samedi 16 juin 2007

La Suisse c'est nous

Lire cette opinion de Mazyar Yosefi dans 24heures
En ce premier jour de la semaine des réfugiés, force est de constater que le nombre des injustices qui leur sont infligées a fortement aug­menté depuis le 24 septembre 2006, où la majorité des votants a fait siennes les positions xéno­phobes de l’UDC, défendues par le Conseil fédéral.
Récemment, la majorité du Conseil fédéral a refusé un con­tingent de seulement 500 réfu­giés irakiens, principalement des femmes et des enfants. Une fois de plus M. Blocher a réussi à convaincre ses collègues de refu­ser toute approche des questions d’asile respectueuse des droits des personnes concernées. Alors même que, le 24 septembre, il nous promettait d’appliquer ses lois d’une façon humanitaire! Le HCR a fortement regretté cette décision en pointant encore une fois du doigt la Suisse et sa politique d’immigration.
La loi sur l’asile devrait per­mettre aux personnes en danger dans leurs pays d’origine de trouver le refuge en Suisse. Bien entendu, nous savons tous que l’Irak est un pays très sûr et sans aucun danger, surtout pour les femmes et les enfants! Dernière cruauté en date, celle concer­nant Adem Salihi, cet employé communal de Bassins. Après avoir travaillé plus de douze ans en Suisse, dont cinq comme em­ployé d’une collectivité publique, il doit quitter la Suisse et retour­ner dans un village en Kosove, où il n’est absolument pas le bienvenu. Tout le village de Bas­sins s’est mobilisé en sa faveur, mais le conseiller d’Etat UDC Jean-Claude Mermoud affirme qu’il ne peut rien faire. Surtout, il ne veut rient faire.
Dans un débat radiophonique avant la votation de septembre 2006, ce même conseiller d’Etat avait déclaré qu’il fallait accepter ces deux lois (sur l’asile et sur les étrangers) afin de donner plus de pouvoir aux cantons. Le can­ton ne se cacherait pas forcé­ment derrière ces lois et chaque dossier serait examiné en détail. Neuf mois plus tard, peut-on vraiment dire que chaque cas de requérant d’asile ou de sans-pa­piers est réexaminé sur le fond, en tenant compte de l’intégra­tion des personnes concernées? Jean-Claude Mermoud applique aveuglément les lois les plus ini­ques, se vantant même d’avoir déjà renvoyé un homme ou une femme, après 21 ans de vie en Suisse, et cela au nom de l’Etat de droit! Quelle belle justifica­tion et surtout quel terrible aveuglement!
Des injustices de ce type exis­tent tous les jours en Suisse et malheureusement elles devien­nent banales: sous prétexte de lutter contre les abus, on se per­met de tenir des propos inouïs à l’égard des étrangers et d’avoir un comportement totalement ir­respectueux.
Comment peut-on être aussi obtus par rapport à des drames aussi évidents? Quel triste cons­tat en ce premier jour de la semaine des réfugiés, que répon­dre à toutes ces injustices qui se déroulent tout autour de nous?
Soyons nombreux demain à la manifestation nationale à Berne pour dire que la Suisse, c’est nous tous qui vivons, indé­pendamment de notre origine, de notre religion et de notre statut de séjour. Nous nous op­posons aux populistes et aux mensonges, nous continuerons de lutter pour les droits fonda­mentaux de chacun. C’est en­semble que nous construirons une société respectueuse des droits individuels de tous.

Deux poids, deux mesures : DANGER

Lire cette opinion d'Hélène Küng dans 24heures.

