L'article de Philippe Maspoli dans 24heures :
Une audience du Tribunal de police de Lausanne reflète une atmosphère très tendue au Centre social d’intégration des réfugiés statutaires (CSIR).
L’employé du CSIR qui avait révélé en mars que des centaines de milliers de francs d’aide sociale ont été indûment versés à des réfugiés ayant obtenu l’asile n’a, cette fois, pas eu gain de cause. Le Tunisien qu’il accuse de l’avoir insulté et menacé de mort a été acquitté au bénéfice du doute.
«Je rends hommage à un assistant social qui a voulu faire la lumière sur des fraudes et dont le zèle se retourne contre lui.» Audelà de ce qui ressemble à une banale affaire d’insulte et de menace, c’est la crise régnant au CSIR qui est apparue une nouvelle fois hier au grand jour au Tribunal de police, présidé par Marie-Pierre Bernel.
Procédure lancée pour mobbing
Le plaignant n’est pas n’importe qui. C’est l’assistant social qui, dans nos colonnes, avait révélé en mars dernier l’affaire de l’aide versée indûment, pointant du même coup le laxisme de ses collègues.
Les services de Pierre-Yves Maillard, chef du Département de la santé et de l’action sociale, ont enquêté (lire l'article du 15 juillet). Il y a quelques jours, le Canton annonçait le dépôt de plaintes pénales portant sur 21 dossiers et un montant de 350 000 francs lié à des malversations. En tenant compte des erreurs et des cas prescrits, la somme totale versée indûment atteint 435 000 francs.
L’assistant social à l’origine du séisme qui secoue le CSIR se trouve actuellement en arrêt de travail total pour maladie. Il n’a pas pu mener à bien une formation de perfectionnement. Il a lancé, avec le soutien de sa supérieure directe, une procédure pour mobbing auprès du groupe Impact, chargé de régler les conflits graves au sein de l’administration cantonale. Il a demandé une mutation. Et il affirme avoir été menacé par plusieurs réfugiés, ce qui l’a amené à déposer cinq plaintes pénales. Cette série de procédures se solde par un premier échec pour lui. Accusé d’avoir insulté l’assistant social, le 21 octobre dernier, en le traitant de «connard» et de «fils de pute», puis d’avoir mimé avec le pouce le geste de l’égorgement, un réfugié tunisien a été acquitté hier au bénéfice du doute, après avoir été condamné par un premier juge à cinq jours avec sursis. La présidente Marie-Pierre Bernel n’a pas trouvé d’éléments suffisants, de témoignages, pour une qualification pénale et donne raison au défenseur de l’accusé, Me Jean-Philippe Heim.
«Harcèlement administratif»?
A la sortie de l’audience, l’assistant social se dit sous le choc. Un recours n’est pas exclu, il se donne quelques jours de réflexion avec son avocat, Me eChristophe Marguerat. Il se sent lâché, voire enfoncé, par ses collègues fâchés d’avoir été traités de laxistes. Quelle que soit l’interprétation à donner, le fait est que personne n’a entendu d’injure ou de menace, même s’il est reconnu que l’accusé s’énerve facilement.
L’assistante sociale désormais en charge du dossier du réfugié tunisien — ce dernier fait l’objet d’une plainte du Canton pour avoir touché l’aide sociale sans avoir déclaré des gains — affirme n’avoir aucune difficulté. Une question de «communication plus harmonieuse», affirmet-elle. Même l’adjointe au Service de surveillance de l’aide sociale, responsable du CSIR, prend ses distances après avoir pourtant cosigné des lettres de l’assistant social.
Ce dernier, considéré comme pointilleux, a-t-il simplement bien fait son travail, trop pour certains, ou est-il un adepte du «harcèlement administratif», comme l’affirme le médecin du réfugié tunisien? «Il y a tellement d’éléments peu clairs dans ce dossier», souligne la présidente du Tribunal. Et le feu ne semble pas près de s’éteindre au CSIR.
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