lundi 12 mai 2008

Les Eglises suisses rejettent l’initiative sur les naturalisations



La Fédération des Églises protestantes de Suisse (FEPS), la Conférence des évêques suisses (CES), l’Église catholique chrétienne de la Suisse (ECCS) et la Fédération suisse des communautés israélites (FSCI) publient un argumentaire intitulé "Naturaliser dans le respect de l’État de droit". Elles y recommandent de rejeter l’initiative "pour des naturalisations démocratiques" qui sera soumise au vote le 1er juin 2008.

Les Églises et la Fédération des communautés israélites ont la conviction qu’une société doit offrir à tous ses membres les mêmes chances de s’intégrer. Les procédures de naturalisation touchent au principe de la justice.

L’initiative demande que les communes puissent décider de manière autonome quel organe accorde le droit de cité communal. Elle rendrait donc à nouveau possibles les votes par les urnes. Or de telles naturalisations violent les droits humains et les droits fondamentaux de même que des conventions internationales. En outre, le Tribunal fédéral a considéré que les naturalisations n’étaient pas des décisions purement politiques, mais des actes administratifs.

Les candidats à la naturalisation vivent depuis de nombreuses années en Suisse et font partie intégrante de notre société. Ils apportent leur contribution au bien commun. S’ils reçoivent une décision négative, ils doivent au moins pouvoir bénéficier du droit de recours garanti par l’État de droit. Supprimer ce droit, c’est céder la place à l’arbitraire. La naturalisation est une étape importante sur la voie de l’intégration, l’intégration doit reposer sur des procédures de naturalisation fiables.

Organisations catholiques très fermes

A moins d’un mois de la votation populaire sur l’initiative de l’Union démocratique du Centre (UDC) relative aux "naturalisations démocratiques", les organisations catholiques suisses "Justice et Paix", Caritas Suisse et Migratio, la rejettent fermement.

Selon ces organisations catholiques, le vote du 1er juin met en jeu des questions fondamentales pour la Suisse : le respect des droits fondamentaux de la personne humaine, le fonctionnement de la démocratie, la vision de la Suisse comme terre d’accueil. Si la l’acquisition d’un passeport suisse n’est pas un droit fondamental, l’octroi ou non de la nationalité touche à des droits essentiels inscrits dans la Constitution fédérale. De plus, la naturalisation par le peuple pourrait porter atteinte à la sphère privée dans la mesure où des données recueillies sur des personnes candidates à la naturalisation étaient publiées.

Pour les organisations catholiques, la démocratie peut ne pas conduire à des décisions conformes aux droits fondamentaux des personnes. De plus, une naturalisation par les urnes signifierait que les actuelles instances élues par le peuple, exécutifs ou législatifs, sont incompétentes pour prendre des décisions. Enfin, si l’initiative était acceptée, cela voudrait dire que le droit communal primerait sur le doit cantonal et fédéral.

L’octroi d’un passeport rouge à croix blanche ne saurait être "considéré comme un privilège ou une récompense accordée à bien plaire", et dont le refus ne peut être contesté. En rester à cette cooptation renvoie, selon les organisations catholiques suisses, à l’image mythique d’une démocratie villageoise qui ne correspond plus à la réalité actuelle. Dans un contexte où la mobilité des individus tout au long de leur vie, la division du lieu de travail et du lieu d’habitat, les facilités de développement ont modifié le visage des collectivités locales, la naturalisation ne peut qu’être la reconnaissance de la décision d’une personne de vivre dans la communauté suisse, d’en respecter les règles et de s’y intégrer.

Oui au contre-projet parlementaire

Les organisations catholiques considèrent que le contre-projet adopté en 2007 par le parlement constitue une "réponse acceptable à l’initiative", même s’il n’élimine pas tout risque d’arbitraire. Ce contre-projet a été rédigé de façon à répondre aux exigences constitutionnelles. Il stipule que le droit cantonal régit la procédure aux échelons cantonal et communal. Les cantons peuvent prévoir qu’une demande de naturalisation soit soumise au vote de l’assemblée communale. Tout rejet doit cependant être motivé et peut faire l’objet d’un recours. Le canton veille en outre au respect de la sphère privée des demandeurs. En cas de refus de l’initiative populaire, c’est ce texte qui entrera en vigueur.

Publication : Naturaliser dans le respect de l’État de droit


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