«En matière de renvois d'étrangers criminels, à Fribourg, il ne se passe presque rien!» De passage mercredi soir dans la cité des Zaehringen, devant un public acquis à sa cause, Christoph Blocher n'y est pas allé avec le dos de la cuiller pour défendre l'initiative dite des moutons noirs.
Les sondages lui prédisent une victoire le 28 novembre. L'ancien conseiller fédéral Christoph Blocher continue pourtant à faire activement campagne en faveur de l'initiative UDC «Pour le renvoi des criminels étrangers». Mercredi soir, il donnait une conférence à Fribourg, suivie par 300 personnes environ acquises à sa cause. Seuls deux jeunes gens ont tenté, en début de soirée, de dérouler une banderole critique, avant d'être évacués sans résistance par le service d'ordre. Après sa conférence, Christoph Blocher a répondu aux questions des médias.
Plus de 70 expulsions à Saint-Gall depuis début 2010, une centaine l'an passé dans les cantons de Vaud et Zurich. Et vous dites qu'il ne se passe rien en matière d'expulsions de criminels étrangers?
Les chiffres globaux pour 2008 pour la Suisse parlent de 375 expulsions. Les cantons que vous citez ont une pratique très stricte, mais vous ne mentionnez ni Genève, ni Fribourg, où il ne se passe presque rien. Si l'initiative UDC est acceptée, le juge décidera d'un renvoi et les cantons n'auront d'autre choix que d'appliquer sa décision.
Décider d'expulser un étranger criminel, c'est une chose. Encore faut-il pouvoir appliquer le renvoi...
La Suisse ne renvoie pas vers l'Erythrée et la Somalie, en raison de la situation instable sur place. Cette pratique temporaire me paraît correcte en vertu du principe de non-refoulement des réfugiés. Mais pour ce qui concerne le Nigeria, c'est la faute à la Suisse si plus aucun renvoi n'est effectué, c'est elle qui a arrêté les expulsions après la mort d'un requérant d'asile à Zurich.
Mais après ce drame, le Nigeria n'accepte plus de reprendre ses ressortissants!
Parce que la Suisse a eu tort d'affirmer qu'elle avait commis une erreur. Pour imposer la conclusion d'un nouvel accord de réadmission, elle a une arme: elle peut interrompre tout de suite son aide au développement sur place. Mais il y a au Conseil fédéral des gens qui se refusent à faire ce lien, parce qu'ils ne veulent pas de renvois.Vous avez dirigé le Département de justice et police entre 2003 et 2007, et on ne peut pas dire que vous ayez signé beaucoup d'accords de réadmission!D'après mon expérience, on peut expulser des criminels vers quasiment tous les pays même sans accord de réadmission. Et pour ceux qui ne veulent quand même pas rentrer chez eux, il faut leur couper l'aide sociale. Mais on ne peut pas toujours chercher le motif qui évitera de renvoyer une personne. Tout le monde peut rentrer chez lui, tout le monde peut obtenir des papiers d'identité pour le faire.
Une année après la votation pour l'interdiction des minarets, ne craignez-vous pas de nouveaux dégâts pour l'image de la Suisse à l'étranger si votre initiative est acceptée?
Cette mauvaise réputation n'a duré qu'une journée, le temps que l'opinion publique des autres pays exprime son désir de voter elle aussi sur les minarets. Il y a toujours des personnes qui nous critiqueront au sein des gouvernements étrangers, mais nous faisons de même avec les Allemands ou les Américains!
L'expulsion de citoyens de l'Union européenne ne viole-t-elle pas l'accord sur la libre circulation des personnes?
Le Danemark appartient à l'Union européenne, et est donc aussi soumis aux règles de la libre circulation des personnes. Or, il a expulsé 1400 étrangers criminels, selon plus ou moins les mêmes règles que notre initiative.
Sur votre affiche de campagne, on peut lire «Ivan S., violeur et bientôt Suisse?» Mais les autorités compétentes refusent la naturalisation aux personnes condamnées. Votre publicité n'est-elle pas mensongère?
Avec le contre-projet, qui parle d'intégration des étrangers, ça ne prendra pas longtemps avant qu'un criminel étranger ne revendique de l'Etat qu'il l'intègre.
Vous mélangez deux choses. Le contre-projet contient certes un article sur l'intégration, mais celle-ci concerne tous les étrangers, et pas les criminels!
Mais si le contre-projet passe, les criminels étrangers auront bientôt un droit à être intégrés; ils pourront donc rester en Suisse. Et je vous signale que notre slogan sur «Ivan S., bientôt Suisse?» contient un point d'interrogation.
Combien payez-vous de votre poche pour cette campagne?
Je ne sais pas encore. Si l'UDC manque de moyens pour boucler son budget, je l'aiderai.
Vous êtes entrepreneur, vous avez forcément prévu un budget...
C'est une affaire privée. Les PDC et les radicaux se plaignent de ne pas avoir d'argent pour faire campagne. Ils ont pourtant des soutiens très riches. Pourquoi ces derniers ne paient-ils pas?
Un article de Serge Gumy dans la Liberté
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