mercredi 15 février 2006

Après vingt-huit ans en Suisse, il risque l’expulsion


Lire l'article de Martine Clerc (photo de Janine Jousson) dans 24 heures.
Shukrije Buja se bat pour garder son mari, arrivé en Suisse à la fin des années 1970. Incar­céré, le père de famille est menacé de renvoi.

«On est en train de casser une famille. Notre fils ne com­prend pas pourquoi son papa est en prison.» Les traits tirés, le coeur au bord des lèvres, Shukrije Buja ne désespère pas de faire libérer son mari du centre de détention de Fram­bois. Voilà presqu’un mois qu’Avdush Buja, père d’un en­fant de 5 ans, y a été emmené en vue de son expulsion vers son pays natal, le Kosovo. Sa faute: être sans-papiers et sous le coup d’une interdiction d’entrée en Suisse ainsi que d’une décision de renvoi.
La situation d’Avdush Buja n’est pas unique. Mais la durée de son séjour en Suisse rend son sort encore plus dramati­que, aux yeux de ses défen­seurs. Arrivé comme saison­nier à la fin des années 1970, le Kosovar a, par la suite, bravé plusieurs interdictions d’en­trée sur sol helvétique. Malgré le soutien des autorités vau­doises qui demandaient un permis B à son intention, Berne ne l’a pas entendu de cette oreille. «M. Buja aurait dû partir il y a vingt-cinq ans, mais il est resté pour subvenir aux besoins de sa famille au Kosovo, explique son avocate Monique Gisel. Maintenant, on veut l’arracher à son jeune fils. C’est humainement boule­versant, mais, juridiquement, il n’y a plus grand-chose à faire.» Avdush Buja vit depuis dix-sept ans avec Shukrije, une compatriote, aujourd’hui titulaire d’un permis B et em­ployée dans un tea-room lau­sannois.

Une double peine?

Une légère condamnation pé­nale pour complicité d’escro­querie (prison préventive), en 1998, pèse également sur les épaules du sans-papiers, selon le groupe Non aux expulsions, qui soutient la famille. «Lors du jugement, le tribunal a ajouté le renvoi à la peine ordinaire infli­gée pour un délit. Avdush est victime d’une double peine, dé­nonce Frédéric Masson, mem­bre actif de l’association. Et l’ex­pulsion administrative dont il est victime aujourd’hui découle de ses problèmes pénaux.» L’obtention d’un permis C par Shukrije Buja, qui permet­trait alors le dépôt d’une de­mande de regroupement fami­lial, serait la seule solution pour éviter le renvoi de son mari. Ce permis vient pourtant de lui être refusé, car la mère de famille avait dû recourir provisoirement à l’aide sociale. Un recours a été déposé.

La nouvelle FAREAS sur la première

Après des débats qui ont été les plus longs de ces dernières années, le Grand Conseil vaudois a mis un point final tout à l'heure à son examen de la nouvelle loi vaudoise sur "l'aide aux requérants d'asile et à certaines catégories d'étrangers". Ce n'est qu'une première lecture, mais sur les dispositions les plus controversées, les majorités ont été assez nettes pour qu'on y voie plus clair. Et par exemple, sur l'établissement de droit public qui va remplacer la fameuse Fareas, la Fondation pour l'aide aux requérants d'asile.
Ecoutez l'interview de Pierre Imhof, directeur de la Fareas.

Avec l’aide d’urgence en matière d’asile, le canton de Vaud se montre précurseur


Voici l'article de Jean-Michel Jacot-Descombes dans 24heures:
Le Grand Conseil a achevé hier la première — intense — lecture de la loi sur l’aide aux requérants d’asile et à certaines catégories d’étrangers. Le deuxième examen s’annonce tout aussi chaud.

