samedi 10 mai 2008

Le dernier mot au peuple ?

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"L'initiative de l'UDC viole le droit international"

Andreas Auer, qui enseigne aujourd'hui à Zurich après avoir quitté Genève, est un peu le père spirituel des jugements par lesquels le Tribunal fédéral a banni les naturalisations par les urnes en 2003.

Adversaire résolu de l'initiative de l'UDC, Andreas Auer n'est pourtant pas de ceux qui pensent que ce texte n'aurait pas dû être soumis au vote populaire en raison de sa conformité problématique avec le droit international. Il donne ici son point de vue sur le conflit, devenu un enjeu institutionnel majeur, entre la démocratie directe et les engagements internationaux de la Suisse. En substance, pour lui, le peuple n'a pas tous les droits et pas toujours le dernier mot.

Lire l'interview d'Andreas Auer dans le Temps

«Le groupe de travail cantonal doit être réactivé rapidement»

En quelques jours, les gens du voyage ont retrouvé à deux reprises le chemin d’Yverdon. Ils doivent normalement lever le camp aujourd’hui. Mais la problématique est cantonale, affirme le municipal Jean-Daniel Carrard. Un article de Frédéric Ravussin dans 24 Heures.

FERMÉE Aire de stationnement officielle du canton pour les gens du voyage, le terrain de Boulex, près de Payerne, est actuellement en réfection. PAYERNE, LE 7 MAI 2008 GUINNARD JEAN-PAUL


I
ls s’étaient faits discrets, ces dernières années. Mais les gens du voyage ont retrouvé la route d’Yverdon. Ces derniers jours, ils se sont installés, à deux reprises, sur un terrain agricole non adapté, prenant à chaque fois de vitesse les autorités.
Il leur est toutefois très diffi­cile de réagir, puisqu’il ne faut qu’une quinzaine de minutes entre le moment où les nomades repèrent un endroit et celui où ils l’occupent, explique Jean-Da­niel Carrard. «Si on parvient à les intercepter, il est possible de discuter. Mais on est très sou­vent mis devant le fait accompli, à savoir l’occupation sauvage et illégale d’un terrain», ajoute-t-il. Selon une jurisprudence du Tribunal fédéral, le propriétaire peut les laisser occuper les lieux au maximum pendant trois nuits et quatre jours. «Et géné­ralement, les Gitans s’y plient, ce qui permet d’éviter une inter­vention musclée jamais agréable à conduire», reprend le munici­pal.
C’est donc vraisemblablement aujourd’hui que la cinquantaine de familles devrait quitter le territoire yverdonnois. «Mais même s’ils se sont installés à deux reprises à Yverdon, la ques­tion se pose dans tout le canton, affirme Jean-Daniel Carrard. Nous pourrions clôturer le champ où ils se sont installés. Mais que va-t-il se passer alors?» Ils iront sans doute stationner leurs caravanes plus loin «et peut-être s’arrêter sur le terri­toire de communes qui n’ont pas les moyens d’intervention d’Yverdon. Le Conseil d’Etat doit prendre en considération que les gens du voyage font à nouveau halte en Suisse et réac­tiver de manière urgente le Groupe de travail Gitans Vaud, présidé par Pierrette Roulet- Grin», conclut-il.
Situation particulière

La préfète relève d’emblée que la situation actuelle est par­ticulière. «Il faut la remettre dans le contexte du printemps pourri que nous venons de vi­vre. Avec le retour des beaux jours, les personnes qui appar­tiennent aux minorités ethni­ques non sédentarisées ont tou­tes repris la route en même temps… Et c’est d’autant plus ennuyeux que l’aire de Payerne est momentanément fermée.»
Mais contraire­ment à ce que redoute Jean-Da­niel Carrard, Pierrette Roulet-­Grin ne croit pas que cette situa­tion perdurera, comme cela avait été le cas au début des années 2000.
«Je suis cependant tout à fait d’accord de réactiver notre groupe de travail. Mais je rap­pelle que c’est aux communes de proposer des terrains pour les accueillir.» Et considérant les aires d’accueil déjà existantes à Payerne et à Rennaz, c’est vers la région lausannoise que se tour­nera sans doute leur regard.

Un match dégénère au centre d'enregistrement

Une soixantaine d’Africains et d’Albanais en sont venus aux mains jeudi en début de soirée. C’est un match de foot organisé au sein de l’établissement qui a mis le feu aux poudres.
C’est au terme d’un match de foot­ball qu’une bagarre a éclaté dans la cour intérieure du Centre d’enre­gistrement de requérants d’asile de Vallorbe, mettant aux prises une cinquantaine de ressortissants afri­cains et une douzaine d’Albanais. Il a fallu pas moins de cinq pa­trouilles de la police cantonale vau­doise et un conducteur de chien de la police de l’Ouest lausannois pour rétablir l’ordre. La bagarre n’a heureusement pas fait de blessés.
L’étincelle qui a mis le feu aux poudres était mineure. «Il est bien clair qu’il ne s’agit en aucun cas d’une bagarre interethnique. L’un des joueurs a shooté le ballon trop loin et cette action a énervé quel­ques membres de l’équipe adverse. Et des mots, ils sont passés aux mains. On voit ça aussi sur un terrain de foot et même en LNA», commente Jonas Montagni, porte­parole de l’Office fédéral des mi­grations.
Délicate intervention

