jeudi 4 novembre 2010

« C'est la grande contradiction du système »

Un demandeur d'asile sur deux est débouté et doit regagner son pays d'origine. Évidemment, aucun ne l'accepte.

Un demandeur d'asile sur deux est débouté par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Dans le délai d'un mois à compter de la notification (par courrier recommandé) de cette décision, le demandeur peut interjeter appel devant la Cour nationale du droit d'asile. Un titre de séjour provisoire est alors accordé jusqu'à ce que la Cour statue. Si la Cour, comme souvent, confirme la décision de l'Ofpra, le préfet du département émet une obligation de quitter le territoire français (OQTF).

La loi prévoit une aide au retour volontaire au pays. Il attribue une somme, variable en fonction des situations (familiale notamment). Mais dans les faits, « très peu s'en vont », indique Jean-Jacques Réchou, le chef de service au Centre d'accueil des demandeurs d'asile de Bayonne. « C'est logique : ils frappent à notre porte parce qu'ils se disent, pour 80 % d'entre eux, en danger de mort dans leur pays. » Comment, dès lors, les imaginer rentrer vers ce danger. « En 20 ans, j'ai vu quatre familles demander le retour volontaire », compte Jean-Jacques Réchou. C'est toute la limite du système. « Sa grande contradiction », estime le professionnel.

Clandestinité

La question se pose de leur sort. Car passé tous les délais légaux de recours, c'est bien la clandestinité qui attend les nouveaux sans papiers. « Il ne faut pas se leurrer », souffle le travailleur social. Entrés avec un titre de séjour provisoire, ils deviennent ''expulsables'', illégaux après trois, voire quatre ans d'existence au grand jour. Pour beaucoup, de travail officiel.

Vis-à-vis d'eux, le positionnement n'est pas facile pour ceux du Cada, qui viennent de les accompagner durant ces années pour tenter d'obtenir l'asile. « Nous, notre rôle, c'est, au bout d'un mois après la décision négative, de leur indiquer qu'ils ne peuvent pas rester. Vous vous en doutez : c'est ce que nous avons à faire de plus dur. Mais quand on travaille au Cada, on connaît la règle, on est prêt. C'est parfois rageant, car certains ont des éléments à faire valoir et ne le font pas toujours. »

Évidemment, Jean-Jacques Réchou et le Cada ne claquent pas la porte sans un mot. « Quand ils doivent partir, on essaie de les orienter vers d'autres réseaux, ceux des organisations caritatives. Nous restons dans le cadre de la loi, mais nous gardons un souci de protection. » Pour les déboutés, une nouvelle période d'incertitude commence.

Pierre Penin dans Sud-Ouest

Aucun commentaire: