samedi 30 octobre 2010

Yvelines: un camp de Roms attaqué

Le commissariat de Poissy (Yvelines) a ouvert une enquête après l'intrusion de plusieurs hommes cagoulés et armés, dans la nuit de mercredi à jeudi, dans un camp de Roms situé dans la plaine de Triel-sur-Seine (Yvelines), a-t-on appris de source policière.

Selon les témoignages recueillis par les enquêteurs, ces hommes ont fait irruption dans le camp vers deux heures du matin dans une voiture munie d'un gyrophare. Ils ont pénétré dans des caravanes avec des fusils et des matraques, arrachant certaines portes.

Plusieurs personnes du camp ont indiqué avoir été molestées et menacées avec des armes à feu, une femme précisant avoir été obligée de se déshabiller. L'agression aurait duré une demi-heure, les hommes cagoulés tirant en l'air à plusieurs reprises. Les habitants du camp ont précisé que leurs agresseurs "étaient habillés comme des policiers".

"Ces familles ne pourront jamais oublier ce qu'elles ont vécu. Le plus dramatique est que ces hommes sont repartis avec les papiers d'identité de plusieurs personnes du camp", a indiqué à Annick Omond, du Collectif de soutien aux familles roms de la plaine de Triel-Chanteloup.

Une trentaine de familles roms, menacées d'expulsion, vivent depuis plusieurs années dans des conditions précaires sur un terrain privé dans la plaine de Triel-sur-Seine. Elles réclament un autre terrain pour pouvoir vivre dans de meilleures conditions et notamment être raccordées à un réseau d'eau potable.

AFP

Intrusion et intimidation dans un camp de Roms ? L'histoire reste floue

Le commissariat de Poissy, dans les Yvelines, a ouvert une enquête après avoir été saisi de cette affaire : plusieurs individus cagoulés et armés ont fait irruption dans un camp de Roms à Triel-sur-Seine, selon les habitants de ce camp.

Les faits se sont déroulés "jeudi matin, entre 2 et 4 heures du matin", indique une source policière proche de l'enquête au Post. Des individus sont entrés dans le camp à bord d'une voiture munie d'un gyrophare, rapporte 20 Minutes.  Puis, selon plusieurs témoignages, ils sont entrés dans les caravanes avec des fusils et des matraques, arrachant même certaines portes. Des habitants du camp auraient été molestés et menacés avec des armes à feu. Durant cette agression d'environ une demi-heure, des coups de feu auraient été tirés en l'air par ces hommes cagoulés. Les agresseurs "étaient habillés comme des policiers", selon les habitants du camp.

"Ces familles ne pourront jamais oublier ce qu'elles ont vécu. Le plus dramatique est que ces hommes sont repartis avec les papiers d'identité de plusieurs personnes du camp", précise Annick Omond, du Collectif de soutien aux familles roms de la plaine de Triel-Chanteloup, citée par 20Minutes. Une trentaine de familles roms, menacées d'expulsion, vivent depuis plusieurs années dans des conditions précaires sur ce terrain privé dans la plaine de Triel-sur-Seine.

Un article trouvé sur le Post

Une Arménienne de 62 ans raconte son expulsion

Envoyée le 25 octobre par un vol de nuit après sept ans dans le canton de Vaud et affirmant avoir été rudoyée par la police, Sveta Bakhshyan, infirme et désemparée, va devoir apprendre à survivre en Arménie où elle n’a jamais vécu.

sveta bakhshyan

«J’ai été expulsée comme une poubelle.» Dans cet appartement de la banlieue d’Erevan, Sveta Bakhshyan, une veuve de 62 ans, semble dans un état psychologique épouvantable et parle avec difficulté. Lundi 25 octobre, elle était encore en Suisse, où elle a vécu sept ans. Dix jours plus tôt, le 15 octobre, elle a été arrêtée en allant renouveler son droit à l’aide d’urgence au Service de la population (SPOP) à Lausanne. Là, alors qu’elle venait d’obtenir son papier, trois policiers se sont emparés d’elle et l’ont conduite devant un juge de paix, puis à la maison d’arrêt de Riant-Parc à Genève.

«Je n’avais rien avec moi en prison, juste mon sac à main», dit-elle. Une amie lui apporte quelques habits alors qu’elle sombre dans la dépression. «Je ne mangeais rien, j’étais extrêmement mal et j’ai demandé à voir un médecin et à recevoir des médicaments.» Si bien que lorsque d’autres policiers viennent la chercher à 7h30 le lundi 25, elle est convaincue qu’ils l’emmènent à l’hôpital. Mais elle est en route pour l’aéroport de Kloten.

«Jusqu’au dernier moment, je n’ai rien compris, murmure Sveta, en revivant cette expulsion. Deux femmes policières m’ont saisie, j’avais les menottes, l’une m’a même bousculée lorsque j’ai dit que je n’arrivais pas à marcher en me criant «marche» en allemand.» Charriée sur un engin à roulettes, elle passe le portique de détection et comprend enfin qu’elle est bien en train d’être expulsée. Au juge qui l’avait interrogée, à Lausanne, elle avait expliqué qu’elle ne pouvait pas retourner dans la région où elle est née, le Karabakh, théâtre de convulsions à la désintégration de l’Union soviétique à la fin des années 1980, ni en Arménie, pays où elle n’a jamais vécu, dont elle n’a pas le passeport et où elle ne connaît personne.

Au moment de la correspondance à Prague, elle réalise que c’est bien à Erevan qu’elle va se retrouver. Elle y est débarquée dans la nuit, sur un brancard. Prévenue à la dernière minute, la mère d’une Arménienne que Sveta a connue en Suisse l’emmène provisoirement chez elle.

Cela fait 22 ans que Sveta Bakhshyan a quitté le Sud-Caucase. En 1988, pendant la guerre entre Arméniens et Azéris pour le contrôle de l’enclave du Karabakh, majoritairement peuplée d’Arméniens mais rattachées par Staline à l’Azerbaïdjan, elle fuit avec sa sœur leur village de Zournapat. De mère azérie mais de père arménien, les deux femmes se retrouvent à Krasnodar dans le sud de la Russie. Puis, pour gagner leur vie, rejoignent Moscou.

Sveta est couturière, mais dans la capitale russe elle devient vendeuse de rue. En 2003, les policiers qui viennent régulièrement la ra­cketter se rapprochent de leur étal improvisé et Sveta, en voulant fuir avec sa marchandise, tombe et se blesse gravement à la jambe. Un début d’infection fait craindre la gangrène. Bien que malade et faible, Sveta et sa sœur s’embarquent – moyennant 2000 dollars par personne – dans un bus, direction la Suisse.

Là, Sveta est attribuée au canton de Vaud. Elle est soignée à Lausanne et dépose une demande d’asile, laquelle sera plusieurs fois refusée. «Quand on nous a refusé l’asile, ma sœur a disparu du jour au lendemain. J’ai tout fait pour la retrouver, enfin, ce que je pouvais, je ne pense pas qu’elle ait pu quitter la Suisse étant donné que nous étions sans papier.»

Sveta a alors sombré dans la dépression et été soignée en hôpital psychiatrique. Elle reste cependant très fragile, très angoissée, tandis que sa jambe la handicape terriblement et lui rend la station debout presque impossible. L’assistante sociale lui trouve des cours de français et, d’hébergement temporaire en foyer, elle se retrouve à Yverdon à partir de 2005, où elle se fait beaucoup d’amis. Elle survit avec l’aide d’urgence, 280 francs par mois, pour laquelle elle doit se présenter parfois plusieurs fois par mois au SPOP. Là, en entendant une femme parler russe, elle s’approche et tombe sur une jeune Arménienne qui, avec ses deux enfants, essaie elle aussi de reconstruire sa vie en Suisse. Les deux femmes deviennent amies, dans des circonstances difficiles pour les deux: «J’avais tout le temps peur de l’expulsion, explique Sveta. Souvent, cette amie me disait «ne dors pas ce soir ici, mais plutôt là, car nous savons que les expulsions ont lieu à six heures du matin». Cette amie devient un peu sa fille – Sveta n’a jamais eu d’enfants. C’est la mère de cette femme qui a recueilli Sveta à l’aéroport d’Erevan dans la nuit de lundi à mardi.

A Yverdon, Sveta est aussi inscrite aux programmes d’occupation, elle fait des ménages puis des traductions, y compris pour le SPOP, pour le maximum légal de 300 francs par mois, tout en donnant de nombreux coups de main bénévoles, notamment à la paroisse et à la coordination asile et migration du Nord vaudois. Seule ombre au tableau: elle a dérobé en 2007 des sous-vêtements pour 100 francs dans un magasin, un seul réel larcin pour lequel elle sera condamnée à un jour-amende. Mais au lendemain de son expulsion, les autorités vaudoises ont justifié le refus de permis humanitaire en la qualifiant de «délinquante».

Aujourd’hui, Sveta a reçu un peu d’argent que ses amis suisses ont envoyé mais, nerveusement malade et avec une jambe handicapée, dans un pays dépourvu de toute aide sociale, son avenir est des plus incertains. «Je suis couturière, je peux travailler, mais ici, que faire? Comment? Où aller? Où seulement trouver un logement?» Tout ce qu’elle espère pour les déboutés du droit d’asile comme elle, c’est que son témoignage servira au moins à une chose. Que ce qu’elle a vécu, ces dix jours en cellule avant cette expulsion sans ménagement, ne se reproduise pas, «au moins pas de cette manière», soupire-t-elle.

Un article de Laurence Ritter, Erevan, dans le Temps

Quatre requérants occupent Saint-Joseph

asile lausanne

24 Heures

vendredi 29 octobre 2010

La gauche vaudoise unanime pour appuyer un double non dans les urnes

Les partis progressistes renvoient l'initiative et son contre-projet dos à dos. Tous deux créent une menace pour l'Etat de droit, disent-ils.

