Voici l'éditorial de Didier Estoppey paru dans Le Courrier
Le sort en est désormais jeté: il faudra lutter pied à pied et user de l'arme référendaire pour rendre à ce pays un peu de son humanité et de sa dignité. La commission des institutions politiques du Conseil national a en effet suivi hier, sur pratiquement tous les points, le Conseil des Etats dans le dynamitage en cours de notre droit d'asile. Seules les deux mesures les plus contestées, menant à une impasse constitutionnelle, font l'objet d'ultimes divergences.
Pour le reste, les commissaires ont fait fi des multiples avertissements émanant d'ONG, d'organisations onusiennes ou du commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe quant à l'incompatibilité de la révision en cours avec les engagements internationaux de la Suisse. Ils ont notamment étendu à l'ensemble des requérants déboutés la coupe de l'aide sociale actuellement en vigueur pour ceux frappés d'une non-entrée en matière (NEM).De premiers rapports mettant en doute l'efficacité d'une mesure qui pousse avant tout les gens à entrer en clandestinité n'auront pas eu raison de l'aveuglement ambiant. Ni la situation kafkaïenne provoquée sur le plan juridique par des mesures introduites en urgence: l'exemple du canton de Vaud, qui vient d'être désavoué par son Tribunal administratif dans sa politique d'«accueil» des NEM, aurait pourtant dû inspirer la commission...
Elle a préféré suivre les vents qu'elle croit dominants et emboucher les trompettes de l'UDC. A moins d'un très improbable retournement de situation, le Conseil national se rangera lui aussi aux ordres en septembre, reniant ses votes de juin 2004. En cautionnant toute une série de durcissements dont il serait trop douloureux de rappeler ici la liste.
Ce qu'il faut en revanche rappeler, c'est la lourde responsabilité du Parti radical et du PDG dans cette Bérésina. Les rares personnalités qui, à l'image de l'ex-chancelier de la Confédération François Couchepin ou des quatre conseillers nationaux libéraux, ont cherché à rappeler le centre-droite à la raison, n'ont trouvé qu'un désert pour prêcher...
Mais si nos prétendues élites politiques ont désormais perdu toute colonne vertébrale leur permettant de résister aux sirènes xénophobes, il n'en va heureusement pas de même de la Suisse réelle. De cette autre Suisse, heureuse de vivre ensemble, qui manifestait samedi dernier dans les rues de Berne. Il sera essentiel, pour assurer le succès de la double campagne référendaire qui se prépare contre la Loi sur l'asile et celle sur les étrangers, de fédérer toutes les forces que les ignominies en cours répugnent. Y compris celles qui, à droite, ont saisi de quel côté se situait désormais le dogmatisme: chez nos dirigeants qui, sous prétexte de prévenir des abus et une criminalité importée qu'ils n'ont pas sérieusement combattus, pratiquent tous les amalgames, attisent la haine de l'autre. Et n'hésitent désormais plus à nous concocter des lois qui font fi des réalités migratoires comme des droits fondamentaux.
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