lundi 30 novembre 2009

Interdiction des minarets: le vote de la peur et de l'ignorance

Interdiction des minarets: le vote de la peur et de l'ignorance

L'interdiction des minarets suscite consternation et inquiétudes.
L'interdiction des minarets suscite consternation et inquiétudes. [TSR]
C'est la consternation dans la presse suisse au lendemain du vote sur l'interdiction des minarets. Xénophobie, intolérance, ignorance, peur... les qualificatifs ne manquent pas pour tenter de comprendre les raisons qui ont poussé les Suisses à rejeter cet objet en masse. Beaucoup s'inquiètent déjà des conséquences de ce vote sur l'image de la Suisse à l'étranger, et en particulier dans le monde musulman.

Le vote de l'ignorance «Un coup de massue »: c'est le sentiment général résumé par Le Temps et illustré par deux caricaturistes, tous d'eux inspirés par le tableau célèbre de Hodler «Le Bûcheron». Hermann dans la Tribune de Genève et Casal dans Le Nouvelliste mettent en scène un bûcheron qui peut prendre les traits de Christoph Blocher abattant un minaret. «Le peuple suisse vient de faire une énorme caricature de Mahomet»: constatation sortie de la bouche d'un journaliste imaginé par le dessinateur du Temps Chappatte . Il y a des résultats de votation qui font mal, affirme l'éditorialiste du Matin qui ne comprend pas comment quatre minarets peuvent faire peur. Inquiet, l'éditorialiste de L'Express et de L'Impartial voit dans le vote des Suisses un mélange d'irrationalité et d'intolérance. Une xénophobie basée sur la peur. Seule source de satisfaction pour l'auteur du commentaire: les Neuchâtelois peuvent être fiers de figurer parmi les rares cantons à avoir voté non. Au fond, c'est l'ignorance qui à l'origine de ce vote, souligne Le Temps. L'avenir dira si les rapports jusqu'à présent pacifiques entre Suisses et musulmans se détérioreront après ce brutal signal. Si fière de sa tradition multiculturelle, la Suisse a, ce dimanche, discriminé une religion minoritaire sur son propre territoire. En acceptant une initiative à la validité contestable, le pays s'est payé un luxe démocratique au moment où tant d'autres défis sont à relever, déplore La Liberté . Voilà donc la Suisse transformée pour Le Courrier «en laboratoire de l'islamophobie».

Après les minarets, la burqa Les adversaires des minarets ont gagné et les partis chrétiens sautent maintenant dans le train de l'UDC. Forts de leur succès, les adversaires des minarets ne sont pas les seuls à envisager de nouveaux interdits, comme le signale la Neue Luzerner Zeitung. La Basler Zeitung fait sa une des déclarations de Christophe Darbellay. Le président du PDC a déclaré hier au quotidien bâlois qu'il allait encore, durant cette session des Chambres, proposer à ses collègues du parlement d'interdire le port de la burqa. Ce voile corporel, symbole du fondamentalisme, doit disparaître le plus tôt possible de nos rues, affirme le Valaisan. Avec les démocrates-chrétiens, une autre formation politique est partie en croisade, ajoute le Tages-Anzeiger . Le Parti évangélique veut lancer de son côté une initiative pour inscrire l'empreinte chrétienne dans la Constitution helvétique. «On ne peut pas interdire à une classe de chanter Noël parce qu'il y a un élève musulman», résume le président du parti. En première page, le dessinateur Schaad fait le portrait de ces citoyens qui donnent de la voix. Face à un musulman apeuré, un groupe de Suisses aux bras noueux lèvent le poing et une forêt de banderoles d'interdictions. Interdiction des mosquées, du voile islamique, du coran et même de la barbe. Une scène commentée par un présentateur de téléjournal qui annonce: après la votation anti-minarets, on peut s'inquiéter d'une radicalisation... de la population suisse.

Opération déminage En acceptant une initiative à la validité contestable, la Suisse s'est payé "un luxe démocratique" au moment ou tant d'autres défis sont à relever, estime La Liberté. Le nouveau défi des autorités sera de gérer la lourde entreprise de déminage après ce vote. A voir comment elles s'y sont prises pour contrecarrer l'initiative anti-minarets, pas sûr que le gouvernement dispose des outils adéquats pour arriver à ses fins, perçoit Thierry Meyer dans 24heures. Le gouvernement, par la voix de Micheline Calmy-Rey, exprime sa surprise et sa déception dans Le Temps. La ministre parle d'une réaction de repli, elle qui déclarait vendredi dans une interview dans Le Matin qu'elle serait fière de son pays si l'initiative était rejetée. Aujourd'hui, des pensées inquiètes vont vers la Libye où deux otages suisses sont retenus depuis 500 jours, rappelle le quotidien.

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