vendredi 5 septembre 2008

Pour ou contre l'initiative antiminarets ?

"Deux en Suisse, c’est assez"

Maximilien BernhardL'opinion de Maximilien Bernhard, secrétaire romand de l'Union Démocratique Fédérale

L'aboutissement de l’ini­tiative antiminarets a fait couler beaucoup d’encre. Rarement le Conseil fédéral n’aura annoncé aussi rapidement son message, soit moins de deux mois après le dépôt. Le gouvernement pré­tend que l’initiative est incom­patible avec la liberté religieuse. A y regarder de près, le texte ne la remet nullement en question, cette liberté étant garantie par l’article 15 de la Constitution fédérale.
L’initiative concerne les arti­cles liés à la relation entre l’Etat et la religion. Il est par ailleurs utile de rappeler que, contraire­ment aux mosquées, les mina­rets n’ont pas de nécessité reli­gieuse. Ils ne sont pas cités dans le Coran et ne se justifient donc que pour l’appel à la prière, qui peut se faire, comme c’est le cas à Genève, à l’inté­rieur même de la mosquée.
Si l’on peut comprendre que le texte suscite un certain ma­laise dans les pays musulmans, c’est oublier que des chrétiens subissent de nombreuses pres­sions dans six d’entre eux au moins, dont l’Arabie saoudite, l’Iran et la Turquie. Dès lors, l’Union démocratique fédérale estime qu’il est temps pour les pays musulmans de garantir la liberté de croyance sur l’ensem­ble de leur territoire. Ce prin­cipe de réciprocité se justifie d’autant plus en regard des nombreux droits dont jouissent les citoyens de notre pays (quelle que soit leur religion), et s’agissant de la liberté de croyance, de ceux de construire des lieux de culte et de prati­quer leur foi en communauté sans crainte pour leur intégrité corporelle.
La prolifération de minarets en Suisse menacerait la paix confessionnelle. Preuve en sont les levées de boucliers qu’on a observées à plusieurs endroits de notre pays. Il est utile de rappeler que l’Europe s’est cons­tituée sur une base judéo-chré­tienne il y a deux mille ans. L’islam, qui est arrivé bien plus tard sur le territoire européen par le biais des flux migratoires, n’en était pas partie prenante. Dès lors, d’un point de vue cul­turel, on est en droit de se demander si les minarets ont véritablement leur place en Suisse.
Pour certains, l’interdiction des minarets pose un problème philosophique. Il s’agit dès lors de faire une pesée d’intérêts en plaçant cette problématique face au symbole de conquête islamique que représentent les minarets. Le danger d’instru­mentalisation de ces derniers par les milieux les plus radicaux est bien réel et pourrait débou­cher sur toute une série de nou­velles revendications (abattages rituels, exemption des cours de natation, suppression des sapins de Noël dans les écoles, etc.). Le radicalisme qui s’est manifesté l’an passé à la mosquée de Ge­nève, et qui a conduit des pa­rents à retirer leurs enfants des cours, est un des exemples pro­bants en la matière.
L’UDF reste attachée au prin­cipe de liberté de croyance ga­ranti par la Constitution; il doit toutefois être mis en regard des dangers potentiels que repré­sentent les islamiques les plus radicaux et des moyens par lesquels ils exercent leurs pres­sions. Le minaret en est un. Il convient dès lors de se prému­nir en limitant à deux (GE et ZH) le nombre de minarets sur le territoire helvétique.

"Trois raisons de dire non"

L'opinion de Hani Ramadan, directeur du centre islamique de Genève.