Les partis de la gauche vaudoise font cause commune pour un double non le 28 novembre. Hier, les représentants du PSV, des Verts et du POP ont présenté ensemble leurs arguments à la fois contre l'initiative de l'UDC et le contre-projet des Chambres fédérales. Les récentes prises de position de Philippe Leuba en faveur du contre-projet ont également été fustigées.

Amarelle tacle Leuba
Cesla Amarelle s'alarme: en instituant l'automatisation des renvois, l'initiative met fin au principe de non-refoulement, qui interdit le renvoi d'une personne vers un Etat où la vie de celle-ci est menacée. Mais le contre-projet n'offrirait pas non plus toutes les garanties sur ce principe inscrit dans le droit international, estime la présidente du PSV. Qui craint que la marge d'appréciation des juges soit réduite à sa portion congrue.
Au passage, Cesla Amarelle tacle le conseiller d'Etat Philippe Leuba. Ce dernier considère que le contre-projet va dans le sens de sa politique de fermeté en matière de renvois. «La politique de Philippe Leuba est basée sur le droit actuel. Elle n'a pas besoin d'un article constitutionnel pour être appliquée», lance la députée. «Le conseiller d'Etat se targue d'avoir prononcé 835 décisions de renvoi pour motifs pénaux, mais seulement 373 ont été appliquées, du fait de l'impossibilité d'effectuer certains renvois. Au final, Frambois est surchargé et on laisse des personnes en détention administrative pour des périodes extrêmement longues», dénonce l'élue socialiste.
Conseillère nationale, Ada Marra tient à dissiper le reproche d'angélisme à l'égard des étrangers, a fortiori des délinquants. «Nous ne sommes pas le parti des étrangers. Nous défendons l'intégration de tous et l'Etat de droit, parce que ces principes font partie des valeurs communes à nos partis», déclare la socialiste.
Un Etat de droit qui, selon ces opposants, se trouverait malmené autant par le texte de l'UDC que par le contre-projet élaboré par le centre-droit (et soutenu par certaines sections cantonales du PS). Tous deux seraient un passeport vers l'arbitraire, notamment en ce qu'ils placent sur un même plan viol, meurtre et fraude aux assurances sociales. «Une femme qui travaille au noir pour boucler ses fins de mois commet une fraude aux assurances sociales et peut de ce fait être renvoyée», s'insurge le Vert Raphaël Mahaim.

 «Justice à trois vitesses»
«Le contre-projet est une transcription de l'initiative en des termes politiquement corrects. Il est juridiquement plus propre, mais c'est là son seul mérite, car il est tout aussi dur que l'initiative, et même plus dur encore sur certains points», continue le député écologiste. Allusion au fait que le catalogue des délits susceptibles d'entraîner le renvoi est plus étendu dans le contre-projet.
Pour Raphaël Mahaim, ce dernier instaure aussi «une justice à trois vitesses», en opérant une distinction entre les Suisses, les ressortissants de l'Union européenne et ceux des pays extra-européens. Compte tenu des clauses de libre circulation des personnes avec l'UE, «un Hongrois bénéficiera d'un traitement plus favorable qu'un Turc», prédit le juriste. Pour qui, in fine, «l'existence même d'un contre-projet légitime les positions de l'UDC».
Julien Sansonnens juge pour sa part que le parti de la droite populiste «attise la haine des étrangers tant qu'ils sont pauvres». Et de relever que les délits économiques tels que la fraude fiscale ne font pas partie des délits incriminés par l'initiative. «Pour l'UDC, frauder le fisc est plutôt une marque d'intégration au système suisse!», grince le vice-président du POP.

Arnaud Crevoisier dans le Courrier

Enfin les vrais chiffres sur les renvois

Le magazine L’Hebdo a dévoilé hier pour la première fois les statistiques complètes des renvois en Suisse.

700 renvois en SuisseChose promise, chose due. Après s’être engagée dans nos colonnes à récolter les chiffres du nombre de renvois de délinquants, voilà qu’Isabel Rochat, la conseillère d’Etat genevoise en charge du Département de la sécurité, de la police et de l’environnement, les publie. Depuis le début de l’année 2010, il y a eu 33 décisions de renvoi et seulement entre 15 et 30 pour 2009. Ce n’est qu’une estimation puisque rien n’existait avant que la ministre libérale n’arrive à la tête de son département. Reste que ces chiffres sont bien loin de ceux avancés par le canton de Vaud avec 103 renvois en 2009 et 113 pour Zurich.

Pour la première fois, L’Hebdo publiait hier la liste complète des statistiques de tous les cantons. Enfin de quoi établir les faits dans le dossier politique le plus émotionnel du moment, à un mois de la votation sur l’initiative UDC sur le renvoi des criminels étrangers. L’enquête du magazine démontre une tendance claire à une plus grande sévérité dans l’application de la loi actuelle. Alors qu’en 2007, un peu plus de 400 renvois ont été prononcés dans toute la Suisse, il y en a eu près de 700 en 2009. «La politique a longtemps refusé de voir la réalité en face. Nous devons aujourd’hui répondre à des attentes plus fortes de la population», résumait Isabel Rochat.

Voilà de quoi relancer le débat sur l’initiative UDC des moutons noirs. Alors que le thème du renvoi des criminels étrangers fait la une depuis des mois, personne, y compris l’administration fédérale, n’était parvenu à récolter une photographie aussi complète de la situation actuelle. La discussion de fond sur l’opportunité d’un durcissement de la loi va enfin pouvoir commencer.

F.MU. dans 24 Heures

Renvoyer les criminels ? Pas si simple !

criminels étrangers renvoiLes praticiens de trois cantons romands décortiquent pour «Le Temps» des cas de renvoi ou de non-renvoi. L’initiative de l’UDC ne résout que très partiellement les difficultés rencontrées aujourd’hui.

L’initiative de l’UDC «pour le renvoi des étrangers criminels» soumise au vote le 28 novembre veut changer la pratique actuelle sur un point majeur: elle retire automatiquement leur autorisation de séjour (permis B) ou d’établissement (permis C) aux étrangers auteurs de délits – de toutes sortes, selon le texte. Actuellement, chaque cas fait l’objet d’une pesée d’intérêts, selon la gravité des infractions, entre la protection de l’ordre public et les droits de la personne.

Le système est laxiste, estime l’UDC. Pour mieux cerner le problème, Le Temps a demandé aux chefs du service compétent de trois cantons (Fribourg, Genève, Vaud) de sélectionner des cas réels, présentés ci-dessous, et de commenter l’initiative.

«Poudre aux yeux!»: tel est le verdict, de l’un d’entre eux. S’il s’agit de régler de façon générale le problème des étrangers indésirables, quelques chiffres montrent que l’initiative vise largement à côté de la cible. Fribourg révoquera en 2010 une dizaine de permis B ou C pour des raisons principalement criminelles, mais la grande majorité des décisions de refoulement (environ 300, sans les procédures d’asile) n’ont rien à voir avec la délinquance telle que la couvre l’initiative: il s’agit d’étrangers sans autorisation de séjour, de fausses déclarations (les mariages «blancs» sont le premier motif de révocation), etc.

Même situation à Genève, où l’on compte cette année 33 décisions de renvoi (permis B et C) pour motifs pénaux, mais 455 décisions de renvois d’étrangers sans autorisation de séjour. Vaud annonce 30 renvois de délinquants étrangers (permis B et C) mais prononce plus de 1200 décisions négatives en moyenne annuelle pour de multiples autres cas de figure.

Au fait, les autorités suivent-elles l’exécution des expulsions? Aucun des trois cantons n’a été en mesure de nous fournir des indications claires. Imprécises quand il s’agit du nombre de renvois pour toute la Suisse (750 en 2009, selon la commission pour les questions migratoires), les statistiques sont muettes sur les départs effectifs.

Et pour cause. Deux difficultés surgissent ici, auxquelles l’initiative de l’UDC n’apporte pas de vraie solution. La première est la lenteur des procédures, en particulier judiciaires. Les cantons ont des pratiques proches car «en bout de course, ce sont les autorités judiciaires qui décident», dit Patrick Pochon, chef du Service fribourgeois de la population et des migrants.

L’expulsion automatique demandée par l’initiative supprimera-t-elle vraiment tout recours, toute référence au droit international? Patrick Pochon «attend avec intérêt» la réaction des juges du Tribunal fédéral.

La lenteur (jusqu’à cinq ans entre les faits et un jugement final) gonfle les dossiers et rend parfois le renvoi impossible. «Il n’y a rien de pire que de prendre une décision et de ne pas l’appliquer», dit Bernard Ducret, chef du Service genevois d’aide au départ. «Il faut faire la chasse aux délais, à tous les niveaux», renchérit Henri Rothen, chef du Service vaudois de la population, qui se bat pour avoir des outils de suivi.

Le second obstacle est l’impossibilité d’effectuer les renvois, faute d’accord avec des pays concernés ou parce que l’application est hasardeuse. C’est le cas pour l’Algérie et le Maghreb en général, la Corne de l’Afrique, la Côte d’Ivoire. Ailleurs (Balkans), les procédures sont longues. La Suisse peut prononcer toutes les décisions de renvoi qu’elle veut; dans ces cas, les étrangers indésirables, délinquants ou non, restent chez elle, et l’initiative de l’UDC n’y changera rien.

Jean-Claude Péclet dans le Temps

La difficile pratique du renvoi, en neuf cas concrets

C., petit délinquant multirécidiviste

C., 26 ans, Portugais originaire du Cap Vert, vit en Suisse en 1994 au bénéfice d’un regroupement familial, et a reçu un permis d’établissement. Il est père d’un enfant né en 2005, qu’il a reconnu mais n’entretient pas. Il traîne un chapelet de 12 condamnations pour vols, effractions, consommation de drogue, rixe, resquille dans les transports publics et «confrontation à un acte d’ordre sexuel». La plus lourde (27 mois ferme) l’a envoyé en prison en décembre 2007. En avril 2008, le Service fribourgeois de la population et des migrants a prononcé son renvoi, estimant que l’intérêt public à l’éloigner l’emportait sur ses liens avec la Suisse. C. a fait recours au Tribunal cantonal de Fribourg. Le Portugal étant membre de l’Union européenne, la Cour a tenu compte non seulement de la jurisprudence suisse, mais aussi de celle, plus restrictive, de la Cour européenne de justice. Selon celle-ci, le délinquant doit représenter «une menace actuelle pour l’ordre public» afin de justifier le renvoi. En juillet 2008, le tribunal a rejeté le recours, invoquant notamment le risque de récidive et la capacité d’intégration quasi inexistante de C., qui n’a pas noué de vraie relation avec son fils.

