Le projet de directive européenne instaurant des règles communes à l'expulsion des clandestins inquiète les associations. Sophie Daylac, de la Cimade, juge ce texte «excessif et démesuré». Propos recueillis par Marie Rostang
LIBERATION.FR : vendredi 6 juin 2008
Sophie Daylac est chargée du suivi des étrangers éloignés à l'association française de défense des étrangers évacués (la Cimade).
Pourquoi avoir qualifié cette nouvelle directive sur l'expulsion des sans papiers de «directive de la honte»?
Parce que ce projet est complètement aberrant. Selon le texte, la rétention d'une personne expulsable pourra être prolongée jusqu'à 18 mois. Le clandestin risque d'être banni de l'UE pendant 5 ans. C'est excessif et complètement démesuré. En France, 85% des personnes enfermées en vue de leur éloignement sont renvoyées dans leur pays d'origine au bout de 17 jours seulement. Ce délai de 18 mois est beaucoup trop long. De plus, les sans papiers pourront être renvoyés dans des pays de transit dans lesquels ils n'ont aucune attache. Il n'est plus obligatoire de les renvoyer dans leur pays d'origine. Cette disposition nous paraît dangereuse et va contraindre les gens à vivre dans la clandestinité.
Pourquoi avoir qualifié cette nouvelle directive sur l'expulsion des sans papiers de «directive de la honte»?
Parce que ce projet est complètement aberrant. Selon le texte, la rétention d'une personne expulsable pourra être prolongée jusqu'à 18 mois. Le clandestin risque d'être banni de l'UE pendant 5 ans. C'est excessif et complètement démesuré. En France, 85% des personnes enfermées en vue de leur éloignement sont renvoyées dans leur pays d'origine au bout de 17 jours seulement. Ce délai de 18 mois est beaucoup trop long. De plus, les sans papiers pourront être renvoyés dans des pays de transit dans lesquels ils n'ont aucune attache. Il n'est plus obligatoire de les renvoyer dans leur pays d'origine. Cette disposition nous paraît dangereuse et va contraindre les gens à vivre dans la clandestinité.
Le texte est aussi plus restrictif pour les mineurs...
Les enfants sont soumis aux mêmes procédures que les adultes selon ce texte. C'est-à-dire qu'ils pourront être enfermés jusqu'à 18 mois eux aussi, même seuls, et qu'ils pourront être expulsés dans un pays de transit, là où ils n'auront pas forcément de responsable légal. Les étrangers gravement malades n'auront plus droit à un titre de séjour automatique, comme c'était le cas jusqu'à présent. Ce texte durcit très sensiblement la politique d'expulsion des sans papiers. On en arrive à des mesures sans fondements.
Cette directive permet aussi de limiter les abus concernant la rétention des migrants dans certains pays de l'UE. En ce sens c'est plutôt positif...
Effectivement dans certains pays de l'Union, la durée de l'enfermement d'un clandestin est illimitée. cette directive européenne permettra d'interdire ce genre de pratiques. De plus, elle instaure un droit à l'aide judiciaire qui n'existe pas partout. Mais les dispositions du texte sont disproportionnées. 18 mois de rétention, c'est mieux que l'enfermement illimité mais ça reste trop long. Ça ne sert à rien de garder les clandestins si longtemps en prison alors qu'ils ne sont même pas criminels.
Selon vous, pourquoi avoir pris de telles dispositions?
Cette directive doit soi-disant harmoniser les mesures d'éloignement des pays membres. Mais à la lecture du texte, on s'aperçoit que c'est un moyen détourné pour transformer l'Europe en forteresse. Le problème des décideurs politiques, c'est que les clandestins qu'ils expulsent reviennent quasi systématiquement. En les enfermant pendant 18 mois, en les bannissant du territoire européen pendant cinq années, ils sont sûrs que ces sans papiers ne reviendront pas aussi vite. Ça n'est évidemment pas une solution. On est en train de criminaliser des gens qui au fond n'ont rien fait de répréhensible, si ce n'est fuir la misère de leur pays.
Que comptez-vous faire pour vous opposer à l'adoption du texte?
Nous organisons une manifestation à Paris le 14 juin pour protester contre ce projet de directive. Partout en Europe, des mouvements vont se mettre en place. En Espagne, en Italie, des manifestations sont prévues aussi. Nous ne laisserons pas passer un tel texte.