Peu après 20 h jeudi soir, le personnel de Securitas chargé de surveiller l’établissement vingt­quatre heures sur vingt-quatre in­formait la police cantonale vau­doise de la situation. Plusieurs pa­trouilles ont été dépêchées sur place afin de calmer les requé­rants. Après plusieurs somma­tions, les policiers ont pénétré dans le centre et ont dû faire usage de sprays au poivre pour faire reculer les footballeurs africains au fond de la cour. Alors que leurs collè­gues albanais, eux, étaient évacués et logés dans une bâtisse située à proximité.
La tension est redescendue en fin de soirée et des mesures ont été prises pour éviter que ces bagarres ne reprennent durant la nuit. Se­lon Philippe Jaton, attaché de presse à la police cantonale, «cette intervention était particulière pour les policiers. Cette fois, nous som­mes venus pour protéger deux groupes antagonistes, et non pas pour régler d’autres problèmes au sein de l’établissement. Mais tout s’est bien passé.» Hier matin, la gendarmerie et la police munici­pale de Vallorbe étaient présentes en ville «afin d’éviter une nouvelle bagarre à la gare, où des Albanais voulaient s’en prendre à un groupe d’Africains en guise de repré­sailles ».
Pas de plainte

«L’affaire est close, d’autant plus qu’aucune plainte n’a été déposée», conclut l’attaché de presse. Les res­ponsables du centre ont pris des dispositions afin de transférer les requérants d’asile albanais vers d’autres centres d’accueil.

24 heures

Zürich, Conseil communal: historique

«Pour la première fois dans la longue histoire de Zurich, la plus haute citoyenne de la ville sera… – oui, les amis – une étrangère. Ou, disons, une double nationale»

Anne Cuneo, "promeneuse d'outre-Sarine", est l'invitée de la rubrique Réflexions de 24 Heures, dans laquelle elle revient sur l'élection de Fiametta Jahreiss à la présidence du Conseil communal de Zürich.

Devant le bâtiment, la foule était bigarrée. Costumes africains, asiatiques ou arabes, se mêlaient aux robes, jeans et complets. On attendait devant la «Rathaus» («Maison du Conseil»), où se déroulent depuis le XIIIe siècle les séances du Conseil communal.

L’harmonieux palais baroque en granit a remplacé au XVIIIe siècle un bâtiment vétuste. La salle du Conseil est rectangulaire; la moitié des fenêtres donne sur le quai, l’autre sur l’eau de la Limmat. Une vaste tapisserie résume l’histoire de la ville à travers les armoiries des communes qui, au fil du temps, ont été ou sont encore dominées par la ville de Zurich, dont la souveraineté est marquée par une couronne placée au-dessus de l’écusson bleu et blanc qui la représente.

Ici ont siégé, au cours des siècles, de nombreux personnages qui ont fait ou influencé l’histoire de la cité et du pays et même la littérature – rappelons que le grand écrivain Gottfried Keller a longtemps été secrétaire communal.

Mardi dernier, ce cadre en apparence immuable a pourtant été secoué par un événement sans précédent. On s’apercevait déjà qu’il y avait de l’émotion dans l’air lorsque, après avoir traversé la petite foule devant l’entrée, on montait à la tribune du public. Comme toujours, il s’agissait de passer le contrôle de sécurité – en temps normal, ça va vite; mardi, la queue devant le portillon allait jusqu’à la rue. La tribune était bondée un quart d’heure avant le début de la séance et, lorsqu’elle a commencé, on était serrés comme des sardines.
Etait-ce parce que l’UDC demandait une fois de plus la suppression des festivités du 1er mai qui, comme souvent, avaient donné lieu à des manifs violentes avec dégradation de biens? Non.

C’était parce que le Conseil élisait ce jour-là un nouveau président, qui serait cette année, on en était presque certain bien que l’élection se fasse à bulletin secret, Fiammetta Jahreiss-Montagnani (PS). Elle a été élue. Et, pour la première fois dans la longue histoire de Zurich, la plus haute citoyenne de la ville sera… – oui, les amis – une étrangère. Ou, disons, une double nationale. Inouï tout de même.
Fiammetta Jahreiss est née à Florence, où elle a grandi et où elle a étudié les Lettres. En 1978, elle a rencontré son futur mari, un Zurichois, et l’a suivi en Suisse. Une de ses grandes préoccupations a toujours été l’intégration des étrangers. Elle a rappelé mardi une des vérités qu’oublient régulièrement ceux qui considèrent les immigrés comme des «intrus»: la plupart d’entre eux ne quittent pas leurs pénates par choix – et dans l’état d’arrachement où ils sont, leur intégration est d’autant plus complexe.

Fiammetta (comme tout le monde l’appelle) a été élue avec un résultat record: 107?voix sur 119 présents (la vice-présidente Garzotto, UDC, a obtenu 67 voix). Aussitôt, ç’a été l’explosion, dans la salle autant qu’à la tribune et dans la rue. Un véritable triomphe. Et, sur toutes les lèvres, une seule phrase: pour le Conseil communal de Zurich, la journée – symbole d’une ville qui se veut ouverte à la diversité – est historique.