R., condamnée en France

Belge, arrivée à Genève en 2007, R. a obtenu une autorisation de séjour de courte durée (permis L, 12 mois), renouvelable. L’Office cantonal de la population (OCP) a appris par la suite qu’elle avait été condamnée à 18 mois de prison en France pour trafic de drogue, et interdite de séjour dans ce pays. En janvier 2008, l’OCP a refusé de renouveler le permis de R., qui a contesté cette décision auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative. Celle-ci a confirmé le refus. R. s’est alors tournée vers le Tribunal administratif fédéral, qui lui a donné raison, en invoquant l’accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) signé avec l’Union européenne. L’article 5 de cet accord dit qu’un retrait d’autorisation de séjour doit être justifié par «des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique». Les juges ont estimé que R. ne représentait pas un tel risque pour la Suisse.

M., trafiquant de drogue

M., un Kosovar de 46 ans, est arrivé en Suisse en 1990, où il a reçu un permis d’établissement. Il a été rejoint par sa femme et ses deux enfants deux ans plus tard. Deux autres enfants sont nés en 1994 et 1995. En novembre 2006, il a été condamné à 8 ans de prison pour un important trafic d’héroïne. Libéré sous condition en juillet 2008, il a fait l’objet, sept mois plus tard, d’une décision de renvoi qu’il a contestée jusqu’au Tribunal fédéral. En juin 2010, ce dernier a rejeté son recours, relevant notamment qu’un comportement «agréable et collaborant» en prison n’exclut pas le risque de récidive. Malgré un long séjour en Suisse, M. «ne s’y est intégré ni socialement, ni professionnellement»: il s’est rendu plusieurs fois au Kosovo, a investi dans une maison et n’exerce pas d’activité lucrative depuis 1993. L’intérêt public à éloigner de la Suisse un gros trafiquant de drogue qui nie sa faute l’a emporté sur la situation des enfants, dont deux sont presque majeurs.

H., sans nationalité connue

D’origine est-européenne, peut-être né en France, H. est un mystère: on ne connaît pas sa nationalité exacte, il n’a pas de papiers valables et a pénétré en Suisse sans autorisation de séjour. Il y a commis en 2005-6 différents vols avec effraction et a été condamné deux fois, la seconde à 18 mois de prison. Quand il a été libéré sous conditions en septembre 2008, l’Office cantonal genevois de la population a tenté de le refouler en France, mais celle-ci a refusé. Une décision formelle de renvoi a été prise en avril 2009, contre laquelle H. a fait recours. Depuis, son dossier a été transmis à l’Office fédéral des migrations, en vue d’une éventuelle admission provisoire. En attendant. H. est libre, sans activité professionnelle connue.

A., agresseur sexuel mineur

A., un Kosovar de 21 ans, né en Suisse, vit dans le canton de Fribourg avec ses parents et son frère et a reçu comme eux un permis d’établissement. Il a été condamné trois fois: d’abord pour vol; puis pour agression, vol, menaces et contrainte sexuelle; enfin pour consommation de drogue et actes sexuels sur une personne incapable de discernement. Il a commencé à purger sa peine dès décembre 2007. Après un avertissement, son permis d’établissement a été révoqué en mai 2008, peu après sa libération. Dans ce cas, le Tribunal fédéral a admis le recours de A., citant l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme Emre contre Suisse d’août 2008: «L’expérience montre que la délinquance juvénile tend à disparaître chez la plupart des individus avec le passage à l’âge adulte.» Malgré la gravité des actes commis, le TF a été sensible au fait que A. a toujours vécu en Suisse et l’évolution positive de son comportement depuis l’époque des faits (été 2006). Pour le TF, il n’est pas établi que A. «constitue une menace réelle et actuelle suffisamment grave pour l’ordre public, qui l’emporterait sur l’intérêt privé de l’intéressé à pouvoir demeurer en Suisse».

Z., receleur  et trafiquant

Tunisien, Z. a épousé une Suissesse dont il a eu deux enfants (puis un troisième, hors mariage). Il a obtenu une autorisation d’établissement. En 1988, il a été condamné une première fois, en Suisse, pour recel et a été averti que son permis pourrait lui être retiré. Nouvelle condamnation en 2002 pour violation de l’obligation d’entretien des enfants. En 2005, Z. a été extradé dans un autre pays européen, où il a été condamné à 5 ans de prison pour trafic de drogue. En décembre 2007, l’Office cantonal genevois de la population (OCP) a déclaré caduque l’autorisation d’établissement de Z., qui a fait recours, en vain. Revenu en Suisse après avoir purgé sa peine, il a demandé un nouveau permis, que l’OCP a refusé en novembre 2009. Z. a une nouvelle fois recouru en invoquant l’art. 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. La Commission cantonale de recours en matière administrative a, cette fois, admis le recours, notamment à cause des «liens particulièrement forts» qu’il entretient avec son fils mineur.

G., indésirable depuis 1998

Tunisien, G. a épousé en 1990 une Suissesse d’origine tunisienne et a obtenu l’année suivante une autorisation de séjour. Depuis, il a été condamné une bonne dizaine de fois pour vol, consommation et trafic de drogue, conduite sans permis, etc. Après un avertissement, il a été l’objet, dès 1994, d’une interdiction de séjour en Suisse. Les liens du mariage n’ont pas pesé lourd face aux multiples infractions, dont la plus grave lui a valu deux ans de prison, et à la volonté quasi inexistante d’intégration de l’intéressé, qui bénéficie de l’aide sociale, comme son épouse. Mais, de recours en détention, G. se trouve toujours en Suisse, même si son permis a été révoqué. Les courriers de la Confédération à l’ambassade de Tunisie visant à obtenir un laisser-passer pour le retour de G. dans son pays (la dernière lettre date du 21 juin 2010) sont restés sans réponse depuis trois ans et demi.

F., qui n’a pas vu de douanier

Arrivé en Suisse à l’âge de 21 ans, F., citoyen serbe, y a vécu 17 ans, pendant lesquels il a commis de nombreux délits (vol en bande et par métier, complicité de brigandage, etc.) qui lui ont valu deux condamnations à 18 et 22 mois de prison, ainsi que le retrait de son autorisation de séjour, en 2007. L’intéressé a recouru au Tribunal fédéral, qui l’a débouté en janvier 2009. Finalement, F. a quitté la Suisse de lui-même le 31 mai 2009. Enfin…, on le pense: comme le veut la règle, il a envoyé au service compétent une carte de sortie attestant qu’il avait passé la frontière au Tessin. Le hic, c’est que la carte, postée au Kosovo, ne comporte pas le timbre du douanier suisse qui devrait y figurer. «Il n’y avait pas de douanier pour timbrer l’annonce de sortie, mais je suis quand même parti (sic)», écrit F.

Belkacem Kermas, voleur islamiste

«Notre grand problème, c’est l’Algérie. Une catastrophe», explique Bernard Ducrest, chef du service Asile et aide au départ du canton de Genève. Les personnes sont difficiles à identifier, la procédure est très longue, et l’Algérie n’accepte pas les vols spéciaux. Les intéressés refusent d’embarquer sur des vols de ligne (sur lesquels le retour est théoriquement possible), et si on les y contraint, le commandant de bord, qui décide, ne les prend pas. A Genève, il y a au minimum 200 à 250 Algériens, souvent multirécidivistes, qui ne peuvent être renvoyés. La précarité même de leur statut les pousse dans une spirale de délits (brigandage au couteau, etc.). Le cas de Belkacem Kermas fait exception. Ce délinquant islamisé «volait des gens dans la rue», se souvient un ancien policier fédéral, pour financer le Groupe salafiste pour la prédication et le combat, devenu depuis Al-Qaida au Maghreb islamique. Actif à Zurich, il a été expulsé vers l’Algérie en 2007, où il purge une peine de 3 ans de prison.

Le Temps

"Les étrangers ne sont pas des animaux"

Les partis de gauche vaudois unissent leurs voix pour contrer l’initiative de l’UDC sur les renvois des étrangers criminels et le contre-projet des Chambres fédérales.

«Les étrangers sont des êtres humains, pas des animaux, fulmine Ada Marra, conseillère nationale socialiste. On a l’impression que plus personne n’ose dire qu’ils ont aussi des droits.» A un mois des votations, le PS, les Verts et le POP vaudois ont appelé hier au rejet de l’initiative de l’UDC pour le renvoi des étrangers criminels.

Le contre-projet concocté par les Chambres fédérales n’obtient pas plus leurs faveurs. «Le contre-projet se montre parfois plus dur que l’initiative UDC, regrette Ada Marra. Par exemple, un étranger pourrait être renvoyé pour cause d’alcool au volant. Accepter ce contre-projet, c’est accepter le discours de l’UDC. Depuis 2002, le peuple a dû chaque année se prononcer sur le thème des étrangers, sauf en 2003. Le climat anti-étrangers s’aggrave. Il faut le dénoncer.»

Pour la gauche, l’initiative de l’UDC aurait dû être invalidée, «car elle contrevient au principe de non-refoulement garanti par nos engagements internationaux. Ce genre de loi est incompatible avec un Etat de droit et un ordre public tant national qu’international digne de ce nom.»

Les trois partis estiment que les deux textes auront pour seuls effets d’engorger encore plus les cellules du centre de détention de Frambois et de pousser des ressortissants étrangers à la clandestinité, puisque de nombreux étrangers ne peuvent pas être renvoyés à cause de l’absence d’accord de réadmission avec leur pays d’origine. «Nous ne sommes pas les partis des étrangers, conclut Ada Marra. Nous disons juste que les étrangers ont aussi des droits.»

