vendredi 22 décembre 2006

COMMENT LE DEBAT AUTOUR DE NOEL A L'ECOLE A DERAPE



Dans sa dernière campagne, l'UDC souhaite à tous "Une joyeuse fête de Noël (du moins aussi longtemps que nous pouvons fêter Noël)". Cette annonce fait référence à plusieurs articles publiés dans la presse sur les célébrations de Noël dans les Ecoles. Célébrations qui seraient mises en cause par des membres de la communauté musulmane. Où? Qui? Le "Blick" a tiré quatre jours de suite sur un débat qui ne repose sur aucun cas concret. Pire, le président de la Fédération suisse des enseignants, Beat Zemp, se retrouve pris au piège de cette polémique sans fondement. Il s'explique.
Sur cette manipulation de l'opinion lire aussi ce post
Lire l'article dans La Liberté texte ci-dessous
L'UDC, avec un art consommé de la propagande, souhaite à ses électeurs par voie d'annonces dans la presse «une joyeuse fête de Noël (du moins aussi longtemps que nous pouvons fêter Noël)». L'annonce, agrémentée d'une image d'un sapin illuminé, fait référence à une déclaration du président de la Fédération suisse des enseignants, Beat W. Zemp, selon lequel «les couronnes de l'Avent et les sapins de Noël n'ont pas leur place dans les salles de classe.»
Le parti de Christoph Blocher ne fait qu'emboîter le pas au «SonnstagsBlick» et au «Blick» qui ont titré quatre jours de suite en une sur «l'interdiction des fêtes de Noël à l'école?» En fait, la question qui agite les médias suisses depuis plusieurs jours ne repose que sur des rumeurs. Aucun cas de musulmans ayant manifesté leur opposition n'a été vérifié, ni à Neuchâtel, ni dans le canton de Vaud. Retour sur une histoire montée en épingles.
Personne ne s'est plaint
L'affaire commence à Neuchâtel, comme l'explique Françoise Kuenzi dans «L'Express». Une libre opinion, parue à la fin octobre, dénonce sans citer de lieux, deux cas d'attitude agressive de parents musulmans qui ne voulaient pas de la fête de Noël organisée par des enseignants. Denis Trachsel, directeur des Ecoles de la ville de Neuchâtel, mène son enquête mais ne trouve rien! Le Collège des Acacias, dont il est semble-t-il question, a bel et bien été décoré pour Noël et personne n'est venu se plaindre. Aucune demande de dispense n'est parvenue non plus à Denis Trachsel. Selon lui, une seule enseignante du Crêt-du-Chêne, s'est fait «timidement» approchée lors d'une réunion par des parents qui lui ont expliqué qu'évoquer pour eux la naissance de Jésus était délicat.
L'auteure de la lettre à «L'Express», qui se décrit elle-même comme quelqu'un de plutôt à gauche et qui voulait éviter de faire «le beau jeu de ceux qui pensent très à droite», regrette que cette affaire soit allée trop loin. «Mon message a été totalement inversé. Les journalistes sont partis sur des fantômes», explique-t-elle à «La Liberté». Elle ne demandait que le respect des croyances et de la culture de chacun. Elle maintient néanmoins sa version des faits, relevant que des parents se sont sentis mal à l'aise face à l'éviction complète de l'histoire de Noël des écoles pour obéir au «politiquement correct».
Un avis de droit
Parallèlement, Sylvie Fischer, de l'agence Protestinfo, rapporte que des cas de demandes de dispenses ont été signalés dans le canton de Vaud l'an dernier par des enseignants. Ces démarches ont entraîné la publication par le Département de la formation et de la jeunesse d'un avis de droit et de recommandations aux enseignants.
Entre-temps, la rumeur a fait son chemin. Dès le 10 décembre, l'UDC valaisanne s'engouffre dans la brêche: «Ces événements qui tendent à se multiplier démontrent que l'islam militant toujours plus actif dans notre pays qui compte des centaines de milliers de musulmans, affiche de plus en plus ouvertement son refus de nos traditions séculaires.»
Amplifiée par la presse, la polémique gonfle et déborde en Suisse alémanique. Sans vérifier les faits, le «Blick» titre en une quatre jours de suite sur «l'interdiction de Noël à l'école» en appelant ses lecteurs à se prononcer. Pour répondre notamment aux déclarations de Beat Zemp, président de la Fédération suisse des enseignants, qui avait estimé que «couronnes de l'Avent et arbres de Noël n'ont pas leur place dans les salles de classes. Ils appartiennent au domaine de la famille.» Cette phrase, le «Blick» n'hésite pas à la qualifier d'appui aux parents musulmans radicaux. Béat Zemp est contraint de s'expliquer par voie de communiqué.
Les griffes du «Blick»
«Nous n'avons pas fait de campagne contre les musulmans. Nous avons seulement cherché à ouvrir le débat», se défend Rolf Cavalli, rédacteur en chef adjoint du «Blick». «Il s'agissait d'une question simple et légitime, nous voulions simplement savoir s'il y avait des normes en Suisse sur ce sujet. M. Zemp nous a fait cette réponse brute - ce qu'il n'a d'ailleurs jamais nié - et nous avons rebondi là-dessus. Il nous reproche aujourd'hui d'avoir monté une histoire, mais ce sont bien ses propos.» Quant au fait de ne pas avoir enquêté sur l'existence ou non de tels cas, pour le responsable du «Blick», ce n'était pas le sujet du débat.
«C'est toujours la même chose, le «Blick» amène des thèmes et des questions et en discute. Tous les autres journaux arrivent ensuite - vous aussi - pour en parler. Finalement le «Blick» est une aide pour permettre aux thèmes d'émerger», poursuit le journaliste. Au point d'en faire sa une quatre jours de suite sans aucune arrière-pensée?
Singulièrement agressés, les musulmans tentent de calmer le jeu. Plusieurs organisations demandent le 18 décembre de ne pas exclure les fêtes de Noël des salles de classe. Une telle exigence serait inappropriée et ne servirait pas la paix religieuse, expliquent-ils. Pas dupes, ils craignent que certains en profitent pour provoquer des tensions communautaires.
L'UDC ne s'embarasse pas de tels scrupules. La paix et la tolérance ne semblent pas faire partie de ses traditions de Noël.

