mercredi 6 janvier 2010

Les propos racistes se banalisent en Italie

Les propos racistes se banalisent en Italie

Un footballeur italien traité de «nègre de merde», des annonces immobilières qui stipulent «Pas d'animaux, pas d'étrangers»: les comportements xénophobes se banalisent en Italie.


L'attaquant de l'Inter de Milan Mario Balotelli, Italien d'origine ghanéenne, a été victime d'injures racistes. (Photo: Keystone)

«La situation se dégrade. Tous les jours, un noir se fait tabasser. On ne peut pas continuer comme ça», explique à l'AFP Gian Antonio Stella, journaliste spécialisé dans les mouvements de droite et auteur du livre «Nègres, tapettes, youpins & co. L'éternelle guerre contre l'autre», paru début décembre.

Parmi les derniers exemples relevés, la nuit de la Saint- Sylvestre: un Ethiopien tabassé à Florence, parce que son amie protestait contre des jets de pétards, et un Egyptien frappé aux cris de «pédé de merde», selon l'organisation Arcigay.

Quelques jours plus tôt, c'était le «Noël blanc» organisé par un maire de la Ligue du Nord, parti anti-immigrés membre de la coalition de droite au pouvoir, qui défrayait la chronique. L'opération visait à recenser les étrangers de Coccaglio (3.000 habitants) et à dénoncer les clandestins en préfecture.

Des responsables de la Ligue du Nord ont également proposé de réserver des wagons de train ou des prestations sociales aux Italiens.

Sentiment d'insécurité

«La Ligue est décidée à exploiter le sentiment d'insécurité vis-à- vis de l'immigration», commente Sergio Romano, éditorialiste du quotidien «Corriere della Sera». «Comme (le Premier ministre) Silvio Berlusconi a besoin du soutien de la Ligue, elle peut dire tout ce qu'elle veut».

Le chef de la Ligue «Umberto Bossi a qualifié les noirs de 'Bingo Bongo' à plusieurs reprises», relève M. Stella, en rappelant ce film de 1982 où Adriano Celentano incarne un homme-singe.

«A l'étranger, c'est une chose impensable. Aucun ministre français, anglais ou allemand ne se permettrait cela parce que ces pays ont réfléchi sur leur passé, ce que les Italiens n'ont pas assez fait», estime-t-il, en allusion aux lois raciales de Benito Mussolini.

La Ligue, elle, se défend de tout racisme: «Nous ne sommes pas du tout racistes. Nous sommes tellement étrangers à cette problématique que nous n'avons même pas besoin d'en parler», déclare à l'AFP Nicoletta Maggi, porte-parole de M. Bossi. La Ligue, implantée avant tout dans le nord du pays, n'est pas la seule à tenir ce type de propos.

Racisme institutionnel

Bernardino De Rubeis, maire de Lampedusa, petite île proche des côtes d'Afrique du Nord sicilienne où débarquent régulièrement des immigrés clandestins, est ainsi actuellement jugé pour des déclarations publiées en septembre 2008 par le quotidien La Repubblica: «Je ne veux pas être raciste mais la chair des nègres sent mauvais même si elle est lavée».

Pour Piero Soldini, responsable immigration au Cgil, le plus grand syndicat italien, tous ces propos relèvent d'un «racisme institutionnel et d'une banalisation des propos racistes» qui «produisent un racisme populaire et toléré au sein de la société».

Ainsi des stades du très populaire Calcio, où après les cris de singe saluant les joueurs noirs, des supporteurs de la Juventus de Turin ont traité de «Nègre de merde» l'attaquant de l'Inter de Milan Mario Balotelli, Italien d'origine ghanéenne, scandant «Il n'y a pas de noirs italiens».

Ou des dizaines d'offres de location à caractère xénophobe qui paraissent tous les jours dans la presse: «Pas d'animaux, pas d'étrangers» ou encore «Italiens uniquement, pas de Chinois».

Un premier procès contre le journal de petites annonces «Porta Portese», qui a laissé paraître des avis excluant «les personnes de couleur», est en cours à l'initiative de l'Office national anti- discrimination.

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