24 Heures

Les albanophones ont leur site en ligne

bashkim iseniUne plate-forme d'informations en trois langues joue à fond la carte de l'intégration.

Les quelque 250'000 albanophones qui vivent actuellement en Suisse ont depuis le 12 octobre, un site en ligne: www.albinfo.ch. Le projet, réalisé en partenariat avec Edipresse, est soutenu par la Commission fédérale des migrations (CFM) et la Direction de la coopération et du développement (DDC). Au menu: des informations sur l'actualité suisse et des Balkans en albanais, français et allemand. Les sujets abordés touchent à des thèmes aussi divers que la santé ou les requérants d'asile, sans oublier tout ce qui peut faciliter l'intégration des albanophones, sans distinction de leur nationalité. «Bien que nous recevions une aide financière actuellement, notre but consiste à nous autofinancer à moyen terme», souligne Bashkim Iseni, le directeur du projet. Parmi les débats filmés, le potentiel d'intégration de la 2e génération d'albanophones vivant en Suisse a été évoqué. «Les nouvelles quotidiennes que nous diffusons devraient aussi intéresser les Suisses qui aimeraient investir ou faire du tourisme dans cette partie des Balkans», ajoute le directeur. L'un des buts recherchés consiste en effet à participer au développement de la région. 

Victor Fingal dans le Matin

L'accueil des réfugiés ne fonctionne plus

dessin de mix&remix"L'interdiction de la torture violée, l'expulsion arrêtée“, titre Die Presse après la décision de la Cour constitutionnelle autrichienne de stopper le renvoi vers la Grèce d'une famille de réfugiés afghans.

La Grèce qui est dépassée et n'arrive plus à traiter les demandes d'asile ne peut plus être considérée comme un "pays tiers sûr“, a jugé la Cour. Cette décision est une première en Autriche mais a déjà été prise dans d'autres pays européens, remarque Der Standard. "Le Royaume-Uni le fait. Les Pays-Bas le font. La Belgique, la Norvège et le Danemark aussi. Ces cinq pays membres du Conseil de l'Europe ont suivi la demande de la Cour européenne des droits de l'homme et refusent de suivre le règlement Dublin II selon lequel un demandeur d'asile doit attendre la fin de la procédure d'asile dans le pays par lequel il est entré dans l'Union européenne“, écrit le quotidien viennois.

En Grèce, le système d'asile s'est effondré, juge un spécialiste des droits de l'homme à l'ONU. Quel que soit leur âge, les réfugiés risquent de passer 6 mois derrière les barreaux. Les conditions dans les camps sont inhumaines et présentent un risque mortel. Le système judiciaire est débordé et force les réfugiés à de longues files d'attente pendant des mois.
"La crise de l'asile en Grèce devient une épreuve pour l'UE“, note Der Standard. Car les Vingt-Sept doivent trouver un mécanisme pour "humaniser“ le système de Dublin II.

En Allemagne, la Cour constitutionnelle a commencé le 28 octobre à examiner la question de savoir si Berlin a le droit de renvoyer automatiquement et sans examen spécifique des réfugiés vers d'autres Etats de l'UE. La décision finale est attendue en 2011. Depuis 2009, la Cour de Karlsruhe a suspendu 13 cas d'expulsion vers la Grèce et 300 autres cas ont été stoppés par plusieurs cours administratives allemandes.

Revue de presse trouvée sur presseurop

L'initiative sur le renvoi est contraire à l'accord sur la libre circulation des personnes

Une expertise juridique souligne les problèmes avec l’UE qu’engendrerait un «oui» à l’initiative de l’UDC le 28 novembre prochain.

Une acceptation de l’initiative de l’UDC pour le renvoi des étrangers délinquants vaudrait à la Suisse d’inextricables ennuis avec l’Union européenne. Elle pourrait même, à terme, remettre en cause l’ensemble des accords bilatéraux, avertit une expertise juridique signée du constitutionnaliste Tobias Jaag, professeur de droit public à l’Université de Zurich, et de son assistant Valerio Priuli, présentée jeudi par le Parti libéral-radical*. L’UDC, accuse le PLR, cherche une nouvelle fois, à travers son initiative, à remettre en cause un accord dont elle a combattu le principe à plusieurs reprises par référendum.

Selon cet avis de droit, le texte soumis au vote du peuple et des cantons le 28 novembre n’est pas compatible avec l’accord sur la libre circulation des personnes signé avec l’UE. Celui-ci ne permet de renvoyer un ressortissant européen condamné en Suisse que dans ces cas limités. Il faut, pour justifier le retrait du droit de séjour, que la présence de l’individu sur le territoire national représente une menace actuelle et sérieuse pour la sécurité publique. Une appréciation au cas par cas doit impérativement avoir lieu, afin que le principe de la proportionnalité puisse être pleinement respecté et que le risque de récidive, en particulier, puisse être mesuré. La personne concernée doit pouvoir bénéficier d’une procédure formelle qui réserve ses droits. Le renvoi automatique de toute une catégorie de délinquants n’est dès lors pas compatible avec l’accord, explique cet avis de droit.

Clause guillotine

Contrairement au contre-projet, l’initiative ne réserve pas les dispositions du droit international qui lui seraient contraires. En cas d’acceptation de l’initiative, explique l’analyse de Tobias Jaag, il sera difficile pour les autorités d’application de faire primer les engagements internationaux de la Suisse sur les dispositions approuvées par le peuple, car la préférence marquée par les électeurs pour l’initiative signifiera que ceux-ci ont fait leur choix en connaissance de cause.

Une renégociation de l’accord pour y inscrire une réserve n’est pas une perspective jugée réaliste par les auteurs. Le non-respect de l’accord par la Suisse pourrait déclencher une réaction de la Commission européenne qui pourrait, en dernier recours, menacer la Suisse de dénoncer l’accord. En raison de la clause guillotine, une telle dénonciation ferait tomber l’ensemble des premiers accords bilatéraux avec l’UE.

Denis Masmejan dans le Temps

* Tobias Jaag et Valerio Priuli, «Ausschaffungsinitiative und Freizügigkeitsabkommen».

Russie: lourdes peines pour des crimes racistes

La justice russe a condamné jeudi à de lourdes peines de prison deux militants nationalistes reconnus coupables de quinze crimes racistes.

Un homme de 22 ans a été condamné à la perpétuité. Un autre, d'un an son aîné, a écopé de 22 ans de réclusion pour l'avoir aidé, dans le cadre de crimes racistes en Russie. Les quinze meurtres, motivés selon le tribunal par le racisme des deux hommes, ont eu lieu dans la région moscovite en l'espace de huit mois, en 2007 et 2008.

Les nationalistes russes visent fréquemment des travailleurs immigrés d'Asie centrale et du Caucase. Ils attaquent également des étudiants africains et asiatiques ou des Russes n'ayant pas l'air d'origine slave. Au moins 60 personnes ont été tuées et 306 blessées pour ces raisons en Russie en 2009, selon Sova, une organisation qui surveille l'évolution de ce phénomène dans le pays.

ATS relayée par 20 Minutes

jeudi 28 octobre 2010

Malmö tremble sous la menace du "flingueur d'immigrés"

La nuit est tombée sur Malmö, Naser Yazdenpaneh termine sa journée en repassant un dernier pantalon, dans la vitrine de son échoppe il ne voit que son reflet... quand un claquement le fait sursauter en même temps que le panneau de verre se fracasse.

malmö tueurs immigrés

En colère, ce repriseur iranien se précipite dans la nuit noire et saisit l'individu qui, pense-t-il, vient de jeter une pierre. Mais un puissant coup de tête dans les dents lui fait lâcher prise. Quelques minutes plus tard, un policier extrait deux balles de fusil de l'encadrement de la vitrine et M. Yazdenpaneh, 57 ans, comprend: il a peut-être échappé au tireur qui, selon la police, semble s'en prendre depuis plus d'un an à la population immigrée de cette ville du sud de la Suède.

La scène se passe vendredi dernier, deux jours après que la police suédoise a révélé étudier la piste d'un tireur isolé qui, mû par la haine raciale, aurait pris pour cible une quinzaine de personnes d'origine étrangère: une a été tuée et beaucoup d'autres blessées. Les enquêteurs pensent que l'individu qu'ils recherchent pourrait également être l'auteur d'un certain nombre de meurtres non élucidés remontant jusqu'à 2003. Depuis cette révélation, la population de Malmö est sous tension.

"J'ai si peur. Je ne sors plus de chez moi après 16h00. Toutes mes amies ressentent la même chose que moi", confie une Somalienne de 31 ans, Hodan Imi, rencontrée dans sa banlieue à forte population immigrée, Rosengaard, où elle vit depuis une dizaine d'années. "En Somalie, il y a la guerre, mais j'ai encore plus peur ici", avoue Naima, 56 ans, vêtue d'un hijab rouge et arrivée en Suède il y a sept mois. "Là-bas, je savais qui était dangereux, alors qu'ici, cela pourrait être n'importe qui. Je passe mon temps à me retourner", explique-t-elle.

Cette affaire rappelle aux Suédois le cas survenu à Stockholm au début des années 1990, lorsqu'un tireur baptisé "Laserman" avait pris pour cibles onze immigrés, certains à l'aide d'un fusil à visée laser. De son nom John Ausonius, il avait ainsi tué une personne et a été condamné à la perpétuité en 1994.

A Malmö, au cours du seul dernier mois, plusieurs cas, dont ceux de deux hommes touchés dans le dos à une semaine d'intervalle alors qu'ils attendaient à un arrêt d'autobus, semblent ne constituer qu'une seule et même affaire. Si bien que le tireur de Malmö a été surnommé "le nouveau Laserman". Dans sa boutique, qu'il a refusé de fermer après son agression, M. Yazdenpanah, en Suède depuis 21 ans, écrase une larme en montrant les bouquets de fleurs reçus depuis la terrible soirée. "Je ne pourrai jamais remercier assez les Suédois pour leur soutien", lâche cet homme avec un sourire laissant apparaître la dent cassée durant sa lutte la semaine dernière.

