LU DANS LE NOUVELLISTE
6 novembre 2009 - CHRISTIANE IMSAND
VOTATIONLes représentants des confessions catholique, protestante et israélite combattent l'initiative antiminarets. Elles invoquent la liberté religieuse et privilégient l'intégration.
Les différentes Eglises et confessions de Suisse partagent des intérêts communs. Elles les défendent au sein du Conseil suisse des religions. Fondé en 2006, ce cénacle rassemble des personnalités dirigeantes chrétiennes, juives et musulmanes. Il a adopté sa première position politique commune en se prononçant contre l'initiative antiminarets. Pour lui, la liberté religieuse est un droit fondamental et la construction de bâtiments destinés à la pratique culturelle de chaque religion en fait partie intégrante. Il estime par ailleurs que l'initiative ne fait qu'alimenter des tensions sans résoudre le moindre problème.
Pour le professeur Jörg Stolz, directeur de l'Observatoire des religions à l'Université de Lausanne, cette position n'a rien de surprenant. «Les catholiques et les protestants mettent aujourd'hui l'accent sur le dialogue interreligieux. Cela les conduit d'une façon très naturelle à combattre une initiative qui va à l'encontre de leurs convictions. Face aux autorités, ils cherchent par ailleurs à parler d'une seule voix, d'entente avec les autres religions monothéistes. Il ne faut pas oublier que ce sont des Eglises qui perdent du terrain. L'unité est nécessaire au maintien de leur influence.»
Seuls les évangéliques se sont exclus de cette communauté d'action. Une partie d'entre eux soutient l'initiative aux côtés de l'Union démocratique fédérale et de l'UDC. «Contrairement aux autres Eglises chrétiennes qui ont perdu leur zèle missionnaire, les évangéliques n'admettent pas le relativisme religieux», note Jörg Stolz. «Persuadés de détenir la seule vérité, ils ne veulent pas seulement dialoguer mais convertir. Paradoxalement, ils sont pourtant beaucoup plus proches des musulmans que ne le sont les catholiques et les protestants. Ils ont par exemple des positions similaires en matière de morale sexuelle.»
La Suisse: une situation à part
La tolérance des principales Eglises chrétiennes ne se heurte pas au mur d'un islam intransigeant. «La situation suisse n'a rien à voir avec ce qui se passe dans d'autres pays», souligne le professeur Stolz. «Les communautés musulmanes de Suisse sont très ouvertes au dialogue interreligieux. Celui-ci est facilité par la neutralité bienveillante des autorités dans les affaires confessionnelles. L'affaire des foulards, par exemple, a été traitée de manière beaucoup plus pragmatique qu'en France.»
Les musulmans se sont tenus en retrait pendant la campagne, ne voulant pas répondre aux provocations des initiants. La Coordination des organisations islamiques en Suisse (COIS) et la Fédération des organisations islamiques en Suisse ont tenu hier à Berne la seule conférence de presse nationale consacrée à l'initiative. Pour le professeur Farhad Afshar, président de la COIS et membre du Conseil suisse des religions, «aucun parti politique n'a la légitimité de décider au nom d'une communauté religieuse ce qui est nécessaire à sa pratique». Le Genevois Adel Mejri déplore pour sa part une islamophobie de plus en plus décomplexée. «Ce climat n'incite pas à l'intégration, il favorise au contraire le repli des communautés sur elles-mêmes.» La réponse des musulmans est le dialogue. Samedi, plus d'une centaine de mosquées et autres lieux de prières seront ouverts au public.
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