C., petit délinquant multirécidiviste
C., 26 ans, Portugais originaire du Cap Vert, vit en Suisse en 1994 au bénéfice d’un regroupement familial, et a reçu un permis d’établissement. Il est père d’un enfant né en 2005, qu’il a reconnu mais n’entretient pas. Il traîne un chapelet de 12 condamnations pour vols, effractions, consommation de drogue, rixe, resquille dans les transports publics et «confrontation à un acte d’ordre sexuel». La plus lourde (27 mois ferme) l’a envoyé en prison en décembre 2007. En avril 2008, le Service fribourgeois de la population et des migrants a prononcé son renvoi, estimant que l’intérêt public à l’éloigner l’emportait sur ses liens avec la Suisse. C. a fait recours au Tribunal cantonal de Fribourg. Le Portugal étant membre de l’Union européenne, la Cour a tenu compte non seulement de la jurisprudence suisse, mais aussi de celle, plus restrictive, de la Cour européenne de justice. Selon celle-ci, le délinquant doit représenter «une menace actuelle pour l’ordre public» afin de justifier le renvoi. En juillet 2008, le tribunal a rejeté le recours, invoquant notamment le risque de récidive et la capacité d’intégration quasi inexistante de C., qui n’a pas noué de vraie relation avec son fils.
R., condamnée en France
Belge, arrivée à Genève en 2007, R. a obtenu une autorisation de séjour de courte durée (permis L, 12 mois), renouvelable. L’Office cantonal de la population (OCP) a appris par la suite qu’elle avait été condamnée à 18 mois de prison en France pour trafic de drogue, et interdite de séjour dans ce pays. En janvier 2008, l’OCP a refusé de renouveler le permis de R., qui a contesté cette décision auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative. Celle-ci a confirmé le refus. R. s’est alors tournée vers le Tribunal administratif fédéral, qui lui a donné raison, en invoquant l’accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) signé avec l’Union européenne. L’article 5 de cet accord dit qu’un retrait d’autorisation de séjour doit être justifié par «des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique». Les juges ont estimé que R. ne représentait pas un tel risque pour la Suisse.
M., trafiquant de drogue
M., un Kosovar de 46 ans, est arrivé en Suisse en 1990, où il a reçu un permis d’établissement. Il a été rejoint par sa femme et ses deux enfants deux ans plus tard. Deux autres enfants sont nés en 1994 et 1995. En novembre 2006, il a été condamné à 8 ans de prison pour un important trafic d’héroïne. Libéré sous condition en juillet 2008, il a fait l’objet, sept mois plus tard, d’une décision de renvoi qu’il a contestée jusqu’au Tribunal fédéral. En juin 2010, ce dernier a rejeté son recours, relevant notamment qu’un comportement «agréable et collaborant» en prison n’exclut pas le risque de récidive. Malgré un long séjour en Suisse, M. «ne s’y est intégré ni socialement, ni professionnellement»: il s’est rendu plusieurs fois au Kosovo, a investi dans une maison et n’exerce pas d’activité lucrative depuis 1993. L’intérêt public à éloigner de la Suisse un gros trafiquant de drogue qui nie sa faute l’a emporté sur la situation des enfants, dont deux sont presque majeurs.
H., sans nationalité connue
D’origine est-européenne, peut-être né en France, H. est un mystère: on ne connaît pas sa nationalité exacte, il n’a pas de papiers valables et a pénétré en Suisse sans autorisation de séjour. Il y a commis en 2005-6 différents vols avec effraction et a été condamné deux fois, la seconde à 18 mois de prison. Quand il a été libéré sous conditions en septembre 2008, l’Office cantonal genevois de la population a tenté de le refouler en France, mais celle-ci a refusé. Une décision formelle de renvoi a été prise en avril 2009, contre laquelle H. a fait recours. Depuis, son dossier a été transmis à l’Office fédéral des migrations, en vue d’une éventuelle admission provisoire. En attendant. H. est libre, sans activité professionnelle connue.
A., agresseur sexuel mineur
A., un Kosovar de 21 ans, né en Suisse, vit dans le canton de Fribourg avec ses parents et son frère et a reçu comme eux un permis d’établissement. Il a été condamné trois fois: d’abord pour vol; puis pour agression, vol, menaces et contrainte sexuelle; enfin pour consommation de drogue et actes sexuels sur une personne incapable de discernement. Il a commencé à purger sa peine dès décembre 2007. Après un avertissement, son permis d’établissement a été révoqué en mai 2008, peu après sa libération. Dans ce cas, le Tribunal fédéral a admis le recours de A., citant l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme Emre contre Suisse d’août 2008: «L’expérience montre que la délinquance juvénile tend à disparaître chez la plupart des individus avec le passage à l’âge adulte.» Malgré la gravité des actes commis, le TF a été sensible au fait que A. a toujours vécu en Suisse et l’évolution positive de son comportement depuis l’époque des faits (été 2006). Pour le TF, il n’est pas établi que A. «constitue une menace réelle et actuelle suffisamment grave pour l’ordre public, qui l’emporterait sur l’intérêt privé de l’intéressé à pouvoir demeurer en Suisse».
