vendredi 11 juillet 2008

Cette Grande Bleue qui hypnotise Sarkozy

Entouré des représentants de plus de 40 pays, dont le Syrien Bachar al-Assad, Nicolas Sarkozy lance ce week-end à Paris son grand projet d’Union pour la Méditerranée. En dépit des dissensions et des doutes. Coup de projecteur sur ce Mare Nostrum auquel nous devons tout. Un article de Bernard Bridel dans 24 Heures.
«Je veux lancer un ap­pel à tous les peu­ples de la Méditer­ranée, pour leur dire que c’est en Méditerranée que tout se joue, et que nous devons surmonter toutes les haines pour laisser la place à un grand rêve de paix et de civilisation. Je veux leur dire que le temps est venu de bâtir ensemble une Union méditerra­néenne qui sera un trait d’union entre l’Europe et l’Afrique.» C’était le 6 mai 2007, au soir. Dans son premier discours de président, Nicolas Sarkozy affi­chait son ambition. Non sans souffle, le nouvel élu rappelait tout ce que nous devons à la Grande Bleue, mais surtout re­disait sa conviction selon la­quelle «l’avenir de l’Europe est au Sud». Une conviction pas tout à fait désintéressée, la France cherchant à renforcer au Sud une influence et un poids qu’elle tend à perdre au Nord.
La patte d’Angela Merkel

Treize mois plus tard, le prési­dent français s’apprête à concré­tiser ce week-end son ambition. Une ambition quelque peu redi­mensionnée après qu’Angela Merkel a refusé le projet initial du Français, qui voulait limiter la nouvelle Union aux seuls pays riverains de la Grande Bleue. Craignant que cet appel du Sud ne menace la construction euro­péenne, la chancelière alle­mande a obtenu que l’Union pour la Méditerranée (UPM) re­vienne dans le giron européen et intègre les 27 membres de l’Union européenne (UE).
C’est donc entouré des diri­geants d’une quarantaine de pays et de ceux de l’Autorité palestinienne (voir carte ci-con­tre) que Nicolas Sarkozy lancera, dimanche au Grand Palais, ce qu’il voudrait que l’on retienne comme l’événement majeur de sa présidence de l’UE, commen­cée le 1er juillet.
Pour Sarkozy, l’UPM doit re­poser sur des coopérations con­crètes dans des domaines comme la protection de l’envi­ronnement et la dépollution de la mer, l’énergie, la sécurité, l’éducation et les échanges cul­turels. Cette nouvelle collabora­tion entre le nord et le sud de la Méditerranée – différente du «processus de Barcelone», lancé en 1995 entre l’UE et les pays du Sud – doit aussi contribuer à gagner la bataille contre le «ter­rorisme, l’intégrisme et le fonda­mentalisme », a assuré Sarkozy.
Tous au défilé

La présence, ce week-end à Paris dans les mêmes lieux, du premier ministre israélien Ehoud Olmert, du chef de l’Autorité palestinienne Mah­m

oud Abbas, mais surtout du président syrien Bachar al-As­sad, est un joli succès pour Nico­las Sarkozy, même si le Libyen Kadhafi a décliné l’invitation. Ce succès sera d’ailleurs affiché au grand jour. Lundi, tout ce beau monde se retrouvera au défilé du 14 Juillet, sur les Champs­Elysées.
Reste que ce raout sarkozien autour de la Grande Bleue a suscité de nombreuses critiques. L’avenir dira si elles étaient jus­tifiées.

MEDITERRANÉE: PASSAGE VERS «L’ELDORADO»
C’est un des pires drames qui endeuille régulièrement les côtes du sud de l’Europe: l’immigration clandestine depuis l’Afrique a pris ces dernières années des proportions inouïes. Pratiquement «rançonnés» par des réseaux de passeurs souvent complices des autorités locales, ils sont des dizaines de milliers à tenter chaque année le passage vers l’eldorado Europe. Les plages du sud de l’Espagne et la petite île italienne de Lampedusa sont devenues les «portes du paradis» pour ceux qui échappent à la noyade. Selon le quotidien italien La Repubblica, qui suit de très près ce dossier, «les

Image de carte
estimations les plus optimistes font état d’au moins 10 000 personnes mortes noyées au cours des dix dernières années» en tentant de rejoindre l’Europe à travers la Méditerranée.

