Les partis progressistes renvoient l'initiative et son contre-projet dos à dos. Tous deux créent une menace pour l'Etat de droit, disent-ils.
Les partis de la gauche vaudoise font cause commune pour un double non le 28 novembre. Hier, les représentants du PSV, des Verts et du POP ont présenté ensemble leurs arguments à la fois contre l'initiative de l'UDC et le contre-projet des Chambres fédérales. Les récentes prises de position de Philippe Leuba en faveur du contre-projet ont également été fustigées.
Amarelle tacle Leuba
Cesla Amarelle s'alarme: en instituant l'automatisation des renvois, l'initiative met fin au principe de non-refoulement, qui interdit le renvoi d'une personne vers un Etat où la vie de celle-ci est menacée. Mais le contre-projet n'offrirait pas non plus toutes les garanties sur ce principe inscrit dans le droit international, estime la présidente du PSV. Qui craint que la marge d'appréciation des juges soit réduite à sa portion congrue.
Au passage, Cesla Amarelle tacle le conseiller d'Etat Philippe Leuba. Ce dernier considère que le contre-projet va dans le sens de sa politique de fermeté en matière de renvois. «La politique de Philippe Leuba est basée sur le droit actuel. Elle n'a pas besoin d'un article constitutionnel pour être appliquée», lance la députée. «Le conseiller d'Etat se targue d'avoir prononcé 835 décisions de renvoi pour motifs pénaux, mais seulement 373 ont été appliquées, du fait de l'impossibilité d'effectuer certains renvois. Au final, Frambois est surchargé et on laisse des personnes en détention administrative pour des périodes extrêmement longues», dénonce l'élue socialiste.
Conseillère nationale, Ada Marra tient à dissiper le reproche d'angélisme à l'égard des étrangers, a fortiori des délinquants. «Nous ne sommes pas le parti des étrangers. Nous défendons l'intégration de tous et l'Etat de droit, parce que ces principes font partie des valeurs communes à nos partis», déclare la socialiste.
Un Etat de droit qui, selon ces opposants, se trouverait malmené autant par le texte de l'UDC que par le contre-projet élaboré par le centre-droit (et soutenu par certaines sections cantonales du PS). Tous deux seraient un passeport vers l'arbitraire, notamment en ce qu'ils placent sur un même plan viol, meurtre et fraude aux assurances sociales. «Une femme qui travaille au noir pour boucler ses fins de mois commet une fraude aux assurances sociales et peut de ce fait être renvoyée», s'insurge le Vert Raphaël Mahaim.
«Justice à trois vitesses»
«Le contre-projet est une transcription de l'initiative en des termes politiquement corrects. Il est juridiquement plus propre, mais c'est là son seul mérite, car il est tout aussi dur que l'initiative, et même plus dur encore sur certains points», continue le député écologiste. Allusion au fait que le catalogue des délits susceptibles d'entraîner le renvoi est plus étendu dans le contre-projet.
Pour Raphaël Mahaim, ce dernier instaure aussi «une justice à trois vitesses», en opérant une distinction entre les Suisses, les ressortissants de l'Union européenne et ceux des pays extra-européens. Compte tenu des clauses de libre circulation des personnes avec l'UE, «un Hongrois bénéficiera d'un traitement plus favorable qu'un Turc», prédit le juriste. Pour qui, in fine, «l'existence même d'un contre-projet légitime les positions de l'UDC».
Julien Sansonnens juge pour sa part que le parti de la droite populiste «attise la haine des étrangers tant qu'ils sont pauvres». Et de relever que les délits économiques tels que la fraude fiscale ne font pas partie des délits incriminés par l'initiative. «Pour l'UDC, frauder le fisc est plutôt une marque d'intégration au système suisse!», grince le vice-président du POP.
Arnaud Crevoisier dans le Courrier
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