La police a mis en place une équipe spéciale et une unité de profilage pour tenter d'élucider l'affaire, mais en dépit de centaines de renseignements recueillis auprès de la population, les enquêteurs ne parviennent pas à définir précisément le profil du suspect car il n'a eu que très peu de contact direct avec ses victimes. Et parallèlement aux efforts semble-t-il assez vains jusque-là de la police, les rumeurs se multiplient sur des groupes qui auraient lancé une chasse à l'homme pour retrouver "le nouveau Laserman".

Sans confirmer ces rumeurs, le chef de la police régionale Börje Sjöholm a mis en garde la population contre l'envie de faire soi-même justice en soulignant que "le danger vient du fait que de tels groupes n'auront pas le même niveau d'exigence que nous en ce qui concerne les preuves (...) des innocents pourraient être blessés".

Le système Dublin préoccupe les défenseurs des migrants

La Suisse use et abuse des possibilités de renvoi offertes par l'accord européen. L'Observatoire du droit d'asile et des étrangers s'en émeut vivement.

Une photographie édifiante des conséquences humaines de la législation suisse en matière d'immigration. Procédures arbitraires, expéditives, interprétations systématiquement restrictives: le troisième rapport1 de l'Observatoire romand du droit d'asile et des étrangers (ODAE), présenté hier, met en lumière des dizaines de cas concrets de violation des droits des migrants. «Ces données sont vérifiées et reflètent une réalité globale. Ce ne sont pas quelques histoires qu'on donnerait en pâture aux médias», précise Philippe Nussbaum, président de l'association. Sur le front de l'asile, en attendant les nouveaux tours de vis qui se profilent, c'est sans doute le système Dublin qui constitue l'une des préoccupations majeures du moment. En vertu de ces accords européens, auxquels la Confédération a souscrit, les requérants ayant déjà déposé un dossier dans autre pays membre sont renvoyés vers ce dernier sans examen de leur demande. Or la Suisse en profite beaucoup grâce à sa situation géographique au coeur du continent. Trop, estime l'ODAE, qui parle d'«abus». De décembre 2008 à août 2010, ce sont plus de 4700 personnes qui ont ainsi été renvoyées, alors que seuls 550 candidats à l'asile ont fait le chemin inverse depuis un Etat Dublin.

L'enfer grec
Pressé d'exploiter pleinement les possibilités de l'accord, l'Office fédéral des migrations (ODM) a mis en place une procédure illégale, qui a finalement dû être modifiée à la suite d'un arrêt rendu par le Tribunal administratif fédéral au début de l'année. «Jusqu'en février dernier, les décisions Dublin n'étaient notifiées qu'au moment de leur renvoi», rappelle Aldo Brina, coordinateur de l'ODAE. Une violation crasse du droit de recours. Quant aux mandataires, ils étaient parfois informés du départ forcé des semaines après son exécution.
Si cette pratique a été modifiée à contrecoeur par les autorités, les renvois Dublin posent un problème de fond, dans la mesure où plusieurs pays membres ne garantissent pas une véritable procédure d'asile ni aucune aide à ces personnes, qui peuvent se retrouver directement en détention. La Grèce est peut-être le pire des exemples. L'Organisation suisse d'aide aux réfugiés vient d'ailleurs d'appeler la Confédération à imiter la Grande-Bretagne, la Norvège et la Belgique et à geler tout renvoi vers cet Etat. dans l'attente d'une décision de la Cour européenne des droits de l'homme et de la Cour de justice de l'Union européenne sur la légalité de ce type de mesure (lire aussi en page 6). Elle en a la possibilité via la «clause de souveraineté» prévue dans l'accord, mais n'en use quasiment jamais.

Droits humains: l'exception
Outre la Grèce, les conditions d'accueil et de traitement des requêtes sont également déplorables en Italie et à Malte. A ce titre, l'ODAE relate notamment le parcours chaotique d'une famille somalienne, récemment renvoyée vers l'île méditerranéenne. Le père y avait transité officiellement avec trois des six enfants et déposé une demande d'asile avant d'arriver en Suisse. La mère et le reste de la fratrie ont eux réussi à gagner notre pays en traversant clandestinement l'Italie. Puisque le système Dublin aurait impliqué une nouvelle séparation, l'ODM et la justice administrative ont ordonné le rapatriement des huit personnes à Malte. Dans ce genre de cas, les accords stipulent en effet que l'Etat responsable est celui où le membre le plus âgé de la famille a effectué ses premières démarches.
Pour l'ODAE, les abus en matière d'immigration, qu'il s'agisse d'asile ou de motivations économiques, sont clairement à mettre du côté des autorités fédérales. «L'image d'un pays trop généreux, trompé par les migrants, ne tient pas», estime Aldo Brina. Professeure au Centre universitaire de droit des migrations à Neuchâtel, Cesla Amarelle résume la situation en une formule: «Dès que les étrangers sont concernés, le respect des droits de l'homme passent du principe à l'exception.»

Olivier Chavaz dans le Courrier

Note : 1) Disponible sur www.odae-romand.ch

Les vrais chiffres des renvois

Entre 2007 et 2009, le nombre d’étrangers criminels que la Suisse a décidé d’expulser est passé de 438 à 664 environ, soit une hausse de 52%. L’initiative de l’UDC aurait-elle atteint son but avant même de passer devant le peuple?

«C’est un scandale. Nous ne disposons pas de chiffres fiables pour contrer l’initiative de l’UDC.» Un bon mois avant la votation du 28 novembre sur l’initiative pour l’expulsion des délinquants étrangers, ce coup de gueule d’un proche d’un conseiller d’Etat romand traduit bien l’embarras des partisans du contre-projet défendu par le Conseil fédéral.

A un mois de l’échéance, l’initiative de l’UDC caracole en tête, recueillant 58% d’avis favorables dans le dernier sondage de l’institut gfs. bern, contre seulement 41% pour le contre-projet.

Les statistiques dont on parle sont celles du nombre de décisions de renvoi prononcées par les offices de migration cantonaux. Elles existent, à un état certes très embryonnaire. Elles montrent que le nombre de renvois prononcés a passé d’environ 438 à 664 ces deux dernières années, soit une augmentation de 52%. «Contrairement à ce que prétend l’UDC, les autorités font leur travail et cette initiative est inutile», assène Francis Matthey, président de la Commission fédérale pour les questions de migrations (CFM).

Le 21 octobre dernier, celui-ci a publié une enquête mandatée par sa commission, largement fondée sur le travail de pionnier qu’avait fait L’Hebdo (voir notre édition du 14 février 2008). Voici trente mois, à l’heure où l’UDC déposait 200 000 paraphes pour chasser les moutons noirs de Suisse, notre magazine avait contacté tous les cantons pour connaître leur pratique en matière d’expulsions de criminels étrangers.

Nous avons répété l’exercice cet automne, un véritable travail de fourmi que le Département fédéral de justice et police (DFJP) a apparemment été incapable de fournir, ou du moins de coordonner. Nous dévoilons ces nouveaux chiffres – qui ne sont parfois hélas que des estimations procurées par les chefs de service – canton par canton.

Un premier constat s’impose: l’initiative de l’UDC a déjà produit un premier effet. Anticipant les critiques, les cantons ont multiplié les décisions de renvois. «Déjà sévère par le passé, la politique des renvois semble s’être encore durcie ces deux dernières années», confirme prudemment Christin Achermann, professeure assistante à l’Université de Neuchâtel et coauteure de l’enquête de la CFM, en attendant des preuves scientifiques plus solides.

Sévérité saint-galloise. Deuxième constat: dans une Suisse toujours si éprise de son fédéralisme, chaque canton conserve forcément une certaine marge de manœuvre dans l’application de la loi fédérale sur les étrangers.

En Suisse allemande, Saint-Gall s’est toujours montré ferme sous la férule de sa cheffe de la sécurité Karin Keller-Sutter. «Nous assumons notre responsabilité politique et faisons prévaloir l’intérêt public face à celui de dangereux criminels», souligne-t-elle.

chiffres renvois par cantonLucerne, qui dit «utiliser la loi de façon conséquente», et le Tessin sont dans le même cas, tout comme les cantons abritant une grande agglomération (Berne, Zurich, Bâle-Ville). En Suisse romande aussi, une tendance lourde se dessine. Dans l’arc lémanique, les deux conseillers d’Etat PLR Philippe Leuba et Isabel Rochat ont imprimé une politique plus ferme. En fournissant des statistiques aussi claires que précises sur les expulsions, le chef vaudois du Département de l’intérieur s’est, de loin, montré l’opposant le plus convaincant à l’initiative.

A Genève en revanche, Isabel Rochat n’a trouvé qu’un désert en matière de chiffres sous l’ère du socialiste Laurent Moutinot. Elle a immédiatement corrigé le tir dès son arrivée à la tête du Département de la sécurité, de la police et de l’environnement.

Le canton du bout du lac a déjà pris 33 décisions de renvoi en 2010, soit le double des estimations effectuées pour 2007. «Le politique a longtemps refusé de voir la réalité en face, faisant preuve d’une certaine forme d’angélisme. Nous devons aujourd’hui répondre à des attentes plus fortes de la population sur le plan de la sécurité publique», déclare-t-elle.

Moins touchés par le phénomène de la criminalité des étrangers, les cantons peu urbains se montrent moins sévères, même s’il serait exagéré de les accuser de laxisme. «Il est clair que nous expulsons tous les grands criminels. C’est dans les cas limites que les décisions sont délicates. Il faudra toujours faire preuve de circonspection, même si l’initiative est acceptée», relève Jean-Marie Chèvre, chef du Service jurassien de la population.

