(ats) Les quelque 150 sans-papiers et activistes qui se sont installés vendredi dans la "Predigerkirche" en vieille ville de Zurich peuvent pour l'heure y rester. Ils sont cependant tenus de rendre l'entrée accueillante.
Après une première nuit sur place, les occupants sont parvenus à susciter l'attention de l'opinion publique. "Maintenant, il s'agit d'approfondir les contacts personnels", a expliqué Daniel Lienhard membre de l'Eglise, devant la presse. L'homme d'église est en contact avec la police. Aucune intervention n'est pour l'heure à l'ordre du jour.
Vendredi, les responsables religieux étaient gênés par le fait que les manifestants veuillent dormir dans l'église et se disent prêts à rester longtemps. Le fait que l'administration cantonale soit en vacances pour deux semaines n'arrange pas non plus les choses.
Samedi, la direction de la paroisse a adouci sa position, et moyennant quelques aménagements pour ne pas déranger les cultes ou autres rassemblements prévus, elle a donné son feu vert pour une occupation de longue durée. Car certains des sans-papiers sont décidés à rester jusqu'à ce que leur situation dans le canton soit régularisée.
LE COURRIER
Editorial - Les sans-papiers s'invitent pour Noël
C'est un réveil soudain, presque inattendu. Quelque cent cinquante femmes, hommes et enfants sans statut légal ont fait irruption sur la scène médiatique et politique en occupant une église en vieille ville de Zurich, la Prediger Kirche. Un rassemblement a simultanément eu lieu à Lausanne. Soutenus par les organisations de défense des migrants, ces sans-papiers et ces recalés du circuit de l'asile réclament le droit de rester et de travailler dignement sur sol helvétique. A la veille de Noël, ces actions rappellent que la Suisse se distingue en Europe par la fermeté d'une législation sans cesse renforcée.
Que le coup d'envoi ait été donné à Zurich constitue une bonne nouvelle. Contrairement à certaines pratiques, romandes notamment, qui sont objectivement plus souples, le centre économique du pays applique avec zèle les lois fédérales. Les autorités zurichoises n'ont ainsi jamais présenté de demande de régularisation collective, alors qu'une forte proportion des 90 000 sans-papiers (une estimation basse de l'Office fédéral des migrations datant de 2004) résident et occupent un emploi au noir dans ce canton. Sans l'adhésion de Zurich, une nouvelle requête lancée par des cantons –à l'image de Genève et ses 5000 permis– n'aurait pas plus de chance d'aboutir, estiment les associations.
Au bord de la Limmat, cette politique inhumaine se décline également dans le domaine de l'asile. Réduite à sa plus simple expression, l'aide d'urgence pour les requérants frappés d'une non-entrée en matière (NEM) et ceux qui ont été déboutés est par exemple distribuée sous forme de bons Migros. Et ces personnes sont contraintes de changer de foyer chaque semaine. Une incitation à la délinquance, en quelque sorte.
Au-delà du cas zurichois, les revendications du mouvement valent néanmoins pour l'ensemble de la Suisse. L'action lausannoise en est la preuve. Parviendra-t-on à remettre la question du droit des migrants au centre du débat? Il faudra en tout cas une bonne dose de détermination. Entamée au début de la décennie, la campagne de soutien aux sans-papiers avait marqué quelques points sous le règne de la conseillère fédérale Ruth Metzler, avant d'être douchée par l'arrivée de Christoph Blocher au Conseil fédéral. L'adoption claire par le peuple des lois révisées sur l'asile et les étrangers, en 2006, n'a ensuite rien arrangé. Quant à Eveline Widmer-Schlumpf, elle ne semble pas disposée à desserrer la vis.
Reste que ces lois laissent théoriquement la possibilité de procéder à des régularisations. Leurs promoteurs en avaient fait un argument pour convaincre la population. Mais ces maigres ouvertures ne sont même pas exploitées. Dans ce contexte, c'est bien l'incurie de la politique migratoire qu'il convient de dénoncer inlassablement.
Une église occupée par des sans-papiers
ZURICH • Environ cent cinquante sans-papiers occupent la «Predigerkirche». Avec cette mobilisation, ceux-ci entendent dénoncer le traitement que leur réservent les autorités.
En vieille ville de Zurich, quelque 150 sans-papiers se sont installés dans la «Predigerkirche» depuis hier. Ils protestent contre le traitement inhumain que leur réservent, selon eux, les autorités zurichoises. Une action de soutien se déroule parallèlement à Lausanne. Une action semblable a déjà eu lieu il y a un an dans le «Grossmünster», la cathédrale zurichoise. Les occupants y étaient restés 24 heures. Cette année, ils ne se sont pas fixé de limite, expliquent-ils dans un communiqué.Selon le porte-parole du collectif zurichois de défense des sans-papiers, certains sont prêts à rester jusqu’à ce qu’ils obtiennent le droit de rester en Suisse. Les occupants demandent au canton d’appliquer les règles fédérales existantes pour les cas de rigueur. Selon eux, le canton de Zurich est désormais le seul qui ne traite aucune demande de cas de rigueur. Les manifestants réclament aussi la levée de l’interdiction de travailler pour les sans-papiers.
Le chef de l’office zurichois de la migration rejette ses accusations. Adrian Baumann a dit que le canton se tenait de façon conséquente aux directives du droit fédéral des étrangers. Selon lui, ces sans-papiers ne remplissent pas les conditions pour que leur demande de papiers soit examinée.
Parmi les 150 personnes présentes dans l’église, 130 sont des sans-papiers ou des réfugiés. On y trouve des hommes, des femmes et des enfants d’Afrique, d’Iran, d’Irak ou d’Afghanistan. Ils ont promis de ne pas déranger les services religieux. Les responsables de l’église se montrent compréhensifs. Les occupants pourront déplier des banderoles durant les messes de Noël.
Mais les responsables religieux sont gênés par le fait que les manifestants sont prêts à rester longtemps. Le fait que l’administration cantonale est en vacances pour deux semaines n’arrangera pas les choses, jugent-ils.
De plus, le président de la paroisse ne souhaite pas que les occupants dorment dans l’église. Ils leur ont proposé de passer la nuit dans une maison adjacente, mais ils ont refusé. Les négociations doivent continuer aujourd’hui. La police a décidé de ne pas intervenir car les occupants sont pacifiques.
Une action de solidarité avec les Zurichois s’est déroulée vendredi soir devant l’église St-Laurent au centre de Lausanne. Au contraire de Zurich, le canton de Vaud avait utilisé la marge de manoeuvre qu’offrait la loi et avait finalement légalisé le séjour de plusieurs centaines de sans-papiers.
Les personnes qui se retrouvent en situation d’urgence sont aussi en augmentation dans le canton de Vaud, a indiqué une participante à la manifestation. La nouvelle loi sur l’asile est inhumaine et discriminante, pouvait-on encore lire sur un papillon. ATS