Le Conseil fédéral a pris la décision de mettre rapi­dement un terme à la polémique sur l’initiative con­tre les minarets, annonçant que son message au parlement se­rait remis le 15 septembre. Il faut effectivement en finir avec des prises de position qui sont indignes des valeurs universel­les que défend notre pays, et cela pour au moins trois rai­sons.
D’abord, les arguments du Comité d’Egerkingen, à l’ori­gine de cette initiative, sont faibles et grossiers. Sur le site des contestataires, le minaret est présenté comme un sym­bole de guerre et de conquête. Il exprime «la volonté d’impo­ser un pouvoir politico-reli­gieux ».
Les initiateurs mettent en garde le peuple contre l’idée «d’ériger, au nom d’une préten­due liberté religieuse, des sym­boles du pouvoir qui rejettent toute tolérance religieuse». Or le minaret est un élément ar­chitectural qui fait partie de la culture islamique, sans pour autant relever d’une obligation religieuse quelconque. Vouloir en faire un symbole politique est une démarche intellectuel­lement malhonnête, qui prend moins en compte la réalité de l’islam que la volonté de susci­ter la crainte.
Ensuite, cette initiative entre en contradiction avec l’esprit de notre Constitution. L’ancien juge fédéral Giusep Nay est allé même jusqu’à appeler le parle­ment à ne pas mettre le texte en votation populaire, le considé­rant comme anticonstitutionnel. Dans le cadre de l’Etat de droit, tous les lieux de culte devraient être conditionnés par la même réglementation en ce qui con­cerne leur construction. On ne peut interdire le minaret si l’on n’interdit pas du même coup le clocher, ou alors on cautionne ouvertement une forme de dis­crimination religieuse inadmis­sible pour qui possède une once de citoyenneté.
Enfin, cette initiative est mauvaise pour l’image de notre pays. La Suisse doit se donner l’ambition d’être un exemple de coexistence pacifique de toutes les cultures. Comment d’autres interpréteront-ils ce refus des minarets? Comme une mesure qui vise l’humiliation d’une communauté qui, dans sa grande majorité, n’est pas assi­milable à l’intégrisme. L’Alba­nais, comme le Turc, comme l’Iranien, comme le Pakista­nais, comme le Sénégalais con­naissent tous le minaret qui orne les mosquées du monde musulman. Tous seront pa­reillement choqués. Quelles réactions viendront par ailleurs de l’extérieur et du monde mu­sulman?
Déjà en mai 2007, notre conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey avait déclaré que cette initiative «met la sécurité des intérêts suisses, des Suisses­ses et des Suisses en danger», en ajoutant que «la liberté de pratiquer une religion est ga­rantie en Suisse». Parce qu’il est essentiel de refuser les amalgames qui font d’un édifice de foi une arme de guerre, qui conduisent à une forme évidente de discrimina­tion religieuse, et qui sont sus­ceptibles d’alimenter les ten­sions dont personne ne veut – sauf ceux qui se déterminent politiquement par la peur et la haine –, il faut donc résolument et démocratiquement rejeter cette malheureuse initiative.

Droit d'asile des migrants : la CFDA hausse le ton

En janvier 2006, les réfugiés de Calais manifestaient contre les conditions sanitaires qu'ils enduraient quotidiennement. PHOTO ARCHIVE JEAN-PIERRE BRUNET En janvier 2006, les réfugiés de Calais manifestaient contre les conditions sanitaires qu'ils enduraient quotidiennement. PHOTO ARCHIVE JEAN-PIERRE BRUNET

La Coordination française pour le droit d'asile (CFDA), a dénoncé jeudi la « situation préoccupante » des « exilés » le long des littoraux de la Manche et de la Mer du Nord. A quatre jours de la conférence européenne sur l'asile qui se tiendra à Paris, le collectif parle de «droits élémentaires bafoués ».

« Des milliers de femmes et d'hommes sont dans l'impasse, condamnés à une indigence indéterminée. » Le constat de la CFDA est sans appel. Composé d'une vingtaine d'associations, dont Amnesty International, France Terre d'Asile ou encore Act Up, le collectif vient de publier un rapport d'enquêtes de terrain sur les campements de fortune des migrants. Il cherche à alerter les responsables politiques avant la conférence sur l'asile prévue lundi et mardi à Paris.

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