Justement, les cas délicats fourmillent dans les dossiers des services cantonaux de migration. Ceux-ci n’ont pas la tâche facile, d’autant plus que le Tribunal fédéral (TF) a prononcé des arrêts illustrant une politique très «fluctuante», selon le terme du préfet de la Gruyère Maurice Ropraz (lire son interview en page 18).

En juin 2007, le TF avait secoué le monde politique en réclamant l’expulsion de douze délinquants étrangers semant la terreur à Bulle et dans la région. Aujourd’hui, même si le calme est revenu, tous sont encore en Suisse.

Or, dans le cas d’un ressortissant des Balkans qui avait été impliqué dans la fameuse affaire d’abus sexuel sur une personne incapable de discernement, c’est le Tribunal fédéral qui a cassé la décision fribourgeoise. Il a estimé que le Tribunal cantonal avait surestimé le risque de récidive au moment du jugement.

Tout récemment, le 16 septembre dernier, le TF a cependant donné un tout autre signal aux autorités cantonales. Fait extrêmement rare, il a confirmé l’expulsion d’un Turc de 23 ans né en Suisse, condamné en 2007 à une peine de quatre ans et demi d’emprisonnement (pour coups et blessures graves, infractions à la loi sur les routes et à celle sur les stupéfiants).

Bien que maîtrisant mieux – selon ses dires – le dialecte alémanique que sa langue maternelle, ce multirécidiviste célibataire sera donc expulsé. Après s’être penché sur plusieurs arrêts de la Cour européenne, le TF est parvenu à la conclusion que son renvoi de Suisse ne violait pas la Convention européenne des droits de l’homme.

Portrait robot. Des décisions isolées qui ne font qu’esquisser le profil de ceux qu’on expulse. Pour aller plus loin, la Commission fédérale pour les questions de migration a recoupé les lois, la jurisprudence des tribunaux et les pratiques des cantons, afin de dresser le portrait-robot de ces délinquants qu’on veut renvoyer.

La décision survient dans trois cas. Premièrement, lorsqu’un étranger a été condamné à une peine de prison «de longue durée». Dans la pratique, les cantons estiment que celle-ci doit atteindre deux ans s’il est marié à une Suissesse et un an si ce n’est pas le cas.

La gravité du délit joue aussi un rôle: les actes de violence, les agressions sexuelles, les infractions sévères à la loi sur les stupéfiants et, depuis quelques années, les dépassements de vitesse massifs commis par les chauffards sont considérés comme des motifs de renvoi.

Infractions répétées. L’expulsion peut aussi être prononcée lorsque quelqu’un représente «une menace contre la sécurité et l’ordre public», même s’il a écopé d’une peine de moins d’un an. C’est typiquement le cas des personnes qui ont commis des infractions mineures mais répétées. Elément crucial: le canton doit prouver que la situation ne va pas s’améliorer dans un avenir proche.

Enfin, une dépendance «durable et significative» envers l’aide sociale peut constituer une cause de renvoi, pour autant que la personne se trouve depuis moins de quinze ans en Suisse. On entend par cela une famille de cinq personnes qui aurait touché plus de 200 000 francs sur une période de onze ans ou un couple qui aurait reçu 80 000 francs en cinq ans et demi, selon les arrêts du TF. En 2009, Berne, Bâle-Ville, Bâle-Campagne, Saint-Gall et Zurich ont renvoyé 43 personnes pour ce motif.

Le type de permis ou d’autorisation de séjour n’est pas non plus anodin. Un ressortissant de l’UE venu en Suisse dans le cadre de la libre circulation des personnes ne se fera pas expulser, sauf s’il représente une grave menace contre l’ordre public et qu’il risque de récidiver. A Zurich, ils ne représentent que 4% des cas, à Bâle-Ville moins de 10% et à Berne entre 3 et 20%.

La pratique est également très restrictive pour les étrangers nés en Suisse. Leur nombre atteint 5% du total des renvois à Bâle-Campagne, moins de 10% à Bâle-Ville et entre 10 et 20% à Berne. Le fait d’avoir effectué sa scolarité en Suisse, d’y avoir un emploi, de la famille et de ne maintenir que des liens ténus avec son pays d’origine jouent un rôle.

Pour la plupart des cantons, il faut une peine de plus de deux ans et/ou une infraction grave (délits contre l’intégrité corporelle et la vie, agressions sexuelles, trafic de drogue portant sur plusieurs kilos) pour qu’on songe à renvoyer un étranger de deuxième génération.

Par contre, toujours selon la pratique actuelle, pour expulser un détenteur de permis C ou B ou L (courte durée), une peine de un an de prison est en général considérée comme suffisante, sauf s’il a des liens familiaux forts en Suisse (époux ou épouse de nationalité helvétique). Les permis B ou L sont plus nombreux parmi les renvois (90% dans le canton de Vaud, 68% à Zurich mais 40% à Bâle-Ville) que les C.

Les expulsions concernent majoritairement des hommes – 90 à 95% du total. On ignore en revanche quelles sont les nationalités les plus représentées. Tout au plus sait-on que seuls 10% des renvois ne peuvent pas être exécutés car l’Etat concerné ne veut pas reprendre son ressortissant.

C’est le cas notamment de l’Ethiopie, l’Erythrée, la Somalie, la Gambie, le Nigeria et l’Algérie, alors que les renvois vers la Turquie, le Moyen-Orient et les Balkans ne posent pas de problème. Au vu du faible nombre de ressortissants de l’UE parmi les expulsés et après avoir examiné plusieurs arrêts du TF, on peut supposer que la plupart des expulsions se font vers ces régions.

Article de Michel Guillaume, Julie Zaugg, Patricia Michaud dans l'Hebdo

Minarets: des juristes chrétiens recadrent le débat

L’interdiction de construire de nouveaux minarets en Suisse est un désaveu de la conception pluraliste et multiculturelle de la liberté religieuse, affirme l’European Center for Justice and Law dans un document qu’il a remis à la Cour européenne des droits de l’homme.

Tout comme l’interdiction du voile islamique en France, l’interdiction de construire de nouveaux minarets en Suisse, approuvée en votation populaire le 29 novembre 2009, constitue un désaveu de la conception pluraliste, tolérante et multiculturelle de la liberté religieuse qui a prévalu en Europe occidentale depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Tel est le constat communiqué par le European Centre for Law and Justice (ECJL) à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) concernant «l’affaire des minarets contre la Suisse».

Ce centre de juristes chrétiens, spécialisé dans la défense de la liberté religieuse, est basé à Strasbourg. Le 17 septembre 2010, la Cour l’a autorisé à intervenir comme tierce partie dans l’affaire des minarets, issue de deux requêtes soumises par la Ligue des musulmans de Suisse et Hafid Ouardiri, ancien porte-parole de la mosquée de Genève. Invoquant les articles 9 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme, les deux parties soutiennent que l’interdiction de la construction de nouveaux minarets constitue une violation de la liberté religieuse.

L’ECLJ ne se prononce pas sur la recevabilité des requêtes, mais propose une réflexion sur le concept de liberté religieuse tel qu’il figure dans l’article 9 de la Convention et tel qu’il s’incarne dans les principes de la neutralité confessionnelle et de la laïcité. Selon Grégor Puppinck, directeur de l’ECLJ, ce concept ne permet plus d’appréhender le phénomène religieux de manière constructive. D’après lui, une évolution de ce concept devrait aller dans le sens d’une meilleure prise en compte par le droit de l’importance sociale et culturelle de la religion dans les pays européens.

Selon l’ECJL, il convient de prendre au sérieux le désaveu exprimé par la population suisse si l’on veut gérer efficacement les conflits qui surgissent entre certaines minorités religieuses et les pays d’accueil européens. Une reconstruction du concept moderne de la liberté religieuse, qui tienne compte de la nécessité de préserver le patrimoine culturel et spirituel de l’Europe, paraît légitime.

Pour une approche réaliste

Pour Grégor Puppinck, tant la neutralité confessionnelle que la laïcité aboutissent à supprimer la dimension sociale de la religion. Or «l’identité socioreligieuse d’une société ne peut pas être neutralisée», explique le directeur de l’ECLJ, qui appelle à «trouver une approche réaliste de la liberté religieuse, qui soit ré-enracinée dans la réalité culturelle». Et qui permettrait de «renoncer à la fiction selon laquelle l’espace public serait un espace neutre ou vide religieusement».

Un article de Patricia Briel dans le Temps

Renvoi précipité

renvoi arménienne

Dans 24 Heures, photo Michel Duperrey

La Hongrie critiquée par un comité de l'ONU

Les experts du Comité des droits de l’homme de l’ONU ont sévèrement critiqué jeudi la situation des Roms en Hongrie, estimant qu’ils étaient victimes de «discriminations» et de «mauvais traitements».

Un Comité des droits de l’homme de l’ONU s’est penché sur la situation des Roms en Hongrie et a livré ses conclusions ce jeudi. Les Roms subissent des «mauvais traitements continus et un profilage racial… de la part de la police», écrivent les 18 experts dans leurs conclusions du rapport périodique de la Hongrie, examinant les mesures prises par ce pays pour se conformer au Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Cette minorité est la cible, selon les experts, de «déclarations virulentes et généralisées (émanant) de personnalités publiques, des médias, et des membres de la Magyar Garda», l’ancienne «Garde hongroise» officiellement dissoute et qui s’en prend habituellement aux juifs et aux Roms.

«Ils (les Roms) forment une minorité très importante en Hongrie» et souffrent de «préjudices et de discriminations de façon très répandue», a expliqué un des membres du Comité de l’ONU, Michael O’Flaherty, en conférence de presse.

L’expert irlandais a toutefois précisé que le Comité avait «parlé avec la Hongrie», estimant que ses représentants avaient «reconnu à quel point les attitudes de la société doivent être modifiées».

A partir du 1er janvier, la Hongrie, où vivent quelque 700.000 Roms, assumera la présidence tournante de l’Union européenne et a déjà annoncé que l’intégration des Roms serait l’un des trois sujets sur lesquels elle désirait mettre l’accent.