Le Mexique, nouvelle route de l'exil cubain

De plus en plus, les Cubains cherchent à rejoindre les Etats-Unis par le continent. Pour ne pas être rapatriés. Un article d'Emmanuelle Steels pour 24 Heures.
Mais il y a un prix à payer: ils sont rackettés par la mafia, les narcotrafiquants… et la police. Témoignages.

Des Cubains sont interceptés par l’armée mexicaine à leur arrivée à Cancún. Quelque 10 000 Cubains seraient passés par le Mexique pour atteindre les Etats-Unis en 2006. En vertu de la politique des «pieds secs, pieds mouillés», ceux qui sont arrêtés en mer sont rapatriés sur l’île, alors que ceux qui touchent le sol américain obtiennent automatiquement un permis de séjour.
CANCÚN, LE 7 JUIN 2008 AP


L
es «90 milles» n’ont plus la cote: la distance qui sépare Cuba de la Floride s’est allongée pour les exilés cubains, qui effectuent désor­mais un détour par le Mexique. Là, ils tombent aux mains d’une police corrompue et de trafi­quants liés aux cartels de la drogue qui monnaient leur pas­sage à prix d’or. La route mari­time, plus directe, est sous étroite surveillance: c’est pour­quoi l’itinéraire mexicain est de plus en plus couru.
Selon les services consulaires américains, 10 000 Cubains sont passés par le Mexique en 2006, alors que 7500 se sont rendus directement en Floride. En vertu de la politique des «pieds secs, pieds mouillés», ceux qui sont arrêtés en mer sont rapatriés sur l’île, alors que ceux qui touchent le sol améri­cain obtiennent automatique­ment un permis de séjour. Cette norme a popularisé la voie ter­restre à travers le Mexique, un chemin pourtant semé d’embû­ches.
«J’ai dû me livrer aux autori­tés parce que les policiers mexi­cains m’avaient dévalisé», ra­conte Rafael Suarez-Remon, ex­professeur d’université à Cuba. Par téléphone, depuis la station migratoire (centre de rétention) de Tapachula, au Chiapas, il explique qu’il s’est fait voler près de 1000 dollars et qu’il n’a plus de quoi continuer sa route.
Alliance entre narcomilice et mafia de Miami

Et puis il y a l’irruption des cartels de la drogue, qui voient dans le trafic de migrants une nouvelle manne à exploiter. Le 12 juin dernier, 33 réfugiés cu­bains étaient kidnappés dans le sud du Mexique, semble-t-il par les Zetas, une milice liée aux narcotrafiquants. Quelques jours plus tard, les Cubains étaient repérés au Texas: d’après les passeurs, au­jourd’hui sous les verrous, l’ex­pédition aurait été financée par des organisations anticastristes de Miami qui baignent dans des activités aussi louches que des trafics d’armes et de drogues.
L’alliance entre la mafia cu­baine et les cartels mexicains n’est encore qu’une hypothèse étudiée par les enquêteurs. Ce qui est par contre avéré, c’est la corruption de la police. «On accuse les Zetas et la mafia cubaine, mais c’est une façon pour les autorités de détourner l’attention et d’éluder leur pro­pre responsabilité», explique Diego Lorente, de l’association d’aide aux migrants Sin Fronte­ras.
Un trafic très lucratif

Le phénomène est bien connu: pour les agents chargés de les surveiller, les Cubains sont une aubaine. Ils ont de l’argent. Dans les stations mi­gratoires, ils constituent une sorte de caste, mieux traitée que les migrants centraméri­cains, qui dorment par terre et dont la nourriture est ration­née.
L’Etat mexicain impose aux Cubains une amende de 5000 à 10 000 dollars et leur accorde un permis transitoire de deux semaines pour passer aux Etats­Unis. «Mais souvent, pour accé­lérer la procédure et les libérer plus tôt, le personnel mexicain les extorque», dénonce Emilie Joly, une Canadienne qui visite chaque semaine le centre de Tapachula pour le compte de l’ONG Fray Matias de Cordova. Pour les mafias comme pour les représentants de l’ordre, le tra­fic de Cubains s’avère lucratif.

L'Europe juge raciste le fichage des enfants roms

enfant code barreStrasbourg  dénonce une politique «discriminatoire». Attention: racisme! La suspicion infamante s’est abattue hier sur le gouvernement italien. Un article de Dominique Dunglas pour 24 Heures.

