Jean-Michel Dolivo livre son opinion aux lecteurs de 24heures en page deux du quotidien.
Ce vendredi 16 décembre 2005, les Chambres fédérales vont adopter une nouvelle loi sur les étrangers (LEtr) et une révision de la loi sur l’asile (LAsi), qui sont parmi les plus dures d’Europe. Ces deux lois s’inscrivent dans une logique d’exclusion, de discrimination et de répression. Elles seront combattues par deux référendums lancés par celles et ceux qui veulent une Suisse ouverte et solidaire. La loi sur les étrangers (LEtr) ferme quasiment l’accès de notre pays aux ressortissants extra- européens, instituant une véritable politique de ségrégation en fonction de l’origine nationale. Elle accroît encore la précarité des étrangers qui vivent en Suisse: le droit à l’obtention d’une autorisation d’établissement après dix ans de séjour est supprimé, celui au regroupement familial réduit comme peau de chagrin. La LEtr jette la suspicion sur les couples binationaux: l’officier d’état civil pourra refuser de célébrer un mariage sur simple soupçon qu’il pourrait être «blanc». Cette loi condamne les sans-papiers à rester dans la clandestinité, soumis aux pires formes d’exploitation. A été supprimée l’obligation d’examiner les demandes de régularisation individuelle déposées par des personnes sans statut légal vivant en Suisse depuis quatre ans et répondant à tous les critères d’intégration, tant professionnelle que sociale. Dans son volet répressif, la LEtr institue notamment «un renvoi informel » permettant aux autorités de police de renvoyer l’étranger sans aucune exigence de forme. Une véritable machine à expulser sans respecter aucun des droits élémentaires de procédure!
La révision de la loi sur l’asile (LAsi) multiplie les mesures de dissuasion et d’exclusion à l’égard des réfugiés. Elle prévoit de refuser d’entrer en matière sur la demande d’asile de ceux qui ne peuvent présenter un passeport ou une carte d’identité: comment exiger d’une personne persécutée par les autorités de son pays qu’elle demande des papiers en bonne et due forme pour en sortir? Une liste de pays tiers, dits «sûrs», sera établie vers lesquels il sera possible de procéder à un renvoi sans examen de détail de la demande individuelle d’asile. Non content de fermer la porte aux arrivées par voie terrestre, les arrivées par voie aérienne seront aussi bloquées. Les aéroports vont être transformés en véritables souricières pour les nouveaux arrivants dans la mesure où la procédure menée à l’aéroport ne se limitera pas au seul examen préalable. Quant à ceux qui ont vu leur demande d’asile traitée mais déboutée, on leur coupera les vivres: plus d’aide sociale et interdiction de travailler, une façon de les contraindre à partir. Ils seront mis au même régime que celui des personnes victimes de non-entrée en matière (NEM) depuis avril 2004.
Ces deux lois pousseront dans la clandestinité des milliers de personnes pour en faire des sans-papiers, des travailleurs sans statut légal, corvéables et exploitables à merci. Simultanément, elles multiplient les mesures de contrainte permettant jusqu’à deux ans de détention sans avoir commis le moindre délit. La politique migratoire et la politique d’asile de la Suisse se sont de tout temps appuyées sur la peur de la «surpopulation » étrangère. A l’heure de la «libre circulation des personnes », cette logique d’exclusion et de discrimination est inacceptable et nous enferme dans les erreurs du passé. En matière de violation des droits fondamentaux, des libertés individuelles et des droits sociaux, la politique d’immigration et d’asile constitue un laboratoire très préoccupant de solutions autoritaires et de régression sociale
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