Même les requérants mineurs n'échappent pas à l'expulsion
Paru le Mardi 17 Novembre 2009 - MICHAËL RODRIGUEZASILE - Un Somalien de 17 ans, sans famille, a été embarqué jeudi par la police. Son professeur, doyen à l'OPTI, monte aux barricades.
«Un nouveau pas dans l'inhumanité vient d'être franchi par les autorités vaudoises et suisses.» Cette fois, ce n'est pas la Coordination asile qui le dit, mais le responsable des classes d'accueil du canton, Etienne Corbaz. Dans un communiqué diffusé dimanche, ce doyen à l'OPTI (Organisme pour le perfectionnement scolaire, la transition et l'insertion) s'insurge contre l'arrestation d'un de ses élèves, Abdirashid, un Somalien de 17 ans.
Réveillé par la police
Jeudi dernier, dans un centre de l'Etablissement vaudois d'accueil des migrants, l'adolescent a été réveillé par la Police de sûreté vaudoise pour être conduit à l'aéroport de Zurich-Kloten. Destination: Rome. Dans sa fuite loin de la guerre en Somalie, Abdirashid était d'abord passé par l'Italie – et par le camp de réfugiés de Lampedusa, de sinistre réputation. Il est arrivé en Suisse en janvier 2009, et était scolarisé à l'OPTI depuis la dernière rentrée d'août. Sa mère vit en Somalie et son père est décédé il y a deux ans, relate encore le communiqué.
En vertu des accords de Dublin, acceptés par le peuple suisse en 2005, les requérants ayant déjà déposé une demande d'asile dans un autre pays signataire y sont presque systématiquement renvoyés. Peu importe qu'il s'agisse de mineurs non accompagnés: selon l'Office fédéral des migrations (ODM), les règles sont les mêmes que pour les adultes... A partir de quel âge peut-on donc expulser un enfant? A cette question, les autorités fédérales ne répondent pas.
Des lois «injustes»
«Nous savons que ce départ a été fait dans le respect des lois, écrit Etienne Corbaz. Mais que dire de lois qui lancent sur les routes de l'Europe un mineur, seul, sans aucun soutien? Que dire de lois qui stoppent un jeune homme dans ses recherches de formation? (...) Nous devons dire notre opposition à l'injustice de ces lois.»
Dans un communiqué envoyé hier, le syndicat SUD a également fait part de son indignation, accusant les autorités de violer la Convention internationale des droits de l'enfant. «Procéder à une rafle aux premières heures du matin rappelle les heures les plus sombres de l'histoire de l'Europe», ajoute le syndicat, affirmant que ces méthodes ont «profondément heurté» les enseignants, les camarades de classe d'Abdirashid et le personnel du centre.
Leuba s'en lave les mains
Le ministre vaudois de l'Intérieur, Philippe Leuba, réfute le reproche d'inhumanité, et assure que l'adolescent sera pris en charge à son arrivée en Italie. Mais il dit n'y être pour rien dans cette affaire. Selon lui, les autorités fédérales sont seules compétentes pour appliquer les accords de Dublin.
«Je n'ai pris aucune décision dans ce dossier, clame le conseiller d'Etat libéral. Il n'y a pas un seul conseiller d'Etat en Suisse qui soit compétent dans ce domaine.» N'est-ce pourtant pas la police vaudoise qui procède aux mesures de contrainte? «La police cantonale n'est pas rattachée au Département de l'intérieur, rétorque le ministre. En outre, elle ne fait qu'exécuter une décision de l'ODM.»
Philippe Leuba n'a guère apprécié le vigoureux communiqué du professeur de l'OPTI. «Sa démarche pose un certain nombre de questions», lâche-t-il. Mais je réserve d'abord ces questions au collège gouvernemental». I
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