L’Argovien aux idées fermes sur les étrangers inspire son parti, qui en débattra demain. Les critiques fusent en Suisse romande.
«Je n’ai aucun problème avec la Suisse romande et ceux qui ne pensent pas comme moi. On va débattre, argumenter, et les délégués trancheront!» lance Philipp Müller. Le conseiller national argovien, connu pour ses positions fermes sur les étrangers, assume parfaitement sa vision utilitariste de l’immigration. Celle qui l’avait motivé à lancer en 1994 son initiative «Maximum 18% d’étrangers». Celle qui vient d’inspirer le controversé papier de position «Immigration pragmatique», que le PLR a présenté en janvier dernier et qui sera débattu ce week-end en congrès à Zurich.
Perçu il y a dix ans comme un électron libre au sein du grand vieux parti, l’ancien pilote instructeur (Ferrari, Porsche) a gagné en influence au sein du PLR. Mais Philipp Müller tient néanmoins à partager les honneurs: «C’est une position du comité directeur et pas seulement de Philipp Müller. D’ailleurs, c’est une voie sur laquelle nous nous sommes engagés il y a longtemps. En décembre 2009, par exemple, nous avions exigé des garde-fous à la libre circulation des personnes. Ce qui a changé, c’est que nous communiquons simplement mieux.»
«Bien sûr que je suis à ma place au PLR», assure Philipp Müller. L’Argovien réfute toute collusion avec l’UDC et toute erreur stratégique en allant chasser sur les terres des démocrates du centre. «L’immigration n’est pas un sujet qui est réservé à l’UDC. Pas plus que la famille au PDC, le social au PS et l’environnement aux Verts. Et d’ailleurs, nous sommes très favorables à la libre circulation des personnes!» lance encore Philipp Müller.
Il n’empêche, pour beaucoup d’élus romands du PLR, il manque passablement de «valeurs humanistes» dans ces douze thèses de politique migratoire. Aussi le Vaudois Claude Ruey et d’autres figures libérales-radicales latines (Dick Marty, Jacques Bourgeois ou Pierre Maudet) ont adressé à la direction du parti un manifeste. Ce dernier, rendu public sur le site liberopenmind.ch, reproche une dérive populiste d’un PLR imitant l’UDC et en contradiction avec la tradition humaniste du libéralisme. Quelque 200 sympathisants l’ont signé.
«J'ai une opinion claire: c’est un autogoal! Lors du congrès, nous ferons tout pour nous montrer unis – année électorale oblige –, mais dans le fond nous faisons le lit de l’UDC.» Cet élu alémanique a, lui aussi, peu goûté la prise de position de son parti. Une quarantaine d’amendements ont été reçus par la direction du PLR, qui les passera au crible aujourd’hui, vendredi, avec les présidents cantonaux, avant l’assemblée des délégués de samedi. Trois sections romandes – Genève, Vaud et Neuchâtel – ont fait connaître leur opposition de principe à ce texte.
La crainte d’un autogoal, d’un positionnement contre-productif en année électorale, est toujours évoquée. «La volonté d’être stricts est partagée par tous. Mais si le papier final «Immigration» reste déséquilibré, nous devrons l’expliquer à notre base. Ce n’est pas là que nous sommes attendus, souligne Christelle Luisier, présidente des radicaux vaudois. Les priorités du PLR ont déjà été fixées: l’emploi, la santé des assurances sociales et l’Etat efficace. C’est là qu’on reconnaît des compétences au PLR.»
Xavier Alonso, Berne, pour 24 Heures
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