Z., receleur et trafiquant
Tunisien, Z. a épousé une Suissesse dont il a eu deux enfants (puis un troisième, hors mariage). Il a obtenu une autorisation d’établissement. En 1988, il a été condamné une première fois, en Suisse, pour recel et a été averti que son permis pourrait lui être retiré. Nouvelle condamnation en 2002 pour violation de l’obligation d’entretien des enfants. En 2005, Z. a été extradé dans un autre pays européen, où il a été condamné à 5 ans de prison pour trafic de drogue. En décembre 2007, l’Office cantonal genevois de la population (OCP) a déclaré caduque l’autorisation d’établissement de Z., qui a fait recours, en vain. Revenu en Suisse après avoir purgé sa peine, il a demandé un nouveau permis, que l’OCP a refusé en novembre 2009. Z. a une nouvelle fois recouru en invoquant l’art. 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. La Commission cantonale de recours en matière administrative a, cette fois, admis le recours, notamment à cause des «liens particulièrement forts» qu’il entretient avec son fils mineur.
G., indésirable depuis 1998
Tunisien, G. a épousé en 1990 une Suissesse d’origine tunisienne et a obtenu l’année suivante une autorisation de séjour. Depuis, il a été condamné une bonne dizaine de fois pour vol, consommation et trafic de drogue, conduite sans permis, etc. Après un avertissement, il a été l’objet, dès 1994, d’une interdiction de séjour en Suisse. Les liens du mariage n’ont pas pesé lourd face aux multiples infractions, dont la plus grave lui a valu deux ans de prison, et à la volonté quasi inexistante d’intégration de l’intéressé, qui bénéficie de l’aide sociale, comme son épouse. Mais, de recours en détention, G. se trouve toujours en Suisse, même si son permis a été révoqué. Les courriers de la Confédération à l’ambassade de Tunisie visant à obtenir un laisser-passer pour le retour de G. dans son pays (la dernière lettre date du 21 juin 2010) sont restés sans réponse depuis trois ans et demi.
F., qui n’a pas vu de douanier
Arrivé en Suisse à l’âge de 21 ans, F., citoyen serbe, y a vécu 17 ans, pendant lesquels il a commis de nombreux délits (vol en bande et par métier, complicité de brigandage, etc.) qui lui ont valu deux condamnations à 18 et 22 mois de prison, ainsi que le retrait de son autorisation de séjour, en 2007. L’intéressé a recouru au Tribunal fédéral, qui l’a débouté en janvier 2009. Finalement, F. a quitté la Suisse de lui-même le 31 mai 2009. Enfin…, on le pense: comme le veut la règle, il a envoyé au service compétent une carte de sortie attestant qu’il avait passé la frontière au Tessin. Le hic, c’est que la carte, postée au Kosovo, ne comporte pas le timbre du douanier suisse qui devrait y figurer. «Il n’y avait pas de douanier pour timbrer l’annonce de sortie, mais je suis quand même parti (sic)», écrit F.
Belkacem Kermas, voleur islamiste
«Notre grand problème, c’est l’Algérie. Une catastrophe», explique Bernard Ducrest, chef du service Asile et aide au départ du canton de Genève. Les personnes sont difficiles à identifier, la procédure est très longue, et l’Algérie n’accepte pas les vols spéciaux. Les intéressés refusent d’embarquer sur des vols de ligne (sur lesquels le retour est théoriquement possible), et si on les y contraint, le commandant de bord, qui décide, ne les prend pas. A Genève, il y a au minimum 200 à 250 Algériens, souvent multirécidivistes, qui ne peuvent être renvoyés. La précarité même de leur statut les pousse dans une spirale de délits (brigandage au couteau, etc.). Le cas de Belkacem Kermas fait exception. Ce délinquant islamisé «volait des gens dans la rue», se souvient un ancien policier fédéral, pour financer le Groupe salafiste pour la prédication et le combat, devenu depuis Al-Qaida au Maghreb islamique. Actif à Zurich, il a été expulsé vers l’Algérie en 2007, où il purge une peine de 3 ans de prison.
Le Temps
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