut traiter le problème en amont. Sinon, notre territoire va finir comme les faubourgs de Rome, Milan et Turin et de tous les grands centres italiens», lance le magistrat, d’obédience PDC.
La Lega saute sur l’occasion

Prompte à thématiser tout ce qui touche à l’immigration, la Lega (droite populiste) s’est tout de suite emparée du sujet. «Les gardes-frontière souffrent d’une sous-dotation en person­nel, dénonce ainsi le député au Grand Conseil Lorenzo Quadri. Et de son côté, la police com­munale de Chiasso n’a pas les moyens de faire face à des si­tuations qui dépassent la ges­tion courante.» Politiciens et juges regardent maintenant en direction de la Berne fédérale. «Elle a fait les choses à moitié en laissant aux cantons le soin d’endiguer un phénomène in­contrôlable à leur niveau admi­nistratif et opérationnel, dé­nonce le procureur Antonio Pe­rugini. Pendant ce temps, ces étrangers clandestins posent des problèmes en augmenta­tion constante et préoccupante, qu’ils vendent de la drogue, qu’ils commettent des vols ou qu’ils voyagent en train sans billets. Et sitôt relâchés, ils re­commencent à commettre des délits, ce qui engendre un senti­ment de frustration chez les juges et les policiers.» Lorenzo Quadri a, de son côté, interpellé le Conseil d’Etat tessinois: à lui de faire pression sur la Confédération pour qu’elle renforce le corps des gardes-frontière au Tessin.
Cent fois moins de cas qu’il y a dix ans

Pendant ce temps, sur le ter­rain, la situation reste calme et Piergiorgio Fornera, comman­dant ad interim des gardes­frontière de l’arrondissement du Tessin, ne s’attend à aucun afflux massif d’étrangers ces prochaines semaines. «A cha­que durcissement de la loi ita­lienne ces dernières années, on a craint une augmentation de la pression migratoire à la fron­tière. Or l’augmentation des en­trées illégales en Suisse dépend moins de la politique italienne que de la situation internatio­nale. A titre de comparaison, l’an passé, nous avons interpellé 590 clandestins, soit moins de deux par jour. Or, en 1997-1998, pendant la crise des Balkans, nous interceptions quotidien­nement 200 personnes.»