Le parle­ment européen a en effet adopté une résolution exhortant Rome à ne pas procéder au relèvement systématique des empreintes des enfants roms, «car cela constitue un acte de discrimination fondé sur la race et l’origine ethnique». La polémique suit la décision du ministre de l’Intérieur Roberto Maroni de faire un recensement de tous les individus résidant dans les camps de nomades. En absence de documents d’identité fiables, les autorités prévoient de recourir à la prise des empreintes digitales, y compris pour les en­fants.
Les préfets se rebellent

Indignation donc. En Italie, d’abord, où, outre l’opposition de la gauche, plusieurs préfets ont refusé de participer au recense­ment. L’Eglise aussi a condamné la mesure. Même Gianni Ale­manno, le nouveau maire de Rome qui a fait campagne sur la lutte contre l’insécurité et les clandestins, a manifesté sa «per­plexité ». En Europe ensuite. Jacques Barrot, commissaire européen à la justice, a demandé à plusieurs reprises des éclaircissements au gouvernement italien. Et le parle­ment de Strasbourg a condamné l’initiative de Rome. Mais les autorités italiennes rejettent point par point les accusations. Le recensement ne concerne pas uniquement les Roms, mais tous les individus qui résident dans des camps de nomades. Il n’y aurait donc pas de discrimination ethnique. Et il ne s’agit pas d’un fichage systématique des enfants; la mesure ne sera adoptée que lorsqu’il est impossible d’établir l’identité.
Ficher pour protéger?

Enfin, le recensement est des­tiné à protéger les enfants. Une fois identifiés et munis de docu­ments en règle, ils recevront une assistance médicale et seront sco­larisés. Ils seront retirés des fa­milles qui les exploitent en les faisant mendier ou se prostituer.
Alors, fausse polémique? La question est complexe, car même la gauche reconnaît que les Roms posent en Italie un problème d’ordre public. Mais le gouverne­ment Berlusconi veut fermer les 1000 camps irréguliers de noma­des qui existent dans la Pénin­sule. Le recensement n’est donc que la première étape d’un rapa­triement forcé des extracommu­nautaires qui ne sont pas en règle, donc la majorité des Roms. En outre, le gouvernement n’a pas financé ni mis en place les infrastructures censées accueillir et scolariser ces enfants. «Cela viendra après le recensement», promet le ministre. L’opinion pu­blique attend de le voir pour le croire.

Une nouvelle tragédie de l'émigration clandestine fait quinze victimes

Quinze Africains, dont neuf jeunes enfants, sont décédés à bord d’un bateau qui tentait de rallier la péninsule ibérique
Le plus jeune avait 12 mois, le plus âgé à peine 4 ans. Neuf enfants et au moins cinq adul­tes sont morts en tentant d’at­teindre les côtes andalouses, dans un bateau qui a été inter­cepté dans la nuit de mercredi à jeudi. Selon les témoignages des 33 rescapés de cette embarca­tion, la plupart des cadavres «ont été jetés par-dessus bord par leurs compagnons de voyage», a indiqué la garde civile d’Almeria, précisant que ce bilan n’était pas définitif. Au moment de l’interception du bateau, «il y avait aussi une femme morte à bord».
Selon la Radio nationale es­pagnole, il y avait aussi plu­sieurs femmes enceintes à bord du bateau de fortune. Tous les clandestins étaient très affaiblis à leur arrivée en Espagne.
Une tragédie similaire s’était produite en début de semaine au large de la Costa del Sol, avec la disparition de quatorze migrants d’origine nigériane après le chavirement de leur embarcation. Les sauveteurs en mer avaient lancé des bouées et secourus 23 des clandestins.
Le chef du gouvernement es­pagnol, José Luis Rodriguez Za­patero, a qualifié de «tragédie insupportable pour l’esprit hu­main » le drame annoncé hier. Des candidats à l’immigration meurent régulièrement en ten­tant la périlleuse traversée de­puis les côtes africaines vers l’Espagne, tout particulière­ment vers l’archipel des Cana­ries, dans l’Atlantique. Au total, 921 immigrants illégaux sont morts ainsi en 2007. ATS

A voir sur le site de la TSR

Voir également ce reportage sur les réactions que suscite cette vague d'immigration sur l'île de Lampedusa

«Venez voir nos églises»

L'ambassadeur du Maroc réagit. Mohammed Guedira s'exprime après le dépôt par quelques UDC de l'initiative voulant interdire la construction de minarets en Suisse

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