samedi 13 mai 2006

Du Pérou à l'écoute des migrants


Myrian Carbajal est en charge du projet de sensibilisation «Migration et intimité» au sein de Profa.

Lire l'article d'Aline Andrey dans 24 heures

Trujillo, Nord du Pérou. Un père médecin, une mère infirmière. Une école de Soeurs, puis des études en travail et politique sociale à l’Université catholique. Voilà pour les bases biographiques de Myrian Carbajal. Si elle a suivi la vocation de ses parents pour ce qui est de la santé, rien ne la prédisposait à se lancer dans le délicat sujet de la sexualité. «Dans ma famille, comme par­tout en Amérique latine, la sexualité, c’est tabou. C’est le projet de ma thèse sur les bar­rières socioculturelles empê­chant les femmes des Hauts Pla­teaux d’utiliser des méthodes de contraception qui m’a obligé à en parler pour la première fois», se souvient-elle dans un français parfait, la voix chantante et douce.
L’émigration idéalisée
Son travail sur le terrain, à deux heures de bus de sa ville côtière, lui ouvre les yeux sur une réalité que la citadine ne connaissait pas: celle des com­munautés andines. Une année plus tard, à une quinzaine d’heures d’avion de son pays d’origine, c’est un autre monde qui l’attend. Grâce à une bourse d’étude, la Suisse lui ouvre ses portes. «J’ai ap­pris ce que c’est que d’être étrangère. Je n’étais jamais sorti de mon pays. Là-bas, le mythe d’une migration heu­reuse persiste. J’ai été frappée de toutes ces histoires d’abus et d’exploitation. Les migrants ne racontent pas toujours leurs difficultés pour éviter d’inquiéter leur famille.» Une année après son arrivée en Suisse, Myrian Carbajal change de sujet de thèse pour se pencher sur la situation des femmes sans papiers. Mi­grante elle aussi, son statut d’étudiante est pourtant un facteur de gêne face à ses interlocutrices clandestines. «Je me sentais tellement pri­vilégiée d’avoir un permis. J’ai cependant pris conscience que je représentais pour elle un lien important avec la léga­lité. Par ailleurs, elles ne se sentaient pas en position de concurrence, comme cela ar­rive parfois entre sans-pa­pier. » Sa thèse, devenue une réfé­rence dans le domaine, lui permettra, ironie du sort, de retrouver son thème de dé­part: la sexualité. Elle est en­gagée par Profa en 2003 comme cheffe de projet pour «l’amélioration de l’informa­tion et l’accessibilité à la con­traception auprès des mi­grant- e-s». Objectif: prévenir les grossesses non désirées dans les communautés latino­américaines et de l’Afrique subsaharienne.
«Les personnes migrantes sont dans une situation de fragilité affective et économi­que qui ne facilite pas l’accès à la santé», mentionne Myrian Carbajal. Pour la jeune femme, parler des représenta­tions sexuelles et des rôles de genre permet de négocier les contradictions entre la culture d’origine et d’accueil. Elle­même, malgré son travail, avoue avec le sourire: «Je dois être très attentive pour ne pas tomber dans les schémas fa­miliaux ou religieux vécus en­fant. »

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