jeudi 13 avril 2006

Pour une véritable loi sur la migration

L'opinion d'Oscar Tosato, conseiller municipal socialiste

Il y a un quart de siècle, le peuple suisse rejetait massivement l’initiative fédérale «Etre solidaires» pour l’abolition du statut de saisonnier. Soutenue par 16,2% des votants, elle réali­sait l’un des plus mauvais résultats qu’une initiative ait atteint tout au long du siècle dernier.

Les conséquences de ce re­fus ont été désastreuses. Elles ont marqué le destin de mil­liers de familles migrantes qui devaient attendre 4 ou 5 ans avant de pouvoir se réu­nir. Une interdiction juridi­que et statutaire que peu de personnes respectaient. Les conjoints travaillaient donc au noir et les enfants res­taient enfermés à la maison. L’hypocrisie s’est ainsi insti­tutionnalisée et notre pays, faute d’une législation qui instaure des droits, a dû se résoudre à inventer des dis­positions réglementaires qui permettent à des mères d’ac­coucher en Suisse, à des en­fants clandestins d’aller à l’école ou d’être au bénéfice d’une assurance-maladie.

Il a fallu attendre les ac­cords bilatéraux pour voir quelle tournure pouvait pren­dre une vraie politique de regroupement familial, qui permette, quelle que soit la durée ou le type d’autorisa­tion de séjour, de faire venir sa famille. Non pas la famille dans sa définition la plus res­trictive, mais celle compre­nant le conjoint et les enfants en dessous de 21 ans ou aux études, ainsi que les parents à charge.
Quel progrès! Ce que les luttes incessantes des défen­seurs des droits humains n’avaient pas réussi à obtenir du gouvernement, les accords bilatéraux l’ont introduit au­delà de ce qu’il était permis de rêver. Je me demande tou­jours pourquoi nous n’avons pas pu franchir ce pas sans pression extérieure et poser nous-même les fondements de nos valeurs en matière de droits humains.

25 ans plus tard, nous nous retrouvons confrontés à une situation identique. A l’envers de tout bon sens, le Parle­ment a durci les possibilités d’obtenir l’asile en Suisse et limité les conditions de mi­gration pour les Non-Euro­péens. Si personne ne con­teste la nécessité d’une régle­mentation, on peut s’étonner qu’elle invente des disposi­tions différentes en matière de regroupement familial en fonction de la nationalité et du statut social et financier des parents. Comment com­prendre aujourd’hui, après avoir vu quelles ont été les conséquences du rejet de l’initiative «Etre solidaires» que le regroupement familial ne soit possible pour certains que jusqu’à 12 ans, pour d’autres jusqu’à 18 ou 21 ans, voire jusqu’à la fin des étu­des? Pourquoi certains doi­vent- ils patienter 12 mois avant de faire la demande? Pourquoi, en cas de dissolu­tion des liens familiaux, l’autorisation de séjour n’est­elle pas maintenue pour tout le monde?

A ce petit jeu des différen­ces, c’est l’organisation de la famille qu’on met en péril. On joue avec les valeurs qui fon­dent notre société, on se mo­que de l’équité et finalement on discrimine.

Certains rétor­queront que les migrants ont le choix d’accepter ou de refuser les conditions posées. Une posi­tion de force sur le marché du travail n’autorise cependant pas à bafouer la dignité des êtres humains, et vivre dans une région en paix n’autorise pas à ériger des forteresses pour repousser les opprimés.
Aujourd’hui ce ne sont pas de nouvelles lois restrictives qu’il nous faut, mais une véri­table loi sur la migration. Une loi pour que toute personne et sa famille, quelle que soit sa nationalité, puisse obtenir une autorisation de séjour si elle est au bénéfice d’un con­trat de travail conforme aux dispositions en vigueur en Suisse.

Des lois adaptées à l’évolution de la société

L'opinion du conseiller national UDC André Bugnon publiée dans 24heures : dans la droite ligne électorale de son parti

Les lois doivent corres­pondre aux attentes de la population et être adaptées en fonction de l’évo­lution de la société. Ainsi en est-il de la loi sur les étrangers et de celle sur l’asile adoptées toutes deux par les chambres fédérales et attaquées mainte­nant par référendum.

Ouverte pendant des décen­nies à une immigration consti­tuée principalement de tra­vailleurs dont elle avait besoin, la Suisse a perdu peu à peu le contrôle de la situation sur la question de l’immigration. Les abus en matière de demande d’asile et l’immigration clan­destine ont non seulement en­gendré des charges supplé­mentaires pour les collectivi­tés publiques, dépassant les deux milliards de francs dans les années de forte de­mande, mais ont contribué à modifier le tissu social de notre société.

Personne ne peut nier que la situation sur le plan de la sécurité et de la criminalité se soit dégradée ces dernières an­nées. Il n’y a qu’à prendre connaissance tous les jours des articles de presses décri­vant les méfaits commis dans une journée dans notre pays. Il y a bien sûr des Suisses de pure souche qui commettent des actes répréhensibles et je me garde bien ici de penser que nous sommes fondamen­talement meilleurs que les autres. Je sais bien aussi que la majorité de la population étrangère dans notre pays est travailleuse et respectueuse de nos droits et qu’elle est bien intégrée. Mais ces constats ne doivent pas contribuer à nous empêcher de voir la réalité des chiffres. Comment ignorer que dans certains établissements pénitenciers la population étrangère qui atteint le 80% des résidents, incarcérée prin­cipalement pour trafic de dro­gue, cambriolage ou vol, est en partie entrée de façon illégale dans notre pays.

C’est pour prendre des me­sures adéquates en matière d’immigration et éviter la ré­pétition des abus constatés ces dernières années sur cette question que la révision des deux lois susmentionnées a été acceptée par les chambres fé­dérales. Pour des questions économiques, notre pays con­naît une réelle pression à l’im­migration. Le niveau de vie élevé et les conditions sociales intéressantes que nous avons mises en place ont pour consé­quence que de plus en plus de personnes habitant dans un pays émergeant rêvent de pou­voir trouver un refuge ici. La législation actuelle n’étant pas assez précise sur de nombreux points ou offrant des condi­tions trop favorables a contri­bué à favoriser cette immigra­tion. Ces dernières années la situation de la plupart des re­quérants ne correspondait pas au droit d’obtenir un refuge car ils n’étaient pas en danger chez eux. Des abus avérés de l’utilisation de notre loi sur l’asile et sur l’immigration ne sont plus à prouver alors que les droits de recours ne font que rallonger le temps de trai­tement des dossiers.

Même si nous pouvons cons­tater une diminution du nom­bre de demandes d’asile, notre pays ne peut accepter, finan­cièrement, juridiquement et émotionnellement, une nou­velle croissance du nombre de cas.

Nous devons faire attention à ce que notre propension à l’humanisme ne nous con­duise pas à penser naïvement que nous pouvons accepter dans notre pays toutes les po­pulations en situation de pau­vreté sur cette planète. La so­lution sur le plan humanitaire consiste à favoriser le plus possible le développement économique dans ces pays de façon à ce que leurs popula­tions trouvent des conditions de vie acceptable, réduisant ainsi en même temps la pres­sion sur les flux migratoires. C’est pourquoi le peuple doit soutenir ces nouvelles lois et les accepter en votation popu­laire.