Sur certains dossiers, les Vingt-Sept savent se serrer les coudes. Notamment en matière sécuritaire. Réuni à Strasbourg, le Parlement européen devrait ainsi adopter aujourd'hui un projet de directive concernant la rétention et l'expulsion des étrangers en situation irrégulière. Ce texte, déjà approuvé par les ministres de l'Intérieur de l'Union, vise à harmoniser les législations en vigueur dans les pays membres.
Dans les faits, il concrétise l'enfermement et le bannissement comme mode de gestion des flux migratoires «non choisis» à l'échelle du continent. Mobilisées depuis des mois, la plupart des organisations de défense des étrangers et des droits humains ont lancé un appel aux parlementaires pour qu'ils rejettent cette «directive de la honte».
Sur le plan technique, ce texte fixe la durée maximale de la rétention à dix-huit mois, y compris pour les mineurs. Détail navrant, l'un des motifs pouvant conduire un étranger à passer ce temps derrière les barreaux est le manque de coopération de... son pays d'origine pour accepter le retour. Certes, seuls les pays autorisant une période plus longue de détention devront obligatoirement adapter leur législation. Mais rien n'empêchera les Etats actuellement plus cléments d'en profiter pour durcir leur politique. Au contraire. On peut par exemple penser à la France qui, contrairement à ce qu'on pourrait croire, limite à un peu plus d'un mois (trente-deux jours) ces mesures. Jusqu'à quand?
Si la directive prescrit hypocritement que «l'éloignement» d'un sans-papiers s'effectue sur une base volontaire, elle montre son vrai visage en assortissant tout renvoi forcé d'une interdiction de territoire pour cinq ans. Inutile de préciser que cette véritable double peine s'appliquera elle aussi aux enfants et adolescents accompagnés. Quant aux rares garde-fous contenus dans ce texte, ils ont été obtenus au forceps. Plusieurs Etats, dont l'Allemagne, souhaitaient par exemple rendre facultatif l'octroi d'une assistance juridique aux personnes en voie d'expulsion. Raison invoquée: les coûts trop importants engendrés par cette protection minimale...
La future présidence française de l'Union européenne entend faire de l'unification des politiques d'immigration son thème prioritaire, en proposant l'élaboration d'un «pacte». Le processus butera peut-être sur des broutilles. Mais sur l'essentiel, les Vingt-Sept sont déjà d'accord: l'immigré n'est le bienvenu que si sa présence est utile à la bonne santé économique du continent. Celui qui cherche simplement un moyen de subsistance, une protection contre des persécutions ou qui fuit les guerres n'est qu'un indésirable. Inexorablement, la forteresse Europe se consolide.
Cette vision est d'autant plus inhumaine qu'elle ne dissuadera aucun être humain en détresse de tout tenter pour gagner le continent. En début de semaine encore, 150 Egyptiens en route pour l'Italie sont morts noyés au large de la Libye. En dix ans, quelque 10000 immigrants ont péri dans le seul canal de Sicile. La mort en chemin ou la prison à l'arrivée: telles sont les perspectives d'avenir des «clandestins».
mercredi 18 juin 2008
Immigration européenne: la mort ou la prison
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