En février 2007, M. Corboz, conseiller communal, était condamné pour dis­crimination raciale à 90 jours­amendes avec sursis et à 1500 francs d’amende pour avoir «taggé» les murs de Bex de slo­gans racistes. En avril 2007, M. Koroma, ainsi que trois autres jeunes Africains qui avaient manifesté leur colère suite à ces inscriptions, était con­damné à 5 mois de prison ferme pour avoir participé à ce qui a été qualifié d’émeute.
Nous souhaitons revenir sur l’histoire malheureuse de M. Ko­roma, seule personne dans cette affaire, nous le soulignons, à de­voir payer de sa liberté. Dès l’âge de 14 ans et pendant 6 ans, il a dû combattre dans les rangs d’une rébellion qui en avait fait un enfant-soldat. Déposant sa demande d’asile, il précise qu’il est dépendant de la drogue, in­gurgitée pendant des années pour supporter les atrocités qu’on l’oblige à commettre. Sans soutien particulier, livré à lui­même, M. Koroma est envoyé dans un centre pour requérants d’asile. Les autorités lui repro­chent de ne pas avoir entrepris de cure de désintoxication dès son arrivée en Suisse. Mais qui lui a indiqué des possibilités, qui lui a proposé un suivi psycholo­gique pour l’aider à vivre avec son passé? Si une autre réponse que le néant avait pu être appor­tée à ces questions, M. Koroma n’aurait probablement pas con­sommé et vendu de la drogue en Suisse.
Or, le fait d’avoir dealé est la raison retenue pour exclure tout motif excusable à sa colère de ce soir-là, puisqu’il «était bien placé pour comprendre l’exaspération de la population bellerine». Le tribunal laisse-t-il entendre que M. Koroma, parce qu’il a lui­même consommé de la drogue, n’aurait pas dû se laisser envahir par la colère en lisant les slogans de M. Corboz? Ou qu’un petit trafiquant n’a pas droit à la pro­tection contre les atteintes à la dignité humaine? Pourtant la Cour européenne des droits de l’homme a eu l’occasion de rap­peler que «la violence raciale constitue une atteinte particu­lière à la dignité humaine et que, compte tenu de ses consé­quences dangereuses, elle exige une vigilance spéciale et une réaction vigoureuses de la part des autorités».
Le Centre social protestant (CSP) rejette toute forme de jus­tice privée, quelle qu’elle soit, et revendique un climat qui per­mette à toute personne de faire valoir la justice. Les jeunes gens avaient demandé vainement aux autorités d’intervenir afin que M. Corboz cesse ses tags. Cette af­faire démontre un très inégal accès des protagonistes aux moyens légaux à actionner, ainsi que des modes de sanction éton­namment différenciés.
Face aux discriminations, par exemple envers les étrangers, nous estimons nécessaire de sou­tenir toutes les initiatives favori­sant la rencontre et le dialogue. Ce n’est qu’ainsi que les peurs et le rejet naturel que suscite l’In­connu pourront se calmer. Créer un espace social où il fait bon vivre ensemble, dans une paix sociale qui protège les plus fai­bles, doit être un objectif priori­taire de l’Etat ainsi que de la société civile! C’est une tâche dans laquelle le CSP entend con­tinuer à s’impliquer également.
*Avec Myriam Schwab Ngamije, assistante sociale, et Caroline Regamey, sociologue.

Il risque l'expulsion après 18 ans en Suisse

Lire dans le Courrier

VALLORBE, UNE COMMUNE AUX PORTES DE L'ASILE

VALLORBE, UNE COMMUNE AUX PORTES DE L'ASILE

Lire l'article d'Ibrahima Cissé dans le Courrier

Ils viennent chercher refuge en Suisse. Une journée nationale leur est dédiée aujourd'hui. Les demandeurs d'asile seront soutenus par une manifestation à Berne. La journée du réfugié vise à faire rencontrer résidents suisses et requérants. A Vallorbe, l'un des quatre centres du pays, l'attente se solde souvent par un refus. Reportage.
Le Centre d'enregistrement et de procédure (CEP) se situe en dehors de la ville, non loin de la frontière franco-suisse. Depuis son ouverture début 2002, cette ancienne caserne accueille entre 150 et 270 étrangers. «Pour un bon fonctionnement, 220 personnes suffisent», précise le directeur suppléant Maurizio Miceli.
De loin, le CEP ressemble à un camp fermé. Ce n'est «ni un hôtel cinq étoiles, ni une prison», indique le responsable devant l'édifice entouré de barbelés. La journée, à moins de devoir rester au centre pour des démarches liées à la procédure d'asile, ses occupants sont libres de leurs mouvements. Tout le monde doit être rentré pour 17h45. Portes fermées de l'intérieur et barbelés sont destinés «à la sécurité des requérants», précise le porte-parole de l'Office fédéral des migrations (ODM) Dominique Boillat. Par exemple pour «éviter que des clandestins n'y entrent, qu'il y ait du trafic de drogue, ou pire, des agressions».
A l'entrée, une grande affiche rappelle en dix langues quelques consignes: exigence de se soumettre aux fouilles, interdiction de faire entrer des aliments ramenés de la ville. Les candidats à l'asile sont logés dans des chambres de 4 à 16, sur des lits superposés. «Hommes et femmes sont séparés», précise M.Miceli.
Depuis le 1er mai 2006, un séjour peut durer jusqu'à deux mois, contre un mois auparavant. Tous participent «activement» aux activités de nettoyage. Les enfants ont droit à un petit plus: deux fois par jour, une collation leur est servie.
Venus d'Afrique, du Moyen-Orient ou des Balkans, les requérants d'asile ont été orientés par des inconnus ou par la police. A mots hachés, ils décrivent les conditions de leur fuite. Certains sont arrivés avec femme et enfants. D'autres sans bagage.
Entre les communautés, la cohabitation est pacifique, selon M.Miceli. «Il n'y a pas de problème de communautarisme. Les incidents sont limités, tout comme l'agressivité.» Les vols sont aussi rares.


«Faire avec et vivre avec»

Des tensions émaillent en revanche les relations entre Vallorbe et le CEP. «Ce n'est pas parce que les Vallorbiers sont xénophobes» se défend le syndic libéral Laurent Francfort, «mais parce qu'ils ne sont pas habitués aux «vagues massives d'arrivées dans la ville».
«Le centre nous est imposé par la Confédération, nous ne pouvons rien contre, si ce n'est faire avec et vivre avec», constate le syndic. Celui-ci avait pourtant demandé la fermeture du CEP. S'il se plaint des «nuisances» dans les rues et des patrouilles des forces de sécurité, il affirme désormais qu'il est «utopique de penser qu'il sera ou doit être fermé».