AFP relayée par le Temps

Provocation à la haine: deux mois de sursis et inéligibilité requis contre Le Pen

La Licra et SOS Racisme attaquent le leader du Front national pour pour avoir diffusé des affiches de campagne jugées offensantes à l'encontre des musulmans et de la population algérienne.

le pen un air de déjà vu

Deux mois avec sursis et un an d’inéligibilité ont été requis, ce jeudi, contre Jean-Marie Le Pen pour provocation à la haine. Attaqué par la Licra et SOS Racisme, le président du Front national est jugé par le tribunal correctionnel de Paris pour avoir diffusé, lors des élections régionales, des affiches de campagne pour le Front national jugées offensantes à l’encontre des musulmans et de la population algérienne.

L’affiche représentait une femme intégralement voilée à côté d’une carte de France recouverte du drapeau algérien sur laquelle se dressaient des minarets en forme de missiles, avec pour titre «Non à l’islamisme».

Lors des dernières élections régionales, le mouvement «jeunesse» du Front national, le FNJ, avait diffusé ces affiches en région Provence-Alpes-Côte d’Azur et sur son site Internet, puis partout en France.

«Une blessure qui est restée»

La Ligue contre le Racisme et l’Antisémitisme (Licra) avait alors saisi le juge des référés du tribunal de Marseille, qui avait condamné le Front national à retirer les affiches. Le magistrat avait estimé qu’elles étaient «de nature à provoquer un sentiment de rejet et d’animosité à l’encontre d’un groupe de personnes dont sont visées les pratiques religieuses, les femmes et la nationalité». A l’époque, l’affaire avait d’ailleurs suscité des protestations de l’Algérie.

Cette fois, la Licra, accompagnée de SOS Racisme et du journaliste Mohamed Sifaoui, attaquent le Front national pour incitation à la haine raciale. «C’est une blessure qui est restée aux personnes musulmanes, invoque l’avocat de SOS Racisme, Me Patrick Klugman. La portée véritable de cette affiche, c’est maintenant qu’elle doit être jugée, en dehors de toute campagne électorale.»

Le procès se tient cet après-midi devant la 17e chambre. Le jugement sera mis en délibéré à plusieurs semaines.

Source AFP relayée par Libération

Votations sur le renvoi des criminels étrangers: le point

Le 28 novembre, l'initiative de l'UDC pour l'expulsion des criminels étrangers sera soumise au vote des citoyens. Elle sera opposée à un contre-projet. Selon le texte de l'UDC, le renvoi doit être automatique si un étranger est reconnu coupable de certains crimes et délits. Selon le contre-projet, c'est la gravité de l'infraction qui est déterminante.

Les précisions de Romaine Morard

Deux sujets extraits du Journal de 19:30 de la TSR

mercredi 27 octobre 2010

Migration: la Suisse toujours plus restrictive

restricted areaL’Observatoire romand du droit d’asile et des étrangers estime que la Suisse mène une politique toujours plus prohibitive.

La régularisation des sans-papiers n’est pas une priorité pour les cantons alémaniques. Les statistiques de l’Office fédéral des migrations (ODM) révèlent un fossé entre Suisses alémaniques et romands. Entre 2001 et 2008, sur les 1985 demandes de régularisation déposées par l’ensemble des cantons auprès de l’ODM, 88% proviennent des cantons de Genève et Vaud – 98% en 2009. Entre ces mêmes dates, l’ensemble de la Suisse alémanique a effectué 120 demandes, dont 10 pour le canton de Zurich. Sur l’ensemble, près de la moitié a été rejetée par l’ODM, entrant en contradiction avec les autorités cantonales.

Ce constat relevé mardi à Genève par l’Observatoire romand du droit d’asile et des étrangers (ODAE), à quelques semaines de la votation sur l’initiative pour le renvoi des délinquants étrangers, veut «montrer que l’initiative de l’UDC joue sur les peurs», selon le pasteur Philippe Nussbaum, président de l’ODAE. «Pour un petit délit ici, le délinquant risque la mort chez lui. Il y a donc une proportionnalité de la faute à considérer», rajoute-t-il.

Un rapport réalisé par le coordinateur de l’observatoire, Aldo Brina, relève notamment une tendance générale de la part des autorités suisses à placer la barre toujours plus haut face aux requérants d’asile. Selon lui, «la Suisse s’est engagée dans une traque sans fin aux abus et applique de façon mécanique l’accord de Dublin». A contre-courant de l’image d’une Suisse trop laxiste reflétée par l’UDC, Aldo Brina accuse la Suisse de «multiplier les entorses aux droits fondamentaux des migrants tout en persistant à vouloir conserver une image humanitaire».

Cesla Amarelle, professeur au Centre de droit des migrations à l’université de Neuchâtel, dénonce le «fardeau de la preuve», exigé du requérant. «La Suisse doit effectuer son travail de vérification.» La moindre imprécision dans un récit peut suffire à discréditer une demande.

Un article signé Feriel Mestiri dans le Temps

"Sommes-nous tous des moutons ?"

A propos des votations de novembre prochain, un courrier de lectrice dans le quotidien 24 Heures.

mouton blagueurL’UDC l’avoue clairement, pour elle, nous sommes des moutons. Car blanc ou noir, un mouton reste un mouton… malléable et influençable. Il suffit de faire peur à un mouton et voilà qu’il se regroupe avec le reste du troupeau et ensemble ils bêlent d’une même voix.

Les statistiques nous annoncent une victoire de l’initiative des moutons noirs, tout comme elle a contribué au succès de l’UDC aux dernières élections fédérales. Alors que Berlin expose Hitler en soulignant courageusement le rôle incarné par le peuple allemand dans son ascension politique de l’époque, nous continuons à tomber dans le piège électoraliste tendu par le «Politburo» zurichois qui surfe sur une vague populiste et simpliste depuis des années.

Si comme moi, vous ne vous sentez pas une vocation de mouton, vous serez tenté par le «non et non». Pari pourtant bien risqué, car l’initiative de l’UDC sera probablement acceptée comme celle totalement inutile des minarets. L’initiative acceptée, la loi suisse appellera au renvoi automatique d’étrangers, sans aucune nuance, ni détail quant aux délits commis.

Seule issue pour sauver le minimum: dire non à l’initiative et dire oui au contreprojet du parlement. Dans le cas d’un double oui sorti des urnes, ce sera la croix dans la «bonne» case de la question subsidiaire qui fera la différence. Statistiquement il y aura plus de votants qui cocheront cette case si on additionne les convaincus du contreprojet et les opposants aux deux textes.

C’est un peu comme pour les électeurs de gauche français qui, en 2002, votaient massivement Chirac plutôt que Le Pen. Le contreprojet est effectivement le moins pire des deux désastres. Alors approuvons-le, même à contrecœur.

Doris Agazzi, Saint-Cierges

L'usage du Taser pour la contrainte condamné

Ces appareils se prêtent à une utilisation abusive, estime un comité du Conseil de l’Europe.

L’utilisation par la police d’armes à impulsions électriques (AIE) – ou Taser – pour obtenir l’obéissance à une injonction est inadmissible, affirme un rapport du Comité pour la prévention de la torture (CPT) publié hier par le Conseil de l’Europe. Ces armes sont notamment utilisées en Suisse.

«De par leur nature même, les AIE se prêtent à une utilisation abusive», estiment les experts du comité, qui observent que la mise à disposition de Taser ou de matraques électriques «devient de plus en plus courante». Les armes à létalité réduite «peuvent dans certains cas éviter le recours aux armes à feu, mais elles ouvrent la porte à des abus». Elles ne devraient être autorisées que lorsqu’elles sont «la seule alternative à une méthode présentant un plus grand risque.»

Les directives dans certains pays «sont si vastes qu’elles laissent la porte ouverte à une réaction disproportionnée», regrette le CPT. Celui-ci se prononce «clairement contre la mise à disposition d’AIE à des unités chargées d’opérations d’éloignement d’étrangers en rétention».

Le rapport se réjouit que certains services de police en Europe aient exclu l’utilisation des AIE pendant les opérations de contrôle des manifestations publiques.

Autorisé depuis 2008 au niveau suisse, le Taser équipe plusieurs polices cantonales. En France, il fait partie de l’arsenal de quelque 5000 policiers, gendarmes et fonctionnaires de l’administration pénitentiaire.

ATS relayé par 24 Heures

Saartjie Baartman, la "Vénus noire"

Aujourd’hui sort en France Vénus noire, le dernier film d’Abdellatif Kechiche, qui raconte l’histoire de la sud-africaine Saartjie Baartman, “la négresse au gros cul” comme certains la qualifiaient à l’époque.
 
Bande annonce du film d'Abdelatif Kechiche

Au début du XIXème siècle, cette servante est emmenée en Europe et devient un objet de foire en raison de ses attributs physiques proéminents. Certains “scientifiques” utilisent sa présence pour théoriser l’infériorité de la “race noire”.

Lorsqu’elle meurt à seulement 25 ans, ses organes génitaux et son cerveau sont placés dans des bocaux de formol, et son squelette et le moulage de son corps sont exposés au musée de l’Homme à Paris.

C’est seulement en 2002 que la France accepte de rendre la dépouille de Saartjie Baartman à l’Afrique du Sud, concluant ainsi un long imbroglio juridique et diplomatique.

Vénus noire dérange en interpellant la nature des regards des spectateurs. Le réalisateur confirme que ce film n’a pas été fait pour être agréable.

En Afrique du Sud, Saartjie Baartman est considérée aujourd’hui comme l’un des symboles de l’humiliation subie par les Noirs pendant la colonisation. Lors de l’affaire de l’athlète Caster Semenya, son nom a aussi été rappelé pour mettre en cause les “impérialistes” occidentaux. Elle sert aussi de porte-étendard aux Khoïsans, le premier peuple ayant habité la région, qui souffrent encore à l’heure actuelle de discriminations.

Mais pour ce commentateur, Saartjie Baartman est en voie de starification pour les besoins d’une quête d’identité des Métis sud-africains, au prix parfois d’une réécriture de l’histoire.

