jeudi 17 décembre 2009
«Il n’y aura pas d’islamisation de la Suisse»
A l’occasion des dix ans de l’Observatoire des religions en Suisse, son directeur, Jörg Stolz, commente le vote sur les minarets
L’Observatoire des religions en Suisse, basé à l’Université de Lausanne, fête aujourd’hui ses dix ans. Avec humour, son jeune directeur, le sociologue Jörg Stolz, dit qu’il est un produit de la sécularisation. Car plus une société se distancie de ses bases religieuses, plus il apparaît nécessaire d’étudier ces phénomènes étranges que sont les croyances, les rites, les pratiques. L’Observatoire a succédé à l’Institut d’éthique sociale de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse. Son approche des questions religieuses est non confessionnelle, et une dizaine de chercheurs y travaillent. Il faut dire que la Suisse est une terre d’élection pour les études de sociologie religieuse, puisqu’elle comporte plus de 490 groupes religieux, qui cohabitent plutôt paisiblement. Le vote sur les minarets va-t-il remettre en question cet équilibre délicat? Entretien.
Minarets: la Cour des droits de l'homme accepte le recours
ATS/ANSA | 16.12.2009 | 19:45
La Cour européenne des droits de l'homme a reçu le recours de l'ancien porte-parole de la mosquée de Genève Hafid Ouardiri contre l'interdiction des minarets. Elle précise qu'il est trop tôt pour pouvoir dire quand une décision pourra être prise sur la recevabilité du texte.
Dans le recours, cité par l'agence italienne Ansa, il est écrit que l'interdiction constitue une violation des articles 9, 13 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme. Ces articles sanctionnent le droit à la liberté de pensée et de religion, le droit à ne pas être discriminés et le droit à la possibilité de recours devant une instance nationale.
Hafid Ouardiri a annoncé son recours mardi. Le bâtonnier genevois Pierre de Preux, un des cinq avocats représentant le recourant, a admis certaines difficultés de recevabilité. Le président de la Cour européenne des droits de l'homme, Jean-Paul Costa, a récemment indiqué que le problème était «compliqué au niveau juridique».
Avant de pouvoir saisir la Cour, les plaignants doivent d'abord avoir épuisé toutes les voies de recours dans leur pays. Or «il n'est pas possible de saisir le Tribunal fédéral contre le résultat d'un vote populaire», expliquait début décembre M. Costa devant des journalistes à Bruxelles.
Ces difficultés peuvent toutefois être résolues par certaines jurisprudences de la Cour européenne elle-même, selon le bâtonnier genevois.
Simple course Guantánamo- Genève pour un Ouzbek
LAURENT AUBERT | 17.12.2009 | 00:02
«Nous voulions régler en 2009 encore la question de l’accueil d’un ex-détenu de Guantánamo.» Eveline Widmer-Schlumpf était trop contente hier d’avoir enfin une bonne nouvelle à annoncer. Début 2010, un Ouzbek emprisonné à Guantánamo depuis 2002 sera accueilli à Genève. Cette arrivée concrétise la procédure engagée en janvier dernier, lorsque Barack Obama avait annoncé la fermeture de Guantánamo et avait demandé à plusieurs pays d’accueillir des détenus contre lesquels aucune charge n’a été retenue.
La ministre de la Justice l’a souligné, les critères de sécurité, d’intégration et de santé ont été déterminants pour la sélection que la Suisse a dû opérer. Au départ, les Etats-Unis ont proposé quatre détenus. L’enquête menée par une délégation suisse a abouti à l’élimination de l’un d’eux pour des raisons de sécurité. Les trois autres – un Ouzbek et deux Ouïgours – remplissaient en revanche toutes les conditions. Mais, comme l’a admis Eveline Widmer-Schlumpf, «le risque zéro n’existe pas, pour quelque individu que ce soit.»
Genève, qui est finalement le seul canton prêt à accueillir des ex-détenus après le désistement de Fribourg et de Zurich, a choisi l’Ouzbek. Ce dernier suivra un programme d’intégration, «il est prêt à apprendre le français, il souhaite recommencer sa vie en Suisse», a précisé la cheffe du Département fédéral de justice et police (DFJP). Il recevra un permis humanitaire et sera autorisé à travailler. Cet homme, qui a été persécuté comme musulman en Ouzbékistan, ne peut pas rentrer dans son pays.
Le président du Conseil d’Etat genevois, François Longchamp, a souligné que cet accueil s’inscrit dans la vocation humanitaire du canton. Pour des raisons de sécurité, il s’est refusé à donner le moindre détail sur la personnalité de ce réfugié, sur la date de son arrivée en Suisse ou sur les modalités de son hébergement.
Comme la Confédération, Genève sera partiellement indemnisé par les Etats-Unis. Les modalités du transfert figurent en effet dans un mémorandum of understandingsigné par la Suisse, qui doit être encore ratifié par le Congrès américain. Eveline Widmer-Schlumpf a réfuté tout rapport entre cet accord et l’affaire UBS. «Mais cela ne nuira pas à notre image», a-t-elle reconnu.
Dans d’autres cantons
Les deux Ouïgours qui remplissent aussi les conditions pour venir en Suisse restent pour l’instant sur le carreau. La cheffe du DFJP n’a pas exclu qu’une solution puisse être trouvée dans d’autres cantons. Par la bouche de son délégué à la communication, le directeur vaudois de la Justice, Philippe Leuba, rappelle sa position: un accueil est possible à condition que la sécurité soit garantie de manière absolue. Pour l’heure, le magistrat estime que le dossier reste du ressort de la Confédération.
Si le Parti socialiste perçoit «un signe d’ouverture et de solidarité», les libéraux radicaux estiment que cette décision ne doit en aucun cas constituer un précédent. De son côté, le président du PDC, Christophe Darbellay, soupçonne la Suisse d’avoir donné «un gage de bonne volonté aux Etats-Unis». Quant à l’UDC, elle ne voit «aucune raison d’accueillir un prisonnier de guerre des Etats-Unis»