Raphaël Mahaim, député des Verts, est l’invité de la page Débats de 24 Heures, au sujet des votations du 28 novembre.
Il existe mille bonnes raisons de déposer un double non dans l’urne lors de la votation sur l’initiative pour le renvoi des criminels étrangers. Celle-ci n’est absolument pas de nature à résoudre les problèmes de criminalité que connaît notre pays. Elle ne propose aucune solution concrète permettant de s’attaquer à leurs causes réelles. En outre, contrairement à une opinion répandue, le renvoi des étrangers ayant commis une infraction est déjà possible dans le droit actuel. Certains étrangers criminels doivent effectivement être renvoyés de Suisse, et ils le sont déjà, souvent avec beaucoup de sévérité.
L’initiative veut introduire l’obligation de renvoyer automatiquement et aveuglément tout étranger coupable d’un délit. Les autorités pénales n’auront pas la possibilité de chercher, de cas en cas, la meilleure solution pour se prémunir contre la récidive. Ainsi, il sera possible d’arracher à sa famille un adolescent né en Suisse – mais de nationalité étrangère – et coupable d’un vol de faible importance. Une telle manière de faire n’est pas digne des valeurs que nous devons défendre. Elle poussera certains délinquants dans la clandestinité, ce qui va à l’encontre des objectifs de lutte contre la criminalité que nous poursuivons.
Au-delà des arguments rationnels plaidant pour un double non, il s’agit de dénoncer haut et fort la lente dérive du discours ambiant au sujet des «étrangers». Qui peut oublier les tristement célèbres affiches des «moutons noirs»? Elles ont inspiré tous les mouvements xénophobes d’Europe. C’est une honte pour la Suisse! Combien de temps faudra-t-il encore attendre pour qu’une franche réaction populaire à cette montée de xénophobie voie le jour? La ligne rouge n’a-t-elle pourtant pas été franchie depuis longtemps?
La campagne des partisans de l’initiative ne vise qu’à attiser la haine envers les personnes de nationalité étrangère, rendues responsables de tous les problèmes de société. Mais comment peut-on espérer trouver des solutions appropriées à des problèmes complexes en instaurant un climat de suspicion et de peur? La réponse est toute trouvée: l’initiative ne cherche pas à dégager des solutions concrètes. Seul est visé le bénéfice électoral engrangé grâce à des propositions simplistes et populistes.
La passivité du Conseil fédéral et des partisans de son contre-projet est tout aussi coupable. Terrorisés par le prétendu rouleau compresseur électoral de l’initiative, ils font profil bas et se contentent de dire timidement qu’elle «posera quelques problèmes d’application». Le contre-projet concocté à Berne reprend tel quel le contenu de l’initiative, en se contentant d’adopter des termes plus polis et «juridiquement corrects». Les innombrables problèmes posés par un renvoi automatique restent entiers. Prétendre combattre l’initiative en allant dans son sens est un leurre! Et cela contribue à alimenter la surenchère électoraliste, à laquelle s’adonnent un nombre inquiétant de politiciens.
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