Trouvé sur le blog d'un jeune journaliste indépendant et relayé par le Monde

Politique migratoire suisse qualifiée de plus en plus restrictive

centre hébergementPour l'Observatoire romand du droit d'asile et des étrangers (ODAE), la Suisse mène une politique de plus en plus restrictive. Les cas concrets qui figurent dans son troisième rapport annuel d'observation rendu public mardi contredisent l'image d'un pays humanitaire.

Ainsi, les travailleurs clandestins cotisent aux assurances sociales, répondent à un besoin de l'économie pour une main-d'oeuvre non qualifiée et participent à la vie sociale mais sont toujours menacés de contrôles et de renvoi, a indiqué devant les médias Aldo Brina, auteur du rapport. Or les critères pour obtenir un permis humanitaire sont appliqués de manière variable.

Pour Giangiorgio Gargantini, du Syndicat interprofessionnel des travailleurs, l'Office fédéral des migrations (ODM) décide "à la tête du client" sur des cas semblables et même lorsque l'employeur accompagne la démarche de régularisation. D'ailleurs, l'ODM refuse plus de la moitié des demandes de régularisation, en contradiction avec les autorités cantonales.

Mais les cantons eux-mêmes ne veulent pas admettre de travailleurs étrangers, puisque la majorité d'entre eux ne déposent pas de demandes auprès de l'ODM. Selon le syndicaliste, Genève et Vaud font figures d'exception avec 88% de l'ensemble des demandes entre 2001 et 2008, et 98% en 2009. Selon M. Gargantini, la Suisse compte entre 100'000 et 200'000 travailleurs clandestins.

En matière d'asile, l'ODAE relève une volonté de réduire le nombre de demandes en appliquant strictement les accords de Dublin. La procédure de renvoi dans le premier pays tiers s'est améliorée entre septembre 2009 et août 2010. Mais les renvois vers Malte, l'Italie et la Grèce, où les personnes ne recevront aucune aide, posent problème pour le Tribunal administratif fédéral.

Concernant l'appréciation de la vraisemblance des demandes, le manuel de procédure de l'ODM parle d'exigences élevées en Europe et en Suisse, alors qu'il n'y a aucune standardisation, selon Cesla Amarelle, professeure au Centre de droit des migrations de l'Université de Neuchâtel. La Suisse ne fait pas son travail de vérification et renverse le fardeau de la preuve, relève-t-elle.

ATS


«La police rôde autour du terrain, les parents ont peur de conduire les enfants à l'école»

C'était l'échéance posée par le gouvernement: le 28 juillet, à la sortie d'une réunion à l'Elysée sur les «problèmes que posent les comportements de certains parmi les gens du voyage et les Roms» (sic), Brice Hortefeux annonçait le démantèlement en trois mois de la moitié des 600 campements illégaux recensés en France.

Nous y voilà. Et le gouvernement peut se targuer d'avoir rempli ses objectifs: au 13 septembre, dernier décompte public, 441 campements avaient été démantelés. Le rythme s'est-il ralenti depuis? Difficile de savoir, le ministère de l'Intérieur n'a pas donné suite à nos sollicitations.

Près de 10.000 citoyens roumains et bulgares ont été expulsés cette année. Comparé aux 12.432 sur toute l'année dernière, le tour de vis sécuritaire de l'été n'a donc pas fait gonfler, pour le moment, le nombre d'expulsions. La donne pourrait évoluer d'ici fin décembre, car les OQTF -«Obligation de quitter le territoire français» dans un délai d'un mois-, massivement distribuées cet été, sont désormais applicables.

Les associations ne désarment pas: elles ont adressé une plainte à la Commission européenne, pour alimenter son analyse sur les infractions commises par la France.

Sur le terrain, les situations dont nous avions rendu compte sur libération.fr témoignent de la main tendue par certaines collectivités locales. Mais trois mois après, le quotidien de ces Roms reste empreint de tourments policiers et de précarité.

Montreuil Au gré de la solidarité

«On va bien, à part qu'on ne sait pas ce qu'ils feront de nous demain», glisse une mère. Depuis l'expulsion de leur squat à Montreuil (Seine-Saint-Denis) le 14 août, dont la violence avait suscité une vague de réactions politiques, ce groupe de 36 Roms roumains vit ballotté au gré de la solidarité tantôt municipale, tantôt associative. Depuis une dizaine de jours, ils ont trouvé refuge dans une maison de quartier prêtée par la mairie. «A cette époque, l'an dernier, on était à la rue avec les enfants. Ici, on a l'eau, le chauffage, etc.», se réjouit tout au moins Daniel, 31 ans, père de trois enfants.

Au soir de leur expulsion, la mairie -dirigée par l'ex-ministre Verts Dominique Voynet- a ouvert un gymnase en guise d'hébergement d'urgence (relire le tchat et le reportage sur libération.fr). Mais se refuse à leur offrir une solution durable d'hébergement, faisant valoir que 350 Roms sont déjà pris en charge dans un programme d'insertion cofinancé par la commune.

Les organisations locales prennent le relais, rédigent fin août une plate-forme où elles s'engagent à soutenir les Roms. Ceux-ci sont hébergés deux semaines dans les locaux d'une première association, cinq dans ceux d'une autre. «La plate-forme travaille maintenant à leur proposer des solutions plus durables, quitte à ce que ce soit famille par famille», rapporte Claude Reznik, conseiller municipal délégué aux populations migrantes.

Daniel Lecatus, 31 ans, avec sa fille Viorica, 3 ans (E.A.)

Le 14 août, les 16 pères s'étaient vus délivrer une OQTF, pour «obligation de quitter le territoire français» sous un mois. Juste avant l'expiration du délai, ils sont retournés en Roumanie, où ils n'ont pas manqué de produire les preuves légales de leur traversée des frontières. Avant de revenir en France, quelques jours plus tard.

Le 17 août: Après le gymnase, l'inconnu pour les Roms de Montreuil

Choisy-le-Roi Entre insertion et expulsions

Une trentaine de Roms et de militants associatifs sont rassemblés devant la préfecture du Val-de-Marne (94), ce jeudi soir, 21 octobre. Avec une lettre pour le préfet. «Les mesures d'expulsion sans solution de relogement mettent des familles à la rue (...). L'hiver approchant rend cette situation encore plus insupportable», écrit le collectif Romeurope 94. Réponse du directeur de cabinet du préfet, telle que rapportée par la délégation partie le rencontrer: «La préfecture est déterminée à expulser les terrains et les personnes qui ne sont pas dans la légalité.»

Autre déconfiture: la préfecture ne reconnaît pas non plus «la pertinence du projet social mis en place à Choisy-le-Roi», rapporte le conseiller municipal venu se joindre à la délégation. Comme à Montreuil, la mairie a ouvert un gymnase pour les 70 Roms roumains à la rue après l'évacuation de leur terrain le 12 août. Un projet d'insertion a été mis en place, un terrain a été aménagé, avec caravanes, sanitaires et accompagnement social. Les enfants vont à l'école, une première pour la plupart.

Pas de quoi freiner la volonté gouvernementale: le 12 octobre, la police a arrêté l'un de ces Roms, Doru Novacovici, alors qu'il téléphonait en Roumanie depuis une cabine. Sous le coup d'une OQTF, il a été placé en rétention et expulsé quatre jours plus tard. «Il est déjà rentré», indique sa femme.

Mais l'épisode «a jeté un froid», rapporte Pierre La France, militant RESF. «La police rôde autour du terrain. C'est nous qui devons conduire les enfants à l'école, parce que les parents ont peur, témoigne Ksenija Car, militante choisyenne. S'ils ne peuvent pas sortir, c'est évident que le projet d'insertion va capoter.»

Le 12 août: Un camp de Roms évacué en région parisienne

Villeneuve-le-Roi L'hiver à l'air libre

Le campement de Villeneuve-le-Roi, le 20 août. (Stéphane LAGOUTTE/M.Y.O.P)

Ils ont bien failli ne pas passer l'été, ils y passeront finalement l'hiver. Sur un petit terrain boisé en bordure de Seine, dans cette commune du Val-de-Marne, une quarantaine de Roumains, Roms pour la plupart, s'apprête à passer la saison froide en cabanes.

Avant le tour de vis sécuritaire du gouvernement, le Conseil général (PCF) avait demandé l'évacuation du terrain. Il a retiré sa plainte fin août, promettant de travailler à «des solutions dignes d'hébergement».

Mais l'urgence va durer. Le Conseil général admet que les associations, mobilisées sur le projet de Choisy, sont un peu à court de ressources pour les Roms de Villeneuve. «On songe à solliciter les fonds européens destinés à l'insertion des Roms», indique le cabinet du président Christian Favier. Le projet, en gros: les hommes suivraient une formation aux métiers du bâtiment en construisant eux-mêmes leur logement, sur une friche urbaine.

En attendant, des dons et l'aide de la Croix-Rouge ont permis l'achat de chauffages au pétrole pour quasiment chaque famille. «On a essayé d'isoler un peu mieux les cabanes, parce qu'il fait très froid maintenant», raconte Nicolae, joint par téléphone.

Quatre enfants ont été inscrits à l'école la semaine dernière. «Ça va lentement, car nous ne sommes pas soutenus par la mairie», déplore Christèle Maïcon, de l'association Imediat.

Et puis l'un des habitants a fait son retour au campement, il y a deux semaines. Après deux mois de prison, sur les trois ferme auxquels il a été condamné fin août. Motif: «provocation de mineurs à commettre un délit», celui de mendicité. Sans nouvelles pendant deux semaines, sa famille a d'abord cru qu'il était mort. Quant aux mineurs en question, «ils ont reconnu qu'ils ne mendiaient pas avec mon beau-père, raconte Nicolae. Il a fait deux mois de prison pour rien».

Diaporama : Dans les cabanes des Roms de Villeneuve-le-Roi

Grand Angle: Roms, vies ouvertes

Stéphane Lagoutte/M.Y.O.P

Un article signé Elodie Auffray dans Libération