Refoulés de Suisse, menacés de mort au Kosovo, ils sont dans l’impasse


LIre l'article de Carole Pantet dans 24 heures
La coordination Asile Nord vaudois se bat pour la régularisation d’Abil, Lirje et leur fille Fiona. Elle fait signer des pétitions adressées au Conseil d’Etat.
« Pour nous la guerre dure encore. Nous ne sommes libres, ni ici, ni là-bas», sanglote Lirje Miftar dans son petit appartement yverdonnois. Fiona, 3 ans écarquille les yeux et regarde sa mère sans vraiment comprendre. Lirje s'excuse immédiatement pour ces larmes: «Je ne devrais pas, mais à chaque fois qu'on en parle, ça me stresse.»

Après avoir enduré les pires heures de la guerre repliés dans la montagne, Lirje et son époux Abil, tous deux albanais du Kosovo sont admis provisoirement en Suisse en 1999. Ils vivent quelque mois à Genève, où ils participent à une pièce de théâtre sur le thème de l'asile.

En avril 2000, lorsque la guerre se termine, ils retournent sans broncher dans leur village. Pour Abil, aucun doute, leur vie était là-bas. «J'y exerçais le métier de géomètre et nous avions une maison en construction», souligne-t-il avec fierté et dans un français bien maîtrisé. S'il retrouve rapidement du travail, les ennuis ne tardent pas à commencer.

Durant les combats, Abil avait caché un ami de la famille, un jeune Serbe déserteur. Ses compatriotes ne lui pardonneront pas cette solidarité «déplacée». Des insultes, puis des menaces de mort. La vie du couple devient impossible. Ils décident non sans déchirement de revenir en Suisse en 2002. Une procédure d'asile complète recommence. En vain. Ils seront déboutés.

Tout de même un soleil

Dans ce ciel obscur, un soleil. Après sept fausses couches et des années d'attente, Lirje donne naissance à Fiona. Mais la réalité les rattrape vite. Le premier plan de vol suit de peu l'heureux événement. Capturé par la police, Abil passera même une journée à la prison de Frambois avant d'être relâché. Depuis, il se cache, vivant le plus souvent loin de sa femme et de sa fille. «J'ai attendu si longtemps d'avoir un enfant et maintenant je dois vivre sans lui», regrette-t-il.

Le retour? «Impossible!» Ils sont catégoriques. Le Kosovo est petit, où qu'ils vivent la menace sera la même. Alors ils s'accrochent et veulent y croire encore. Pour les aider dans leur ultime démarche, la coordination Asile Nord vaudois fait signer ces jours à Yverdon une pétition adressée au Conseil d'Etat vaudois «pour que cette famille retrouve un minimum de dignité».
Des cas en suspens chez les «523»


Le combat acharné des différentes coordinations Asile vaudoises pour régulariser les «523» requérants déboutés semble désormais bien loin. Pourtant, tous les cas n'ont pas encore été réglés. La grande majorité des 146 dossiers déclarés «en attente» en juillet pour cause de recours n'ont pas encore reçu de réponse définitive. Les premières nouvelles semblent néanmoins plutôt bonnes. «C'est difficile d'articuler un chiffre précis, mais quatre permis F viendraient d'arriver», se réjouit Francine Sacco, de la Coordination Asile Nord vaudois. Mieux, parmi les protégés régionaux il ne reste désormais plus qu'une seule famille dans l'expectative.

Bien qu'épuisée, la coordination Asile n'a pas pour autant décidé de jeter l'éponge. Une quinzaine de membres défendent toujours une vingtaine de familles qui, bien que ne faisant par partie des «523», se trouvent dans des situations analogues. «Le combat est d'autant plus difficile que nous ne pouvons plus nous appuyer sur cet effet de groupe», conclut avec pessimisme Francine Sacco.