vendredi 15 octobre 2010

Un requérant arrêté durant un rendez-vous administratif

Malgré les risques qu'il encourt en rentrant au Kosovo, le tribunal pourrait expulser ce requérant serbe.

Hier, au Palais de justice de Genève, avaient lieu les auditions de trois prévenus actuellement en détention administrative. Parmi eux, Vahid1, Serbe du Kosovo, présente une situation différente de celle de ses codétenus. Cet infirmier de formation, arrivé en Suisse en 2007, n'encourt aucune condamnation pénale. «Il n'a jamais volé un stylo», précise son avocat, Andrea Von Flüe. Néanmoins, le tribunal veut prolonger sa détention administrative et, à terme, le renvoyer au Kosovo.
Autre particularité du cas de Vahid: les circonstances dans lesquelles il a été arrêté. Jamais entré dans la clandestinité, ce requerant d'asile, dont la demande a été rejetée à son arrivée, a toujours suivi la procédure que lui imposaient les institutions. «Il a joué le jeu», explique Orlane Varesano, du comité de la Ligue suisse des droits de l'homme (LSDH) qui soutien ce requérant. Vahid s'est effectivement rendu à tous ses rendez-vous administratifs, notamment ceux avec l'Office cantonal de la population (OCP) à Genève. C'est d'ailleurs durant un de ces contrôles mensuels à l'OCP qu'il a été arrêté, le 16 septembre dernier; un procédé dénoncé par la LSDH. Il existerait un «accord tacite», selon les mots de Mme Varesano, entre les associations d'aide aux requérants et les autorités. Ces dernières n'emprisonneraient pas les demandeurs d'asile déboutés qui respectent la procédure établie. Ce genre d'arrestations «pousse les requérants à la clandestinité et les exclut de l'aide sociale», déplore Mme Varesano.
Détenu au centre de détention de Frambois, Vahid souffrirait psychologiquement de son enfermement. Mais c'est également la perspective d'un retour au Kosovo qui semble peser sur son moral. Selon un rapport publié le 28 septembre 2010 par Amnesty International2, cité par Me Von Flüe durant l'audition, un éventuel retour dans ce pays serait effectivement une prise de risque considérable pour lui, alors qu'il appartient à la minorité serbe enclavée. «Les Serbes restent en danger, même dans les enclaves serbes», peut-on lire dans ce rapport qui dénonce également le fait qu'ils «ne jouissent d'aucune liberté de mouvement». Personnellement affecté par ce drame, Vahid porte des documents attestant de la mort par balles de deux de ses proches, victimes de violences ethniques, que le Tribunal fédéral a rejetés lors de sa première tentative d'obtenir l'asile.
Malgré la plaidoirie de Me Von Flüe, qui dénonce une éventuelle expulsion comme «anticonstitutionnelle» et violant le droit international», les juges décident de prolonger la détention administrative de Vahid; un premier pas vers sa future expulsion.

Francisco Perez dans le Courrier

Note : 1 Prénom d'emprunt. 2 «Serbia,not welcome anywhere: stop the forced return of the Roma to Kosovo», Amnesty International, 28 septembre 2010 (format .pdf) 

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