Les enfants sont soumis aux mêmes procédures que les adultes selon ce texte. C'est-à-dire qu'ils pourront être enfermés jusqu'à 18 mois eux aussi, même seuls, et qu'ils pourront être expulsés dans un pays de transit, là où ils n'auront pas forcément de responsable légal. Les étrangers gravement malades n'auront plus droit à un titre de séjour automatique, comme c'était le cas jusqu'à présent. Ce texte durcit très sensiblement la politique d'expulsion des sans papiers. On en arrive à des mesures sans fondements.
Cette directive permet aussi de limiter les abus concernant la rétention des migrants dans certains pays de l'UE. En ce sens c'est plutôt positif...
Effectivement dans certains pays de l'Union, la durée de l'enfermement d'un clandestin est illimitée. cette directive européenne permettra d'interdire ce genre de pratiques. De plus, elle instaure un droit à l'aide judiciaire qui n'existe pas partout. Mais les dispositions du texte sont disproportionnées. 18 mois de rétention, c'est mieux que l'enfermement illimité mais ça reste trop long. Ça ne sert à rien de garder les clandestins si longtemps en prison alors qu'ils ne sont même pas criminels.
Selon vous, pourquoi avoir pris de telles dispositions?
Cette directive doit soi-disant harmoniser les mesures d'éloignement des pays membres. Mais à la lecture du texte, on s'aperçoit que c'est un moyen détourné pour transformer l'Europe en forteresse. Le problème des décideurs politiques, c'est que les clandestins qu'ils expulsent reviennent quasi systématiquement. En les enfermant pendant 18 mois, en les bannissant du territoire européen pendant cinq années, ils sont sûrs que ces sans papiers ne reviendront pas aussi vite. Ça n'est évidemment pas une solution. On est en train de criminaliser des gens qui au fond n'ont rien fait de répréhensible, si ce n'est fuir la misère de leur pays.
Que comptez-vous faire pour vous opposer à l'adoption du texte?
Nous organisons une manifestation à Paris le 14 juin pour protester contre ce projet de directive. Partout en Europe, des mouvements vont se mettre en place. En Espagne, en Italie, des manifestations sont prévues aussi. Nous ne laisserons pas passer un tel texte.
Sans-papiers: pour Hortefeux, la directive de l'UE ne changera pas la politique française
Les eurodéputés votent aujourd'hui la «directive retour», qualifiée de «directive de la honte» par les associations, un projet de loi controversé qui durcit les règles d'expulsion des sans-papiers.
AFP - LIBERATION.FR : mercredi 18 juin 2008
Le projet européen de directive "retour", sur l'expulsion des sans-papiers, a déjà été approuvé par les chefs de gouvernements. Il doit être voté aujourd'hui par le Parlement à Strasbourg. Mais Brice Hortefeux, ministre de l'Immigration l'a promis, quelle que soit l'issue du vote, cette directive "ne changera en rien la politique protectrice, équilibrée, ferme et juste que le gouvernement mène en matière d'immigration".
Concernant l'un des points les plus controversés du projet de la directive "retour" qui vise à fixer à dix-huit mois la durée maximale de la rétention des étrangers, le ministre a déclaré, en réponse à Serge Letchimy (PPM, Martinique): "Pour la France, je vous l'indique très clairement, il n'est pas question de modifier la durée maximum qui est de 32 jours."
Sur le deuxième élément de la directive qui vise à interdire pendant 5 ans le retour dans le pays d'accueil à tout étranger en situation irrégulière qui en a été expulsé, Brice Hortefeux a indiqué "avoir négocié" avec ses collègues Jean-Pierre Jouyet (Affaires européennes) et Bernard Kouchner (Affaires étrangères). "Nous avons obtenu que cette durée puisse être diminuée voire supprimée. La France n'est pas favorable à des politiques de bannissement", a ajouté Brice Hortefeux.
Enfin, à propos d'une troisième disposition relative aux mineurs sans-papiers isolés, le ministre de l'Immigration a rappelé qu'en France "il n'est pas possible, et cela me parait juste, de les renvoyer dans le pays d'origine".
"En revanche, a-t-il aussi expliqué, un certain nombre de pays le pratiquent. Le projet de directive vise à atténuer cette possibilité en demandant des garanties. Mais là aussi, très concrètement, cela ne change rien pour la France."
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