Un café et une écoute

Dans l'attente d'une décision de l'administration fédérale, les activités des requérants, qui n'ont pas le droit de travailler, se limitent à des va-et-vient entre le centre et la gare. A flanc de montagne, au-dessus de Vallorbe, celle-ci abrite un local de l'Association auprès des requérants d'asile de Vallorbe oecuménique et humanitaire (ARAVOH).
Une quarantaine de bénévoles, âgés entre 35 et 81 ans, s'activent au sein de l'association. Ils veulent offrir un «visage humain» aux demandeurs d'asile. Ces derniers «se sentent seuls ici, il faut leur donner un endroit où s'asseoir, pleurer, rire», explique Yvette Bourgeois, active retraitée responsable des bénévoles de l'ARAVOH.
L'association abrite aussi un service d'assistance juridique. Les matinées sont animées lorsque les requérants se retrouvent par petits groupes autour de la grande table, avec un café et quelques jeux.
Laurent Francfort ne «partage pas la vision» de l'ARAVOH. Car, dit-il, elle «pousse les requérants (déboutés) à faire recours». Quelque 110 communes romandes soutiennent les activités de l'association, selon une liste qu'a pu consulter l'ATS. I
Note : *Correspondant sénégalais de l'Agence télégraphique suisse (ATS), Ibrahima Cissé s'est rendu à Vallorbe, la commune vaudoise qui abrite l'un des quatre centres d'enregistrement du pays. Il livre sa vision.

Journée du réfugié: serrons les rangs! :: lecourrier :: Un quotidien suisse d'information et d'opinion

LIre l'édito de Didier Estoppey dans le courrier

Voilà revenu ce dernier samedi du printemps. L'occasion, comme chaque année, de marquer la Journée du réfugié par une grande manifestation à Berne, regroupant ceux que la Suisse a –plus ou moins...– accueillis et ceux qui continuent à leur marquer leur soutien.
En ce 16 juin 2007, pourtant, les coeurs ne sont pas à la fête. Le plébiscite sans appel réalisé par les lois sur l'asile et les étrangers, le 24 septembre dernier, continue à réfrigérer les esprits. Les réseaux militants, qui se sont activement engagés l'an dernier dans la campagne référendaire rasent aujourd'hui les murs. Dans le monde associatif comme au sein des principaux partis de gauche, la crainte d'aller à l'encontre des courants dominants semble avoir des effets aussi démobilisateurs que ravageurs.
Il faut le reconnaître, la douche fut glaciale. Ce n'est pas une raison pour ne pas chercher à se réchauffer en serrant les rangs. Car il faut aussi oser le rappeler: le peuple n'a pas toujours raison. Il peut parfois se tromper, surtout quand on l'y aide. Les autorités fédérales ont eu beau jeu de monter en épingle les quelques cas d'abus auxquels elles ont elles-mêmes largement contribué par la lenteur des procédures comme par leur incapacité à négocier des accords de réadmission avec les pays intéressés. Et les nouvelles lois n'apporteront aucune modification de la situation sur ce point.
Preuve est d'ailleurs déjà faite qu'elles ne joueront pas non plus l'effet dissuasif tant vanté contre «l'afflux» que la xénophobie officielle se plait à peindre sur la muraille. L'an dernier, alors que la campagne battait son plein, le nombre de nouvelles demandes d'asile n'avait jamais été aussi bas. Depuis quelques mois, alors que les nouvelles lois ont été largement médiatisées, les requêtes sont à nouveau en nette augmentation. C'est que le regain d'intensité de certaines guerres, notamment en Irak, est passé par là. Et qu'aucune loi n'arrêtera jamais les marées.
Les véritables abus, par contre, persistent. Tels ceux commis par cette Suisse qui contrevient aux règles les plus élémentaires de l'hospitalité, comme en témoignent les conditions d'accueil faites aux requérants dès leur arrivée à Vallorbe. Recenser ces abus, à l'image du travail entrepris par l'Observatoire genevois dont nous publions l'une des fiches, est devenu une oeuvre de salubrité publique. Car dès qu'elle a conscience d'une attaque contre les droits humains, la population sait serrer les rangs et montrer sa solidarité. Comme elle a su le manifester dans les cas de cet employé communal de Bursins ou de ce fromager gruyérien que Berne s'acharne à vouloir renvoyer après des années de fidèle labeur. Parce que, même si la vie leur a reconnu leurs droits, l'autorité s'obstine à leur refuser des papiers

L'Allemagne régularise ses «étrangers tolérés» mais leur impose l'intégration

Lire l'article d'Yves Petignatt dans Le Temps
En s'alignant sur les directives européennes, les Allemands mettent fin à la tradition de souplesse relative en matière d'immigration. La page de la société multiculturelle prônée par les Verts est tournée.