La semaine dernière, les dé­putés en avaient admis le principe. Hier, ils sont en­trés dans les détails pour déter­miner exactement ce que l’on entend par aide d’urgence. La discussion a été d’autant plus intense que Vaud est le premier canton à légiférer dans le do­maine. «Un rôle de précurseur», ainsi que l’a souligné sur les ondes de la RSR Pierre Imhof, directeur de la Fondation vau­doise pour l’accueil des requé­rants d’asile (FAREAS).
Dans les grandes lignes, l’aide d’urgence s’adresse aux requé­rants déboutés, aux étrangers frappés d’une décision de non­entrée en matière (NEM) et aux sans-papiers. Elle constitue en fait le troisième niveau de l’aide sociale. Le plus bas surtout: 240 francs par mois, selon la commission de minorité du Grand Conseil. Un montant tou­tefois théorique vu que l’aide d’urgence «est dans la mesure du possible allouée sous forme de prestation en nature».
Parmi ces prestations, on trouve le logement — collectif sauf exception —, les repas et les soins médicaux d’urgence. Hier, les députés ont longuement dis­cuté de la possibilité d’inclure l’octroi d’une aide financière. A droite, on a alors rappelé que l’aide d’urgence, via ses presta­tions limitées, avait pour but de dissuader les gens de rester. «Leur donner de l’argent irait contre cet objectif», ont noté plusieurs députés. Au vote, cette aide a finalement été refusée.
C’est la FAREAS qui sera dé­sormais chargée d’octroyer l’aide d’urgence. Une fondation dont l’assainissement financier a par ailleurs été accepté hier par les députés. Pour Pierre Imhof, le paquet législatif adopté hier va plutôt dans le bon sens: «Nos missions sont désormais claire­ment établies. Ceux qui les com­mandent sont ceux qui les finan­cent. Et grâce à ce nouveau cadre légal, les relations sont aussi plus claires entre la FAREAS et les requérants d’asile.

La mue de la Fareas acceptée en premier débat



Lire l'article du Courrier basé sur une dépêche de l'ATS
Les députés vaudois ont achevé hier la première lecture du paquet législatif sur l’aide aux demandeurs d’asile et aux autres étrangers. Ces dispositions transforment la FAREAS en établissement de droit public et instituent l’aide d’urgence.
Les débats se sont notamment focalisés sur la forme que doit prendre l’aide d’urgence. Les députés ont longuement discuté pour savoir s’il fallait préciser dans la loi que le logement offert dans ce cadre était collectif. Il existe en effet des
exceptions, en particulier pour les familles. Les élus sont finalement tombés d’accord pour dire que le logement était en «règle générale» collectif. De même, la
gauche souhaitait préciser que l’aide d’urgence «pouvait inclure l’octroi d’une aide financière ». Cette mesure devait s’appliquer aux personnes qui restent longtemps dépendantes de l’aide d’urgence. Le conseiller d’Etat Jean-Claude Mermoud a appelé le plénum à ne pas créer une «spécificité vaudoise» qui aurait de plus une grande portée symbolique. L’aide d’urgence doit être dispensée «dans la mesure du possible en nature», selon la loi. Cela laisse une marge suffisante pour les exceptions, a-t-il estimé. Il a été suivi par une courte majorité de 78 voix contre 74 et une abstention.Le Grand Conseil a également adopté un décret sur l’assainissement financier de la Fondation pour l’accueil des requérants d’asile (FAREAS). Le Conseil d’Etat proposait d’éponger en grande partie la dette de la fondation à l’égard du canton, qui s’élève à un peu moins de 23,2 millions de francs. Seule une ardoise de 6,8 millions subsistera, que la fondation remboursera par la vente d’actifs devenus inutiles. La valeur vénale du parc immobilier de la FAREAS est estimé à 37,5 millions. Le libéral Nicolas Daïna proposait, plutôt que de passer l’éponge, de faire rembourser la fondation sur 50 ans à coup de 360 000 francs par an par exemple.
Cette solution a été écartée à une très nette majorité. «L’Etat ne pourra que financer luimême ce remboursement», a argumenté le radical Gérard Bühlmann. En outre, le canton a aussi sa part de responsabilités dans les dysfonctionnements qui ont conduit à creuser l’endettement de la FAREAS, a souligné le socialiste Michel Cornut.
L’adoption de cet ensemble législatif ouvre la voie à la transformation de la
FAREAS en un établissement de droit public. Le contrôle de sa gestion et de ses activités sera nettement renforcé